AMIRAL
AMIRAL
Venu du mot arabe am 稜r ou em 稜r (chef), le terme «amiral» désigne dès le XVIe siècle, selon Jal (Glossaire nautique , 1848), «le chef des flottes, des armées et de la police navale d’un État». Il s’applique, d’une part, à celui qui est revêtu de la charge d’amiral, d’autre part, à celui qui est investi du commandement à la mer.
La dignité d’amiral de France sous la royauté, ou de grand amiral sous l’Empire, était généralement réservée à des princes du sang ou à des personnalités importantes. Chef suprême de la marine en principe, l’amiral n’exerçait pas en fait de commandement à la mer, mais il était à la tête d’une administration portuaire responsable de nombreux aspects de la navigation et du commerce maritime. Définies et codifiées dans le dernier quart du XVIIe siècle par Colbert, ses responsabilités étaient administratives (délivrance de commissions de capitaines de la marine marchande, de commissions d’armer en guerre, de passeports ou lettres de mer, de congés, de sauf-conduits; règlement des prises, des bris et des naufrages; commandement des milices garde-côtes; perception des redevances maritimes) et judiciaires (cours d’amirauté où étaient jugées les affaires relevant du droit et de la réglementation maritimes, notamment celles de la course et des prises). Les finances de l’amirauté provenaient de redevances variées et de la retenue du dixième de la valeur des prises condamnées par les juridictions françaises. La signature de l’amiral était aussi apposée aux ordonnances du roi relatives à la marine. L’Assemblée nationale supprima la charge d’amiral en 1791. Elle fut rétablie en 1805 par Napoléon, avec le titre de grand amiral de l’Empire, mais sans les prérogatives qu’y attachait l’Ancien Régime. Elle fut maintenue par la Restauration et supprimée à nouveau par la République.
Le grade de vice-amiral fut créé au XVIe siècle. Sous la monarchie, les grades d’officiers généraux de la marine de guerre étaient en ordre ascendant: chef d’escadre, lieutenant général des armées navales, vice-amiral. Le grade de contre-amiral remplaça celui de chef d’escadre à la Révolution et, en 1830, les trois grades d’amiraux furent assimilés à celui de maréchal de France. En 1939, le titre d’amiral de la flotte fut décerné à l’amiral Darlan. De nos jours se trouvent au sommet de la hiérarchie navale les contre-amiraux, vice-amiraux, vice-amiraux d’escadre et amiraux. Quel que fût le grade de l’officier général commandant à la mer, on l’appelait amiral, et le vaisseau qu’il montait arborait son pavillon, sa «marque», et devenait ainsi le vaisseau amiral. Au temps des escadres à voile, le titre d’amiral fut donné aux officiers généraux commandant une escadre (par exemple, amiral de l’escadre bleue, voire par contraction amiral bleu). Dans les ports de guerre, l’amiral désigne aussi, par extension de langage, le vaisseau stationnaire où se tiennent services administratifs, inspections, conseils de guerre.
amiral, ale, aux [ amiral, o ] n.
1 ♦ N. m. Anciennt Commandant d'une force navale; dignité équivalant à celle de maréchal. — Mod. N. Officier du grade le plus élevé dans la marine, correspondant à celui de général d'armée. ⇒ contre-amiral, vice-amiral.
♢ Adj. Vaisseau amiral, ayant à son bord un amiral, le chef d'une formation navale.
2 ♦ N. f. Vieilli Femme d'un amiral.
● amiral nom masculin (arabe amīr al-‘ālī, très grand chef) Dignité équivalente à celle de maréchal de France. (On disait dans ce sens amiral de France.) Grade des marines militaires française et étrangères, correspondant à celui d'officier général dans les armées de terre, de l'air et de la gendarmerie. ● amiral (citations) nom masculin (arabe amīr al-‘ālī, très grand chef) François Marie Arouet, dit Voltaire Paris 1694-Paris 1778 Dans ce pays-ci, il est bon de tuer de temps en temps un amiral pour encourager les autres. Candide ● amiral, amirale, amiraux adjectif Se dit de tout bâtiment ayant à son bord un amiral et, en particulier, de celui du chef d'une formation navale.
amiral, aux
n. m. Officier général de la marine militaire.
|| adj. m. Bâtiment amiral, sur lequel se trouve l'amiral, le chef d'escadre.
I.
⇒AMIRAL1, AUX, subst. masc.
A.— Grade le plus élevé dans la marine de guerre :
• 1. ... je reçus une invitation signée du nom d'un comte jadis célèbre et dont la famille avait donné des ministres aux rois de France, des évêques au clergé et des amiraux à notre Marine nationale. Bref, un insigne personnage et qui me priait en termes excellents de bien vouloir me rendre chez lui pour parler du passé...
L.-P. FARGUE, Le piéton de Paris, 1939, p. 247.
• 2. Il était évident que les Anglo-saxons étaient en train d'élaborer le plan d'une vaste opération sur le théâtre occidental. Le général Marschal, chef d'État-major de l'armée américaine, et l'amiral King, commandant en chef de la flotte de l'Atlantique, avaient séjourné à Londres au mois de mai en évitant de me voir.
Ch. DE GAULLE, Mémoires de guerre, L'Appel, 1954, p. 207.
— Titre donné aux amiraux, contre-amiraux, vice-amiraux.
Rem. Selon LE CLÈRE 1960, on écrit Monsieur l'Amiral, Monsieur le Vice-Amiral d'Escadre x; dans la langue parlée, on dit Amiral pour Amiral, Vice-Amiral, etc., non précédé de Monsieur ou de mon; cf. aussi Amirale subst. fém., réduction de Madame l'Amirale, titre de la femme d'un amiral.
♦ Amiral de la Flotte. ,,Titre assumé par l'Amiral chef d'État-major de la marine française en juin 1939.`` (GRUSS 1952).
B.— Dignité équivalente à celle de Maréchal de France.
— En partic., HIST. Grand Amiral, Grand-Amiral, Grand-Amiral de France ,,Dignité de la Couronne. (...) Chef de toute la Marine (guerre et commerce)`` (GRUSS 1952); Amiral de France ,,Dignité correspondant à celle de Maréchal de France, mais qui n'a pas été rétablie comme cette dernière l'a été en 1916.`` (GRUSS 1952) :
• 3. Cependant les principaux seigneurs du Parlement et du Conseil s'empressèrent à venir le voir, l'assurant que tout irait bien, et qu'il serait vengé d'une injure qui touchait à l'honneur de la Couronne. L'Amiral de France, le sire de Coucy, le sire de Saint-Pol, lui conseillèrent de se retirer dans son château de Montlhéry et de les laisser conduire cette affaire.
P. DE BARANTE, Hist. des ducs de Bourgogne, t. 1, 1821-1824, p. 371.
• 4. À Madrid, je me rappelle, le coup des obsèques du Grand Amiral, qu'est-ce que j'ai pu rigoler...
J. AUDIBERTI, Le Mal court, 1947, III, p. 182.
Rem. En sc. naturelles, le mot désigne : a) un papillon qui est une variété de vanesse (cf. H. COUPIN, Animaux de nos pays, dict. pratique, 1909, p. 267), b) un ,,oiseau d'une espèce rare et énorme, ayant sur ses longues pennes les trois étoiles dessinées en noir`` (P. LOTI, Mon frère Yves, 1883, p. 78), c) une coquille de la classe des gastéropodes (cf. PRIVAT-FOC. 1870).
Prononc. ET ORTH. :[], masc. plur. []. FÉR. 1768 et FÉR. Crit. t. 1 1787 signalent une forme anc. admiral.
Étymol. ET HIST. — 1. Vers 1100 a. fr. amiralt « émir chez les Sarrazins » (Ch. de Rol., éd. Bédier, vers 1503 : En Val Metas li dunat uns diables, Si li tramist li amiralz Galafes); 1200 a.fr. m.fr. amiral (J. BODEL, Jeu de Saint Nicolas, éd. Jeanroy, vers 315 : Mahom saut l'amiral del Coine, De par le roy qui sans essoigne Li mande qu'en s'aïe viegne!); 2. av. 1212 amiral « chef de flotte » (VILLEHARDOUIN, Chron., 476 ds QUEM. t. 1 1959 : Et lors li vint une novele que Esturiens qui ere amirals des galies Toldre d'Ascre ere entrez a X et XII galies en Boque d'Avie, el Braz sain George).
Empr. à l'ar. al-' « très grand chef » (EWFS2, FEW t. 19, s.v. , BRÜCH, Z. rom. Philol. t. 42, pp. 226-227) et non de l'ar. -al-(bahr) « commandant de la mer » (DAUZAT 1968) ou -ar-rahl « commandant de la flotte » (LOK. 1927), en raison du sens des premières attest. Le sens 2 est apparu d'abord à la cour normande de Sicile, et de là en France (voir FEW, loc. cit.).
STAT. — Fréq. abs. litt. :976. Fréq. rel. litt. :XIXe s. : a) 2 097, b) 721; XXe s. : a) 544, b) 1 646.
BBG. — Ac. Gastr. 1962. — ARV. 1963, pp. 281-282. — BACH.-DEZ. 1882. — BLANCHE 1857. — BOUILLET 1859. — ESN. 1966. — GOUG. Mots t. 1 1962, p. 214, 298. — GRUSS 1952. — JAL 1848. — JOSSIER 1881. — KEMNA 1901, pp. 57-59. — LA RUE 1954. — LASNET 1970. — LE CLÈRE 1960. — LELOIR 1961. — LEP. 1948. — Mét. 1955. — MONT. 1967. — PISSOT 1803. — PRIVAT-FOC. 1870. — SPR. 1967. — WILL. 1831.
II.
⇒AMIRAL2, ALE, AUX, adj.
A.— Emploi adj. Navire amiral, vaisseau amiral, navire, vaisseau à bord duquel un amiral exerce son commandement. Avec trait d'union : vaisseau-amiral (P. CLAUDEL, Le Soulier de satin, 1929, p. 786), bâtiment-amiral (P. CLAUDEL, Le Soulier de satin, 1929, p. 834), bateau-amiral (P. CLAUDEL, Le Livre de Christophe Colomb, 1929, p. 1162); au fém. barque amirale (V. HUGO, Ruy Blas, 1838, p. 383; F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 2, 1848, p. 555; Ch. PÉGUY, La Tapisserie de Notre-Dame, 1913, p. 676), galère amirale (E.-D. DE LAS CASES, Le Mémorial de Sainte-Hélène, 1823, p. 704; J. GRACQ, Le Rivage des Syrtes, 1951, p. 33); cf. aussi avec trait d'union, le subst. en appos. : maison-amiral (G. FLAUBERT, Salammbô, 1863, p. 117).
B.— Par ell. L'amiral, subst. masc. Vaisseau monté par l'amiral ou principal vaisseau d'une flotte, d'une escadre.
— Spéc., ART CULIN. [Se dit d'une préparation de poissons] À l'amirale. Richement garni (cf. Ac. Gastr. 1962).
amiral, ale, aux [amiʀal, o] n. et adj.
ÉTYM. 1200; amiralt, 1080, Chanson de Roland; de l'arabe ’ǎmīr « chef », et (p.-ê.) ǎl-‘ālī « très grand ».
➪ tableau Mots français d'origine arabe.
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1 Anciennt (anc. franç.). Émir, chef. — Chef de la flotte sarrasine.
2 (Déb. XIIIe). Hist. Commandant d'une force navale; dignité équivalente à celle de maréchal. || L'amiral de Guyenne, de Provence, de Bretagne, de Normandie. || L'amiral, le grand amiral : le chef suprême des forces navales.
1 Dans ce pays-ci il est bon de tuer de temps en temps un amiral pour encourager les autres.
Voltaire, Candide, XXII.
3 Mod. Officier du grade le plus élevé dans la marine, grade correspondant à celui de général d'armée. ⇒ Contre-amiral, vice-amiral. || Monsieur l'amiral.
♦ Titre donné aux amiraux, contre-amiraux, vice-amiraux. || Oui, amiral.
♦ Au fém. || Madame l'amirale X : la femme de l'amiral X.
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II Adj. || Vaisseau, navire amiral, le vaisseau ayant à son bord un amiral, le chef d'une formation navale, et, par ext., le principal vaisseau d'une flotte. || La galère, la frégate amirale. || L'amiral de la flotte n'est généralement pas le commandant du navire amiral.
2 L'incendie, attaquant la frégate amirale,
Déroule autour des mâts son ardente spirale.
Hugo, les Orientales, V.
REM. On trouve aussi, avec le trait d'union : bateau-, bâtiment-, navire-, vaisseau-amiral.
3 À Cronstadt, l'affaire se déclenche à neuf heures et demie. Ce sont les torpilleurs T 501 et T 513 qui ouvrent le feu. Ils torpillent à bout portant l'énorme dreadnought Tsarévitch, vaisseau-amiral.
B. Cendrars, Moravagine, in Œ. compl., t. IV, p. 153.
♦ N. m. Vx. || L'amiral : le navire amiral.
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DÉR. Amiralat, amirauté.
COMP. Contre-amiral, vice-amiral.
Encyclopédie Universelle. 2012.