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PSILOPHYTES
PSILOPHYTES

De par leur morphologie et leur grande ancienneté géologique, les Psilophytes constituent un embranchement particulièrement archaïque au sein des Ptéridophytes. Les premières Psilophytes connues datent du Dévonien inférieur où elles se sont développées de façon soudaine. Elles disparaissent après le Dévonien et, à la suite d’une longue interruption stratigraphique de près de 400 millions d’années, on en retrouve des représentants dans la flore actuelle avec les genres Psilotum et Tmesipteris .

Généralités et classification

Les Psilophytes se réduisent à des axes plus ou moins dichotomes, dépourvus de racines et de feuilles véritables. Une tige souterraine, ou rhizome, porte des rhizoïdes et des tiges dressées.

Comme toutes les Ptéridophytes, les Psilophytes se présentent au cours de leur cycle de végétation sous forme d’individus haploïdes (gamétophytes) et diploïdes (sporophytes). Le sporophyte est homosporé. Dans les espèces vivantes où on a pu les étudier, les anthérozoïdes sont multiciliés et l’embryon est dépourvu de suspenseur.

Dans les formes primitives, le gamétophyte et le sporophyte ont la même importance dans le cycle de végétation: leur durée de vie est voisine et ils sont pareillement vascularisés. Si, au cours de l’évolution des groupes de plantes vasculaires, l’importance du gamétophyte régresse par rapport à celle du sporophyte, la vascularisation du gamétophyte n’est toutefois constatée que dans cet embranchement primitif.

L’embranchement des Psilophytes (Psilophyta ) comprend l’unique classe des Psilopsida divisée en trois ordres: Rhyniales et Psilophytales du Dévonien et Psilotales de l’époque actuelle (cf. tableau). La division en deux classes parfois retenue (Psilophytopsides du Dévonien et Psilotopsides actuelles) est sans fondement.

Les Rhyniales

À partir de courts fragments plus ou moins dichotomes, quelquefois terminés par des sporanges renflés, trouvés dans les cherts du Dévonien inférieur de Rhynie (Aberdeenshire, Écosse), R. Kidston et W. Lang, en 1917, reconstituèrent le Rhynia major . Cette plante se présente sous la forme d’un rhizome cylindrique lisse, portant çà et là des tiges dressées également lisses, dont les ramifications effilées se terminent par un sporange orthotrope (fig. 1). Le sporange est la terminaison élargie et peu modifiée de la tige dressée, dont le tissu interne, au lieu de rester stérile et diploïde, est devenu fertile et sporogène en donnant après la méiose des isospores haploïdes.

On a longtemps pensé que le genre Rhynia était représenté par deux espèces différentes: l’une de taille relativement grande, appelée Rhynia major , et l’autre plus petite Rhynia gwynne-vaughani , dont les tiges n’étaient jamais en connexion avec un sporange, mais portaient fréquemment des protubérances hémisphériques. La nature gamétophytique de ce Rhynia , supposée depuis longtemps, a été confirmée: en 1957, A. G. Lyon décrit des spores ressemblant à celles du Rhynia major en voie de germination; en 1959, H. Merker remarque que certains axes rhizomateux portent des cellules groupées par quatre qui constituent des cols d’archégones; en 1961, D. D. Pant suggère que le Rhynia gwynne-vaughani est le gamétophyte vascularisé de Rhynia major , invoquant pour cela la présence de protubérances hémisphériques qui peuvent contenir les archégones et l’absence constante de sporanges en connexion; enfin, en 1968, Y. Lemoigne confirme l’existence d’un archégone dans une protubérance hémisphérique placée sur une portion d’axe vascularisé. Le cycle végétatif du genre Rhynia comporte donc un sporophyte diploïde porteur de sporanges où s’effectue la méiose (Rhynia major ) et un gamétophyte haploïde porteur de gamétanges (Rhynia gwynne-vaughani ).

Horneophyton lignieri , espèce datant aussi du Dévonien d’Écosse, est très voisine du Rhynia : elle comporte une tige lisse et dichotome, un rhizome lobé et des sporanges isosporés. Le sporange contient une sorte de columelle qui prolonge directement le faisceau conducteur de xylème et de phloème de l’axe. La transformation du rameau stérile en un sporange orthotrope est moins complète qu’elle ne l’est dans le cas du Rhynia . J. Proskauer a comparé les spores de l’Horneophyton lignieri (50 猪m de diamètre) avec celles des Bryophytes du genre Anthoceros (groupe des Fusiformis ).

La famille des Hedeiaceae comporte deux genres Hedeia et Yarravia provenant probablement du Gédinnien supérieur (Dévonien inférieur d’Australie). Ceux-ci ne représentent que des extrémités de rameaux fertiles; Hedeia est formé de rameaux très dichotomisés, terminés le plus souvent par de grands sporanges orthotropes séparés composant un ensemble corymbiforme; le genre Yarravia est plus spécialisé, car ses fructifications terminales synangiales sont constituées d’un petit nombre de sporanges soudés à la base et disposés autour d’un espace central. De tels synanges ont été rapprochés du genre carbonifère Aulacotheca , organe mâle de Ptéridospermée, où la soudure entre les sporanges est complète. On peut établir la série suivante :

Les Psilophytales

Le Psilophyton princeps signalé en 1844 fut la première Psilophyte décrite (J. W. Dawson, 1856). Le Psilophyton princeps se trouvait en abondance dans le Dévonien inférieur de la baie de Gaspé (Canada) près d’Aiguillon, à l’est du Cap-aux-Os, et dans le Dévonien supérieur de New York.

Les tiges dressées dichotomes ont des extrémités circinées et sont dépourvues de feuilles. Elles portent des poils spiniformes pluricellulaires terminés soit par une pointe aiguë, soit par une sorte de glande, et des sporanges isolés, latéraux et pédonculés disséminés çà et là.

L’Asteroxylon mackiei découvert par Kidston et Lang en 1920, associé au Rhynia major , consiste en un rhizome nu souterrain, porteur de rameaux dressés dichotomes couverts de petits appendices resserrés, émanations ressemblant à des microphylles. Ces tiges dressées se prolongent (mais la connexion est seulement supposée) par des axes lisses, dichotomes, porteurs de sporanges isosporés orthotropes, à déhiscence mécanique. Isolées, ces parties fertiles sont désignées par le genre de forme Nothia .

L’Asteroxylon mackiei est parfois classé parmi les Lycophytes.

Les Psilotales

Le genre Psilotum , de répartition essentiellement pantropicale et subtropicale, se réduit à deux espèces principales très polymorphes et bien définies: Psilotum triquetrum (P. nudum ) et Psilotum flaccidum (P. complanatum ).

P. triquetrum est abondamment représenté dans toutes les régions tropicales, alors que P. flaccidum est une espèce plus rare que l’on rencontre dans les îles des tropiques comme la Jamaïque, les îles de la Société, les îles Sandwich, Java; on le trouve aussi dans la péninsule Malaise et au Mexique. C’est une espèce exceptionnellement terrestre vivant surtout en épiphyte dans les amas d’humus accumulés sur les Fougères arborescentes ou les Palmiers. Le Psilotion triquetrum est, au contraire, principalement terrestre et très rarement épiphyte.

Comme chez toutes les Psilophytes, le sporophyte ne comporte pas de racines. Le rhizome de couleur brune, dichotome, coralloïde est couvert de rhizoïdes; ses tissus renferment des champignons rappelant les mycorhizes. Les axes dressés chlorophylliens, à section triangulaire, portent, lorsqu’ils sont jeunes, de petites écailles foliaires bifides insérées sur trois hélices. À l’aisselle de ces feuilles, on trouve des sporanges homosporés sur de courts pédicelles. Leur diamètre varie de 2 à 3 cm. Les sporanges groupés par trois forment des synanges triloculaires d’où s’échappent les spores (fig. 2). En germant, chaque spore donne naissance à un gamétophyte ayant l’aspect d’un prothalle légèrement bifurqué, couvert de rhizoïdes; il contient des champignons symbiotiques et peut être vascularisé. Le xylème rappelle le cordon centrique du Rhynia ; le phloème, mal défini, est plutôt comparable aux leptoïdes du Polytric [cf. MOUSSES]. Ce gamétophyte est monoïque et porte les gamétanges: anthéridies et archégones.

Le genre Tmesipteris , avec une seule espèce (T. tannensis ), est connu en Australie, Nouvelle-Calédonie, Nouvelle-Zélande, et dans les autres îles de l’océan Pacifique austral. Il s’agit d’une plante épiphyte, dressée sur les branches ou pendante. Elle se distingue des Psilotum par ses sporanges qui sont groupés en synanges biloculaires et par ses organes «foliaires» plus aplatis.

L’évolution vasculaire des Psilophytes

L’évolution des structures des Psilophytes aboutit progressivement à édifier dans le sporophyte une disposition vasculaire exarche, centripète et externe par rapport au liber, caractéristique de la racine des plantes supérieures.

Chez le Rhynia major , le xylème du sporophyte montre une structure rudimentaire centrique faite entièrement de cellules lignifiées annelées; il est entouré par un anneau continu de phloème. Ce caractère annelé des trachées représente un début de lignification dans la formation de la paroi secondaire de la membrane squelettique pecto-cellulosique.

Chez l’Asteroxylon mackiei , la différenciation ligneuse à partir d’un pôle centrique est maintenue dans la partie rhizomateuse alors qu’elle se fait à partir de plusieurs pôles excentriques dans la partie dressée de la plante. En outre, la différenciation de la paroi des trachéides, d’abord annelée, devient spiralée dans la partie centrale de l’axe de la plante. Le phloème entoure le massif lobé du xylème excentrique. Chez le Psilophyton princeps , l’excentricité est accentuée à tel point que, dans les parties dressées, le xylème a une différenciation exarche, centripète, alternant avec un phloème réparti en faisceaux disjoints qui a disparu devant les pôles de la différenciation. Les trachéides, annelées au pôle, sont ensuite spiralées, puis couvertes d’une ornementation intermédiaire entre les spirales et les réseaux. Cette évolution du xylème, observée dans cette plante du Dévonien, se retrouve dans le Psilotum triquetrum actuel où elle est encore plus achevée. Dans cette dernière espèce, en effet, l’évolution se termine par une ornementation ponctuée simple, nettement scalariforme (fig. 3).

La disposition exarche caractéristique de la tige dressée du Psilotum se retrouve tout le long de l’axe (aussi bien dans la racine que dans la tige) du Lycopodium (Lycophytes), puis elle se cantonne chez les plantes plus évoluées au niveau de la racine (cf. organisation des PLANTES, évolution du règne VÉGÉTAL).

L’essentiel de l’évolution des Psilophytes a eu lieu pendant le Dévonien. C’est du Dévonien inférieur que date l’explosion de phylums produisant toutes les formes, de la plus primitive (Rhynia ) à la plus évoluée (Psilophyton ) en passant par un état intermédiaire (Asteroxylon ). Les sporanges, orthotropes et terminaux dans les types primitifs, deviennent rapidement latéraux et les dichotomies nettement marquées dans le Rhynia deviennent pseudomonopodiales dans le Psilophyton . Après le Dévonien, ces structures et ces formes se sont maintenues presque intégralement jusqu’à l’époque actuelle (Psilotum ).

En ce qui concerne les Psilophytes, un des problèmes les plus discutés est celui de savoir si les espèces dévoniennes de cet embranchement représentent le creuset dans lequel se sont développées toutes les plantes vasculaires ou s’il s’agit de formes secondairement régressées, par le milieu aquatique par exemple. (Certains auteurs pensent en effet que les Bryophytes, en particulier les Mousses, sont issues de plantes vasculaires encore plus dégradées par le milieu aquatique.) Pour justifier ce caractère régressé, on invoquait notamment le fait que le genre Rhynia était postérieur à des formes beaucoup plus complexes comme Baragwanathia [cf. LYCOPHYTES] datant du Silurien.

En fait, toutes ces formes sont contemporaines et il semble que l’on puisse affirmer que toutes les plantes vasculaires sont issues des Psilophytes et que l’apparition de la lignine dans le monde des végétaux coïncide avec leur arrivée.

Encyclopédie Universelle. 2012.