Akademik

humiliation

humiliation [ ymiljasjɔ̃ ] n. f.
XIVe; lat. ecclés. humiliatio
1Action d'humilier ou de s'humilier. abaissement, honte. « la joie de l'humiliation d'autrui » (Voltaire). Les humiliations de la vie religieuse. mortification.
2État, sentiment d'une personne qui est humiliée. confusion, honte. Rougir d'humiliation. « si l'humilité est un renoncement à l'orgueil, l'humiliation au contraire amène un renforcement de l'orgueil » (A. Gide).
3Ce qui humilie, blesse l'amour-propre. affront, avanie, camouflet, fam. 1. claque, gifle, vexation. Infliger, endurer, essuyer une cruelle humiliation, des humiliations (cf. fam. En prendre plein la gueule). « la vie de Voltaire est une suite de triomphes et d'humiliations » (Sartre).
⊗ CONTR. Flatterie, glorification.

humiliation nom féminin (latin ecclésiastique humilatio, -onis) Sentiment de quelqu'un qui est humilié, atteint dans sa fierté, sa dignité : Éprouver de l'humiliation à la suite d'un refus. Sentiment de honte qui résulte de telle cause : L'humiliation de la défaite. Acte, situation qui humilie, blesse l'amour-propre : Essuyer une humiliation.humiliation (citations) nom féminin (latin ecclésiastique humilatio, -onis) Julien Green Paris 1900-Paris 1998 Académie française, 1971 Dieu n'ayant pu faire de nous des humbles fait de nous des humiliés ! Journal Plon Robert Mallet 1915 On s'humilie par orgueil. On accepte d'être humilié par humilité. Apostilles Gallimard André Malraux Paris 1901-Créteil 1976 L'érotisme, c'est l'humiliation en soi ou chez l'autre, peut-être chez tous les deux. La Condition humaine Gallimard Neftalí Ricardo Reyes, dit Pablo Neruda Parral 1904-Santiago 1973 Nous demandons une patrie pour celui qui a été humilié. Pedimos patria para el humillado. Chant généralhumiliation (synonymes) nom féminin (latin ecclésiastique humilatio, -onis) Sentiment de quelqu'un qui est humilié, atteint dans sa fierté...
Synonymes :
- abaissement
- avilissement
- mortification
Contraires :
- élévation
- exaltation
- glorification
- relèvement
Sentiment de honte qui résulte de telle cause
Synonymes :
- confusion
- honte
Contraires :
- fierté
- orgueil
- satisfaction
Acte, situation qui humilie, blesse l'amour-propre
Synonymes :
- affront
- avanie (littéraire)
- camouflet (littéraire)
- vexation

humiliation
n. f.
d1./d Action d'humilier ou de s'humilier; état d'une personne humiliée.
d2./d Ce qui humilie, vexe. Infliger une humiliation à qqn. Syn. affront.

⇒HUMILIATION, subst. fém.
A. — 1. Action d'humilier (quelqu'un, quelque chose). Synon. abaissement; anton. exaltation, glorification. Causer l'humiliation de qqn; humiliation publique. [Raphaël] savoura tous les plaisirs de la vengeance en contemplant l'humiliation profonde de cette sagesse sublime, dont naguère la chute semblait impossible (BALZAC, Peau chagr., 1831, p. 211) :
1. Nos philosophes ne sont point cyniques (...). Ils n'étalent pas un désir (...) de voir se maintenir au profit de leur classe l'humiliation et l'écrasement des hommes.
NIZAN, Chiens garde, 1932, p. 92.
2. Fait d'être humilié (par quelque chose). Synon. abaissement; anton. exaltation, glorification. Le souvenir d'une humiliation; avoir son lot d'humiliation. La perte de ce pont-levis fut, je pense, la première humiliation que ce manoir guerrier eut à subir (A. FRANCE, Bonnard, 1881, p. 345). Des semaines, il garda de son humiliation un souvenir cuisant (VAN DER MEERSCH, Empreinte dieu, 1936, p. 102) :
2. L'homme est fait ainsi; comme il a démoli, il va reconstruire; le difficile ne lui fait pas peur. Mais il ne supporte pas l'humiliation.
ALAIN, Propos, 1922, p. 382.
[Avec un compl. introd. par de spécifiant la cause] Et Morrel avait eu raison, car il était revenu brisé sous l'humiliation d'un refus (DUMAS père, Comte Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 363). L'humeur altière de la marquise était bien connue dans le pays; on devinait sans peine tout ce qu'elle avait dû souffrir avant de se résigner à l'humiliation d'une pareille mésalliance (SANDEAU, Sacs, 1851, p. 36).
3. Action de s'humilier soi-même. — On parle aisément de ses fredaines, de ses turpitudes à des amis (...) mais raconter la même chose à genoux (...) cela diffère; ce qui n'était qu'une amusette devient une humiliation vraiment pénible (HUYSMANS, En route, t. 1, 1895, p. 234). Aussi cette semaine de prières est-elle pour nous une époque d'humiliation, d'amère contrition et de fervent repentir (Le Monde, 19 janv. 1952, p. 9, col. 3) :
3. ... Mme Jeannin (...) prit des secondes classes, bien qu'elle se fût promis de prendre des troisièmes; mais elle n'eut pas le courage de cette humiliation, en présence des deux ou trois employés du chemin de fer, qui la connaissaient.
ROLLAND, J.-Chr., Antoinette, 1908, p. 860.
B. — Sentiment d'une personne qu'on a humiliée ou qui s'est humiliée. Grande, petite, légère humiliation; ressentir, éprouver, partager une humiliation, surmonter l'humiliation. Pleurer, rougir d'humiliation. Je n'ai pu le voir dans une si grande humiliation sans lui pardonner. C'est le comble de l'humiliation (Ac.). J'avoue que cet acte si rapidement accompli m'a causé une des plus profondes humiliations de ma vie (DU CAMP, Mém. suic., 1853, p. 77). Il ne laissait à Maigret aucune initiative et celui-ci n'en ressentait ni contrariété, ni humiliation (SIMENON, Vac. Maigret, 1948, p. 53) :
4. Pourtant, il ressentait jusqu'à l'envie de vomir l'humiliation que ressent tout homme devant un homme dont il dépend : impuissant contre cette immonde à fouet, — dépouillé de lui-même.
MALRAUX, Cond. hum., 1933, p. 388.
Adj. + d'humiliation. Dans tel ou tel état à cause du sentiment d'humiliation. Être malade d'humiliation. Mehoul, stupide d'étonnement et d'humiliation, ne bougeait pas (AYMÉ, Rue sans nom, 1930, p. 230). Le spectacle réjouissant (...) des colonnes de prisonniers feldgrau (...) le bleu des yeux pâle d'humiliation et de panique (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 416).
[Dans une constr. comportant un compl. spécifiant la cause de l'humiliation]
Humiliation + de + subst. La coutume exige ici que l'offensé ne survive pas à l'humiliation de l'outrage (GAULTIER, Bovarysme, 1902, p. 75). Jeunes filles, craignez l'humiliation du célibat (ROMAINS, Copains, 1913, p. 242) :
5. ... il faut tout faire, en effet, pour que ces hommes échappent à la double humiliation de la misère et de la laideur.
CAMUS, Env. et endr., 1937, p. 17.
Humiliation + à/de + inf. Rome eut l'humiliation d'avouer aux montagnards que (...) rien n'empêchait ceux-ci de faire la guerre à qui ils voulaient (MICHELET, Hist. romaine, t. 1, 1831, p. 146). L'inspecteur de police éprouvait comme une sorte d'humiliation à profiter ainsi des obligeances du sieur Fogg (VERNE, Tour monde, 1873, p. 112) :
6. Quand les maîtres d'hôtel s'empressèrent, que le wagonnet d'argent où roulait le rosbif, les raviers des hors-d'œuvre avec les mayonnaises, les crevettes, les salades, valsèrent autour d'eux, Edmond éprouva l'humiliation profonde de n'être pas l'homme qui paie.
ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 309.
C. — Fait, acte qui humilie (quelqu'un). Synon. outrage, avanie, affront. Quelle humiliation! Il a essuyé une grande humiliation (Ac. 1835-1935). Outre cela, un avantage incontestable (...) c'est qu'il a le privilège de tenir dans sa main l'humiliation de la France, et de lui rendre le long affront du traité de Westphalie! (QUINET, All. et Ital., 1836, p. 7). Le ridicule de cette poursuite, l'humiliation d'interroger à son tour, (...) étaient amers à sa fierté (BERNANOS, Soleil Satan, 1926, p. 197) :
7. Le Principal descendit ainsi tous les degrés de la table de Pythagore, jusqu'à ce qu'il fût arrivé à cette question dérisoire : « Combien font un et un? » Mais Charles-Marie, ne pouvant plus supporter cette humiliation, fondit en larmes.
CHAMPFL., Souffr. profess. Delteil, 1853, p. 167.
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Av. 1449 « acte destiné à humilier » (J. DE STAVELOT, Chron., p. 466 ds GDF. Compl.); 2. 1495 « fait d'être humble, de s'humilier » (J. DE VIGNAY, Miroir historial, Delb., Rec. ds DG). Empr. au lat. chrét. humiliatio « action d'abaisser; fig. humiliation, abaissement; action de mater, d'humilier (par mortification) ». Fréq. abs. littér. : 1 055. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 1 200, b) 1 151; XXe s. : a) 1 441, b) 1 978.

humiliation [ymiljɑsjɔ̃] n. f.
ÉTYM. Av. 1450, « action d'humilier »; lat. ecclés. humiliatio, du bas lat. humiliare. → Humilier.
1 (1495). Relig. Le fait de s'humilier volontairement, de s'abaisser devant Dieu. || L'humiliation de l'âme.(Une, des humiliations). Attitude, pratique par laquelle qqn s'humilie (→ Austérité, cit. 16).
1 (…) s'offrir par les humiliations aux inspirations, qui seules peuvent faire le vrai et salutaire effet (…)
Pascal, Pensées, IV, 245.
2 (…) qui serait si superbe, qui voyant l'apôtre saint Paul ainsi vivement attaqué, ne confesserait pas devant Dieu dans l'humiliation de son âme que vraiment notre maladie est extrême, et que les plaies de notre nature sont bien profondes ?
Bossuet, 1er sermon pour la Pentecôte, 1er point.
2 Action d'humilier ou de s'humilier; fait de se rabaisser ou d'être abaissé dans l'estime. Abaissement (cit. 6), aplatissement (fam.), avilissement, dégradation, diminution, honte, mortification. || L'humiliation de qqn par qqn, par qqch. || Travailler à l'humiliation d'un rival. || Humiliation volontaire (→ Exorciser, cit. 5).État d'une personne qui est humiliée. || C'est le comble de l'humiliation (Académie). || Les affres et l'amertume de l'humiliation (→ Adoucir, cit. 4). || L'épreuve de l'humiliation (→ Éprouver, cit. 9). || L'humiliation des mauvaises gens (→ Haïssable, cit. 2), des réprouvés. || Vivre dans l'humiliation. || Descendre au dernier degré de l'humiliation.
3 (…) il (ce discours) est imprimé et, à la honte du siècle comme pour l'humiliation des bons auteurs, réimprimé.
La Bruyère, les Caractères, XV, 23.
4 Ô ciel ! un barbare m'a outragé jusque dans la manière de me punir ! il m'a infligé (…) ce châtiment qui met dans l'humiliation extrême (…)
Montesquieu, Lettres persanes, CLVII.
5 (…) j'apprends, pour comble de malheur et d'humiliation, que le procureur du roi, auquel il s'est adressé, est mon ennemi déclaré, et cherche partout de quoi me perdre.
Voltaire, Lettre à d'Argental, 573, 12 févr. 1739.
6 Le ris malin (…) est autre chose; c'est la joie de l'humiliation d'autrui (…)
Voltaire, Dict. philosophique, Rire.
7 Dix-huit ans, il y exécutera son dessein sombre : l'humiliation et l'anéantissement de ceux dont il a été, dans son enfance, la victime.
Émile Henriot, Portraits de femmes, p. 418.
3 (XVIIe). Sentiment d'une personne humiliée. Confusion, honte (2.). || L'humiliation qui suit une faute (→ Atténuer, cit. 8). || Orgueil qui grandit (cit. 7) dans l'humiliation. || Avoir, éprouver l'humiliation de… (→ Embrasement, cit. 6). || Il conçut une vive humiliation de cet échec. || Rougir d'humiliation. || Elle en fut quitte pour l'humiliation. → Pour sa courte honte.
8 (…) elle y eût lu (dans ce regard) comme un espoir vague de la plus atroce vengeance. Ce sont sans doute de tels moments d'humiliation qui ont fait les Robespierre.
Stendhal, le Rouge et le Noir, IX, p. 56.
9 Nos morts du XIIe siècle n'auraient pas vu sans humiliation, que dis-je sans horreur, leurs successeurs du XIVe siècle (…)
Michelet, Extraits historiques, p. 117.
9.1 Fallait-il en arriver à ce degré d'humiliation ? S'appeler Schultze, être le maître absolu de la plus grande usine et de la première fonderie de canons du monde entier, voir à ses pieds les rois et les parlements, et s'entendre dire par un petit dessinateur suisse qu'on manque d'invention, qu'on est au-dessous d'un artilleur français !…
J. Verne, les Cinq Cents Millions de la Bégum, VIII, p. 128.
10 L'homme que l'humilité inclinait, au contraire, l'humiliation le fait se regimber. L'humilité ouvre les portes du paradis; l'humiliation, celles de l'enfer.
Gide, Dostoïevsky, II, p. 106.
11 (…) si l'humilité est un renoncement à l'orgueil, l'humiliation au contraire amène un renforcement de l'orgueil.
Gide, Dostoïevsky, II, p. 108.
12 Plutôt que de survivre à l'humiliation atroce d'un refus, elle se serait tiré un coup de revolver dans la cervelle (…)
J. Green, Léviathan, p. 235.
13 (…) un genre d'humiliation dont il est admis que les hommes ont le privilège : l'humiliation de l'impuissance sexuelle.
Romains, les Hommes de bonne volonté, V, I, p. 8.
14 L'humiliation, sentiment luciférien, naît d'une comparaison avec l'extérieur, c'est l'individu toisant la société et rejetant sur elle sa bassesse (…) les libertins Rousseau, Voltaire, Beaumarchais, en sont obsédés : aveux humiliants, refus humiliants, reproches humiliants, ces mots se retrouvent à chaque instant sous leur plume. Le complexe d'infériorité est l'originalité du XVIIIe siècle et le vice suprême du jacobinisme.
Paul Morand, in Tableau de la littérature franç., Beaumarchais.
4 (Une, des humiliations; l'humiliation). Ce qui humilie, blesse l'amour-propre. Affront, avanie (cit. 5), blessure, camouflet, dégoût, gifle (fig.), honte (par ext.), mortification, vexation. || Essuyer (cit. 13), recevoir, subir une cuisante, cruelle humiliation (→ Exagérer, cit. 3). || Il endura l'humiliation jusqu'au bout (→ Boire un affront, le calice jusqu'à la lie; avoir toute honte bue). || Dévorer son humiliation (→ Fureur, cit. 33). || Infliger une humiliation à qqn. || Accabler qqn d'humiliations. || Être cuirassé (cit. 4) contre les humiliations.
15 (…) après de si étranges humiliations, elle fut encore contrainte de paraître au monde et d'étaler pour ainsi dire à la France même et au Louvre, où elle était née avant tant de gloire, toute l'étendue de sa misère.
Bossuet, Oraison funèbre de Henriette-Marie de France.
16 Apprendre à vivre chez vous en étranger est une humiliation que je n'ai pas méritée.
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, VI, Lettre VII.
17 (…) l'énorme besoin de vengeance qu'existaient chez lui le sentiment de sa supériorité et la vue de ses humiliations.
Renan, Vie de Jésus, IV, in Œ, compl., t. IV, p. 117.
18 Debout, dans sa chaire, pâle de rage, le pauvre On écoutait toutes ces injures, dévorait toutes ces humiliations et se gardait bien de répondre.
Alphonse Daudet, le Petit Chose, I, IX.
19 (…) depuis sa bastonnade, son embastillement, sa fuite à Londres, jusqu'aux insolences du roi de Prusse, la vie de Voltaire est une suite de triomphes et d'humiliations.
Sartre, Situations II, p. 147.
CONTR. Exaltation, flatterie, gloire, glorification.

Encyclopédie Universelle. 2012.