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MAHABHARATA
MAHABHARATA

Le Mah bh rata , le Grand Bh rata , en fait la «Grande (Geste) des Bh rata», est l’une des deux épopées sanskrites qui ont servi de toile de fond et d’inépuisable réservoir à la littérature hindoue ultérieure. Lorsqu’on dit seulement: l’«Épopée», avec une majuscule, on se réfère toujours au Mah bh rata qui, par son étendue – plus de cent mille stances divisées en dix-huit chapitres –, représente le document majeur du début de l’hindouisme.

Dans la perspective légendaire, on entend par Bh rata un groupe de tribus organisées en petits royaumes et dont les princes se réclament d’une origine commune, un certain Bharata, descendant de Puru, roi de la lignée lunaire et ancêtre des deux partis dont la lutte forme le sujet central du poème.

La composition de l’Épopée s’étale sur des siècles, mais son influence s’exerce sur un temps plus long encore. Non seulement les textes épiques plus récents ont repris nombre de ses thèmes, mais toute la littérature indienne ne cesse de s’y référer ou d’y faire allusion. Le théâtre lui a emprunté ses sujets – ainsi qu’au R m ya ユa –, l’emploi du dialogue facilitant le passage des récitations alternées à un découpage scénique. Plus près de nous, le cinéma indien a porté et porte fréquemment à l’écran des épisodes qui en sont tirés. D’admirables bas-reliefs déroulent indéfiniment sur les murs des temples les exploits des P ユボava et de leurs armées et, prenant la relève, l’imagerie populaire vendue à travers l’Inde entière répand les traits sophistiqués des cinq frères, de leur épouse Draupad 稜 et de leur divin allié K リルユa. En fait, la matière du Mah bh rata a imprégné l’ensemble de la tradition indienne.

Les problèmes historiques et littéraires

À la fin du deuxième millénaire précédant l’ère chrétienne, pense-t-on généralement, le chef de l’une des tribus ryennes qui s’installèrent dans l’Inde du Nord-Ouest s’appelait Bharata. Suivant un procédé de dérivation habituel à la langue sanskrite, ses descendants, et plus généralement les membres de son clan, portaient le nom de Bh rata («issus ou dépendants de Bharata»). Par ailleurs, l’ouvrage entier du Mah bh rata révèle l’existence de luttes tribales qui ont dû se produire vers le Xe siècle avant notre ère et que les chantres épiques des siècles suivants ont magnifiées à la manière dont les Grecs ont célébré dans L’Iliade les rivalités entre les peuplades du bassin oriental de la Méditerranée.

La tradition indienne parle de deux grandes lignées mythiques: la lignée solaire, illustrée par la deuxième épopée, le R m ya ユa , et la lignée lunaire à laquelle les héros du Mah bh rata appartiennent en tant que descendants de Bharata, lignée qui eut pour capitale Hastin pura, située au bord d’un ancien lit du Gange, au nord-est de l’actuelle Delhi; la tradition locale en a, jusqu’à nos jours, conservé le nom, dérivé de celui de son fondateur Hastin, que la légende donne pour fils à Bharata. On rapporte que la ville fut détruite par une crue du fleuve.

La composition du poème

La tradition indienne inscrit cet immense ensemble épique au compte d’un seul auteur, Vy sa, à qui l’on impute, au surplus, beaucoup d’autres ouvrages. Ce Vy sa serait à la fois le conteur et l’un des personnages centraux du poème. En fait, vy sa est un substantif que l’on peut traduire par «compilateur», quoique, littéralement, le terme désigne moins celui qui recueille que celui qui diffuse.

Le récit n’a rien de linéaire; il se présente, au contraire, comme un foisonnement de thèmes dont on imagine difficilement la complexité. Composés en vers pour la majeure partie, la plupart des chapitres utilisent le ごloka , le grand vers épique; pourtant, çà et là, s’intercalent des mètres très divers. On y trouve aussi des fragments en prose, peu nombreux mais parfois assez longs. Cette composition si lâche s’explique lorsqu’on sait qu’elle s’étend au moins sur six ou sept siècles – trois cents ou quatre cents ans avant notre ère et à peu près autant après – sans qu’il soit possible de déterminer à quelle période précise remonte tel ou tel passage. En gros, le thème central (la lutte entre les deux clans rivaux, l’origine et la préparation du combat) doit, sauf interpolations assez fréquentes, figurer parmi les portions les plus anciennes. Les passages en prose, par contre, sont tenus pour plus récents.

Au récit proprement dit s’entremêlent des légendes n’ayant souvent qu’un rapport lointain avec l’action principale: à propos d’un personnage épisodique jaillit une suite de vers traitant de lui, de sa famille, de ses exploits. En un tel enchevêtrement, on sent un procédé de conteur désireux de satisfaire la curiosité de son auditoire ou de lui rapporter des histoires connues qu’il souhaite entendre à nouveau. Enfin, l’ouvrage comporte des exposés théoriques, moraux ou religieux; ces parties spéculatives s’écartent fréquemment du récit en cours; le Mah bh rata se présente comme un gigantesque fourre-tout, où l’on a entassé un échantillonnage des connaissances de l’époque, entre autres de doctrines philosophiques variées, souvent imprégnées des idées du s ュkhya-yoga .

La transmission

La genèse du poème se comprend mieux compte tenu des conditions dans lesquelles il a été conservé: la transmission était alors purement orale ; les récitants de l’Épopée connaissaient par cœur des milliers de vers; ils en donnaient des auditions publiques à l’occasion de certaines fêtes religieuses ou profanes. Suivant le temps, le lieu ou les préférences des conteurs, ceux-ci devaient introduire des digressions en rapport avec les légendes et les traditions locales. D’où les divergences entre les manuscrits qu’on a rédigés par la suite dans différentes régions de l’Inde. Il est probable que les récitations se faisaient souvent à plusieurs voix, offrant ainsi l’embryon de ce qui deviendra le drame indien: le terme de bh rata s’était, par contamination, attaché aux récitants de l’Épopée; plus tardivement, il a fini par désigner n’importe quelle sorte d’acteur, ce qui semble bien confirmer l’usage des récitations alternées. Comme le sanskrit ignore l’emploi du discours indirect, les parties des récitants – dont le nom apparaît hors texte – sont entrecoupées des propos de leurs interlocuteurs ou des personnages dont ils rapportent les gestes et les paroles. La plupart du temps, les noms de ceux-ci sont également mentionnés hors du texte; ils y sont parfois inclus, mais leurs interventions sont formulées dans tous les cas en style direct.

D’autre part, les événements évoqués par le poème se déroulent à plusieurs époques. Le Mah bh rata est mis dans la bouche du sage Sauti, qui le récite dans la forêt légendaire de Naimi ルa, en présence d’un groupe de r ルi à l’occasion d’un grand sacrifice du roi えaunaka. Mais ce que Sauti raconte, ce sont des faits relatés antérieurement par son maître Vai ごamp yana lors du sacrifice que célèbre Janamejaya, descendant du parti vainqueur. La genèse et les particularités de la lutte pour la royauté d’Hastin pura sont aussi rapportées sous forme de dialogues qui mettent en scène divers récitants, tous les personnages du thème central et de nombreux autres interlocuteurs: un tel emboîtement de récits ajoute encore à la complexité de l’ensemble.

La grande histoire des descendants de Bharata

Le sujet principal de l’Épopée, cette rivalité entre cousins germains nés de demi-frères, ne prend toute sa signification que si l’on remonte aux origines du conflit, relatées dans les premiers livres. Ces événements déjà lointains passent pour avoir été révélés à Vai ごamp yana par son maître Vy sa qui est, en même temps, l’ancêtre des deux partis adverses, cette «révélation» devant authentifier le récit.

Deux clans, aux droits équivalents, se disputent la royauté d’Hastin pura; toutefois la prépondérance accordée antérieurement à P ユボロ, père des P ユボava, et le fait que leurs cousins usent de procédés déloyaux mettent le dharma , la justice, du côté des P ユボava. Dans une telle perspective, il apparaît normal et nécessaire pour l’ordre cosmique et l’ordre social – c’est la même chose, l’un étant le garant de l’autre – que les descendants de P ユボu l’emportent. Mais les rapports des uns aux autres s’enchevêtrent trop étroitement pour que la victoire ne s’achète pas fort cher: le prix payé se révélera exceptionnellement lourd. Dans la perspective de l’équilibre entre le pouvoir religieux (brahman ) et l’imperium (K ルatra ), le but de la lutte est aussi l’affaiblissement par la mort de nombreux guerriers de l’imperium devenu trop puissant.

Origine de la guerre

On peut partager les dix-huit chapitres (ou livres) de l’Épopée en trois groupes principaux. Les quatre premiers livres exposent les raisons lointaines et proches du conflit et comment celui-ci est devenu inévitable: il faut en rechercher les causes plusieurs générations en arrière.

Parmi la postérité de Bharata figure un certain Kuru; bien que l’appellation de « Kaurava » soit réservée à l’un des partis, celui de Dh リtar ルレra, les uns comme les autres descendent tous de ce Kuru. Un de ses arrière-petits-fils, le roi え ntanu, eut, dans sa jeunesse, de la nymphe G face="EU Updot" 臘g (le Gange personnifié) un fils sage et vertueux, Bh 稜 ルma. Plus tard, le roi rechercha l’alliance d’une princesse, Satyavat 稜, qui elle-même avait eu à l’insu de tous un fils, K リルユa, qu’elle avait abandonné dans une île (dv 稜pa ); aussi appelait-on K リルユa Dvaip yana (l’îlien) cet enfant qui, parvenu à l’âge adulte, se retira dans la forêt pour y mener une vie d’anachorète. Le père de Satyavat 稜, désireux de voir un fils de celle-ci devenir roi d’Hastin pura, exigea de え ntanu non seulement que Bh 稜 ルma renonce au trône, mais encore qu’il s’engage à ne jamais engendrer une descendance qui pourrait rivaliser avec celle de la jeune épouse. Bh 稜 ルma, qui est juste et droit, promet d’obéir, par respect pour son père. Le mariage a lieu, deux fils naîtront. Mais la malchance s’en mêle: l’un est tué dans un combat, l’autre est de santé fragile et, bien qu’il ait deux épouses, il meurt sans laisser d’enfants. Or, dans la perspective indienne, encore très imprégnée de croyances védiques, n’avoir pas de fils pour continuer la lignée et pour offrir les sacrifices qui maintiennent dans l’autre monde une certaine vie aux ancêtres apparaît comme un désastre.

Suivant une coutume ancienne, qui rappelle celle du lévirat, on a recours, en pareil cas, au frère du défunt; mais Bh 稜 ルma, qui s’est engagé solennellement à ne jamais procréer, ne peut faillir à cet engagement. Satyavat 稜 se souvient alors de son autre fils, l’ascète, qui a pris le nom de Vy sa. On l’envoie chercher et il engendre un fils à chacune des épouses de son frère mort. Seulement sa laideur est telle, si peu soigné son aspect que les deux princesses ont défailli d’horreur à son approche; l’une a fermé les yeux et a, de ce fait, mis au monde un fils aveugle; l’autre s’est évanouie: à cause de sa pâleur extrême, on appellera son enfant P ユボu, le Blême. Bien que Dh リtar ルレra soit l’aîné, sa cécité le fait écarter du trône; on proclame roi P ユボu. Ce dernier aussi a deux épouses; mais le sort s’acharne sur les Kaurava: victime d’une malédiction, P ユボu est averti qu’il mourra s’il a commerce avec une femme. Le même problème se repose donc à la génération suivante.

En climat légendaire, on trouve souvent le remède à côté du mal; d’un sage auquel elle avait offert l’hospitalité, Kunt 稜, la première épouse, a reçu jadis un don curieux: elle peut, en invoquant n’importe quel dieu, concevoir de lui un fils. Jeune fille, elle en avait même fait l’expérience en cachette avec S rya, le Soleil. Quant à Kar ユa, né de cette liaison, elle l’avait abandonné par crainte du qu’en-dira-t-on. Dans la détresse où la malédiction plonge P ユボu, elle fait état de ce don et, avec l’accord de son mari, qui en assumera la paternité, elle a successivement trois fils: Yudhi ルレhira, né de Dharma, l’incarnation de la Justice; Bh 稜ma, l’Impétueux, fils de V yu, le dieu du Vent; et Arjuna, l’Archer, le plus beau des trois, fils d’Indra, le chef des dieux. Chose plus curieuse encore, elle accepte de faire bénéficier de ce don exceptionnel Madr 稜, sa coépouse, qui s’afflige de sa stérilité forcée; toutefois elle ne le concède que pour une seule fois. Madr 稜, avisée, invoque les Dioscures indiens, les deux A ごvin, et donne elle-même naissance à deux jumeaux, Nakula et Sah deva, aux traits physiques et moraux bien plus flous que ceux de leurs aînés.

Pendant ce temps, l’épouse de Dh リtar ルレra lui a donné d’abord Duryodhana, né avant Yudhi ルレhira, puis quatre-vingt-dix-neuf autres fils. De cette nombreuse postérité, qui semble quelque peu indistincte, seul émerge Duryodhana, violent, injuste, jaloux, haineux; sa mauvaise nature sera la cause de la rivalité entre les princes.

P ユボu est mort jeune, laissant ses enfants en bas âge. Kunt 稜, qui assume la maternité des cinq P ユボava, se réfugie auprès de l’excellent mais faible Dh リtar ルレra. Ainsi les cousins sont élevés ensemble; ils ont pour maître ès armes et conseiller leur oncle Bh 稜 ルma. De tempérament impétueux, Bh 稜ma, l’enfant du Vent, se heurte fréquemment à Duryodhana; mais celui-ci ne supporte pas mieux la vertu de Yudhi ルレhira, ni la beauté et l’adresse d’Arjuna. Cette vertu évidente de Yudhi ルレhira incite Dh リtar ルレra, qui exerçait le pouvoir depuis la mort de son frère, à proclamer prince héritier son neveu plutôt que son propre fils. Fou de rage, ce dernier, par ses artifices, décide le roi à exiler les P ユボava et leur mère dans la forêt.

Durant cet exil, les cinq princes apprennent que se tient chez Draupada, souverain du Pañcala, le svaya ュvara (choix d’un époux) de sa fille K リルユ Draupad 稜 (la draupadienne). Ils s’y rendent sous un déguisement, et Arjuna, vainqueur dans le concours à l’arc, obtient la princesse qu’ils ramènent tout triomphants à leur mère: «Nous avons gagné un trésor.» Une fois encore, la malchance joue; sans savoir de quoi il s’agit, Kunt 稜, mère équitable, répond: «Mes enfants, il faut le partager.» En contexte indien, la parole est toute-puissante; l’ordre ne peut être transgressé: ainsi Draupad 稜 devient-elle l’épouse des cinq P ユボava. Leur temps d’exil terminé, ils reviennent auprès du roi. Alors Dh リtar ルレra scinde le royaume: il garde Hastin pura, mais, dans la ville d’Indraprastha, il installe Yudhi ルレhira qui gouverne ses domaines avec modération et justice. La jalousie de Duryodhana s’en accroît; à l’occasion d’une partie de dés – où les dés sont pipés – avec son cousin dont la faiblesse est un amour immodéré du jeu, il gagne sur celui-ci non seulement son royaume, mais ses frères et leur commune épouse. Amenée comme esclave, Draupad 稜 est publiquement insultée. Dh リtar ルレra, indigné, intervient et rend tous ses biens à Yudhi ルレhira. Celui-ci, cependant, aime trop le jeu: il reperd tout, et le roi, cette fois, doit céder et exiler de nouveau les cinq frères pour douze années, plus une treizième, durant laquelle ils devront vivre cachés, sous peine de mort. Toutes ces années, sont naturellement, remplies d’aventures. À l’expiration de ce temps d’épreuves, les P ユボava sont résolus à reprendre possession de leur royaume: la guerre est imminente.

C’est par le récit de ces antécédents du conflit, sur lesquels il est nécessaire d’insister, que les premiers livres permettent de comprendre la guerre elle-même; d’autre part, cette partie du poème est la plus riche en enseignements sur les coutumes du temps où fut composée l’Épopée.

La guerre

La deuxième partie, qui traite de la lutte elle-même, couvre les chapitres cinq à onze. Le livre V décrit les préparatifs immédiats et tout le jeu des alliances. Parmi les alliés possibles des deux partis, K リルユa se détache, souverain de Dv rak , lointain cousin de tous les descendants de え ntanu. Dans l’ensemble du poème, il est un prince comme les autres; fait curieux, cependant, et qui le présente sous un éclairage particulier, il offre aux belligérants soit l’aide de son armée, soit la sienne seule. Duryodhana s’empresse de choisir l’armée; ainsi K リルユa, rejeté dans le parti adverse, devient le conducteur (s ta ) du char d’Arjuna. Au livre VI seulement, quand la lutte va s’engager, dans les dix-huit chants de la Bhagavad G 稜t – en des passages dont d’aucuns pensent qu’il s’agit du cœur même de l’Épopée mais dont d’autres pensent qu’ils ne sont probablement pas parmi les plus anciens –, il abandonne cette identité banale pour devenir l’incarnation de Vi ルユu, l’avat ra glorieux, l’Absolu personnifié, dont la présence dans leur camp assurera la victoire aux fils de P ユボu.

La bataille se déroule du livre VI au livre IX, avec des alternances de revers et de succès. Au livre IX, Duryodhana, l’âme de la lutte, est blessé à mort et seuls demeurent encore autour de lui trois de ses partisans. Au livre X, ceux-ci se glissent dans le campement endormi et confiant des P ユボava et massacrent les cinq fils que Draupad 稜 avait eus de ses cinq époux. Le livre suivant résonne des lamentations poussées par les femmes en présence d’un tel malheur.

Les suites du conflit

Avec le livre XII, on peut considérer qu’il s’agit déjà des suites de la guerre. D’une étendue considérable, ce え ntiparvan (livre de l’Apaisement) apparaît comme le plus confus de tous. Théoriquement, il répète le discours que Bh 稜 ルma, mortellement blessé, tient à Yudhi ルレhira désespéré devant tant de morts, dont presque tous sont ses proches. Combattant dans le parti des Kaurava, qu’il avait adopté dans l’espoir de modérer la violence de Duryodhana, Bh 稜 ルma n’en demeurait pas moins convaincu, dès le départ, du bon droit des P ユボava. Avant de mourir, il prodigue à son neveu consolation et avis. Son discours se poursuit au livre XIII. Il meurt enfin, cinquante-huit jours après avoir été blessé.

Yudhi ルレhira, vainqueur indiscutable, exécute alors un a ごvamedha (sacrifice du cheval), rite solennel que seul peut accomplir un roi victorieux: c’est le thème du livre XIV. Plus tard, il abdiquera en faveur du Parik ルit, un petit-fils d’Arjuna et de sa deuxième épouse.

Les quatre derniers livres relatent la mort de tous les héros sortis indemnes du combat: Dh リtar ルレra, son épouse, sa belle-sœur Kunt 稜 (dans un incendie de forêt), K リルユa et son frère Balar ma, enfin les P ユボava. Yudhi ルレhira, ses frères et Draupad 稜 avaient entrepris un long voyage vers les Him l ya; les uns meurent en route, mais tous finissent par parvenir au ciel d’Indra.

Récits épisodiques et passages spéculatifs

L’ensemble de l’ouvrage comporte de nombreuses digressions qui, toutes, offrent de l’intérêt. Parmi les légendes qui se greffent sur le thème principal, lui-même si chargé, on peut noter un cycle en rapport avec les forces souterraines – les serpents –, souvent en conflit avec les forces célestes, les oiseaux. On a détaché et traduit séparément de l’histoire des P ユボava celle de Nala et Damayant 稜, amoureux types de la tradition indienne, et celle de Savitr 稜, le modèle des épouses qui, à force d’insistance et d’habileté, parvient à arracher son jeune mari, Satyavant, au pouvoir de Yama, le dieu des enfers. On rencontre aussi, au livre III, une version abrégée des aventures de R ma, héros du R m yana . Ces légendes et bien d’autres, éparses dans le texte, remontent à une haute époque; certaines comptent au nombre des plus anciennes de l’Épopée; beaucoup reproduisent des récits dont parlaient déjà les Br hma ユa .

Par ailleurs, des fragments souvent plus récents développent des aperçus philosophiques: au livre VI, la Bhagavad G 稜t est, au moins partiellement, de composition ancienne; mais, au livre XII, le discours de Bh 稜 ルma véhicule des idées plus tardives: le N r ya ユ 稜ya Parvan , qui comprend dix-huit chapitres consacrés à Vi ルユu-N r ya ユa et à la secte des P ñcar tra, n’est pas antérieur au IIIe siècle de notre ère; l’Anug 稜t , texte philosophico-religieux du livre XIV, est certainement de composition récente. Dans tous ces passages spéculatifs s’affirme la prédominance d’un schéma s ュkhyayoga qui se poursuivra jusqu’à l’époque actuelle.

Au IVe siècle de notre ère, on a adjoint au Mah bh rata un long poème épique de composition similaire, le Hariva ュ ごa (la Lignée de Hari ), de plus de dix mille ごloka . La tradition le considère comme un supplément à l’Épopée, attribué également à Vy sa. Par son style, il se rapproche davantage des grands textes épiques postérieurs, les Pur ユa , qu’évoquent déjà d’ailleurs certaines parties tardives du Mah bh rata . Cet ouvrage, très populaire, consacré, comme son nom l’indique, à Hari, c’est-à-dire à Vi ルユu, se compose de légendes, de mythes et d’hymnes en l’honneur de Vi ルユu-K リルユa; il apparaît comme une sorte de livre saint à l’usage des bh gavata , les fidèles du Bhagavant.

L’extrême difficulté qu’on éprouve à séparer, dans la pensée indienne, philosophie et religion, explique cet aspect important du Mah bh rata qu’est la présence de passages spéculatifs mêlés par ailleurs à des mythes qui, pour la foule, sont étroitement liés aux croyances. Dans cette perspective religieuse se place le thème de la malédiction, qui est considérable dans la tradition indienne et revient sans cesse dans l’Épopée: l’inimitié des cousins, l’inéluctabilité de la guerre, tout se présente comme l’enchaînement des suites, parfois à long terme mais inévitables, d’une malédiction: Bh 稜 ルma a enlevé pour ses frères les filles du roi de Bénarès, brisant ainsi l’avenir de l’aînée, fiancée à un roi voisin; celle-ci, désespérée, le maudit et jure de se réincarner dans le corps d’un guerrier pour le tuer... Parce que P ユボu a tué un tigre pendant son accouplement, la tigresse – être humain victime aussi d’une malédiction – le condamne, sous peine de mort, à ne jamais approcher de ses épouses. La malédiction joue, dans l’Épopée indienne, le même rôle que la Moira dans la littérature grecque.

En appliquant au Mah bh rata les méthodes d’étude des mythes ou d’analyse structurale (G. Dumézil), on a pu faire ressortir certains traits frappants et des rapports entre les événements et les personnes, qui avaient échappé jusqu’alors; l’examen des noms propres est, sous cet angle, très révélateur du destin et du statut de ceux qui les portent. En fait, cet immense ensemble est trop riche pour qu’un seul procédé d’explication, quel qu’il soit, puisse rendre compte de la totalité de ses significations. Il importe néanmoins de ne pas négliger les recherches entreprises en ce sens.

Mahâbhârata
(le) épopée anonyme composée en sanskrit entre le VIe s. av. J.-C. et le IVe s. apr. J.-C., le texte le plus pop. de la littér. sacrée de l'Inde (V. Veda). Ses 200 000 vers racontent la lutte des Kaurava et des Pândava, deux clans qui, descendant d'un roi mythique, le grand (Mahâ) Bhârata, se disputent la possession de son royaume. L'épisode Bhagavad-Gîtâ expose la philosophie brahmanique; il a Krishna et Arjuna pour héros.

Encyclopédie Universelle. 2012.