JUGLANDALES
Les Juglandales constituent un ordre de végétaux en majorité arborescents, représentés surtout par la famille des Juglandacées. Ces arbres sont largement répandus et cultivés dans les pays tempérés soit comme plantes alimentaires (les noix des noyers Juglans regia en Europe, Juglans nigra en Amérique et celles de divers Carya , dont le pacanier), soit comme essences de reboisement ou surtout d’ornement (noyers, Pterocarya ), soit aussi comme source de très beaux bois d’ébénisterie (noyer, noyer cendré, noyer blanc ou hickory...). Toutefois cette utilisation trop intense entraîne actuellement leur régression.
Type étudié: le noyer
Le genre Juglans compte dans le monde une quinzaine d’espèces des zones tempérées de l’hémisphère boréal; toutefois quelques représentants existent aux Andes.
Le noyer commun (Juglans regia ), arbre pouvant atteindre trente mètres, est originaire d’Asie occidentale et centrale et des Balkans. Son écorce gris-brun pâle est lisse, un peu fissurée chez les individus âgés; les feuilles sont composées imparipennées (ce qui distingue les Juglandales des Fagales), généralement à sept ou à neuf folioles, dont une terminale.
Caractères botaniques
Du point de vue anatomique, les arbres adultes ont un bois résistant, caractérisé par des formations sclérenchymateuses au niveau du péricycle (fréquente lignification du parenchyme circummédullaire). On note aussi une moelle discontinue, dite «diaphragmée» ou «scalariforme». La ramure largement étalée, très décorative, porte des feuilles, alternes et sans stipules, ayant à leurs aisselles plusieurs bourgeons habituellement protégés par des écailles scarieuses. Le limbe foliaire est bien caractérisé, avec de nombreuses glandes, plus ou moins pédicellées, résinifères, odoriférantes. Les stomates sont de type «renonculacéen».
Le noyer est une espèce monoïque: les fleurs mâles et femelles sont séparées, mais portées par le même individu. Ces fleurs sont incomplètes (leur périanthe se réduit à des écailles vertes ou brunes) et constituent des inflorescences très reconnaissables; les fleurs femelles, petites, dressées, forment des groupes de une à quatre fleurs dans une enveloppe scarieuse caduque; le pistil se compose d’un ovaire infère constitué par deux carpelles uniloculaires et un style court terminé par deux stigmates lobés, très élargis. L’ovaire ne contient qu’un seul ovule dressé. Les fleurs mâles forment de longs chatons pendants, isolés, assez denses; chaque fleur a de dix à quarante étamines à anthères un peu saillantes, à fente de déhiscence externe. La pollinisation est anémogame, l’efficacité du processus étant accentuée par la morphologie des stigmates.
Le fruit est une sorte de drupe, comprenant une partie externe (mésocarpe et épicarpe) charnue, verte et une partie interne fortement lignifiée, très dure (endocarpe), qui constitue la «noix» proprement dite (fig. 1). Celle-ci est une coque bivalve assez ornementée, dont la cavité interne est très incomplètement divisée par des cloisons imparfaites; elle contient l’amande comestible ou graine; cette dernière est recouverte d’un tégument vascularisé et sa partie interne (ou cerneaux) est formée des deux cotylédons bilobés, à structure sinueuse; il n’y a pas d’albumen et la germination est hypogée. Ce fruit est difficile à interpréter. Son étude montre que chaque valve de la coque correspond en réalité à deux demi-carpelles et non à chacun des deux carpelles de l’ovaire; en outre, les diverses parties n’auraient pas une origine organogénique homogène, des prinordiums appendiculaires et axiaux intervenant grâce à des transformations qualitatives concomitantes pour élaborer globalement cette unité qu’est le fruit.
Écologie et biologie
Le noyer commun a été introduit en Europe occidentale probablement au haut Moyen Âge. Les exemplaires que l’on rencontre proviennent de cultures, de plantations ou même de naturalisation (c’est-à-dire d’implantation indépendante de l’homme à partir des pieds en culture). L’arbre peut vivre quatre cents ans; il fructifie au bout d’une quinzaine d’années; ses graines germent facilement, mais l’essence est assez sensible à la gelée.
Bien qu’il préfère les sols riches, le noyer se rencontre aussi sur les remblais et fut utilisé en bord de routes. Il existe rarement en forêt, car il supporte mal le couvert d’un peuplement fermé; cependant, dans sa région de spontanéité, il constitue un élément, avec les chênes et les érables, des forêts caducifoliées, tant dans le nord de la Perse que dans l’Himalaya. Comme le châtaignier et le marronnier d’Inde, il appartient à un groupe de plantes reliques du Tertiaire, dont plusieurs représentants habitent encore l’Elbourz: Zelkowa , Parrotia , Albizzia , Danae ... Les feuilles portent souvent des excroissances minuscules, circulaires, dues à l’attaque de cécidies; les taches brunes que l’on voit y apparaître dès juillet proviennent d’une maladie cryptogamique, l’anthracnose. La sensibilité du noyer royal envers les champignons parasites des racines peut être atténuée en le greffant sur le noyer noir d’Amérique.
En France, Dauphiné et Bas-Limousin sont réputés pour la production des noix de consommation. Bien que la partie comestible du fruit soit la graine qui, pressée, donne l’huile de noix, la partie charnue externe verte ou brune, appelée brou, est également utilisée (vitamines, substances tannantes dont certains extraits donnent des huiles de bronzage, des teintures). Comme les feuilles, il contient un composé naphtoquinonique, le juglone, qui s’oxyde à l’air en brunissant.
Caractères généraux du groupe
Les Juglandales comportent deux familles, les Juglandacées et les Myricacées (parfois élevées au rang d’ordre), auxquelles on rattache plusieurs très petites familles isolées (Julianacées, Rhoiptélacées...).
On reconnaît habituellement huit genres et environ soixante-dix espèces de Juglandacées. Les Juglans habitent l’Europe sud-orientale, l’Asie centrale et l’Amérique du Nord; les Carya , l’Asie orientale et l’Amérique du Nord. Les autres genres sont des genres endémiques régionaux (Asie tropicale orientale, Malaisie, Amérique centrale). Tous sont à feuillage décidu et vivent plutôt à l’état isolé dans les forêts plurispécifiques, où ils sont parfois caractéristiques, ainsi le Juglans nigra des forêts de l’est des États-Unis.
Ce sont les fruits qui servent à la reconnaissance des divers genres (fig. 2). Seuls les Juglans et les Carya ont des fruits nettement drupacés, lisses; ailleurs, ils sont soit «épineux», soit ailés. Par exemple, le Pterocarya fraxinifolia , arbre du Caucase et de l’Elbourz fréquemment planté dans les parcs, a des infrutescences en grappes, longuement pendantes, composées de minuscules noix entourées d’une colerette scarieuse. Cet arbre, à germination épigée, vigoureux et drageonnant, a des feuilles légèrement satinées à huit ou à douze paires de folioles dentées.
Les Myricacées réunissent trois ou quatre genres très curieux de petits arbres et d’arbrisseaux. Le Myrica Gale habite l’ouest de l’Europe («myrte des marais») dans des régions peu éloignées de l’Océan ou de la Baltique. Le système souterrain traçant porte des boursouflures (symbiose mycélienne), les rameaux dressés, à écorce tannante, ont des petites feuilles simples, alternes. Les fleurs, disposées en chatons unisexués ou non, sont nues; le gynécée des fleurs femelles est entrouvert. La plasticité sexuelle de la plante paraît grande, des individus pouvant alternativement porter des fleurs de l’un ou de l’autre sexe, ou des deux. Le genre Myrica groupe une cinquantaine d’espèces, dont certaines sont utiles (baies, poix, fixation des sables). Le genre Comptonia est un petit arbuste nord-américain à feuillage décoratif.
Les Juglandacées (surtout Carya , identifié dès la fin du Secondaire) et les Myricacées sont des familles anciennes, dont certains genres connurent au Tertiaire une plus grande extension. Tous les auteurs n’admettent pas la proximité de ces deux familles: si la plupart les placent au voisinage des Fagales par leurs inflorescences en chaton (A. Engler, J. Hutchinson), certains assimilent les seules Myricacées aux Amentiflores (à feuilles entières) et rapprochent les Juglandacées des Térébinthales à inflorescence réduite, par leurs feuilles composées imparipennées et leur appareil excréteur (L. Emberger). Le genre calédonien Canacomyrica serait la seule Angiosperme vivante dont l’ovaire est muni d’un appendice rappelant la structure des Welwitschia , des Ephedra et des Conifères.
Encyclopédie Universelle. 2012.