STENHAMMAR (W.)
STENHAMMAR WILHELM (1871-1927)
Né et mort à Stockholm, Wilhelm Stenhammar est considéré à juste titre comme l’un des pères de la musique suédoise contemporaine. Disparu trop tôt (il s’éteint à l’âge de 56 ans d’une hémorragie cérébrale), Stenhammar a marqué la vie musicale de son pays tout autant par ses activités d’interprète et de chef d’orchestre que par ses talents de compositeur.
Élevé dans une famille où la musique comptait beaucoup (notamment pour son père, architecte et compositeur, ancien élève de Lindblad et qui a laissé quelques œuvres chorales influencées par le style de Mendelssohn), Stenhammar fait très tôt partie d’un ensemble choral. Son apprentissage sera néanmoins celui d’un autodidacte: il n’est passé par aucun conservatoire même si, pour le piano, il a reçu des leçons de Richard Andersson, disciple de Clara Schumann. C’est avec des œuvres vocales et des compositions pour le piano que Stenhammar fera ses armes. Une première sonate pour piano (1890), un premier concerto pour piano (1893), un opéra (Gildet på Solhaug , 1892) et diverses pièces chorales n’atteindront pas la célébrité que lui conféreront certaines œuvres de sa maturité: en 1895, les trois fantaisies pour piano (écrites la même année qu’une deuxième sonate) annoncent par leurs mélodies caressantes les Sensommarnätter (Nuits de fin d’été) de 1914. Entre ces deux dates vont s’inscrire les productions majeures de Stenhammar. La cantate Ett folk (Un peuple), écrite en 1904-1905, surpasse toutes les autres; l’année 1904 sera aussi celle d’un deuxième concerto pour piano (terminé en 1907) et d’un quatrième quatuor à cordes (achevé en 1909) qui, avec les trois premiers (respectivement 1894, 1896 et 1897-1900) et les deux suivants (le cinquième, de 1910, connu sous le nom de Sérénade , et le sixième, de 1916) constitueront un exemple unique de synthèse nordique post-beethovénienne dans ce domaine particulier de la musique de chambre. Stenhammar sacrifiera encore à des épanchements mélodiques néo-romantiques avec les deux Sentimentala Romanser (Romances sentimentales, pour violon et orchestre, de 1910) et de nombreuses mélodies dont la célèbre Sverige (Suède), perçue comme un second hymne national par ses concitoyens, avant d’atteindre le dépouillement très protestant de sa deuxième symphonie (écrite de 1911 à 1915), qui contraste avec le lyrisme tout aussi intérieur et spirituel des cinq élégants mouvements de la Sérénade pour orchestre (1911-1913). Enfin, l’impressionnante cantate Sången (Le Chant) comporte un interlude marqué par Bruckner et un grandiose final quasi haendélien; cette œuvre fut composée en 1921 pour le cent cinquantième anniversaire de l’Académie de musique royale suédoise.
Les œuvres de Stenhammar jalonnent une existence tout entière dévouée à la musique. Dès 1902, il jouera avec le quatuor de Tor Aulin et donnera ultérieurement plus de mille concerts avec cette formation. Mais c’est surtout en tant que chef d’orchestre que Stenhammar se distingue: après des débuts à Stockholm, il dirigera la toute nouvelle Göteborgs Orkesterförening (Société philharmonique de Göteborg) de 1906 à 1922. Sous son impulsion, de nombreuses œuvres de compositeurs nordiques sont exécutées pour la première fois (entre autres Nielsen, qui a été chef invité, et Sibelius, qui a dédié sa sixième symphonie à Stenhammar), mais aussi des artistes du continent, dont un certain Gustav Mahler, que Stenhammar a su apprécier avant qu’il ne reçoive la reconnaissance tardive que l’on sait. Stenhammar reprendra des tournées de concerts, notamment avec le violoniste Henri Marteau, et apparaîtra quelque temps à l’Opéra de Stockholm avant que la maladie ne l’emporte. Il laisse en Suède l’empreinte durable d’une ouverture vers l’Europe, mais aussi d’une indépendance envers le monde germanique. «Si nous marchons sur les traces de Wagner, nous n’atteindrons que Richard Strauss et ses imitateurs», a-t-il écrit à Carl Nielsen, un compositeur avec lequel il partage, dans l’écriture symphonique, une esthétique nordique détachée du folklore et dont le maître d’œuvre reste Sibelius (un des plus proches amis de Stenhammar), par opposition à Grieg, notamment.
Encyclopédie Universelle. 2012.