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TAUTOLOGIE
TAUTOLOGIE

TAUTOLOGIE

Dans le langage ordinaire, énoncer une tautologie, c’est dire la même chose deux fois; c’est affirmer un truisme, une évidence triviale, voire parler à vide et finalement ne rien dire. S’il n’est pas totalement dépourvu de signification, le discours tautologique est du moins dénué d’intérêt et il ne véhicule aucune information; comme le jugement analytique décrit par Kant, il ne fait qu’expliquer un concept; plus radicalement encore, il se borne à préciser une convention linguistique. Par exemple, dire que «la baisse de valeur de la monnaie provoque la hausse des prix» est, pour B. Nogaro, non l’expression d’une relation de cause à effet, mais une tautologie, les deux expressions mentionnées ne se référant qu’à un seul et même phénomène (La Valeur logique des théories économiques , 1947). Le discours tautologique devient donc sophistique lorsqu’il se donne pour autre chose que la stipulation d’une convention linguistique qui pose deux expressions comme équivalentes ou substituables salva veritate et comme ayant, sinon même sens, du moins même dénotation selon la distinction frégéenne classique (G. Frege, Écrits logiques et philosophiques , 1971).

Une thèse extrême a été soutenue par Antisthène, disciple de Gorgias, au \TAUTOLOGIE Ve siècle. Elle présuppose la méconnaissance de la fonction référentielle du langage traité comme une réalité en soi, et une interprétation de la copule «est» comme signifiant exclusivement l’identité. Une première version de cette thèse est l’impossibilité du discours faux, dire quelque chose étant toujours dire l’être. La seconde est l’impossibilité de la prédication et de la définition, qui n’autorise que les énoncés tautologiques: on ne peut dire d’une chose que ce qu’elle est, c’est-à-dire qu’elle est ce qu’elle est; un seul mot convient à chaque chose, son nom; le chat n’est pas autre chose que chat, il n’y a de prédication que tautologique. L’intérêt de ce type de position est de souligner jusqu’à l’absurde les problèmes à résoudre.

La tautologie est aussi une figure de rhétorique. Certaines tautologies élémentaires jouent le rôle de maximes: «Un sou est un sou»; «Une femme est une femme»; «Les enfants sont les enfants». Pour revêtir tout son intérêt et son sens, une telle figure doit être interprétée en fonction du contexte et de la situation. Soit: un sou n’est pas négligeable, n’est pas rien, il est l’unité sans laquelle il n’y a pas de sommation possible; quels que soient ses qualités, ses opinions ou ses souhaits personnels, une femme a une «nature féminine» et doit donc être traitée comme telle; ne vous étonnez pas si ces enfants- sont bruyants, ils sont comme tous les enfants; ou encore: si ingrats que soient tels ou tels enfants, ils doivent être choyés. De même: «Un père est toujours un père»; dans son traité Des tropes , Dumarsais estime que le second terme est un substantif pris adjectivement. Pour un même terme substantif, on peut dire qu’en sa première occurrence, où il joue le rôle de sujet grammatical, il exprime la simple appartenance d’un individu à une classe, et qu’en sa seconde occurrence, où il joue le rôle de prédicat, il exprime la possession par l’individu des propriétés inhérentes à tous les individus de la classe en question; l’appartenance à la classe des pères, par exemple, implique la possession des qualités paternelles que possèdent nécessairement tous les individus appartenant à cette classe.

La tautologie apparaît enfin dans la logique du calcul propositionnel. Une proposition composée ou moléculaire est une tautologie si sa valeur de vérité est toujours le vrai, quelles que soient les valeurs de vérité de ses éléments atomiques. Par exemple: p V \TAUTOLOGIE p (qui se lit «p ou non-p ») est toujours vrai, que p soit vrai ou faux. Plus formellement, on dira qu’une formule du calcul propositionnel est une tautologie si et seulement si, en remplaçant dans toutes leurs occurrences les énoncés atomiques qui la composent par d’autres énoncés atomiques, on obtient toujours une formule vraie. Les tautologies sont utilisées dans la déduction: q est une conséquence logique de p , si q est impliqué tautologiquement par p . Certaines sont plus fréquemment utilisées que d’autres, par exemple le modus ponens : [(p 念q ) . q ] 念 q ; le «syllogisme hypothétique»: [(p q ) . (q r )] 念 (p r ). Ce sont des implications tautologiques. Parmi les équivalences tautologiques, mentionnons la loi de double négation: p \TAUTOLOGIE \TAUTOLOGIE p. On peut noter, enfin, que les tautologies sont les thèses du système et que toutes les thèses du système sont des tautologies.

tautologie [ totɔlɔʒi ] n. f.
• 1596; bas lat. tautologia, mot gr.
1Vice logique consistant à présenter, comme ayant un sens différent, une proposition dont le prédicat ne dit rien de plus que le sujet. La tautologie est un truisme ( lapalissade) . Répétition inutile de la même idée sous une autre forme. pléonasme, redondance.
2(XXe) Log. Proposition complexe qui reste vraie en vertu de sa forme seule, quelle que soit la valeur de vérité des propositions qui la composent. La tautologie est le fondement des lois logiques.

tautologie nom féminin (bas latin tautologia, du grec tautologia) Négligence de style ou procédé rhétorique consistant à répéter la même idée en termes différents (par exemple J'en porte la responsabilité pleine et entière). Formule logique universelle valide, selon laquelle A ∨ A → A (tautologie du calcul des propositions) et ∀x P(x) → ∃x P(x) (tautologie du calcul des prédicats). ● tautologie (synonymes) nom féminin (bas latin tautologia, du grec tautologia) Négligence de style ou procédé rhétorique consistant à répéter la...
Synonymes :
- pléonasme
- répétition
- truisme
Formule logique universelle valide, selon laquelle A ∨ A →...
Synonymes :
- proposition identique

tautologie
n. f. LOG
d1./d Caractère redondant d'une proposition dont le prédicat énonce une information déjà contenue dans le sujet.
Relation d'identité établie entre des éléments formellement identiques (ex.: A = A; un chat est un chat; etc.).
d2./d Formule de calcul propositionnel qui reste toujours vraie lorsqu'on remplace les énoncés qui la composent par d'autres.

⇒TAUTOLOGIE, subst. fém.
A. — LING., STYL.
1. Procédé rhétorique ou négligence de style consistant à répéter une idée déjà exprimée, soit en termes identiques (ex. au jour d'aujourd'hui), soit en termes équivalents (monter en haut). Synon. pléonasme. C'est parce que nous disons, avec une sorte de tautologie, économie domestique pour l'administration d'une fortune privée, que nous avons pu dire économie politique pour l'administration de la fortune nationale (SISMONDI, Écon. pol., 1827, p. 11). [Les critiques] ne parient jamais sur une issue incertaine et (...) tout se passe pour eux comme si la littérature tout entière n'était qu'une vaste tautologie et comme si chaque nouveau prosateur avait inventé une nouvelle manière de parler pour ne rien dire (SARTRE, Litt., 1948, p. 38).
2. En partic. Répétition de mots dans certaines formules consacrées (ex. us et coutumes; mandons et ordonnons que...). (Dict. XIXe et XXe s.).
B. — LOGIQUE
1. LOG. FORMELLE. ,,Proposition identique, dont le sujet et le prédicat sont un seul même concept (exprimé ou non par un même mot)`` (LAL. 1960).
Principe, postulat de tautologie. ,,Principe d'après lequel le même mot doit, dans le cours d'un exposé théorique, être pris dans le même sens`` (FOULQ.-ST-JEAN 1969). Le principe de tautologie met l'accord constant entre l'auteur et le lecteur. C'est le principe même de la lecture (BACHELARD, Philos. du non, ds FOULQ.-ST-JEAN 1969). L'intelligible serait l'identique, ou, comme disent les logisticiens modernes, que le principe suprême de la pensée, c'est le principe de tautologie (Gds cour. pensée math., 1948, p. 372).
2. LOG. MOD. ,,Proposition complexe qui reste vraie en vertu de sa forme seule, quelle que soit la valeur de vérité des propositions qui la composent [selon Wittgenstein]`` (LAL. 1968). La tautologie est cette forme dégénérée de la liaison qui demeure vraie quelles que soient les valeurs de vérité des propositions qu'elle combine; la proposition « p ou non p », par exemple, est vraie indépendamment de tout constat, puisqu'elle l'est pour p vraie comme pour p fausse (Encyclop. univ. t. 16 1973, p. 997).
Prononc. et Orth.:[]. V. tauto-. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1521 tautologia « négligence de style ou procédé rhétorique consistant à répéter une même idée avec des termes différents » (P. FABRI, Art de pleine rhét., éd. A. Héron, livre II, p. 127); 1576 tautologie (RAMUS, Dial., l. I, Peroration ds HUG.); spéc. 1872 (LITTRÉ: Tautologie. Dans les formules de droit, nom donné aux répétitions de mots consacrés); 1835 log. (COMTE, Philos. posit., t. 2, 1893, p. 299). Empr. au b. lat. gramm. tautologia « id. » IVe s. ds BLAISE Lat. chrét., du gr. « id. », dér. de « qui redit la même chose », comp. de crase attique pour neutre de « le même » et « dire ». Cf. la forme taftologie « id. » Trév. 1704-1771. Fréq. abs. littér.:34.
DÉR. Tautologique, adj. a) Ling., styl. Qui relève de la tautologie (supra A). Formule, raisonnement, répétition tautologique. C'est là le seul sens que le chrétien puisse reconnaître au mot « état laïque », qui autrement n'a qu'un sens tautologiquela laïcité de l'état signifiant alors qu'il n'est pas l'Église (MARITAIN, Human. intégr., 1936, p. 190). b) Log. Science tautologique. ,,Qualification donnée à la logique et aux mathématiques par les logiciens Wittgenstein, Carnap et l'École de Vienne`` (Lar. Lang. fr., QUILLET 1965, GDEL). — []. Supra prononc. Att. ds Ac. dep. 1762. — 1re attest. 1721 (Trév.); de tautologie, suff. -ique; cf. l'adv. gr. « tautologiquement » XIIe s. ds LIDDELL-SCOTT.
BBG. — FRÉDÉRIC (M.). La Tautologie ds le lang. naturel. Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1981, t. 19, n° 1, pp. 313-326. — JACOBSEN (B.). Tautologies pures et tautologies rhétorisées ds un texte d'anc. fr. Neuphilol. Mitt. 1982, t. 83, pp. 99-110. — REY-DEBOVE (J.). Le Sens de la tautologie. Fr. mod. 1978, t. 46, pp. 318-332.

tautologie [tɔtɔlɔʒi] n. f.
ÉTYM. 1596; bas lat. tautologia, mot grec; de tauto-, et -logie.
Didactique.
1 Log. Proposition identique.Log. mod. Proposition complexe qui est toujours vraie, quelle que soit la valeur de vérité des propositions élémentaires. || La tautologie est une loi logique.
1 Le terme de tautologie, qui s'explique donc, selon l'école (du positivisme logique), à l'ensemble des vérités logico-mathématiques, peut être pris en deux sens qu'il convient de distinguer (…) En un premier sens on dira qu'il y a tautologie lorsque les liaisons en jeu sont fondées sur l'identité… (par exemple « les animaux sont les animaux »… et « les animaux réunis aux animaux donnent encore les animaux », ceci en opposition avec l'itération 1 + 1 = 2). En un second sens, on dira qu'il y a tautologie lorsqu'un jugement épuise identiquement toutes les possibilités (…) Une affirmation toujours vraie peut, en explicitant l'ensemble des liaisons en jeu, être mise sous la forme d'une tautologie.
J. Piaget, Logique et Connaissance scientifique, Épistémologie, in Encycl. Pl., p. 88-89.
2 Péj. Vice logique consistant à présenter comme ayant un sens différent, une proposition dont le prédicat ne dit rien de plus que le sujet. || La tautologie est un truisme.Gramm. et style. Répétition inutile de la même idée sous une autre forme. Pléonasme (ex. : « Mais enfin je l'ai vu, vu de mes yeux, vous dis-je », La Fontaine, IX, 1).
2 (…) tout se passe pour eux (nos critiques) comme si la littérature tout entière n'était qu'une vaste tautologie et comme si chaque nouveau prosateur avait inventé une nouvelle manière de parler pour ne rien dire.
Sartre, Situations II, p. 79.
3 Fausse démonstration par laquelle on répète la thèse avec d'autres mots.
DÉR. Tautologique, tautologue.

Encyclopédie Universelle. 2012.