PROPAGANDE
PROPAGANDE
Sans doute est-il impossible de fixer l’origine de la propagande politique, d’en circonscrire le champ et d’en recenser les moyens. Les symboles de puissance des chefs dans les sociétés archaïques peuvent déjà y être rattachés. Insignes, chants, gestes rituels qui marquent l’appartenance à un groupe et une commune allégeance peuvent être considérés comme des moyens privilégiés de propager la foi dans le pouvoir et dans la légitimité de ceux qui l’exercent.
Toutefois, il semble nécessaire d’assigner au concept un sens plus précis. La propagande politique apparaît avec le fait explicite de politique. C’est à partir du moment où la question du pouvoir est ouvertement posée, où sa figure n’est plus dissoute dans la représentation mythique ou religieuse d’un ordre du monde, que des méthodes spécifiques de conquête du consensus sont mises au point. En ce sens, l’origine de la propagande politique coïncide avec celle de la démocratie en Grèce. L’art oratoire en constitue sans doute la première armature.
Dans les sociétés industrielles modernes, la propagande politique a connu une mutation avec l’avènement des régimes totalitaires. C’est alors qu’elle cesse de se confondre avec l’emploi des moyens traditionnels de persuasion, pour devenir une technique hautement rationalisée, tandis que son secteur se voit délimité. L’identification du sujet au pouvoir est systématiquement recherchée par la mobilisation de l’affect et la contagion émotionnelle. L’argumentation se trouve souvent subordonnée à la nécessité de créer une fascination collective à l’égard du leader.
Les régimes démocratiques — compte tenu des limites que leur impose la libre compétition des partis — ont eux aussi exploité de tels procédés. Cependant, l’utilisation de la télévision a permis, dans une large mesure, de faire l’économie du «viol des foules» (Serge Tchakhotine) par des moyens ostentatoires et de simuler la relation personnelle de l’homme politique avec chaque électeur potentiel.
propagande [ prɔpagɑ̃d ] n. f.
• 1792; congrégation de la propagande 1689; trad. lat. congregatio de propaganda fide « pour propager la foi »
1 ♦ Relig. Institution pour la propagation de la foi chrétienne. Propagandes catholiques, évangéliques. Propagande qui envoie des missionnaires.
2 ♦ (1790) Cour. Action exercée sur l'opinion pour l'amener à avoir certaines idées politiques et sociales, à soutenir une politique, un gouvernement, un représentant. Propagande d'un parti politique. Propagande électorale. Instruments, moyens de propagande (discours, journaux, cinéma, télévision). « la propagande assenée par les journaux et les ondes » (Colette). Thème de propagande. Propagande nazie. Se laisser endoctriner par la propagande. — C'est de la propagande ! des nouvelles fausses, faites pour influencer l'opinion. ⇒ intoxication (intox). — Film, revue, tract de propagande.
♢ Par ext. Action de vanter les mérites d'une théorie, d'une idée, d'un homme..., pour recueillir une adhésion, un soutien. ⇒aussi prosélytisme. Il fait de la propagande pour ce livre auprès de tous ses amis.
● propagande nom féminin (latin congregatio de propaganda fide, congrégation pour propager la foi, de propagare, propager) Action systématique exercée sur l'opinion pour lui faire accepter certaines idées ou doctrines, notamment dans le domaine politique ou social : La propagande électorale. ● propagande (expressions) nom féminin (latin congregatio de propaganda fide, congrégation pour propager la foi, de propagare, propager) La Propagande, nom usuel de la congrégation de la Propagation de la foi. Faire de la propagande pour quelque chose, quelqu'un, vanter leurs mérites, chercher à développer leur notoriété.
propagande
n. f. Activité tendant à propager, à répandre des idées, des opinions, et surtout à rallier des partisans à une idée, à une cause. Faire de la propagande.
⇒PROPAGANDE, subst. fém.
A. —RELIG. CATH., vx. [Écrit avec une majuscule] Congrégation de la Propagande ou, p.ell., Propagande. Congrégation romaine fondée pour la propagation de la foi chrétienne. Ils se concilient le clergé en ouvrant des voies nouvelles à la Propagande, et en attribuant des territoires aux missions catholiques (A. FRANCE, Pierre bl., 1905, p.228).
B. —1. SC. SOC. ET POL., cour. Action psychologique qui met en oeuvre tous les moyens d'information pour propager une doctrine, créer un mouvement d'opinion et susciter une décision. Agent, esprit, film, instrument, ministère, revue, services, thème de propagande; active propagande; propagande (anti)communiste, électorale, gouvernementale, nationale, national(e)-socialiste. Les ennemis sont hérétiques, ils doivent être convertis par la prédication ou propagande; exterminés par l'inquisition ou Gestapo. Le résultat est que l'homme n'est plus, s'il est du parti, qu'un outil au service du Führer, un rouage de l'appareil, ou, s'il est ennemi du Führer, un produit de consommation de l'appareil (CAMUS, Homme rév., 1951, p.228). La radio n'était qu'un moyen de propagande. «Radio-Paris ment, Radio-Paris ment, Radio-Paris est allemand», chantonnait Radio-Londres (CACÉRÈS, Hist. éduc. pop., 1964, p.120):
• 1. Entre l'information et la propagande, il y a au moins une différence de degré et d'intention. L'information se veut information, c'est-à-dire communication de données dont l'informé fera ce qu'il veut. Elle s'adresse à la seule intelligence qu'elle entend meubler de connaissances. L'intelligence jugera. La propagande se veut propagande, c'est-à-dire influence sur celui à qui elle s'adresse. Elle veut convaincre.
SALLERON, Comment informer, 1965, p.37.
Rem. 1. Il serait abusif de confondre propagande et publicité bien qu'on ait parfois adopté des formules telles que propagande commerciale, publicitaire, touristique (v. infra C). 2. La propagande appelle la contre-propagande.
— P. méton. L'organisme qui met en oeuvre cette action. À l'hôpital, répondit-elle, ce soir, une trentaine de jeunes femmes de la propagande échappées aux troupes blanches... blessées. Il en arrive de plus en plus. Elles disent que l'armée est tout près. Et qu'il y a beaucoup de tués... (MALRAUX, Cond. hum., 1933, p.212).
2. [Dans les arts, les sc., etc.] Action qui a pour but de provoquer le succès d'une théorie, d'une idée, d'une oeuvre, d'un homme en dehors de tout souci lucratif. L'amélioration des productions fourragères peut être considérable si elle est basée sur une expérimentation, une vulgarisation et une propagande intenses organisées par des spécialistes ayant «la foi» (Qq aspects équip. agric., 1951, p.10). Mais en 1955, la loi de 1936 a été abolie, la liberté de l'avortement et de la propagande anticonceptionnelle rétablie (LESOURD, GÉRARD, Hist. écon., 1966, p.501):
• 2. Un vaste mouvement de conversion semble pourtant se dessiner aujourd'hui, dont les premiers signes sont apparus en Chine, où l'accord semble s'être fait maintenant au sein du gouvernement communiste: l'enseignement des méthodes contraceptives et la propagande en leur faveur semblent décidés.
Traité sociol., 1967, p.288.
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1740. Étymol. et Hist.1. a) 1689 Congrégation de la Propagande «congrégation religieuse qui a son siège à Rome et qui a pour but de propager la foi» (Second Voyage du Père Tachard et des Jésuites envoyez par le roy au royaume de Siam, p.402 ds Mél. Frank, 1957, p.16); b) 1790 propagande «association ayant pour but de propager certaines opinions (surtout politiques)» (RANFT, p.148); 2. 1792 «action organisée en vue de répandre une opinion ou une doctrine (surtout politique)» (CONDORCET, Lettre à de Pange ds BRUNOT t.9, p.628, note 5). Francisation du lat. mod. Congregatio de propaganda fide «congrégation pour propager la foi» (propager), elliptiquement Propaganda, fondée en 1622. Fréq. abs. littér.:564. Fréq. rel. littér.:XIXes.: a) 104, b) 277; XXes.: a) 657, b) 1765.
DÉR. Propagander, verbe intrans. Faire de la propagande pour. Bruhl propagandait pour son oeuvre. Lui et Augustin étaient les têtes philosophiques de la classe (MALÈGUE, Augustin, t.1, 1933, p.171). — [], (il) propagande []. — 1re attest. 1862 (Salons de W. Bürger de 1861 à 1868, t.1, p.257); de propagande, dés. -er.
BBG. —DUB. Pol. 1962, p.390. —GALL. 1955, p.XXIV, XXVI. —QUEM. DDL t.15 (s.v. propagander).
propagande [pʀɔpagɑ̃d] n. f.
ÉTYM. 1689, congrégation de la Propagande; trad. lat. congregatio de propaganda fide « pour propager la foi » (de propagare → Propager).
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1 Relig. Institution pour la propagation de la foi chrétienne. || Propagandes catholiques, évangéliques. || Propagande qui envoie des missionnaires. — (1790). Par ext. Vx. Association dont le but est de répandre les doctrines d'un parti politique (Bescherelle). || Les propagandes au pouvoir (→ Copieux, cit. 5).
2 (1790). Cour. Action exercée sur l'opinion pour l'amener à avoir certaines idées politiques et sociales, à vouloir et soutenir une politique, un gouvernement, un représentant. || Propagande politique (⇒ Agit-prop). || Propagande d'un parti politique. || Propagande électorale. || Propagande gouvernementale, nationale. || Propagande bonapartiste (→ Inonder, cit. 14). || Propagande communiste, anticommuniste. || Instruments, moyens de propagande. || Propagande par la parole (discours, meetings, émissions radiophoniques), l'écriture (journaux, tracts, inscriptions, graffiti), l'image (affiches, photos, cinéma, télévision), etc. || Propagande qui frappe, suggestionne plus qu'elle n'informe, provoque des réflexes conditionnés (→ Plasticité, cit. 2). ⇒ Bourrage (de crâne). || Thème de propagande. || Les bluffs, les mensonges de la propagande. — C'est de la propagande, des nouvelles fausses, destinées à manipuler l'opinion. || Ennemis qui doivent être convertis par la propagande (→ Hérétique, cit. 7). || Le discours, la rhétorique de la propagande. || Publicité commerciale et propagande (→ Montage, cit. 1). || Militant qui fait de la propagande. — (Choses). || De propagande : qui sert une propagande. || Film, revue… manœuvre de propagande. || Guerre de propagande (→ Expansionniste, cit. 1).
1 (…) refus de percevoir la présence de l'envahisseur, de lire l'affiche de Paul Chack et les autres placards déshonorants, régurgitation mentale opposée à la propagande assenée par les journaux et les ondes (…)
Colette, l'Étoile Vesper, p. 31.
2 Est-il possible de ne pas penser chaque heure de chaque jour au duel engagé non même plus sourdement, mais avec le vacarme des publicités et des propagandes entre les deux plus grands empires du monde.
G. Duhamel, Manuel du protestataire, III.
3 La propagande se rapproche de la publicité en ce qu'elle cherche à créer, transformer ou confirmer des opinions et qu'elle use en partie de moyens qu'elle lui a empruntés; elle s'en distingue en ce qu'elle vise un but politique et non commercial (…) La propagande influence (…) l'attitude fondamentale de l'être humain. En cela elle peut être rapprochée de l'éducation : mais les techniques qu'elle emploie habituellement et surtout son dessein de convaincre et de subjuguer sans former, en font l'antithèse.
J.-M. Domenach, la Propagande politique, p. 9.
♦ Par ext. Action de vanter les mérites d'une théorie, d'une idée, d'un homme… pour recueillir une adhésion, un soutien. || Il faisait de la propagande pour un peintre de ses amis.
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DÉR. et COMP. Propagandisme, propagandiste. — Contre-propagande. REM. Péguy (in D. D. L.) emploie le verbe dérivé, propagander (tr. et intr.) en 1901, ainsi que les dérivés propagandable, adj., propagandeur, n. m., et une série formée avec le suff. -iser (propagandiser, -able, -ation, -eur). Ces formes n'ont pas vécu.
Encyclopédie Universelle. 2012.