chance [ ʃɑ̃s ] n. f.
1 ♦ (XIIIe) Manière favorable ou défavorable selon laquelle un événement se produit (⇒ aléa, hasard); puissance qui préside au succès ou à l'insuccès, dans une circonstance (⇒ fortune, sort). La chance nous sourit enfin. Souhaiter bonne chance, et ellipt Bonne chance ! Faire cesser la mauvaise chance. Courir, tenter sa chance. Mettre la chance de son côté (cf. Mettre tous les atouts dans son jeu). Loc. La chance a tourné, de bonne, elle est devenue mauvaise (ou vice versa).
2 ♦ (XVIIIe) Possibilité de se produire par hasard. ⇒ éventualité , probabilité. Il y a beaucoup de chances, de fortes chances, il y a des chances (pour) que cela se produise : c'est probable. Il y a peu de chances, toutes chances qu'il accepte. Elle a toutes les chances de réussir. Calculer ses chances de succès. Ses chances sont minces. Il y a une chance sur trois (pour) que ça marche. Donner sa chance à qqn, lui laisser la possibilité de réussir. — Occasion. Saisir, laisser passer sa chance. « La guerre et le jeu enseignent ces calculs de probabilités qui font saisir les chances sans s'user à les attendre toutes » (France). C'est notre dernière chance. ⇒ espoir.
3 ♦ La chance. Heureux hasard, sort favorable. ⇒ bonheur, fortune, fam. veine. Avoir de la chance, beaucoup de chance. ⇒fam. 1. bol, pot (cf. Avoir la baraka; être né sous une bonne étoile, être né coiffé). Il aura de la chance s'il s'en tire. Nous avons eu la chance de le rencontrer. Porter chance à qqn. Par chance. Au petit bonheur la chance. Le facteur chance. C'est un coup de chance. Un jour de chance. ⇒ 2. faste, heureux. Il n'a pas de chance. Ellipt Pas de chance ! Manque de chance ! Loc. fam. C'est la faute à pas de chance, se dit lorsqu'on ne peut tenir personne pour responsable. — Par antiphr. C'est bien ma chance !
⊗ CONTR. Déveine, 2. guigne, malchance, poisse.
● chance nom féminin (latin cadentian, de cadere, tomber) Possibilité, probabilité que quelque chose (surtout un événement heureux) se produise : Évaluer ses chances de succès. Sa dernière chance de salut. Sort favorable : Compter sur la chance. Faveur du sort, issue heureuse de quelque chose, situation favorable de quelqu'un : Oui, j'ai eu la chance de le rencontrer. C'est une chance de vous trouver ici. ● chance (citations) nom féminin (latin cadentian, de cadere, tomber) Marcel, dit Jean Guéhenno Fougères 1890-Paris 1978 Académie française, 1962 On défend bien plus férocement sa chance que son droit. Changer la vie Grasset André Maurois Elbeuf 1885-Neuilly 1967 Académie française, 1938 Il y a dans tous les succès humains une part mal définie de bonheur. Lyautey Plon Paul Valéry Sète 1871-Paris 1945 L'homme se pare de ses chances. Choses tues Gallimard ● chance (difficultés) nom féminin (latin cadentian, de cadere, tomber) Orthographe Par chance. Toujours au singulier. Emploi 1. Chance = probabilité, hasard heureux ou malheureux. Il a une chance sur deux de réussir, d'échouer. Le mot n'est plus employé en ce sens que dans l'expression soignée. 2. Chance = hasard heureux. C'est une chance de vous rencontrer. Ce sens est aujourd'hui le plus courant. Remarque C'est le premier sens qui était autrefois le plus fréquent, et la chance pouvait être qualifiée de bonne ou mauvaise. Construction 1. C'est une chance que,il y a des chances que (+ subjonctif) : c'est une chance que vous me trouviez, j'allais partir ; il y a des chances qu'il y parvienne. 2. Avoir la chance que (+ subjonctif) : il a eu la chance que nous passions par là. 3. C'est une chance de, avoir la chance de (+ infinitif) : c'est une chance d'avoir si beau temps ; il a eu la chance de bénéficier d'une subvention. ● chance (expressions) nom féminin (latin cadentian, de cadere, tomber) Avoir une chance de pendu (familier), de cocu (populaire), avoir une chance inespérée et persistante. Avoir ses chances, être dans une situation où les probabilités de succès sont assez fortes. C'est bien ma chance !, se dit par ironie ou par dépit quand on n'a pas eu de chance. Courir, tenter sa chance, essayer de réussir, de gagner. Donner, laisser sa chance à quelqu'un, lui offrir, lui laisser une occasion de réussir. Familier. Il y a des chances, c'est très probable. Jour de chance, jour où tout vous réussit. La chance a tourné, celui qui avait de la chance n'en a plus, celui qui n'en avait pas en a. La chance me (te, lui, etc.) sourit, le sort m'(t', lui, etc.) est favorable. Par chance, par bonheur. Porter chance, porter bonheur. Souhaiter bonne chance à quelqu'un ou bonne chance !, lui souhaiter de réussir. ● chance (synonymes) nom féminin (latin cadentian, de cadere, tomber) Possibilité, probabilité que quelque chose (surtout un événement heureux) se produise
Synonymes :
- éventualité
- possibilité
- probabilité
Sort favorable
Synonymes :
- destin
- hasard
- veine (familier)
Contraires :
- déveine (familier)
- guigne (familier)
- poisse (populaire)
Faveur du sort, issue heureuse de quelque chose, situation favorable de...
Synonymes :
- aubaine
- bol (familier)
- bonheur
- pot (familier)
Par chance
Contraires :
- calamité
- malheur
chance
n. f.
d1./d éventualité heureuse ou malheureuse. Courir une chance. Souhaiter bonne chance.
d2./d (Plur.) Probabilités, possibilités. Il y a peu de chances pour qu'il accepte.
d3./d Hasard heureux. Quelle chance!
⇒CHANCE, subst. fém.
I.— JEUX (de hasard)
A.— Vx. Coup de dé; point(s) que donne un dé en tombant. Donner la chance, livrer (la) chance. Amener sa chance (Ac. 1878).
— P. méton. Sorte de jeu de dés. Jouer à la chance (Ac. 1878). Les transitions du récit (...) paraissaient abandonnées au caprice de la parole comme une chance du jeu de dé (NODIER, Smarra, 1821, p. 20).
— P. métaph. Si du dé fatal la chance fut perfide (DELILLE, L'homme des champs, Premier chant, 1800, p. 54).
B.— Théorie des chances. Calcul des probabilités appliqué aux jeux de hasard (cf. COMTE, Cours de philos. positive, t. 4, 1839-42, p. 331).
♦ Calculer les chances :
• 1. Les jeux de bourse, l'agiotage sur les fonds publics pouvaient en effet me conduire à un retour de fortune. Il suffisait pour cela de bien calculer les chances et de prévoir les résultats des événements.
REYBAUD, Jérôme Paturot, 1842, p. 401.
C.— Jouer sa chance. Essayer de gagner au jeu de dés; p. ext. à n'importe quel jeu.
— P. métaph. On ne peut dire qu'Édouard Drumont négligea de jouer sa chance, pour employer l'argot du sport (BERNANOS, La Grande peur des Bien-Pensants, 1931, p. 208) :
• 2. Échoués, à quatre mille mètres d'altitude, sur un plateau aux parois verticales, son mécanicien et lui [Mermoz] cherchèrent pendant deux jours à s'évader. Ils étaient pris. Alors, ils jouèrent leur dernière chance, lancèrent l'avion vers le vide, ...
SAINT-EXUPÉRY, Terre des hommes, 1939, p. 155.
♦ Expr. Mener jusqu'au bout ses chances :
• 3. ... j'avais en face de moi, fermé, désinvolte et tendu, le joueur de poker décidé à mener jusqu'au bout ses chances.
GRACQ, Un Beau ténébreux, 1945, p. 136.
II.— Tour favorable ou défavorable, mais de soi imprévisible et livré au hasard, que peut prendre ou que prend effectivement une situation ou un événement; issue heureuse ou malheureuse d'une situation donnée. Synon. éventualité, hasard :
• 4. Ses camarades (...) ne comprenaient pas pourquoi, avant le combat, il paraissait espérer quelque chose, et ne devinaient point que d'Auverney, de toutes les chances de la guerre, ne désirait que la mort.
HUGO, Bug-Jargal, 1826, p. 16.
• 5. ... les vicissitudes de ma jeunesse n'avaient pas été assez nombreuses et assez variées pour me fournir l'occasion d'embrasser sous tous les aspects toutes les chances d'une existence complète. Je regrettais de n'avoir éprouvé ni assez de malheurs, ni surtout assez de prospérités pour être sûr de ma résolution dans tous les événements de la vie.
NODIER, La Fée aux Miettes, 1831, p. 151.
A.— Au sing.
1. Puissance (cachée) qui est censée orienter à son gré le cours des événements dans un sens favorable ou défavorable. Synon. fortune :
• 6. ... j'ai vu, depuis vingt ans, le monde par son envers, dans ses caves, et j'ai reconnu qu'il y a dans la marche des choses une force que vous nommez la providence, que j'appelais le hasard, que mes compagnons appellent la chance.
BALZAC, Splendeurs et misères des courtisanes, 1847, p. 642.
— [Le caractère favorable ou défavorable est précisé par un adj. qualificatif] Bonne, mauvaise chance; souhaiter bonne chance à qqn. Quelle bonne chance vous amène? Seigneur Hérode, dit l'hôtelier (GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, p. 183). C'est la mauvaise chance qui me poursuit encore; le Guignon, chanté par Mallarmé (LARBAUD, A. O. Barnabooth, 1913, p. 16).
— Emploi exclam. Bonne chance! Mille amitiés, bonne chance, bon succès (BALZAC, Correspondance, 1832, p. 173).
2. [La chance est considérée comme une force favorable] Faveur accordée par le sort, condition d'une personne favorisée par le sort.
a) [La chance est présentée comme une allégorie]
— Cour. [P. réf. aux dés qui changent de face (cf. supra I) ou à la roue de la Fortune, qui en tournant, présente en bas ce qui était d'abord en haut] La chance tourne (contre lui). La bonne chance l'abandonne. La chance a tourné, j'ai été pris (BARRÈS, Un Homme libre, 1889, p. 226).
— [P. allégorie et personnification (cf. la Fortune personnifiée)] Littér. La chance ne lui sourit pas (DABIT, L'Hôtel du Nord, 1929, p. 55).
♦ [P. réf. à la représentation fam. de la Fortune-chance, qu'il faut savoir prendre au passage] Dans un geste terrible de cow-boy, (...) attraper la chance d'un seul coup (COCTEAU, Poèmes, 1916-23, p. 234).
b) [La chance est considérée comme une faveur ou un ensemble de conditions favorables attachées à une pers.] Issue heureuse d'une situation, bonheur inespéré accordé par le sort. Synon. fam. veine. Je suis un homme plein de chance! (ERCKMANN-CHATRIAN, Histoire d'un paysan, t. 2, 1870, p. 353). Qu'avez-vous fait au bon Dieu pour mériter pareille chance? (ESTAUNIÉ, L'Empreinte, 1896, p. 63). Je n'ai pas seulement de ligne de chance dans la main (BERNANOS, La Joie, 1929, p. 617).
— P. antiphrase. Issue défavorable, malchance. Dans l'expr. fam. : voilà bien ma chance! (cf. VERNE, Les Enfants du capitaine Grant, t. 1, 1868, p. 66). Voilà une fois de plus ma malchance habituelle.
— Iron. Je ressemble à ma mère. « Si la chance des chances, c'est d'avoir pas de chance, qu'elle me disait, je suis servie! » (BERNANOS, Journal d'un curé de campagne, 1936, p. 1253).
3. Locutions
a) Par chance. Par bonheur.
b) Cour. Avoir de la chance, n'avoir pas de chance. Avoir la chance de + inf. Communément l'envieux se dit que l'autre a de la chance et que lui-même n'en a point (ALAIN, Propos, 1935, p. 1288). Aurai-je la chance de vous trouver à Paris vers le milieu d'août? (FLAUBERT, Correspondance, 1867, p. 118).
c) C'est une chance que. Une chance qu'il a l'air bon papa (COLETTE, Claudine à l'école, 1900, p. 220).
d) Conter sa chance. Maheu (...) lui contait sa chance, une truite superbe pêchée et vendue trois francs (ZOLA, Germinal, 1885, p. 1335).
e) Porter chance (rare). Porter bonheur.
f) Un coup de chance, un coup de génie, un de ces hasards prodigieux (G. DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Les Maîtres, 1937, p. 203).
g) Pop., fam., p. antiphrase. Une chance de cocu (DABIT, L'Hôtel du Nord, 1929, p. 56). Une chance exceptionnelle.
h) Fam. [En s'adressant à qqn] Au petit bonheur la chance. Si par un bonheur, qui à vrai dire, n'est que peu certain, le sort est favorable... Au petit bonheur la chance, on aviserait (GIONO, Un de Baumugnes, 1929, p. 91).
B.— Au sing. ou au plur. Événement, éventualité, favorable ou défavorable, pouvant se produire.
1. [L'option est précisée par un élément de syntagme]
a) [Cet élément est un adj. épithète] Adieu. Écrivez-nous toutes vos chances, bonnes ou mauvaises (LAMARTINE, Correspondance, 1836, p. 225).
b) [Cet élément est un adj. ou un compl. de nom, de coloration souvent péj.] Synon. mod. plus usuel risque :
• 7. ... il [Nicolas de Russie] peut être assassiné par quelqu'un de son armée (...) il court la chance des conspirations de casernes, des révoltes de régiments (...) des maladies brusques et obscures, des coups terribles...
HUGO, Napoléon le Petit, 1852, p. 215.
• 8. En cinq ans, elle [Emma] ne vit pas un seul homme. Elle avait accepté de franc jeu la chance d'une réclusion éternelle.
RENAN, Feuilles détachées, 1892, p. 33.
• 9. Poincaré (...) a conçu et exécuté une politique qui, loin d'écarter les chances de guerre, n'a fait que les accroître!
R. MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, p. 140.
— Vieilli. Avoir chance de + inf. Risquer de :
• 10. D'ordinaire, dans la conversation, le sujet m'importe peu; un petit comme un grand me trouve bien disposé, mais je veux qu'on le traite à mon goût, qui n'est pas bien relevé : les moindres esprits peuvent le satisfaire; les plus considérables ont chance de le blesser horriblement.
A. FRANCE, La Vie en fleur, 1922, p. 551.
— Emploi abs., au plur., rare, vieilli. Risques, dangers. Une besogne de tyran, entouré de chances, de précautions, de terreurs (HUGO, Angelo, tyran de Padoue, 1835, p. 15). Et ta soif de l'or t'a empêché de calculer les chances auxquelles tu exposais ta tête, en l'engageant dans une négociation (A. DUMAS Père, Catherine Howard, 1834, I, 5, p. 226).
c) [L'adj. épithète ou le compl. indiquent une chance favorable, mais dans un cont. négatif ou limitatif qui annule ou réduit la probabilité d'une issue heureuse] Il était donc alors amoureux sans chances de réussite (HUYSMANS, Les Sœurs Vatard, 1879, p. 105) :
• 11. Peut-être trouverons-nous sur son parcours les naufragés du Britannia. — Faible chance! répondit le major. — Si faible qu'elle soit, reprit Paganel, nous ne devons pas la négliger.
VERNE, Les Enfants du capitaine Grant, t. 1, 1868, p. 83.
— Vieilli
♦ Avoir grand'chance :
• 12. Non, dit-il [Émile Barrel] au sous-préfet Rateau qui dégustait sa chartreuse, de la vraie s'il vous plaît, M. Delangle n'a pas grand'chance, entre nous, les probabilités sont pour le ballotage, et Barbentane au second tour.
ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, p. 144.
♦ Avoir chance de + inf. :
• 13. M. de Charlus m'avait distrait de regarder si le bourdon apportait à l'orchidée le pollen qu'elle attendait depuis si longtemps, qu'elle n'avait chance de recevoir que grâce à un hasard si improbable qu'on le pouvait appeler une espèce de miracle.
PROUST, Sodome et Gomorrhe, 1922, p. 628.
2. Possibilité réelle ou probabilité de succès (cf. aussi supra I B, C).
a) Au sing. [Chance est le plus souvent accompagné d'un adj. poss., l'idée dominante étant celle de possibilité réelle] :
• 14. ... c'était pauvrement penser de la France, de ses ressources naturelles et de ses destinées providentielles, que d'estimer qu'un parti, si utile qu'on le juge, est sa dernière chance de salut, ou son unique moyen de salut, bref est nécessaire à sa vie d'une nécessité de moyen.
MARITAIN, Primauté du spirituel, 1927, p. 93.
• 15. Ce qu'ils me disaient mes dabes, en somme c'était bien raisonnable... que j'étais dans l'âge décisif pour fournir mon effort suprême... forcer ma chance et mon destin... que c'était le moment ou jamais pour orienter ma carrière...
CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 354.
• 16. Il me dit — en faisant semblant de plaisanter — qu'il regrette presque maintenant de ne pas avoir tenté sa chance aux élections qui viennent d'avoir lieu; qu'il avait une occasion (...) et qu'il aurait peut-être risqué le coup s'il avait pu supposer que l'affaire d'Amérique ne marcherait pas.
ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, La Douceur de la vie, 1939, p. 115.
— Loc. Donner sa chance à qqn. Lui donner la possibilité de tenter quelque chose et d'y réussir. Tenter sa chance (supra ex. 16). Jouer sa chance (supra I C). Jouer sa dernière chance (supra ex. 2). Forcer sa chance (supra ex. 15).
♦ Au plur., rare. Mener jusqu'au bout ses chances (supra ex. 3).
b) Au plur. [L'idée dominante est celle de probabilité] Probabilité avec laquelle un événement peut se produire (supra I B). L'affaire est en bon train et a quatre-vingt-dix-neuf chances sur cent de réussir (FLAUBERT, Correspondance, 1854, p. 38).
— Loc. Il y a des (de grandes) chances (pour) que + subj. ou ind. prés. ou fut. (cf. E. DELACROIX, Journal, 1856, p. 240) p. ell., fam. Y'a des chances! Cela est tout à fait probable (cf. COURTELINE, Le Train de 8 h 47, 1888, II, 3, p. 120).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1175 chaance « manière (en général favorable) dont peut tourner un événement » (B. DE STE MAURE, Ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 16426; au plur., 10070); d'où 1762 (J. J. ROUSSEAU, Contrat, III, 6 ds LITTRÉ : On met ainsi presque toutes les chances contre soi); 2. 1200 caanche « chute des dés » (J. BODEL, Jeu St Nicolas, éd. A. Henry, 853). Substantivation du lat. cadentia, part. prés. plur. neutre de cadere « tomber » qui s'employait aussi en lat. class. dans le vocab. du jeu en parlant de l'osselet (CICÉRON, Fin. 3, 54 ds TLL s.v., 21, 17). Fréq. abs. littér. :5 000. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 3 597, b) 5 660; XXe s. : a) 6 933, b) 10 993. Bbg. CASSAGNAU (M.). Vox media. Vie Lang. 1969, p. 433. — RAT (M.). Risquer de, avoir les chances de. Déf. Lang. Fr. 1969, n° 47, pp. 6-8.
chance [ʃɑ̃s] n. f.
ÉTYM. V. 1175, chaance; caanche, 1200, « manière dont tombent les dés »; du lat. pop. cadentia, plur. neutre du p. prés. de cadere « tomber ». → Choir; cadence.
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1 Vx. Façon dont tombent les dés. — ☑ Loc. Donner la chance : jeter les dés le premier; fig., avoir l'initiative de quelque chose. — ☑ Rompre la chance : faire manquer une affaire.
2 (XIIIe). Mod. (littér. ou style soutenu). Manière (heureuse ou malheureuse) dont les choses, les événements se produisent. ⇒ Aléa, fortune, hasard, sort. || La chance des armes. || Nous en courrons la chance. — Cour. || Souhaiter bonne chance, et, absolt, Bonne chance ! — La bonne chance. || Une heureuse chance. || La mauvaise chance. || Faire cesser la mauvaise chance. || La chance m'est favorable. || Mettre la chance de son côté pour réussir. ⇒ Atout (mettre les atouts dans son jeu).
♦ ☑ Loc. La chance a tourné : les choses ont changé.
1 Que si d'un sort affreux la maligne inconstance
Vient par un coup fatal faire tourner la chance (…)
Boileau, Satires, IV.
2 La chance peut tourner. Patience et persévérance peuvent beaucoup.
Louis Madelin, Hist. du Consulat et de l'Empire, L'avènement de l'Empire, XVIII, p. 232.
♦ Un concours de chances favorables (→ Circonstance, condition, conjoncture).
3 Tu dis : « Nous étions nés l'un pour l'autre ». Mais pense à ce qu'il dut falloir de chances, de concours, de causes, de coïncidences pour réaliser ça, simplement, notre amour !
Paul Géraldy, Toi et Moi, p. 36.
3.1 Par une heureuse chance, nous tombons à Sibut le jour du marché mensuel.
Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 718.
3 (XVIIIe). Cour. || Chances : possibilités de se produire par hasard. ⇒ Éventualité, possibilité, probabilité. || Calculer ses chances. || Les chances pour qu'un événement se produise. || Il y a beaucoup de chances pour… il y a des chances (fam. Y a des chances), c'est probable. || Il y a des chances qu'il réussisse; il y a peu de chances qu'il y arrive. || Vous avez quelques chances de réussir. || Les chances sont favorables, défavorables (⇒ 2. Auspice). — Occasionnellement. || Saisir les chances → ci-dessous (cit. 5).
4 Tous, tant que nous sommes, nous n'avons à nous que la minute présente; celle qui la suit est à Dieu : il y a toujours deux chances pour ne pas retrouver l'ami que l'on quitte : notre mort ou la sienne. Combien d'hommes n'ont jamais remonté l'escalier qu'ils avaient descendu !
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, I, VII.
5 La guerre et le jeu enseignent ces calculs de probabilités qui font saisir les chances sans s'user à les attendre toutes.
France, le Jardin d'Épicure, p. 67.
6 Il y a des chances pour qu'il en soit ainsi et vous voilà à peu près fixés sur un des côtés de la question.
Courteline, Petit historique de Boubouroche, p. 9.
7 Quant à la jeunesse, — excusez-moi, — toutes les chances de se tromper sont nécessairement avec elle.
Valéry, Mon Faust, p. 74.
7.1 Ah ! pour ça, monsieur le maire, riait bêtement Parju, y a des chances.
A. Allais, l'Affaire Blaireau, p. 24.
4 (La chance). Résultat heureux, heureux hasard, fortune favorable. ⇒ Aubaine, bonheur, étoile, fortune (bonne fortune), heur (vx), veine. || Avoir de la chance (cf. Retomber sur ses pieds; jouer de bonheur; avoir le vent dans ses voiles). || Avoir beaucoup de chance. || Avoir la chance de… || Il a eu une sacrée chance de s'en sortir. ☑ Avoir une chance de cocu, une chance extraordinaire. || Il aura de la chance s'il s'en tire. || La chance lui sourit. → Aimer (être aimé des dieux), coiffer (il est né coiffé; les fées ont soufflé sur lui), étoile (être né sous une bonne étoile), favorisé… — ☑ Loc. Porter chance. ⇒ Bonheur (porter bonheur); porte-chance. || Avoir la chance de réussir. || Il a eu de la chance (cf. Il est bien tombé). || Il n'a pas de chance, et, absolt, pas de chance ! manque de chance ! (fam. de bol, de pot). — ☑ Coup de chance : chance, occasion heureuse et inattendue. || La chance de qqn, sa chance. — ☑ Iron. Voilà bien ma chance ! (ma malchance).
8 Ce qui tendrait à prouver qu'il n'y a que les choses les plus notoirement folles qui viennent à bonne fin, qu'il y a une chance pour les fous, un Dieu pour les téméraires.
Loti, Aziyadé, III, L, p. 149.
9 (…) vous avez de la chance de n'avoir aucun antécédent pathologique du côté respiratoire !
Martin du Gard, les Thibault, t. IX, p. 110.
10 Le bonheur et la chance ont une merveilleuse acoustique (…)
Giraudoux, Bella, VII, p. 165.
11 La chance (…) En ce temps-là, on l'a beaucoup attendue, avec Schborn, en courant de rue en rue. Et le soir venu, on l'attendait encore, fidèles (…) On guettait. Le petit brin de veine. Que ça se décide. Ça ne venait pas.
Louis Calaferte, Partage des vivants, p. 79.
♦ Une chance : une occasion favorable. || Guetter une chance de… || C'est une chance, c'est encore une chance.
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CONTR. Déveine, guignon, malchance.
Encyclopédie Universelle. 2012.