ivresse [ ivrɛs ] n. f.
• 1160; de ivre
1 ♦ État d'une personne ivre (intoxication produite par l'alcool et causant des perturbations dans l'adaptation nerveuse et la coordination motrice). ⇒ ébriété, enivrement ; fam. biture, cuite, soûlerie. Fumées, vapeurs de l'ivresse. Mal de tête suivant l'ivresse (cf. Gueule de bois). — Dr. pén. Répression de l'ivresse publique. Conduite en état d'ivresse.
♢ Par anal. L'ivresse provoquée par la prise de cocaïne, d'opium.
♢ Par ext. L'ivresse du combat, de l'action. ⇒ enthousiasme, exaltation, excitation, griserie, transport.
♢ Méd. Ivresse des profondeurs : accident de plongée causant une sensation d'ébriété.
2 ♦ État d'une personne transportée, vivement émue. L'ivresse de l'amour, du pouvoir, du succès. Dans l'ivresse de la victoire.
♢ Absolt État d'euphorie, de ravissement, d'exaltation. ⇒ enivrement, extase. « Cette ivresse que donne la campagne à ceux de la ville » (Montherlant). Moments, heures d'ivresse.
⊗ CONTR. Froideur, lucidité, sobriété.
● ivresse nom féminin État d'excitation euphorique, avec troubles perceptifs, incoordination des mouvements, troubles de l'élocution et parfois libération de l'agressivité, dû à une ingestion massive de boissons alcoolisées ou de psychotropes sédatifs (barbituriques et éther en particulier). Excitation euphorique provoquée par un sentiment, une émotion, une passion violents : L'ivresse de la danse. ● ivresse (citations) nom féminin Émile Augier Valence, Drôme, 1820-Paris 1889 Académie française, 1857 Tout tourne autour de lui ! C'est le centre du monde ! L'Aventurière, II, 5, Annibal Hetzel l'ivrogne Honoré de Balzac Tours 1799-Paris 1850 La prospérité porte avec elle une ivresse à laquelle les hommes inférieurs ne résistent jamais. César Birotteau François, duc de La Rochefoucauld Paris 1613-Paris 1680 La jeunesse est une ivresse continuelle : c'est la fièvre de la santé ; c'est la folie de la raison. Maximes Alfred de Musset Paris 1810-Paris 1857 Aimer est le grand point, qu'importe la maîtresse ? Qu'importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse ? Premières Poésies, la Coupe et les lèvres Marc Antoine Girard, sieur de Saint-Amant Quevilly, près de Rouen, 1594-Paris 1661 Académie française, 1634 Je tiens pour Hippocrate, Qui dit qu'il faut à chaque mois S'enivrer du moins une fois. Débauche hippocratique ● ivresse (expressions) nom féminin Ivresse des mots, prolixité de quelqu'un qui se laisse emporter par la griserie verbale. Ivresse des profondeurs, accident de la plongée autonome, se traduisant par un sentiment d'euphorie accompagné d'ébriété, se produisant généralement au-delà de 30 m de profondeur. ● ivresse (synonymes) nom féminin État d'excitation euphorique, avec troubles perceptifs, incoordination des mouvements, troubles...
Synonymes :
- bitture (populaire)
- cuite (populaire)
- culotte (populaire)
- ébriété
- ribote (populaire)
- soûlerie (populaire)
- soûlographie (populaire)
Contraires :
- sobriété
- tempérance
Excitation euphorique provoquée par un sentiment, une émotion, une passion...
Synonymes :
- étourdissement
- extase
- griserie
- volupté
ivresse
n. f.
d1./d état d'une personne ivre; intoxication alcoolique.
— Par anal. Ivresse morphinique, due à l'action de la morphine.
d2./d Par ext. Exaltation causée par une émotion violente, une passion. L'ivresse de l'amour.
⇒IVRESSE, subst. fém.
A. — État d'exaltation des facultés mentales résultant de l'absorption en grande quantité de boissons alcoolisées. Synon. ébriété, soûlerie (fam.). Ivresse cérébrale, capiteuse, délirante; ivresse des boissons, de l'alcool; ivresse des sens et de l'esprit; cuver son ivresse; état d'ivresse; débauche, délire, excitation, fumées de l'ivresse; abruti, appesanti, assoupi, engourdi, hébété par l'ivresse; sévir contre l'ivresse; yeux noyés d'ivresse. Cette créature pouvait bien avoir soixante ans, et était d'une taille moyenne et d'un hideux embonpoint; le visage, horrible à voir, avait une singulière expression de méchanceté railleuse; la bouche ricanait un cruel sourire où l'on démêlait les hébétements de l'ivresse que produit l'alcool (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 1, 1859, p. 266). Près d'elle un guéridon avec un verre et une bouteille que Nanie a déjà plusieurs fois renouvelée. Elle boit lentement, silencieusement, posément. Elle regarde ses invités s'agiter. Elle jouit attentivement de l'ivresse du vin blanc qui monte si lentement qu'on n'en prend pas conscience (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 209) :
• 1. Le lendemain, avec son ivresse mal cuvée de la veille, il repartait, tapait aux volets des consolations, se lâchait de nouveau dans une course furieuse, au milieu des petits verres, des canons et des litres, perdant et retrouvant ses amis, poussant des voyages dont il revenait plein de stupeur, voyant danser les rues, tomber la nuit et naître le jour, sans autre idée que de boire et de cuver sur place.
ZOLA, Assommoir, 1877, p. 628.
— MÉD. Coma de l'ivresse. Perte de conscience, de sensibilité et de motilité provoquée par l'absorption de boissons alcooliques :
• 2. Lui-même, jusque-là, s'était méfié, n'avait pu admettre, comme les anciens, qu'un corps, imprégné d'alcool, dégageât un gaz inconnu, capable de s'enflammer spontanément et de dévorer la chair et les os. Mais il ne niait plus, il expliquait tout d'ailleurs, en rétablissant les faits; le coma de l'ivresse, l'insensibilité absolue, la pipe tombée sur les vêtements qui prenaient feu, la chaire saturée de boisson qui brûlait et se crevassait...
ZOLA, Dr Pascal, 1893, p. 206.
— P. anal. Exaltation et déséquilibre mental provoqué par l'absorption de substances toxiques. Ils se figurent l'ivresse du haschisch comme un pays prodigieux, un vaste théâtre de prestidigitation et d'escamotage, où tout est miraculeux et imprévu (BAUDEL., Paradis artif., 1860, p. 354). Sachez, mon cher monsieur, que le sang de la vigne ne suffit plus à troubler la sérénité de mon cerveau. Il faut à mon ivresse l'opium des Chinois, le haschich des Indiens et le raki des Polynésiens (THEURIET, Mar. Gérard, 1875, p. 141).
B. — Au fig.
1. État d'exaltation psychique, provoqué par une passion. Ivresse dionysiaque, insensée, joyeuse, légère, lucide, lyrique, matinale, printanière, sexuelle, vertigineuse. Autrefois, les scènes de la nature me jetaient dans une ivresse amoureuse. J'aimais la nature comme une amante. Cette extase n'est plus aussi vive. Il y a des pages d'Atala et de René qui ont été écrites dans le délire d'une vraie passion pour la nature; elles ont été écrites dans l'ivresse (CHATEAUBRIAND ds CHÊNEDOLLÉ, Journal, 1808, p. 32). L'harmonisation de ces tons, de ces teintes, de ces irisations, ç'a été, une heure ou deux, chez moi une ivresse, une ivresse produite chez un coloriste par une griserie de couleurs... Il est vrai que cette ivresse, je l'ai encouragée par deux ou trois verres de fine champagne (GONCOURT, Journal, 1887, p. 670). Je sais que je lui donnais asile avec ivresse dans mon cœur, qu'elle s'y est blottie pour me mordre avec plus de joyeuse sûreté et s'est glissée rapidement loin de moi en m'abandonnant à la pire souffrance (BARRÈS, Jard. Oronte, 1922, p. 149) :
• 3. Je me suis longtemps demandé, songeant à Léon Schleiter, si l'ivresse de la popularité, la passion de l'influence, ou même le jeu des idées pouvaient vraiment faire hésiter un homme de haute culture entre deux destinées, deux carrières, deux fortunes, celle du savoir et celle du pouvoir, j'entends de ce pouvoir évident, sensible, grossier, qu'est le pouvoir public.
DUHAMEL, Terre promise, 1934, p. 45.
— Au plur. Passions. Si je veux bâtir une cité je prends la pègre et la racaille et je l'ennoblis par le pouvoir. Je lui offre d'autres ivresses que l'ivresse médiocre de la rapine, de l'usure ou du viol (SAINT-EXUP., Citad., 1944, p. 564).
2. Sensation d'euphorie, exaltation.
a) [P. réf. à une activité physique] Ivresse physique. Désabusé, je me truque pour ressentir encore, malgré le vieillissement qui me délabre, la jeune ivresse de l'alpiniste (SARTRE, Mots, 1964, p. 201) :
• 4. La joie que donne le sport est une ivresse qui naît de l'ordre. Celle que vous ressentez à la lecture de ce poème qu'est une belle fiche physiologique. On rêve, pour dire cette joie, d'un style dont le pouvoir d'ivresse sortirait de sa précision...
MONTHERL., Olymp., 1924, p. 260.
— Ravissement de l'âme. Ivresse de l'extase. Je résolus de vivre comme Jean-Jacques Rousseau, de rien ou de peu, de retrancher à ma vanité, à mes vêtements, à ma nourriture tout ce que je voulais donner à la sainte ivresse de mon âme (LAMART., Raphaël, 1849, p. 246) :
• 5. Des personnes plus agréables causèrent un moment avec moi. Mais qu'étaient leurs paroles, qui, comme toute parole humaine extérieure, me laissaient si indifférent, à côté de la céleste phrase musicale avec laquelle je venais de m'entretenir? J'étais vraiment comme un ange qui, déchu des ivresses du paradis, tombe dans la plus insignifiante réalité.
PROUST, Prisonn., 1922, p. 258.
b) [P. réf. à une activité intellectuelle] Ivresse pensive, philosophique. La sublimité d'une large hypothèse ravira le philosophe, la délicatesse d'une théorie l'enchantera. Ses bonnes fortunes seront les découvertes d'ingénieuses formules, et ses débauches les entiers abandons aux ivresses de la fantaisie métaphysique (BOURGET, Essais psychol., 1883, p. 159). De quelle ivresse n'exultait-il pas à l'idée qui naissait en lui d'un Zagreus épouvanté devant l'approche des Titans. Ah! comme il était repris par toute la beauté! comme il s'arrachait à l'amour! comme il « séparait de la chair l'idée suprême de la déesse »! comme il se sentait libre, enfin! (, Aphrodite, 1896, p. 42) :
• 6. L'apparition des plus royales demeures de Notre-Dame, dans cette fétide embuscade d'Atar, peut bien consoler Maxence. Mais non! Il reste au fond de lui un sombre tourment. Que les faibles se nourrissent des plus nobles rêves! Lui, il veut la vérité avec violence. Il est saisi par la noble ivresse de l'intelligence, et cette fièvre d'esprit le travaille, d'aller à la véritable raison, à cette assurance très sereine de la raison bien assise.
PSICHARI, Voy. centur., 1914, p. 104.
3. État second :
• 7. Cette mélopée émouvante, qui ressemble à un chant arabe, mais avec beaucoup plus de variété dans le mouvement et d'étendue dans la tessiture, c'est le chant flamenco, le plus pur moyen d'expression de la poésie andalouse, vers et musique improvisés par le chanteur, le plus souvent sans accompagnement. C'est un véritable état d'ivresse qu'engendre peu à peu un rythme marqué avec le bout des doigts sur les genoux ou sur le bord d'une table.
T'SERSTEVENS, Itinér. esp., 1963, p. 123.
Prononc. et Orth. : []. Ac. 1694, 1718 yvresse, puis i-. Étymol. et Hist. 1. 1121-34 « état d'une personne prise de boisson » (PHILIPPE DE THAON, Bestiaire, 833 ds T.-L.); 2. ca 1160 « trouble de l'âme dû à une passion, à l'amour » (Eneas, 821, ibid.). Dér. de ivre; suff. -esse1. Fréq. abs. littér. : 2 447. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 3 533, b) 3 969; XXe s. : a) 4 014, b) 2 850. Bbg. SCKOMM. 1933, p. 145.
ivresse [ivʀɛs] n. f.
ÉTYM. V. 1160; ivrece, v. 1130; de ivre.
❖
1 État d'une personne ivre; intoxication produite par l'alcool et causant des perturbations dans l'adaptation nerveuse et la coordination motrice. ⇒ Ébriété, enivrement, soûlerie; et, fam. beurrée, biture, cuite, pistache (vx), soûlographie. || Être plongé dans l'ivresse (→ 1. Étonner, cit. 1). || L'ivresse de qqn. || Noyer son chagrin dans l'ivresse. ⇒ Alcool, soûlerie. || Commencement, fin d'ivresse (→ Cohérence, cit. 3; euphorie, cit. 2). || Provoquer l'ivresse de qqn, chez qqn. ⇒ Enivrer, monter (à la tête). || Dissiper l'ivresse de qqn. ⇒ Dégriser, désenivrer, dessoûler. || Effets de l'ivresse : troubles de l'équilibre, migraine, diplopie (→ Abolir, cit. 8; brute, cit. 2; épaule, cit. 19; excitant, cit. 7; humilier, cit. 13; individu, cit. 22). || Brouillard, fumées, vapeurs de l'ivresse. ⇒ Hébétude, trouble; → Bien-aimé, cit. 5. || Mal de tête, malaise d'après l'ivresse. → fam. Gueule de bois. || Légère ivresse. ⇒ Griserie, pointe (de vin). || Scène d'ivresse. ⇒ Bachique. || « Qu'importe le flacon (cit. 6) pourvu qu'on ait l'ivresse » (Musset). — Méd. || Coma de l'ivresse. — Dr. pén. || Ivresse publique et manifeste. || Conduite en état d'ivresse. — Par anal. || Ivresse provoquée par l'absorption d'opium, d'éther, de haschisch (→ Éthérique, cit.; indescriptible, cit. 2; et ci-dessous, cit. 3). || Ivresse cocaïnique, éthérique, morphinique.
1 (…) l'ivresse étant une bonne épreuve et certaine de la nature d'un chacun, et (…) propre à donner aux personnes d'âge le courage de s'ébaudir en danses et en la musique, choses utiles et qu'ils n'osent entreprendre en sens rassis.
Montaigne, Essais, II, II.
2 (…) à la manière des gens qui, sentant venir l'ivresse, veulent savoir dans quelle estime on les tient; car, dans le naufrage de l'ivresse, on peut observer que l'amour-propre est le seul sentiment qui surnage.
Balzac, Modeste Mignon, Pl., t. I, p. 555.
3 Avant tout, je dois vous dire que ce maudit hachisch est une substance bien perfide; on se croit quelquefois débarrassé de l'ivresse, mais ce n'est qu'un calme menteur.
Baudelaire, les Paradis artificiels, Poème du hachisch, III.
4 L'ivresse ne manifeste en nous
Que ce que nous portons en nous-mêmes (…)
L'ivresse ne déforme pas; elle exagère;
Ou plutôt, elle fait rendre à chacun
Ce que souvent par excès de pudeur il cachait (…)
Gide, le Roi Candaule, I, 3.
♦ Une, des ivresses : état, situation momentanée d'une personne ivre. || Pendant son ivresse.
2 Par ext. ⇒ Excitation, griserie, transport. || Un bercement les laissait engourdis (cit. 13) dans une ivresse tranquille. || Danseurs cherchant l'ivresse, le vertige. ⇒ Étourdissement (→ Envol, cit. 2). || Parfums capiteux, qui versent l'ivresse (→ Griser, cit. 3). || Émotion (cit. 16) qui devient une ivresse. || État de demi-ivresse qu'on connaît dans l'action, le travail (→ 2. Boulot, cit. 3).
5 (…) une sorte d'ivresse, nullement sensuelle, analogue à celle que la musique donne à certaines personnes (…)
Proust, À la recherche du temps perdu, t. VIII, p. 198.
6 Et, de nouveau, il eut la sensation d'être soulevé : ivresse joyeuse de l'acte; confiance sans limite; activité vitale tendue à son paroxysme; et, par-dessus tout, exaltation de se sentir superbement grandi.
Martin du Gard, les Thibault, t. II, p. 142.
7 Et ce qui le gonflait, ce n'était pas seulement cette ivresse que donne la campagne à ceux de la ville (…)
Montherlant, le Songe, I, V.
♦ L'ivresse de…, causée par. || L'ivresse du combat (→ Héros, cit. 16).
3 (1691). Qualifié. || L'ivresse, une ivresse de… État d'une personne transportée, vivement émue. ⇒ Émotion, exaltation. || L'ivresse de l'amour, des grandeurs, du pouvoir, du succès, de la victoire, du désir, des plaisirs… (→ Agir, cit. 14; annoncer, cit. 17; avant-goût, cit. 2; époux, cit. 10). || Dans l'ivresse de l'improvisation (→ Électriser, cit. 4), de la folie sainte (→ Exulter, cit. 1).
♦ Ivresse d'altruisme (cit. 3).
8 De l'absolu pouvoir vous ignorez l'ivresse (…)
Racine, Athalie, IV, 3.
9 Bailly jura le premier, et prononça le serment si distinctement, si haut, que toute la foule du peuple, qui se pressait au dehors, put entendre, et applaudit, dans l'ivresse de l'enthousiasme. Des cris de Vive le Roi s'élevèrent de l'Assemblée et du peuple (…)
Michelet, Hist. de la Révolution franç., t. I, IV.
10 (…) l'ivresse de l'Art est plus apte que toute autre à voiler les terreurs du gouffre (…)
Baudelaire, le Spleen de Paris, XXVII.
♦ (Qualifié par un adj.). || L'orgueil, ivresse morale (→ Génésique, cit. 3).
11 Elle le savait, que l'amour, c'était seulement une petite ivresse courte d'où l'on sortait un peu triste (…)
France, le Lys rouge, V.
♦ (1732). || L'ivresse des sens.
12 Je vois que de ses sens l'impétueuse ivresse
L'abondonne aux excès d'une ardente jeunesse (…)
Voltaire, Adélaïde du Guesclin, I, 1.
13 Ô baiser ! (…) Ivresse des sens, ô volupté !
A. de Musset, la Confession d'un enfant du siècle, III, XI.
4 (Av. 1742). || L'ivresse, une ivresse : état d'euphorie, de ravissement, de béatitude… ⇒ Enivrement, extase, joie; → Abîmer, cit. 6. || Moments, heures d'ivresse (→ Cadran, cit. 3; envoler, cit. 7). || Pâmé d'ivresse. ⇒ Volupté; → Entre-, cit. 15. || Succomber à l'ivresse dans le bonheur (→ Équilibrer, cit. 8). || Céder à une ivresse (→ Plein, cit. 7). || Avec ivresse (→ Encens, cit. 3).
14 (…) le plus beau moment d'une femme, le seul où elle puisse produire cette ivresse de l'âme, dont on parle toujours et qu'on éprouve si rarement, est celui où, assurés de son amour, nous ne le sommes pas de ses faveurs (…)
Laclos, les Liaisons dangereuses, XLIV.
15 (…) il resta encore une seconde comme en suspens, écoutant avec ivresse le bruit du canon, respirant et savourant l'odeur de la poudre (…)
A. de Vigny, Cinq-Mars, X.
16 C'était une sorte d'attachement idiot plein d'admiration pour lui, de volupté pour elle, une béatitude qui l'engourdissait; et son âme s'enfonçait en cette ivresse et s'y noyait (…)
Flaubert, Mme Bovary, II, XII.
17 Elle aimait, elle était aimée. Sans doute elle n'avait pas ressenti l'ivresse rêvée. Mais l'éprouve-t-on jamais ?
France, le Lys rouge, I.
♦ (Av. 1711). État d'exaltation lyrique que fait naître l'inspiration, la création. ⇒ Enthousiasme, exaltation. || Une ivresse presque divine (→ Griser, cit. 10).
18 Je les fis toutes deux (l'Iliade et l'Odyssée) plein d'une douce ivresse;
Je chantais, Homère écrivait.
Boileau, Poésies diverses, XXX.
19 Je compris vite que l'ivresse sans vin n'est autre que l'état lyrique (…)
Gide, Si le grain ne meurt, I, VII, p. 194.
20 Des costumes qui sont pour les yeux une ivresse (…)
Baudelaire, les Fleurs du mal, CXXVI, IV.
21 Toucher à la victoire, c'est une ivresse.
Hugo, Quatre-vingt-treize, III, IV, XI.
22 Partir à pied, quand le soleil se lève, et marcher dans la rosée, le long des champs, au bord de la mer calme, quelle ivresse !
Maupassant, Monsieur Parent, À vendre.
❖
CONTR. Calme, froideur, lucidité, sobriété. — Désenchantement.
Encyclopédie Universelle. 2012.