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TORAH
TORAH

Le judaïsme se distingue des autres religions révélées par le fait qu’il place au centre de la révélation la T 拏rah , la « Loi ». Non qu’il faille confondre Loi et légalisme: à côté des prescriptions religieuses, éthiques et sociales, la T 拏rah ne cesse de parler, à travers les récits qui la composent, du «Dieu unique», maître de l’histoire et créateur des cieux et de la terre, et cependant proche de toutes créatures qui l’invoquent en vérité. Mais il est vrai que la T 拏rah (et déjà, en son noyau originel, le Décalogue) se présente comme un code, un impératif; elle est un ensemble de commandements (mi ルw 拏t ) qui culminent dans l’appel à la sainteté, règle de l’éthique personnelle, dans l’obligation de la justice, qui s’impose à l’ensemble de la société, dans la requête de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain, qui englobent toutes les autres exigences. Son message ne répond point d’abord à la préoccupation du salut personnel, mais à la conscience d’une élection collective au service du reste des humains, à l’intérieur d’une histoire où l’homme se fait le partenaire de Dieu dans le cadre de l’Alliance (B face="EU Caron" ガrith ): «Et maintenant si vous écoutez ma voix et si vous préservez mon Alliance, vous serez pour moi un peuple élu parmi tous les peuples, car toute la terre m’appartient. Vous serez pour moi un royaume de prêtres et une nation sainte» (Ex., XIX, 5-6).

Durant toute son histoire, le peuple juif n’a cessé, au long de l’élaboration et de l’étude de la T 拏rah et par sa mise en œuvre dans le réel, de rester obstinément fidèle, jusque dans ses infidélités, aux implications de la voix qui a retenti au Sinaï et dont Moïse fut le premier interprète.

La T size=5拏rah à l’époque rabbinique

Le terme «T 拏rah» dérive du verbe yar 拏h qui, à la forme du hiphil , signifie «enseigner», «instruire»: c’est en ce sens qu’il est utilisé dans le Lévitique (X, 11 et XI, 46). Il concerne d’abord l’enseignement de lois particulières (cf. Lév., VI, 7: «Voici la T 拏rah de l’holocauste»).

C’est pourquoi on trouve aussi le terme au pluriel: T 拏r 拏th (Ex., XVIII, 20; Prov., I, 8). Puis le terme prend un sens global et désigne l’ensemble du contenu de la révélation mosaïque (cf. Deut., I, 5 et XXIII, 4; Jos., I, 8; Mal., III, 22). Lorsque l’on distinguera, vers 130 avant l’ère vulgaire, entre les trois parties de la Bible: Loi (T 拏rah ), prophètes (n face="EU Caron" ガvi‘im ), écrits (k face="EU Caron" ガt bim ), le Pentateuque sera désigné par l’appellation: Hamiša ネ mšey T 拏rah («les cinq livres de la T 拏rah»). À partir du Ier siècle, le terme «T 拏rah» finira par désigner l’ensemble des doctrines et des prescriptions enseignées par le judaïsme.

On admet communément que, dès les origines, la tradition orale n’a cessé d’interpréter, d’amplifier et de compléter ce que fournissaient les documents écrits. Les scribes, puis les rabbins prirent en charge cette réinterprétation permanente de la T 拏rah, ce qui conduisit le judaïsme rabbinique à formuler le concept de T 拏rah še‘ba ‘al pe (Loi orale), distinguée de la T 拏rah še bi-k face="EU Caron" ガtab (Loi écrite). Le contenu de l’idée de Loi orale s’est élargi progressivement avec la consolidation du judaïsme rabbinique. Au point de départ, la Loi ne désigne que des énoncés et des précisions transmis par la tradition, en particulier des énoncés présentés comme « Halakha » («règle d’action») par Moïse, à partir du Sinaï. C’est à propos de pareilles traditions que devait se déclencher le conflit entre pharisiens et sadducéens, les seconds mettant en doute le caractère normatif de la T 拏rah orale. Mais le concept de T 拏rah orale s’élargit par la suite jusqu’à englober tout ce qui avait fait l’objet des discussions des maîtres de la Loi dans les maisons d’étude et les synagogues. La T 拏rah orale n’est pas simplement vue comme une chaîne d’enseignements parallèles à ceux de la Loi écrite, elle en vient à s’identifier avec cette grande œuvre d’explicitation et de reprise des textes sacrés que désigne le terme de Midraš et qui se trouvera mise par écrit dans les deux Talmuds et dans les nombreuses collections de corpus midrašiques. Cet effort fécond du judaïsme rabbinique, qui s’affirme entre le Ier et le IVe siècle, conduira à ériger en dogme le caractère révélé de la Loi orale à côté de la nature révélée de la Loi écrite. On en arrivera à considérer que tous les enseignements des Sages furent déjà explicitement enseignés à Moïse au Sinaï. Paradoxe qui s’exprimera, entre autres, par le Midraš de Moïse venant s’asseoir au dernier rang des élèves de l’école d’Aqiba (Mena ム 拏t , 29 b). L’identification de la T 拏rah avec la Sagesse des textes sapientiaux conduira, d’autre part, les rabbins à affirmer la préexistence de la T 拏rah par rapport à la création (P face="EU Caron" ガssa ムim , 54 a). Et les controverses qu’ils menèrent avec les gnostiques et les premiers chrétiens amèneront les Maîtres d’Israël à affirmer l’éternité et la non-abrogibilité de la T 拏rah.

À côté des interprétations rabbiniques de la T 拏rah, il importe de mentionner l’œuvre élaborée, à la même époque, au sein du judaïsme alexandrin. C’est dans cette communauté que fut produite la première traduction de la Bible en langue grecque: celle des Septante. C’est là aussi que Philon le Juif, contemporain de Caligula, entreprit une exégèse allégorique de la Bible qui se situe au carrefour du judaïsme et de l’hellénisme: son influence fut profonde sur les premiers Pères de l’Église, mais ne laissa que peu de traces dans la littérature juive.

La pensée juive médiévale et la T size=5拏rah

Différents courants parcourent la pensée juive médiévale, qui reste solidement entée sur le tronc du judaïsme rabbinique, mais se trouve aux prises avec des problèmes nouveaux résultant de son insertion dans les milieux culturels chrétien et musulman.

Le rationalisme juif est déjà présent chez Saadia Ben Joseph (882-942), qui développe dans son œuvre une théorie des rapports entre la raison et la révélation et qui, à la suite des Mu‘tazilites musulmans, distingue, parmi les commandements de la T 拏rah, entre les commandements de raison et les commandements d’obéissance. Chez Maimonide (1135-1204), la plus grande figure de l’intellectualisme juif médiéval, on découvre d’abord, dans sa Répétition de la Loi (Mišneh T 拏rah , 1180), une codification de tout le droit talmudique selon un ordre cohérent. Son Guide des égarés (Moré Neb kim , 1190) emprunte la voie d’une exégèse allégorique de la T 拏rah. L’usage de l’allégorie lui permet de retrouver, dans le récit de la Genèse, la science physique et, dans la première vision d’Ézéchiel, la science métaphysique des aristotéliciens médiévaux. La loi révélée lui apparaît, à la suite d’Al-F r b 稜, comme un règlement politique apporté par Moïse, le prophète-législateur, à la communauté d’Israël en vue de l’organiser. L’ensemble de la T 拏rah a pour objet de faire cesser la violence réciproque, d’ennoblir les mœurs et d’inspirer des idées vraies. La pratique cultuelle des sacrifices n’a été, au moment de la sortie d’Égypte, à l’égard d’un peuple plongé dans l’obscurité, qu’un moyen employé par Dieu afin de lui faire atteindre le vrai but, à savoir l’extinction de l’idolâtrie et le triomphe de la conception du «vrai Dieu». Ainsi s’expliquent également tous les autres commandements qui ne ressortissent pas au perfectionnement du corps et de l’esprit.

De pareilles idées seront familières à tout le courant intellectualiste juif, à Lévi Ibn Gerson, par exemple. Elles se heurtent, cependant, à l’opposition du courant fidéiste dont la plus belle figure fut Juda Hallévi (1085-1140). Pour celui-ci, la T 拏rah ne saurait être une sorte de redondance des vérités métaphysiques formulées par les philosophes. La fonction de la T 拏rah dans l’économie de l’univers ne se comprend qu’à partir de l’élection d’Israël, porteur de la «Chose divine» et destiné à vivre en Terre sainte. La T 拏rah est cette charte qui garantit à Israël une existence stable en Palestine sous le signe de la bénédiction et dont l’observance doit permettre au «peuple élu» de conduire l’humanité aux accomplissements messianiques. La soumission aux commandements divins, loin d’être une charge, rend Israël capable d’être le support de la présence divine dans le monde et élève chaque individu à la joie la plus haute.

La lecture de la T 拏rah que pratiquent les kabbalistes procède de trois principes fondamentaux. Le premier touche à la nature de la T 拏rah: celle-ci est reconnue comme étant le «Nom de Dieu». Le texte littéral dévoile aux yeux de l’initié la texture de tous les noms divins, qui procède du tétragramme. La T 拏rah est venue manifester, tout en les dissimulant, le plérome des forces divines concentrées dans son nom. Le deuxième principe est celui qui voit dans la T 拏rah un organisme vivant, conception que les ésotéristes illustrent à l’aide de la métaphore de l’arbre ou de l’homme. C’est à ce principe que se rattache la théorie des quatre niveaux d’interprétation de l’Écriture, qui correspondent à une approche de plus en plus approfondie du texte révélé. Un dernier principe préside à la lecture mystique de la T 拏rah: celui de la signification infinie du texte révélé. Ainsi parlera-t-on des «soixante-dix visages de la T 拏rah» pour signifier la plénitude inépuisable de sens contenue dans le verbe divin qui s’est déposé dans ce texte.

Certains cercles ésotériques, tel que celui qui a produit le livre T face="EU Caron" ガm n (première partie du XIIIe siècle), développent l’idée qu’à partir de la T 拏rah primordiale, identifiée avec la sophia divine, un aspect particulier de la révélation se dévoile à chaque époque du temps cosmique et historique (Šemitt ). Aucune Šemitt n’est capable, à elle seule, de manifester toute la force de Dieu révélée par la T 拏rah primordiale. La période où nous vivons correspond à l’éon de la rigueur, d’où découle l’existence de commandements et d’interdictions, alors que l’éon suivant, qui introduira l’époque messianique, sera marqué par un retour à l’utopie. Il y avait là les germes d’une orientation de la mystique dans le sens d’un antinomisme, qui éclatera au grand jour avec le mouvement «sabbataïste», au XVIIe siècle.

L’exégèse juive médiévale est le reflet des courants que l’on vient d’évoquer. L’exégèse mystique est illustrée en Espagne par Nahmanide et ses élèves, puis par Bahya ben Ašer, ce dernier faisant une place à l’exégèse littérale et allégorique. Dans ce même pays, Ibn Ezra et David Kimhi comptent parmi les tenants d’une exégèse rationaliste et littéraliste. Menahem Reqanati illustre l’exégèse kabbalistique en Italie. Le judaïsme français du XIIe siècle a produit une floraison d’œuvres exégétiques où se marque le souci du sens littéral distingué des exégèses midrašiques. Autour de Salomon Ben Isaac, dit Rashi (1040-1105), dont le commentaire sur la T 拏rah demeure aujourd’hui encore un classique des humanités juives, il faut mentionner Joseph Cara, Samuel Ben Meïr et Joseph Bek 拏r Š 拏r.

La T size=5拏rah et la critique moderne

L’ouverture des juifs à la culture occidentale et leur progressive émancipation provoquèrent chez les penseurs juifs une nouvelle attitude à l’égard de la T 拏rah. Spinoza fut, à travers son Tractatus theologico-politicus (1670), l’un des fondateurs de la critique biblique. Le philosophe d’Amsterdam ne vit plus dans la T 拏rah qu’un pur traité politique destiné à l’État des Hébreux sans qu’il pût encore être question d’une révélation historique. Moïse Mendelssohn (1729-1786), marqué par le rationalisme des Lumières, soutint que la T 拏rah n’est pas une religion révélée – car les vérités rationnelles doivent avoir été mises à la disposition de tout homme –, mais seulement une législation révélée à l’intention du peuple juif promu au rôle de gardien des vérités religieuses fondamentales au milieu d’une humanité où règne toujours la possibilité d’une dénaturation de ces vérités.

La coupure épistémologique avec l’approche traditionnelle des textes bibliques, telle qu’elle se pratiquait comme œuvre pieuse dans les maisons d’étude et les Yešiv 拏t (académies talmudiques), est sciemment effectuée par les tenants de la science du judaïsme groupés autour de L. Zunz (1794-1886); pour ceux-ci, le judaïsme doit faire l’objet d’études objectives et critiques, débarrassées de tout ethnocentrisme, au même titre que n’importe quel objet des sciences de la culture. Dans leur sillage, N. Krochmal et S. D. Luzzatto, avec certaines réserves chez ce dernier, appliquent les méthodes de la critique historique aux textes hébraïques. La nouvelle approche se répercute, bien entendu, au niveau des idéologies de l’époque. Cependant que le mouvement réformateur, avec A. Geiger et S. Holdheim, justifie sa volonté de réformer le judaïsme dans l’esprit du prophétisme éthique, en se fondant sur les résultats de la méthode historique et l’attachement à l’idée de progrès, la néo-orthodoxie de S. R. Hirsch refuse a priori d’admettre que les textes bibliques puissent entrer dans le champ d’investigation des sciences de l’homme et demeure attachée au dogme de l’inspiration littérale.

Le problème se pose différemment aujourd’hui à la fois en raison des progrès de la science historique et d’un approfondissement très sensible de la réflexion théologique. Sur le plan proprement scientifique, la théorie documentaire, malgré les critiques dont elle a fait l’objet, particulièrement de la part de U. Cassuto et de Y. Kaufmann, semble être pour la quasi-unanimité des biblistes le point de départ obligé de toute investigation en ce domaine. Mais le repérage des strates ne préjuge nullement, contrairement à ce que postulait l’hypothèse de Graf et Wellhausen, de l’ancienneté des traditions orales qui s’y trouvent recueillies. Les découvertes des civilisations cunéiformes et égyptiennes, de leurs lois, traités, récits et monuments, ainsi que les recherches archéologiques pratiquées en Palestine même ont permis de placer les récits bibliques sous un nouvel éclairage. La vie, les institutions, la religion d’Israël se sont trouvées solidement insérées dans l’histoire du Proche-Orient ancien. Du même coup est mieux apparue l’originalité de la T 拏rah, témoignage vivant de la fidélité d’Israël au Dieu des Patriarches au cours de toutes les pérégrinations du peuple dans le désert d’abord, puis de son séjour en Terre sainte, et de l’Exil. Comme l’ont fait ressortir M. Weber et A. Neher, les stipulations de la B face="EU Caron" ガrith ont conféré son caractère unique à la société hébraïque, où n’a cessé de faire irruption le charisme prophétique.

Si l’orthodoxie juive institutionnalisée reste attachée au fondamentalisme, beaucoup de théologiens juifs contemporains – et pas seulement parmi les réformés ou les libéraux – se rallient aux positions exprimées dès les années 1930 par F. Rosenzweig. La croyance en la sainteté de la T 拏rah et en son caractère révélé ne préjuge en rien de l’importance qu’on doit accorder au processus de rédaction ou à la valeur philologique des textes bibliques. C’est pourquoi l’attachement et la fidélité à la T 拏rah, qu’elle soit écrite ou orale, pas plus que l’observance de ses prescriptions, n’ont à barrer la voie à l’investigation scientifique. Inversement, la multiplicité des sources et des époques ne contredit pas la convergence et la connexion des textes, rayons réfractés à partir d’une même source lumineuse. Il y a là deux plans de vérité qui, loin de s’exclure, ont à s’articuler l’un avec l’autre.

En un temps où le peuple juif a vécu tour à tour le plus grand génocide de son existence et sa résurrection en Terre sainte, les paroles de la T 拏rah, indivisiblement T 拏rah de Dieu et T 拏rah de Moïse, appel divin et réponse de l’homme, semblent plus que jamais concerner la pensée et le cœur de chaque juif, aussi bien que de tout homme qui se reconnaît dans la révélation biblique.

torah [ tɔra ] n. f. VAR. thora
• 1666 thore mil. XIVe; mot hébr. « doctrine, enseignement, loi »
Relig. Nom que les juifs donnent au Pentateuque. Par ext. Ensemble formé par les livres du canon biblique et le Talmud. Torah écrite et Torah orale. Les Lévites « passionnément attachés [...] au texte de la torah » (Daniel-Rops). Rouleau de parchemin enroulé autour de deux baguettes, portant le texte du Pentateuque copié à la main, selon des rites stricts. Ornements de la Torah. Torah déposée dans l'arche de la synagogue.

Torah ou Thora
n. f. RELIG Nom donné par les Juifs à la loi mosaïque et, par ext., au Pentateuque, qui contient les Dix Commandements (ou Décalogue ou la Loi) dont la tradition attribue la rédaction à Moïse inspiré par Dieu. (Le Talmud l'appellera Torah chébiketav, la "Loi qui est par écrit". Parallèlement, de nombreuses traditions circulaient dans l'ancien Israël; cette Loi orale, la Torah chébealpé, la "Loi qui est dans la bouche", est consignée dans le Talmud. (V. aussi Kabbale.)

⇒THORA, TORA(H), (TORA, TORAH)subst. fém.
RELIG. JUIVE
A. — Thora ou Thora écrite
1. Loi de Moïse, loi juive. Une Loi a été révélée, à Adam, puis à Noé, à Abraham, enfin, à l'époque de Moïse, au Mont Sinaï, au peuple juif tout entier. C'est la Thora, qui n'est pas loi seulement, c'est-à-dire impérative, mais, selon l'étymologie hébraïque du terme: chemin, voie, mise sur la route, enfantement (A. NEHER, Clefs pour le judaïsme, 1977, p. 55). V. judaïsme ex. de A. Harris, A. de Sédouy, juif ex. 5, pharisien ex. 1.
2. P. méton.
a) Pentateuque qui renferme cette loi. En 444 environ, le Jour de l'An hébreu, Esdras lut en présence de Néhémie des extraits du Livre de la loi de Moïse devant une grande assemblée (...). La lecture publique de la Torah n'était pas une innovation en Israël (I. EPSTEIN, Le Judaïsme, trad. L. Jospin, 1959, p. 79). V. sabbatique A 2 ex. de Neher.
b) P. méton. Rouleau de parchemin portant le texte du Pentateuque écrit à la main et lu aux offices religieux, notamment le Sabbat et les jours de fêtes. Le bedeau me remit un des rouleaux sacrés, et je me vois encore, avec ma Thora sur les bras, tournant autour de l'almémor [estrade où se tient l'officiant], tandis que la foule des Juifs, se pressant autour de moi, venait toucher les sonnettes et baiser les franges sacrées (THARAUD, An prochain, 1924, p. 32).
B. — Thora orale. [P. oppos. à Thora écrite] Ensemble de précisions, de commentaires apportés à la Thora écrite, qui furent consignés dans le Talmud. L'étude exclusive de la tora écrite et orale, seule patrie qui subsiste quand tout s'est écroulé, a pris, depuis l'asservissement sous le joug romain, une place prépondérante dans la vie juive (WEILL, Judaïsme, 1931, p. 178).
Prononc. et Orth.:[]. LITTRÉ: thora; Lar. Lang. fr.: tora, thora. Étymol. et Hist. 1240-44 Tore, Thore (Assises de Jérusalem, éd. A. Beugnot, t. 2, p. 172 cité par R. ARVEILLER ds Mél. Horrent (J.), p. 13: le Jude deit jurer sur la Tore de sa lei [ms. M, fin XIVe s.]; la Thore [var. ms. A, mil. XIVe s.]); 1295 thorath (GUIART DESMOULINS, Bible historiale, ms. BN fr. 15392, f° 68 v° ds TRENEL, p. 232, note 2: li Ebrieu apelent ainsi ces V livres thorath); déb. XIVe s. tore (Les Gestes des Chiprois, éd. G. Raynaud, p. 214: la tore des Juis); 1624 Torah (MERSENNE, Impiété des déistes, t. 1, p. 153); 1817 thorâh (L'Israélite fr., I, p. 60 ds QUEM. DDL t. 25); 1840 Thora (P. LEROUX, Humanité, p. 921). Empr. à l'hébr. biblique h « instruction, enseignement, doctrine; loi, la Loi de Moïse (le Pentateuque) », nom verbal de h « montrer, indiquer; diriger, enseigner, instruire », forme hiphil (causative) de h « jeter, lancer ». Fréq. abs. littér.:14. Bbg. QUEM. DDL t. 25, 28.

torah ou thora [tɔʀa] n. f.
ÉTYM. 1846; mot hébreu « doctrine, enseignement, loi ».
Religion.
1 Le Pentateuque; spécialt, la loi de Moïse (→ Ritualiste, cit.).
1 (…) cette Thora ne contient (…) pas de dogmes; pas même d'idées métaphysiques; pas, proprement, d'éthique. Elle pose des affirmations décisives sur la souveraineté et la volonté de Dieu et elle prescrit des pratiques, les unes négatives : des interdictions; les autres positives : des obligations.
Ch. Guignebert, le Monde juif…, p. 86.
2 Rouleau de parchemin enroulé autour de deux baguettes, portant le texte du Pentateuque copié à la main, selon des rites stricts, et qui sert aux offices religieux israélites, notamment à ceux du sabbat. || La sainte Torah. || Armoire aux thoras dans une synagogue.
2 (…) Reb Eljé ne s'était pas contenté de copier le Livre avec amour, il avait encore envoyé une gaine de soie brodée d'un écusson aux deux lions de Juda, et deux riches couronnes garnies de clochettes d'argent. Hertz Wolf glissa le parchemin dans sa gaine, posa sur les bâtons de buis les couronnes tintinnabulantes. Et la Thora ainsi parée, il la plaça debout, sur un rayon de l'armoire grande ouverte.
Jérôme et Jean Tharaud, l'Ombre de la croix, V.

Encyclopédie Universelle. 2012.