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IBO
IBO

Les Ibo habitent la province orientale du Nigeria. Leur nombre (approximatif et difficile à vérifier) est estimé à plus de seize millions en 1992. Le pays ibo est limité, au sud, par l’océan Atlantique, et, à l’ouest, par le delta marécageux du Niger. Le relief s’élève doucement vers le nord. La province d’Owerri, au sud, est couverte de forêt, tandis qu’au nord apparaît la savane. La terre, d’une fertilité modérée, est en certains endroits surpeuplée et surcultivée. Cette étude a pour objet de donner une description purement ethnographique des Ibo traditionnels, l’aspect politique étant envisagé dans l’article NIGERIA.

Avant la période de colonisation, les Ibo n’étaient pas soumis à une autorité centralisée, et étaient divisés en nombreuses communautés qui n’avaient pas d’origine commune. Leurs premiers contacts avec les Européens se firent au port de Bonny, marché d’esclaves où, à la fin du XVIIIe siècle, on vendait annuellement 20 000 esclaves, dont 16 000 Ibo. En 1856, la première mission, envoyée par la Church Missionary Society de Londres, s’établit à Onitsha, ainsi qu’un poste commercial.

L’unité des Ibo se fondait, d’abord sur un langage propre à tous ceux qui se disaient ibo (il appartient au groupe kwa comme le Yoruba et le Bini), ensuite sur de nombreux traits culturels communs. La langue ibo est divisée en quelques dialectes régionaux, qu’on a tenté d’harmoniser en un idiome commun, l’«union ibo».

Économie et société

La subsistance était assurée par la culture, principalement de l’igname et du manioc, et secondairement du maïs et des haricots. L’huile de palme était préparée pour la vente. À cause de la mouche tsé-tsé, il y avait très peu de bétail. La pêche était peu importante et le gibier rare. Le commerce était stimulé par l’existence de monnaies locales: cauris, manilles, barres de laiton, petites pointes de fer. Les forgerons étaient réputés pour leur habileté.

L’unité sociale de base était le patrilignage exogame localisé, groupant des familles étendues. L’aîné détenait un bâton symbolisant l’autorité des ancêtres. Il était l’arbitre des dissensions internes et représentait le lignage dans les relations extérieures. Les épouses lui étaient soumises, mais les chefs des lignages de celles-ci pouvaient intervenir en leur faveur. Le rôle rituel de l’aîné était important: lui seul en effet pouvait officier au sanctuaire du fondateur. Un lignage pouvait se dissocier du village, en rejoindre un autre et se diviser en groupes autorisant les intermariages. Il y avait une tendance à l’exogamie de village.

Les enfants appartenaient au lignage du père si celui-ci avait payé la dot de la mère. Des mariages d’enfants étaient arrangés, la vie commune ne pouvant commencer qu’après la puberté. Entre celle-ci et le mariage, les filles étaient gardées à l’écart et bien nourries. La clitoridectomie comme la circoncision étaient pratiquées quelques jours après la naissance, sans cérémonie spéciale. Le divorce était facile et les relations extraconjugales fréquentes.

Des classes d’âge étaient organisées sur une base villageoise. Aux individus d’un âge déterminé incombaient des devoirs communautaires. Ainsi, le nettoyage des sentiers était le travail des jeunes; la police du marché, l’exécution des ordres des anciens étaient confiées aux hommes d’âge mûr.

La société des personnes titrées, où l’on était admis à deux conditions: naissance libre et capacité de payer, constituait un rouage important de l’organisation ibo. Les associés se partageaient les droits d’entrée du nouveau membre et des fêtes étaient offertes par le néophyte. Le statut social dépendait de l’appartenance à cette confrérie fondée sur la réussite matérielle et ne devait rien à la naissance ou à la faveur des puissants.

Les femmes, dont les activités étaient nettement séparées de celles des hommes, étaient organisées elles aussi et agissaient par l’injure et le ridicule. On se souvient encore d’une révolte de femmes dont les épisodes mouvementés se déroulèrent en 1929.

L’unité politique la plus étendue était le groupe de villages partageant un marché et un sanctuaire et comptant en moyenne 4 500 habitants. Un village pouvait être indépendant; chacun d’eux comportait autant d’enclos que de familles étendues.

L’autorité locale était détenue par le corps des aînés de lignage, conseillé et orienté par les hommes titrés. Elle n’était jamais l’apanage d’un seul.

Les forces naturelles

Les Ibo révéraient les forces naturelles: soleil, eau, ciel et par-dessus tout Ale , la terre, source de fécondité et donc propriétaire de tout ce qui vit et a vécu. Celle-ci inspirait la morale car de nombreuses actions étaient censées l’offenser (telles que homicide, vol de nourriture, adultère). Ale ne tolérait pas la naissance de jumeaux ni d’anormaux, dont les mères étaient bannies. Ses prêtres avaient des fonctions quasi judiciaires. Elle était la force d’intégration la plus puissante de la société ibo.

Les ancêtres étaient considérés comme les agents d’Ale. On croyait à leur réincarnation. L’esprit d’un défunt ne s’apaisait qu’après les secondes funérailles, plusieurs mois ou même plusieurs années après le décès, prétexte à l’étalage du prestige du lignage.

Ale et les autres divinités étaient honorées dans des sanctuaires où souvent un oracle attirait les impétrants. La sorcellerie ne se pratiquait guère. Les guérisseurs se transmettaient de père en fils la connaissance des herbes curatives et des techniques magiques.

Arts

Les sculpteurs taillaient dans le bois des masques, des statuettes, des tabourets, des panneaux. La diversité des styles ibo, qui n’ont pas encore été tous dénombrés et qui vont du naturalisme à l’abstraction, a été expliquée par leur morcellement politique. Un art peu connu, aux produits éphémères, était celui des statuettes en argile crue sur armature de bambou.

Il arrivait à Ale d’exiger par la voix d’un devin la construction d’une maison mbari ; carrée et ouverte sur les quatre côtés, couverte d’un toit de zinc, souvent le seul du village; on pouvait en voir encore une quinzaine au sud de Owerri en 1956. Bien que la maison mbari ne fût pas un sanctuaire, l’image en argile de Ale tenant son enfant trônait au centre; la représentation avait la taille d’une femme. De l’autre côté de la maison se trouvait Amadi-Oha , dieu du tonnerre, adjoint de Ale; parfois il était habillé comme un fonctionnaire anglais, symbole d’autorité. Un troisième personnage important était la déesse de l’eau, aux traits délicats. Un boa constricteur, animal caractéristique de Ale, se trouvait toujours aussi dans la maison. Les artistes avaient toute latitude pour imaginer les autres statuettes qui remplissaient l’édifice. Certaines représentaient des sujets modernes: tailleur avec sa machine à coudre, infirmiers transportant un malade, accoucheuse en tablier blanc, européen en voiture; l’éléphant, connu seulement par ouï-dire, était figuré comme un animal fabuleux, à l’opposé du léopard traité de façon réaliste. Les statues étaient peintes en noir, blanc, rouge, gris et ocre, avec parfois des touches de bleu de lessive. Les murs intérieurs de la maison étaient ornés de motifs géométriques peints qui s’accordaient avec les statues, elles-mêmes couvertes de dessins inspirés des peintures corporelles traditionnelles.

Aucun culte ne se pratiquait dans la maison mbari qui, une fois construite, était laissée à l’abandon. Lorsque après trois ou quatre ans elle était en ruine, une nouvelle était édifiée. C’est pour cette raison sans doute que cet art est resté vivant, et a incorporé les innovations qui plaisaient aux sculpteurs.

ibo, Ibo
adj. inv. et n. m. V. igbo, Igbo.

Encyclopédie Universelle. 2012.