CRISTAUX
«DE toutes les parties qu’embrasse l’histoire naturelle, il n’en est peut-être point qui mérite d’être plus approfondie ni qui promette une moisson plus abondante à ceux qui voudront en faire l’objet de leurs recherches que celle qui traite des pierres et des minéraux. Sans parler ici des avantages que les arts et le commerce peuvent retirer de ces recherches, n’a-t-on pas lieu de présumer qu’elles nous conduiront à des découvertes sur la nature et la formation des substances du règne minéral qui, moins composées que celles des deux autres règnes et placées, pour ainsi dire, au degré le plus bas de l’échelle des êtres, semblent pour cela même nous inviter à suivre de plus près les phénomènes curieux qu’elles nous présentent.»
Écrite en 1772, cette préface de l’Essai de cristallographie de Romé de l’Isle, pionnier de cette science, est d’une remarquable clairvoyance. L’étude des cristaux, qui a suscité au long du XIXe et au début du XXe siècle un intérêt particulièrement soutenu, a apporté à la connaissance de la matière une contribution fondamentale. On verra comment, de l’observation immédiate de l’anisotropie discontinue des cristaux, qui se manifeste, par exemple, par l’existence de faces naturelles, on est conduit à l’idée d’une stratification périodique du milieu cristallin. Cette notion conduit à celle de l’existence nécessaire d’un motif élémentaire, le cristal étant formé d’un empilement régulier de tels motifs, tous identiques, et l’existence du motif, élément de la périodicité, a été la première idée directe et tangible de l’existence d’une limite inférieure dans la dimension des éléments constitutifs de la matière: le fondateur de la théorie atomique est donc, en fait, R.-J. Haüy, qui le premier montra l’évidence de la structure périodique du milieu cristallin, formé par la juxtaposition régulière de motifs cristallins identiques.
Cette démonstration fondée sur des observations simples, faite à l’échelle macroscopique, dut attendre pendant plus d’un siècle une confirmation directe, à l’échelle atomique, par les méthodes de diffraction des rayons X (Von Laue, Bragg). Mais, fort heureusement, les mathématiciens et les physiciens du XIXe siècle avaient compris l’importance des raisonnements et de la découverte de Haüy et, bien avant que les rayons X en permettent une étude directe et détaillée, avaient décrit tous les caractères géométriques (périodicité, modes de réseaux, symétries) qui sont propres à la matière cristallisée, considérée aussi bien à l’échelle macroscopique qu’à l’échelle atomique.
La découverte de la diffraction des rayons X (1912), celle des électrons, puis, plus récemment, celle des neutrons a donné à la science des cristaux une impulsion nouvelle et puissante, et, au cours de la première moitié du XXe siècle, l’activité principale des cristallographes a consisté dans le développement et l’exploitation de ces méthodes en vue de la détermination de l’arrangement des atomes dans les cristaux. De très nombreuses structures de cristaux ont été ainsi déterminées, apportant des connaissances sûres et précises sur les liaisons interatomiques dans la matière solide et les configurations moléculaires. Les techniques expérimentales actuellement utilisées sont très élaborées et automatisées; elles mettent en œuvre, en particulier, des moyens de calcul électronique importants. C’est ainsi que l’étude des structures de molécules aussi complexes que celles de protéines a pu être menée à bien à partir de l’analyse des données de la diffraction de rayons X par les cristaux que peuvent former ces protéines. Alors que l’étude de la configuration atomique d’une telle molécule isolée est une gageure, l’étude du cristal, formé par un empilement régulier de ces molécules, conduit en effet à la description de cette configuration, et c’est là l’un des intérêts fondamentaux des méthodes radiocristallographiques.
Mais la science des cristaux ne se limite pas à la détermination et à la description de la structure atomique de la matière cristallisée. Partant de la connaissance plus ou moins complète de cette structure, elle se propose aussi l’étude et l’interprétation des propriétés de la matière solide. La cristallographie est l’une des branches essentielles de la science des matériaux dans ses aspects à la fois fondamentaux et appliqués.
L’une des premières propriétés physiques des cristaux qui ait fait l’objet d’investigations précises est l’optique cristalline. Moyen d’identification des espèces cristallines et plus spécialement des cristaux naturels, les minéraux, l’étude optique a aussi conduit à l’utilisation de lames cristallines dans de nombreux types d’instruments d’optique. L’apparition de la technique des lasers a permis d’utiliser les cristaux en optique et plus précisément en optique non linéaire.
Mais l’intérêt des monocristaux ne se limite pas au domaine des montages optiques. Bien d’autres techniques, telles que celle des semi-conducteurs, sont aussi fondées sur l’utilisation de cristaux. Ces impératifs à la fois scientifiques et industriels ont, au cours de ces dernières décennies, stimulé les recherches sur les méthodes d’élaboration de cristaux, qui ont fait de remarquables progrès. Mais si la cristallogenèse est maintenant une technique industrielle aux multiples aspects, c’est encore une science dont tous les problèmes fondamentaux ne sont pas résolus.
Les progrès des techniques d’élaboration de cristaux toujours plus parfaits ont d’ailleurs permis de s’intéresser efficacement à l’étude de leurs défauts, avec d’autant plus d’intérêt que bon nombre de propriétés du milieu cristallin (et parmi elles beaucoup sont l’objet d’intéressantes applications telles que la conductibilité électrique des semi-conducteurs ou les qualités mécaniques des métaux) sont sensibles aux défauts et même, dans certains cas, entièrement déterminées par l’existence et la nature de ces défauts. C’est ainsi que leur étude est devenue l’une des branches les plus actives de la cristallographie. La surface d’un cristal peut d’ailleurs être considérée aussi comme un défaut, qui limite le milieu cristallin, et l’étude des surfaces cristallines peut conduire à l’interprétation de phénomènes aussi divers que la catalyse ou le frottement.
Les concepts de la mécanique quantique ont permis d’aborder l’étude des propriétés des corps solides (et plus particulièrement du comportement des électrons dans les solides) d’une manière nouvelle et particulièrement féconde: ce type d’étude est généralement désigné sous le nom de physique des solides et fera, en raison de son importance, l’objet d’un article distinct.
Le présent ensemble d’articles se propose donc d’exposer d’abord les fondements essentiels de la science des cristaux (cristallographie ), puis les problèmes liés à la cristallogenèse (croissance des cristaux ) et aux défauts dans les cristaux . Le dernier article est consacré à la cristallochimie . L’ensemble des théories et des faits qui sont ainsi exposés est nécessaire pour une bonne compréhension de la physique des solides et plus généralement de cette science des matériaux dont l’impact sur les aspects les plus divers de notre civilisation industrielle est très évident.
● cristaux nom masculin pluriel Nom commercial du carbonate de sodium cristallisé. ● cristal, cristaux nom masculin (latin crystallus, du grec krustallos, glace) Solide dont la structure atomique est ordonnée et périodique dans les trois directions de l'espace. Verre contenant une proportion importante d'oxyde de plomb, qui se distingue des autres verres par une plus grande densité, un indice de réfraction supérieur ainsi que par son éclat, sa limpidité et sa sonorité. Objet de cristal ou assimilé, et, en particulier au pluriel, verrerie de table : Des cristaux de Bohême. ● cristal, cristaux (citations) nom masculin (latin crystallus, du grec krustallos, glace) Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Tout souffle, tout rayon ou propice ou fatal, Fait reluire et vibrer mon âme de cristal, Mon âme aux mille voix, que le Dieu que j'adore Mit au centre de tout comme un écho sonore ! Les Feuilles d'automne, Ce siècle avait deux ans ● cristal, cristaux (expressions) nom masculin (latin crystallus, du grec krustallos, glace) Boule de cristal, verre de forme sphérique, instrument de la cristallomancie. Cristal liquide, matériau à l'état mésomorphe. Cristal de roche, quartz hyalin, substance transparente, incolore et très dure. Cristal unique, synonyme de monocristal. Littéraire. De cristal, qui a la transparence ou la sonorité du cristal. Papier cristal, papier d'emballage translucide, à base de pâtes chimiques très raffinées, glacé et lustré sur les deux faces. ● cristal, cristaux (synonymes) nom masculin (latin crystallus, du grec krustallos, glace) Cristal unique
Synonymes :
Encyclopédie Universelle. 2012.