avorter [ avɔrte ] v. <conjug. : 1>
• XIIe; lat. abortare
I ♦ V. intr.
1 ♦ Accoucher avant terme (naturellement ou par intervention) d'un fœtus ou d'un enfant mort. ⇒ avortement. (REM. Pour l'avortement naturel, on dit plutôt faire une fausse couche.) Un remède qui fait avorter. ⇒ abortif.
2 ♦ Par ext. Ne pas arriver à son plein développement, en parlant des fruits, des fleurs.
3 ♦ Fig. Être arrêté dans son développement, ne pas réussir (projet, entreprise). ⇒ échouer . « Devant la menace d'une invasion étrangère, tout mouvement d'insurrection avorterait » (Martin du Gard).
II ♦ V. tr. Faire subir un avortement (à une femme), et spécialt un avortement volontaire. Le médecin qui l'a avortée. — Plus cour. Elle s'est fait avorter. « Presque toutes les femmes de l'Asie, de l'Afrique et de l'Amérique, se font avorter sans encourir de blâme » (Sade).
⊗ CONTR. Aboutir, développer (se), réussir.
● avorter verbe intransitif (latin abortare) (auxiliaire avoir). Expulser un embryon ou un fœtus non viable. (auxiliaire avoir ou être). Ne pas réussir, ne pas aboutir, en parlant d'une action, d'un projet ; échouer : La révolution a avorté. Une réforme avortée. ● avorter (difficultés) verbe intransitif (latin abortare) Construction Avorter une femme (pour faire avorter). Cette construction transitive, naguère critiquée, est aujourd'hui d'un emploi courant. Recommandation Dans l'expression soignée, préférer des tournures incontestées comme faire avorter ou interrompre la grossesse de. ● avorter (homonymes) verbe intransitif (latin abortare) ● avorter (synonymes) verbe intransitif (latin abortare) Ne pas réussir, ne pas aboutir, en parlant d'une action...
Synonymes :
- échouer
- manquer
- rater (familier)
Contraires :
- aboutir
- réussir
● avorter
verbe transitif
Procéder à l'avortement d'une femme, en parlant d'un médecin.
● avorter (homonymes)
verbe transitif
avorter
v. intr.
d1./d Expulser le produit de la conception avant qu'il soit viable.
d3./d Fig. Ne pas aboutir, ne pas avoir le succès prévu (plans, entreprises). Révolution qui avorte. Syn. échouer.
d4./d (Emploi transitif.) Faire avorter un projet.
|| Pp. adj. Entreprise avortée.
⇒AVORTER, verbe intrans.
A.— [En parlant d'un animé animal ou humain]
1. Emploi intrans.
a) Rural. [En parlant d'un animal] Mettre bas accidentellement un fœtus non viable :
• 1. Le pronostic [de la fièvre aphteuse] demeure toujours grave, non pas tant par la mortalité d'ailleurs très faible, mais en raison surtout des pertes économiques. Les femelles malades avortent, les laitières ne donnent pour ainsi dire plus de lait. Les veaux et les agneaux succombent facilement.
E. GARCIN, Guide vétér., 1944, p. 228.
Rem. Pour une femme enceinte, on dit dans ce cas faire une fausse couche.
b) Usuel. [En parlant d'une femme enceinte] Accoucher volontairement d'un fœtus non viable :
• 2. Mais la grossesse est possible chez les basedowiennes : il en est qui avortent et il en est qui accouchent à terme.
SOUQUES ds (F. Widal, P.-J. Teissier, G.-H. Roger, Nouv. traité de méd., fasc. 8, 1920-24, p. 205).
• 3. Je me souvenais bien de sa fille aussi, à lui, une autre gaillarde, flétrie déjà, mais solide et silencieuse, qui était revenue pour avorter, à plusieurs reprises chez ses parents. On ne lui reprochait rien à celle-là. On aurait seulement voulu qu'elle finisse par se marier en fin de compte, surtout qu'elle avait déjà un petit garçon de deux ans à demeure chez les grands-parents.
CÉLINE, Voyage au bout de la nuit, 1932, p. 336.
Rem. Lar. 19e, Nouv. Lar. ill. enregistrent un emploi pronom. présentant un sens identique, mais vx : ,,Accoucher avant terme : une femme qui s'avorte``.
2. Emploi factitif-trans.
a) Rare, vx. Faire avorter une grossesse. L'interrompre volontairement. Faire avorter un fœtus. Le rejeter par une manœuvre d'avortement :
• 4. — C'est pourtant ce diable qui sonne l'angélus!
— Oh! le sourd! le borgne! le bossu! le monstre!
— Figure à faire avorter une grossesse mieux que toutes médecines et pharmaques!
HUGO, Notre-Dame de Paris, 1832, p. 269.
b) Faire avorter une femme. Faire en sorte que sa grossesse soit interrompue :
• 5. Elle ignorait tout de son malheur que Mérodack portait seul, « Enceinte, » se disait le mage; « lorsqu'elle sentira le crime s'agiter en elle, ce sera sa mort; je ne puis pas cependant la faire avorter pour la sauver. Oh! si je l'aimais de passion folle et non de charité, je pourrais lui sauver l'honneur et la vie sans qu'elle sût jamais qu'ils furent en danger. Mais tuer même l'enfant du mal! un innocent!... Cependant, quand elle saura, elle se tuera certainement, et l'enfant n'étant pas à terme mourra de sa mort ... »
J. PÉLADAN, Le Vice suprême, 1884, p. 291.
Rem. Seul QUILLET 1965 mentionne un emploi trans. : ,,provoquer un accouchement prématuré par des manœuvres abortives. La sage-femme qui l'avait avortée est en prison. On dit mieux : faire avorter``.
— Emploi abs. Un remède qui fait avorter (ROB.).
c) Emploi pronom.-réfl. Se faire avorter
— Interrompre sa grossesse par des manœuvres appropriées. Elle fut soupçonnée d'avoir pris des breuvages pour se faire avorter (Ac. 1835).
— Faire appel à une aide pour interrompre sa grossesse. Elle fut soupçonnée de s'être fait avorter (Ac. 1932).
B.— P. anal. [En parlant d'un organe, d'une plante, d'un fruit, etc.] Ne pas arriver à son plein développement. Les fruits du verger avortent :
• 6. Mais le seul lieu où il me soit permis de me fixer, c'est Cuverville, où j'ai contre moi le ciel et la terre et les hommes; où ma pensée bientôt s'engourdit; où tous les fruits de mon verger avortent, etc.
GIDE, Journal, 1933, p. 1177.
♦ Faire avorter. Il y a des vents qui font avorter les fruits (Ac. 1798-1932) :
• 7. ... des accidents de saison, des sécheresses excessives ayant fait avorter les récoltes, le gouvernement n'a fait pour l'impôt ni délai ni grace : ...
VOLNEY, Les Ruines, 1791, p. 94.
C.— P. métaph. et au fig.
1. [En parlant d'une pers. qui entreprend qqc.] S'interrompre prématurément; échouer.
a) Emploi intrans., vieilli :
• 8. Son père avait fini par avoir une maison et un champ; mais lui, le fils, n'avait rien eu de plus pressé que de perdre dans une fausse spéculation ce champ et cette maison. Il ne lui était rien resté. Il avait de la science et de l'esprit, mais il avortait. Tout lui manquait, tout le trompait; ce qu'il échafaudait croulait sur lui. S'il fendait du bois, il se coupait un doigt. S'il avait une maîtresse, il découvrait bientôt qu'il avait aussi un ami. À tout moment quelque misère lui advenait; de là sa jovialité.
HUGO, Les Misérables, t. 1, 1862, p. 781.
b) Emploi pronom. (à sens réfl.) :
• 9. Il est des hommes débiles qui ne peuvent se surmonter. D'un bonheur médiocre, ils font leur bonheur après avoir suicidé leur grande part. Ils s'arrêtent dans une auberge pour la vie. Ils se sont avortés eux-mêmes. Et peu m'importe de ceux-là ce qu'ils deviennent ni s'ils vivent. Ils nomment bonheur de croupir sur la pauvreté de leurs provisions.
SAINT-EXUPÉRY, Citadelle, 1944, p. 637.
2. [En parlant de tout ce qui est susceptible de connaître une évolution, un développement, un résultat (action, maladie, sentiment, etc.)] Ne pas atteindre le terme attendu de son évolution. Une entreprise qui avorte :
• 10. Si un projet de débarquement en Angleterre avorta, comme avortera celui de Napoléon, partout, de l'océan Atlantique à l'océan Indien, nos escadres avaient tenu les Anglais en échec et le bailli de Suffren s'illustra comme un de nos plus grands marins.
BAINVILLE, Histoire de France, t. 2, 1924, p. 14.
♦ Faire avorter :
• 11. D'où vient ce mal secret qui atteint, fait avorter, les œuvres et les hommes en qui la force originale, le dynamisme, était le plus vivant?
MASSIS, Jugements, t. 2, 1924, p. 260.
• 12. Ces foules déchaînées et illuminées allaient, au crépuscule des croisades, amener les mêmes malheurs qu'au début. En 1096 elles avaient failli faire avorter la guerre sainte en un ignoble massacre de Juifs et de paysans hongrois ou grecs. Ce fut par un massacre du même ordre qu'en 1291 elles provoquèrent la catastrophe finale.
GROUSSET, L'Épopée des croisades, 1939, p. 378.
Rem. 1. On rencontre dans la docum. le néol. avortoir, subst. masc. (SARTRE, La Nausée, 1938, p. 51; suff. -oir). Lieu où l'on pratique l'avortement. 2. L'emploi adj. de la forme en -ant est attesté ds l'emploi fig. une indemnité avortante (CHATEAUBRIAND, Polémique, 1818-27, p. 466).
PRONONC. :[].
ÉTYMOL. ET HIST. — Début XIIe s. part. passé subst. avorted « enfant mort-né » (Psautier Cambridge, éd. Fr. Michel, 57, 8 ds T.-L. : sicume l'avortad [var. : avorted] de la femme, ki ne vit unches soleil [quasi abortivum mulieris quod non vidit solem]); 1174-78 avorter « accoucher avant terme » (E. DE FOUGÈRES, Manières, éd. F. Talbert, 1182, ibid. : conceit e porte Et a effant s'ele n'avorte); fin XIIe s. fig. « ne pas réussir, échouer » (BÉROUL, Tristan, éd. Fr. Michel, I, 102, ibid).
Du lat. abortare « id. » (VARRON, Rust., 2, 4, 14 ds TLL s.v., 126, 77).
STAT. — Fréq. abs. littér. : Avorter. 187. Avortant. 6.
BBG. — BRUANT 1901. — LITTRÉ-ROBIN 1865. — NYSTEN 1814. — ROG. 1965, p. 109.
avorter [avɔʀte] v.
ÉTYM. V. 1174; déb. XIIe, p. p. subst., « enfant mort-né »; lat. abortare.
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I V. intr.
1 (Le sujet désigne une femme). Accoucher avant terme d'un embryon ou d'un fœtus non viable, naturellement ou par intervention. ⇒ Avortement. — REM. Pour l'avortement naturel, on dit faire une fausse couche.
♦ Spécialt, cour. Supprimer le fœtus avant terme (→ 2. Enceinte, cit. 4). || Un remède qui fait avorter. ⇒ Abortif. || Avorter dans une clinique, dans un local de fortune.
1 L'état de grossesse révéré dans le monde est une certitude de réprobation parmi ces infâmes (…) combien de fois est-ce à force de coups qu'ils font avorter celle dont ils se décident à ne pas recueillir le fruit (…)
Sade, Justine…, t. I, p. 170.
2 Par ext. (fruit, fleurs). Ne pas arriver à son plein développement (opposé à mûrir). || La gelée a fait avorter les fruits. || Les fruits ont avorté, n'ont pas noué. ⇒ Couler.
3 Fig. Être arrêté dans son développement. || « Ces projets ont avorté par sa faute » (Littré). || L'affaire avorta. ⇒ Échouer. || Faire avorter une affaire. — REM. L'emploi métaphorique (→ cit. 3) est archaïque.
2 La conjuration s'en allait dissipée,
Vos desseins avortés, votre haine trompée (…)
Corneille, Cinna, III, 4.
3 Ces petits souverains qu'il (le peuple) fait pour une année,
Voyant d'un temps si court leur puissance bornée,
Des plus heureux desseins font avorter le fruit,
De peur de le laisser à celui qui les suit.
Corneille, Cinna, II, 1.
4 Pour le discréditer, et faire avorter toutes ses entreprises (…)
Saint-Simon, III, 62.
5 Combien de génies qu'une méthode contraire a fait avorter ! combien de talents étouffés ou dégénérés dès leur naissance, par une culture mal entendue !
6 Le meilleur moyen de faire avorter la Révolution, c'est de trop demander.
Mirabeau, cité par Louis Barthou, Mirabeau, p. 168.
7 Une certaine tempérance morale est nécessaire pour que certains talents se développent; si elle manque, ils avortent.
Taine, Philosophie de l'art, I, II, 2.
8 (…) mais l'univers ne connaît pas le découragement; il recommencera sans fin l'œuvre avortée (…)
Renan, Souvenirs d'enfance…, Préface.
9 (…) le complot, enfin découvert, allait brusquement avorter.
Louis Madelin, Hist. du Consulat et de l'Empire, t. V, IV.
10 Devant la menace d'une invasion étrangère, tout mouvement d'insurrection avorterait.
Martin du Gard, les Thibault, VII, 55.
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II V. tr.
1 Faire subir un avortement à (une femme), et, spécialt, un avortement volontaire. || Le médecin qui l'a avortée. — Passif et factitif (plus cour.). || Être avortée. || Se faire avorter.
11 (…) la cruelle habitude (chez les sauvages) où sont les femmes de se faire avorter, afin que leur grossesse ne les rende pas désagréables à leurs maris (…)
Montesquieu, Lettres persanes, 121.
12 Presque toutes les femmes de l'Asie, de l'Afrique et de l'Amérique, se font avorter sans encourir de blâme; Cook retrouva cet usage dans toutes les îles de la mer du Sud.
Sade, Justine…, t. I, p. 126.
13 Des centaines de femmes continueront d'être avortées dans les centres de Paris ou de province et d'autres plus nombreuses encore, d'être dirigées vers les Pays-Bas ou l'Angleterre.
le Monde, 14 nov. 1973, p. 22.
2 Par métaphore (avec la même valeur que I., 3.). Littér. et rare :
14 Lui, ne voit qu'écorces, épluchures,
fragments honteux de masques qui s'incurvent,
et décide d'avorter la Mémoire
mère des Muses.
Francis Ponge, le Parti pris des choses, p. 140.
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avorté, ée p. p. adj.
1 Femme avortée.
2 Dont le développement a été interrompu. || Fruits avortés. — Abstrait. → ci-dessus, cit. 2 et 8.
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CONTR. Aboutir, développer (se), mûrir, réussir.
DÉR. Avortement, avorteur, avortoir, avorton.
Encyclopédie Universelle. 2012.