VIGNOBLE
VIGNOBLE
Dans de nombreux pays, la vigne existe en association avec d’autres cultures, fournissant la consommation familiale ou donnant quelques excédents de vins courants (vignes complantées de l’Italie centrale, par exemple). En France, les vignobles en monoculture se caractérisent par leur superficie plus ou moins importante, par leur situation (plantations de coteaux) et par leur orientation (insolation maximale).
On distingue différents types de plantations viticoles. Il y a, en premier lieu, les vignobles de masse, qui visent d’abord de forts rendements: 80 hl/ha en moyenne, exceptionnellement 200 hl/ha dans l’Hérault; la mécanisation, la fumure, les traitements chimiques y imposent des frais annuels élevés. La densité de ceps à l’hectare est assez faible pour permettre une large utilisation des machines. Livrant des vins ordinaires, les vignobles de masse connaissent des phases de surproduction et de mévente dans tous les pays.
On trouve, en deuxième lieu, les vignobles de cru; les rendements y sont comparativement très faibles: de 20 à 25 hl/ha en moyenne, de 13 à 15 hl/ha pour le clos-vougeot. On y évite autant que possible la fumure. Beaucoup de travaux ne peuvent se faire qu’à la main: terrage, égrappage, vendanges selon la maturité. Certaines pratiques, comme la recherche de la «pourriture noble», qui donne des cuvées exceptionnelles, relèvent d’un authentique art viticole. Désormais, les vins de cru bénéficient d’une demande très vive car ils correspondent à un besoin de produits de qualité dans tous les pays évolués. Ils alimentent souvent des courants d’exportation remarquables, par exemple celui du cognac, première activité de la région Poitou-Charentes évaluée en valeur, dont plus de la moitié de la production est exportée.
Existent, en troisième lieu, les vignobles destinés à la récolte et à la commercialisation du raisin frais ou du raisin sec. Ils sont peu étendus en Europe, où 95 p. 100 de la production est vinifiée; par contre, en Amérique du Nord, les deux tiers des raisins sont consommés comme fruits; il en est de même en Afrique du Sud et en Australie. Ce type de vignoble peut correspondre à des réalités économiques très dissemblables. Traditionnellement, la Grèce et les Balkans produisent des raisins secs (raisins de «Corinthe») en petits vignobles familiaux. À l’opposé, la Californie s’est spécialisée dans la culture spéculative du raisin de table et du raisin sec; il s’agit alors de véritables plantations fruitières, traitées scientifiquement et servies par un appareil commercial à l’échelle des États-Unis et du monde.
Avant la crise phylloxérique, les vignobles français étaient mal différenciés, en liaison avec l’étroitesse des échanges locaux. Les nouvelles plantations ont consacré la distinction entre vignobles de cru et vignobles de masse. Tandis que la limite septentrionale des vignobles se fixait sur le cours moyen et inférieur de la Loire, en Champagne, en Lorraine et en Alsace, la recherche de la qualité permettait de sauver la vigne dans ces régions. Dans le Midi, au contraire, la vigne glissait des coteaux vers la grande plaine et s’orientait vers la production de masse. De nos jours, les vignobles français sont les plus typés d’Europe. Une législation complexe, lentement élaborée sous la pression des milieux viticoles, détermine des appellations (o: ordinaire, c: contrôlée, V.D.Q.S.: vin de qualité supérieure, etc.); quant à l’appellation «château», elle s’applique au vin produit sur des parcelles issues du découpage d’anciennes propriétés nobiliaires ou leur appartenant actuellement. Les grands crus français y ont gagné une réputation mondiale (bourgogne, champagne, vins de Loire, côtes du Rhône). Avec ses 135 000 ha, le vignoble de Bordeaux livre à la fois de très grands crus et des vins courants. Quant aux quatre départements du Midi viticole, ils restent voués à la monoculture de masse même s’ils réussissent à individualiser certains centres de production dans le sens qualitatif (vins du Minervois ou des Corbières).
Dans les pays méditerranéens, qui cultivent partout la vigne, les vins courants satisfont d’abord une demande nationale active. La vigne existe dans toutes les régions d’Espagne, au Portugal, en Italie, en Grèce, dans les Balkans: en vignobles de masse (Manche espagnole; Pouilles, Lucanie, îles en Italie) et, plus souvent, en vignobles de cru, accédant inégalement aux marchés étrangers (porto, xérès, malaga dans la péninsule Ibérique; asti, chianti en Italie).
L’Europe moyenne ne possède que des vignobles isolés établis dans des conditons limites quant à leur écologie: en Allemagne, vignobles du pays de Bade, du Palatinat, de la vallée du Rhin et de la Moselle; en Suisse, vins du Valais et du pays de Vaud; vins de Moravie; vignobles de l’Autriche de l’Est; vins hongrois (tokay), roumains (podgoria); vignobles de Crimée et de Géorgie.
En Afrique, la vigne se localise à l’extrême nord et à l’extrême sud; dans chaque cas, elle est liée à la colonisation européenne. Le vignoble maghrébin est le plus étendu, orienté surtout vers la production massive. En Afrique du Sud, le vignoble du Cap a été créé au XVIIe siècle par des huguenots charentais. Il produit du raisin de table et des vins en partie exportés vers les pays anglo-saxons.
L’Amérique, où l’on trouve de la vigne à l’état sauvage, possède deux grands vignobles. Celui de Californie s’étend sur les premiers contreforts des monts Napa et au sud de San Francisco. Capable de rivaliser, dans le domaine du vin, avec les meilleurs crus européens, il utilise largement un cépage local, le zinfandel, et produit du raisin de table. Le vignoble argentin s’abrite au pied des Andes, la première province viticole étant celle de Mendoza. C’est un vignoble de masse. Il convient aussi de signaler les régions de vignobles du Chili, s’étendant au sud jusqu’à Valdivia.
Le vignoble australien, qui était à l’origine étroitement dépendant du marché local, exporte à son tour des vins de qualité.
vignoble [ viɲɔbl ] n. m.
• 1180; a. provenç. vinhobre, avec substit. de suff., lat. région. °vineoporus (de vinum) « qui porte des vignes », transformation du gr. ampelophoros
♦ Plantation de vignes. Pays de vignobles. Désignation de vignobles. ⇒ 2. clos , coteau, 1. cru. Le phylloxéra « détruisit les vignobles charentais » (Chardonne).
♢ Ensemble des vignes d'une région, d'un pays. Le vignoble bordelais; français, italien.
● vignoble nom masculin (ancien provençal vinhobre, du latin populaire vineoporus, du latin classique vinea, vigne, et grec ampelophoros, qui porte des vignes) Territoire planté de vignes. Ces vignes elles-mêmes. Ensemble des vignes d'une région, d'un pays : Le vignoble espagnol.
vignoble
n. m.
d1./d Terre plantée de vignes.
d2./d Ensemble des vignes d'une région, d'un pays. Le vignoble bordelais, du Bordelais.
⇒VIGNOBLE, subst. masc.
A. — Au sing. ou au plur. Terrain planté de vignes. Beau, petit, riche vignoble; vignoble atteint par le mildiou; productivité, protection, reconstitution d'un vignoble; pays de vignobles; planter un vignoble. Dans plusieurs endroits, et notamment à Saint-Goarshausen, dans le pays de Nassau, j'ai vu des vignobles abandonnés (HUGO, Rhin, 1842, p. 266). Dans un vignoble bien tenu, il ne sera donc pas utile d'effectuer tous ces traitements simultanément (LEVADOUX, Vigne, 1961, p. 80).
— Empl. adj., vieilli. [En parlant d'un espace géogr.] Où l'on cultive la vigne. Synon. viticole. Rien de plus triste que les pays vignobles avant que la vigne n'ait des feuilles (MICHELET, Journal, 1839, p. 293). Qu'il est intéressant, ce grand paysage vignoble, pour mes compagnons de route, presque tous gens de Châteauneuf, Jarnac, Cognac, Segonzac, les crus à eau-de-vie les plus fameux du monde! (THARAUD, Relève, 1919, p. 15).
B. — Au sing.
1. [Sans déterm.] Plantation de vignes envisagée en général. La lutte contre les ennemis du vignoble s'étend actuellement à un grand nombre de parasites végétaux et animaux (LEVADOUX, Vigne, 1961, p. 71).
2. [Avec déterm.] Ensemble des vignobles présentant une certaine caractéristique.
a) [Localisation géogr.] Vignoble algérien, américain, bourguignon, mondial. Dans le vignoble autour de Gaillac, la grande propriété tend à diminuer (JAURÈS, Ét. soc., 1901, p. 5). Le vignoble français est reconstitué aujourd'hui soit en racinés-greffés, soit en hybrides (PESQUIDOUX, Livre raison, 1925, p. 73).
b) [Destination du raisin produit] Le gros vert (...) occupe la deuxième place après le chasselas dans notre vignoble de table (LEVADOUX, Vigne, 1961, p. 45).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1200 subst. « terrain planté de vigne » (JEAN RENART, L'Escoufle, éd. F. Sweetser, 4375); 1558 le vignoble angevin (DU BELLAY, Divers jeux rustiques, éd. H. Chamard, t. 5, 12, p. 18); 2. 2e moit. XVe s. adj. terre vinoble « où l'on cultive la vigne » (Droit maritime d'Oléron, éd. H. Zeller, 8, p. 12); 1808 adj. vignoble (DE GUIGNES, Voyages à Peking, Manille et l'Île de France, t. 3, p. 348). Empr., après substitution de suff., à l'a. prov. vinhobre (ca 1375, Cout. Rouergue, II, 128, 7 v. u ds LEVY Prov.); l'a. prov. représente un lat. région. vineoporus, transformation du gr. « portant des vignes » par substitution du lat. vinea « vigne » au gr. « plant de vigne ». Fréq. abs. littér.:199. Bbg. AEBISCHER (P.). La etimologia del frances vignoble. In: A. (P.). Estudios de toponomia y lexicografia romanica. Barcelona, 1948, pp. 131-156. — ALESSIO (G.). Sull etimologia del fr. vignoble. St. rom. 1937, t. 27, pp. 121-143. — PASQUALI (P.S.). Il problema di vignoble. Neuphilol. Mitt. 1935, t. 36, pp. 200-206. — REICHENBERGER (K.). Die Etymologie von frz. vignoble im Lichte der frz. Ortsnamen. Rom. Forsch. 1955/56, t. 67, pp. 101-115.
vignoble [viɲɔbl] n. m. et adj.
ÉTYM. V. 1180; de l'anc. provençal vinhobre, avec substitution de suffixe, d'un lat. régional vineoporus, de vinum, transformation du grec ampelophoros.
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1 N. m. a (Rare au sing.). Plantation de vignes. ⇒ 2. Vigne. || Un vignoble réputé. || Pays de vignobles. || Désignation de vignobles. ⇒ Clos, coteau, 1. cru. || Petits (→ Entretien, cit. 2) et grands vignobles. || Vin produit par un vignoble dont il porte le nom. || Le phylloxéra (cit.) détruisit ses vignobles. || Vendanger un vignoble (→ Concevoir, cit. 5).
1 La nuit tombait Les vignobles aux ceps tordus
Devenaient dans l'obscurité des ossuaires (…)
Apollinaire, Alcools, Rhénanes, « Les femmes ».
b Collectivt. Ensemble des vignes d'une région, d'un pays. || Le vignoble bordelais; français, italien.
2 (…) le vignoble métropolitain dans son ensemble a été fortement éprouvé par un hiver rigoureux.
2 Adj. (1835; vinoble, 1386). Vieilli. Où l'on cultive la vigne. || Région vignoble. ⇒ Viticole.
3 (…) des gens aussi liés avec le père de David Séchard que peuvent l'être des voisins dans un petit bourg vignoble.
Balzac, Illusions perdues, Pl., t. IV, p. 884.
Encyclopédie Universelle. 2012.