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TUBIFLORALES
TUBIFLORALES

Les Tubiflorales, ou Tubiflores, constituent un ordre de plantes dicotylédones, gamopétales, possédant une corolle généralement tubuliforme, d’où elles tirent leur nom. Leurs fleurs isostémones et superovariées les rapprochent de l’ordre des Contortales, mais les feuilles alternes les en distinguent. Cet ordre est si vaste qu’il est très loin d’obtenir une situation univoque du point de vue systématique. Certains le considèrent comme un groupe distinct; d’autres, au contraire, le découpent en un nombre considérable d’ordres; d’autres, enfin, répartissent les vingt-sept familles qu’il comporte en trois ordres seulement: Polémoniales, Personales et Labiales, chacun de ces trois ordres possédant au moins une famille importante par son nombre de genres et d’espèces, son universalité, son intérêt économique, ses qualités ou ses particularités biologiques. Pour simplifier la présentation des Tubiflorales, nous adopterons cette dernière classification. S’il n’existe pas un type, caractéristique pour les trois ordres isolés, à chacun correspond une famille type, et l’évolution de la fleur (avortement ou réduction d’éléments fertiles, zygomorphie) permet, grâce à des genres de transition, de passer de l’un à l’autre. Seules les familles présentant un intérêt systématique, biologique ou économique seront mentionnées.

Caractères généraux

Les Polémoniales

Les Polémoniales groupent cinq grandes familles: les Convolvulacées, les Polémoniacées, les Solanacées [cf. SOLANACÉES], les Boraginacées, les Hydrophyllacées et quelques familles réduites à peu de genres. Ce sont des plantes généralement herbacées ou arbustives, rarement des arbres. Les feuilles sont alternes, simples ou lobées, presque toujours sans stipules. Les fleurs sont pentamères (cf. figure): calice à 5 sépales habituellement libres, souvent inégaux, à préfloraison imbriquée ou quinconciale; corolle à 5 pétales; androcée à 5 étamines alternes, insérées plus ou moins profondément dans la corolle; gynécée supère formé de 2 carpelles (rarement 3-5), soudés en un ovaire à 2 loges (parfois subdivisées par une fausse cloison) biovulées. Les graines sont albuminées.

Les Convolvulacées (plus de 50 genres et 1 200 espèces) représentent une famille très homogène, cosmopolite, plus abondamment groupée toutefois dans les régions chaudes d’Asie et d’Amérique. La corolle à préfloraison tordue et plissée dans le bouton forme un entonnoir. L’embryon recourbé ou même enroulé, à cotylédons larges et plissés, est très caractéristique de la famille. Les Convolvulacées sont aussi caractérisées du point du vue anatomique par des formations de liber interne (faisceaux bicollatéraux) et un appareil sécréteur de latex dans tous les organes.

Les cuscutes, parfois exclues des Convolvulacées, sont des herbes volubiles qui vivent en parasites sur d’autres végétaux [cf. PARASITISME]. Leurs tiges filiformes émettent des racines aériennes qui, grâce à des suçoirs, ou ventouses, viennent adhérer à la surface des végétaux voisins.

Les Polémoniacées , composées d’environ 8 genres et 300 espèces, se rencontrent principalement en Amérique du Nord extra-tropicale. Elles se distinguent généralement des précédentes par leur morphologie florale, des inflorescences cymeuses, la présence d’un disque intrastaminal parfois vascularisé comme le cycle d’étamines, par un gynécée composé normalement de 3 carpelles, par des graines possédant un embryon droit et par l’absence d’appareil sécréteur.

La famille des Boraginacées (quelque 100 genres et 2 000 espèces) est répartie sur toute la surface du globe, exception faite des régions froides; elle possède cependant deux centres où elle est particulièrement bien représentée: le bassin méditerranéen et le sud-ouest des États-Unis. Cette famille est caractérisée par des plantes herbacées, rarement arbustives ou arborescentes, presque toujours entièrement couvertes de poils rudes de nature épidermique. Les Boraginacées diffèrent de la famille des Polémoniacées par un gynécée composé généralement de 2 carpelles uniloculaires qui se sont subdivisés de bonne heure en 4 logettes proéminentes, séparées par des sillons, correspondant aux cloisons séparatrices, et au croisement desquels s’insère le style devenu ainsi gynobasique. Les fleurs de cette famille très homogène ne possèdent pratiquement comme variation que l’absence de la fausse cloison du gynécée. Leur formule florale est donc: 5S + 5P + 5E + 2C.

Les Lennoacées (3 genres et 4 espèces), les Nolanacées (2 genres, 60 espèces) et les Hoplestigmatacées (1 genre et quelques espèces) sont de minuscules familles qui ont une répartition géographique particulièrement limitée, puisque la première est localisée uniquement en Californie méridionale et au Mexique, la deuxième dans l’ouest de l’Amérique du Sud et la troisième en Afrique occidentale.

Les Hydrophyllacées (20 genres et 300 espèces) sont caractérisées par leurs exigences écologiques extrêmement souples, ce qui confère à ces plantes des types biologiques variés et nombreux (plantes xérophiles, sciaphiles, hydrophiles, aquatiques, de plaine, de haute montagne...).

Les Personales

Deuxième ensemble des Tubiflores, les Personales sont représentées par neuf ou dix familles, parmi lesquelles les Scrophulariacées [cf. SCROPHULARIACÉES], les Orobanchacées, les Gesnériacées, les Bignoniacées, les Lentibulariacées, les Acanthacées. Elles sont caractérisées par l’apparition de la zygomorphie et la corolle, l’avortement presque constant de l’étamine postérieure, la fixation à 2 du nombre des carpelles, chacun contenant n ovules.

Les Orobanchacées (12 genres et 200 espèces environ) se rencontrent pratiquement sur tout l’hémisphère Nord. Elles se rapprochent étroitement des Scrophulariacées dont elles diffèrent toutefois par leur ovaire à placentation pariétale et par leur graine à embryon peu différencié. Il s’agit de plantes herbacées sans chlorophylle, dont les feuilles sont parfois réduites à des écailles et qui se développent en parasites sur les racines d’autres plantes, souvent de façon spécifique (cf. ANGIOSPERMES, pl. II). Elles possèdent souvent un appareil de fixation souterrain bulbeux, avec racines et un ou plusieurs axes munis d’écailles (feuilles) et de fleurs. Les orobanches ne sont donc constituées que par un axe fertile, hypocotylé, raciné, ramifié, feuillé et florifère; de plus, la plantule ne comporte en règle générale ni tigelle ni cotylédons.

Les familles des Gesnériacées (100 genres et 1 200 espèces) et des Bignoniacées (100 genres et 750 espèces) ne se trouvent pratiquement que dans les régions chaudes du globe, exception faite, pour les Gesnériacées, de deux petits centres isolés, l’un dans les Pyrénées (Ramondia pyrenaica ), l’autre dans les Balkans (Haberlea ).

Les Pédaliacées très proches des Bignoniacées et des Scrophulariacées, s’en distinguent par la présence de poils sécréteurs d’un mucilage particulier.

La famille des Lentibulariacées (5 genres et 300 espèces) est répandue dans tous les endroits humides du globe, mais surtout dans les régions intertropicales. Elle diffère principalement de celle des Scrophulariacées par un androcée réduit à 2 étamines. L’espèce type de la famille est certainement la grassette (Pinguicula vulgaris ), petite plante herbacée croissant généralement avec les mousses humides dans les marais. Elle possède des feuilles en rosettes, garnies de poils glanduleux permettant la capture de proies animales.

Très curieuses sont les utriculaires aquatiques (Utricularia ), dont les feuilles possèdent des utricules remplis d’un mucus lourd les maintenant au fond de l’eau; à l’époque de la floraison, des gaz remplissent les utricules et les transforment en autant de poches aériennes, ce qui permet à la plante de monter à la surface de l’eau et de flotter; c’est à ce stade que la floraison et la fécondation ont lieu. Plus tard, une sécrétion de mucus remplit les utricules, entraînant la plante sous l’eau. Les utricules contiennent des diastases digestives et peuvent également fonctionner comme pièges à animaux.

Les Acanthacées (250 genres et 2 500 espèces) se répartissent sur presque toutes les zones chaudes. Quelques espèces seulement se rencontrent dans les zones tempérées.

Les Sélaginacées (6 genres et 120 espèces) et les Globulariacées (3 genres et 25 à 30 espèces) sont caractéristiques par leurs glandes ou poils glanduleux sécrétant du carbonate de calcium.

Les Labiales

Proches des Personales par leur corolle zygomorphe et l’avortement constant de l’étamine postérieure (cf. figure), les Labiales en diffèrent par leurs carpelles uniovulés et biovulés. Elles comprennent essentiellement les Labiées [cf. LABIÉES], les Verbénacées, les Plantaginacées.

Les Verbénacées (100 genres et 2 700 espèces) sont si proches des Labiées qu’il est parfois très difficile de les distinguer de cette famille; elles en diffèrent surtout par leur style terminal, leur fruit, qui est un polyachène ou une drupe, et par la graine, qui est exalbuminée.

Le type le plus représentatif de la famille, en Europe tempérée, est la verveine (Verbena officinalis ), petite plante herbacée commune dans les lieux incultes et sur les bords de chemins. Il existe des types tropicaux arborescents: Tectona grandis , extrêmement répandu en Inde, fournit le bois de teck utilisé dans la construction des édifices et surtout des navires et exporté pour la fabrication des meubles; les Avicennia entrent dans la composition floristique des mangroves [cf. MANGROVES].

La petite famille des Plantaginacées ne comporte que 3 genres (Plantago , Littorella et Bouguiera ) et quelque 200 à 300 espèces. L’organisation florale rend incertaine la place de cette famille dans la classification: la fleur, pentamère et zygomorphe, simule une fleur tétramère par suite de l’avortement du sépale postérieur et d’une étamine, et par la soudure des deux pétales postérieurs.

Intérêt économique

Chez les Convolvulacées, la patate douce est une racine tubéreuse riche en amidon de l’espèce Ipomoea batatas ; elle est cultivée dans toute la zone chaude du globe. Le latex des racines de Convolvulacées contient des gluco-résines et des gommes-résines employées en médecine comme purgatifs: la scammonée (Convolvulus scammonia ), le jalap (Exogonium purga ), le turbith (Ipomoea turpethum ). Les «liserons» à grandes fleurs sont des espèces du genre Ipomoea , fort appréciés en horticulture ainsi que les «belles-de-jour», ou lisets (Convolvulus tricolor ).

De nombreuses Polémoniacées (Phlox , Cobaea , Polemonium ), Gesnériacées (Sinningia = Gloxinia , Saintpaulia ), Bignoniacées (Bignonia , Catalpa , Tecoma ), Boraginacées (Heliotropium peruvianum , Echium sp., Myosotis sp., entre autres) et Acanthacées sont ornementales.

La famille des Boraginacées a une valeur économique certaine; les racines de plusieurs genres (Alkanna , Anchusa , Arnebia , Echium , Lithospermum , Onosma ) fournissent une matière colorante rouge anthracénique: l’alkannine. D’autres plantes contenant des alcaloïdes peu actifs sont médicinales, notamment les Heliotropium , Cynoglossum , Borago , Symphytum . Chez la bourrache (Borago officinalis ), fleurs et feuilles contiennent du mucilage et possèdent diverses propriétés: elles sont, par exemple, émollientes, sudorifiques, adoucissantes, dépuratives, et s’emploient en infusion ou en décoction. On peut aussi en faire des cataplasmes calmant les inflammations. La bourrache est encore une plante mellifère réputée, et peut être employée en outre comme herbe de cuisine, cuite ou crue. Parmi les Pédaliacées, il faut citer le sésame (Sesamum indicum ), des graines duquel on extrait une huile fixe comestible, très abondante: l’huile de sésame, connue depuis la plus haute Antiquité. Selon Hérodote, les Babyloniens s’en servaient déjà. Dans tout l’Orient, elle est encore employée pour l’alimentation, la fabrication des savons, en médecine et cosmétologie.

Affinités et relations phylogénétiques

Bien que la position systématique de certaines familles soit encore mal assurée du fait de la placentation, de l’organogénie florale ou des réactions sérologiques, les Tubiflores constituent un groupe très homogène, compte tenu de son ampleur et de la quantité de ses représentants. Les affinités de ses familles sont parfois si intimes que certains genres peuvent être classés dans plusieurs d’entre elles: ainsi, Paulownia peut être classé dans les Bignoniacées ou dans les Scrophulariacées, Brookea dans les Scrophulariacées ou dans les Gesnériacées. De nombreux liens de parenté existent entre les Convolvulacées et les Polémoniacées; les Nolanacées se rapprochent, par certains de leurs caractères, des Convolvulacées, des Boraginacées et des Solanacées. Les Buddléiacées sont souvent unies aux Rubiales ou aux Contortales bien que généralement apparentées aux Scrophulariacées. Les Gesnériacées présentent des analogies indiscutables avec les Scrophulariacées (Veronica ). Les Verbénacées sont en relations très étroites avec les Labiées qui, elles-mêmes, sont liées aux Boraginacées et aux Scrophulariacées. Il est possible de résumer ces relations en disant que les Labiées sont aux Boraginacées ce que les Scrophulariacées sont aux Solanacées, ou encore que les Labiées sont aux Scrophulariacées ce que les Boraginacées sont aux Solanacées.

Les relations phylogénétiques comme les affinités de certaines familles sont complexes et parfois fort discutées; il est, par exemple, possible de rattacher les Lennoacées aux Éricales et les Lentibulariacées aux Primulales aussi bien qu’aux Tubiflorales. Les Columelliacées, enfin, n’ont pas encore une position fixe dans la systématique; elles sont généralement rattachées aux Tubiflorales, mais possèdent des rapports avec les Ébénales, les Éricales, les Oléacées, et même avec les Saxifragacées et les Onagracées.

Encyclopédie Universelle. 2012.