Akademik

héros

héros [ 'ero ] n. m.
• 1361; lat. heros, du gr.
1Myth. antiq. demi-dieu. Les héros de la mythologie grecque, romaine. Hercule, héros vainqueur d'Antée. Apothéose des héros. Les dieux et les héros dans l'art antique. Par anal. Personnage légendaire auquel on prête un courage et des exploits remarquables. Siegfried, héros de la tradition germanique.
2(1550) Celui qui se distingue par ses exploits ou un courage extraordinaire (dans le domaine des armes). brave. REM. Pour une femme, on emploie normalement héroïne. « Les héros ont leur accès de crainte, les poltrons des instants de bravoure » (Stendhal). Il, elle s'est conduit(e) en héros. Combattants qui meurent, qui tombent en héros ( héroïquement) . Héros de la Résistance. Héros de l'Union soviétique, haute distinction militaire décernée de 1934 à 1991. — Appos. « Le peuple héros » (Michelet).
3Homme digne de l'estime publique, de la gloire, par sa force de caractère ( héroïsme), son génie, son dévouement total à une cause, une œuvre. Pierre le Grand, héros national russe. Les héros de la foi, de la science. « Ces héros du travail, dont l'obstination est sans limite » (Alain). Les champions sont les héros modernes. Loc. prov. Il n'y a pas de héros pour son valet de chambre : ceux qui vivent dans l'intimité des grands hommes en connaissent les faiblesses, les petitesses.
4(XVIIe) Personnage principal (d'une œuvre). aussi 1. héroïne. Héros de tragédie, de roman. Le héros d'un film. Héros éponyme. « Les héros de roman naissent du mariage que le romancier contracte avec la réalité » (F. Mauriac). Le héros romantique. Héros traditionnel et antihéros.
Par ext. Le héros d'une aventure, celui à qui elle est arrivée, qui en a été le principal acteur. ⇒ protagoniste. Le triste héros de ce fait divers. Le héros du jour, celui qui accapare l'attention du moment, qui occupe le premier rang de l'actualité.
⊗ CONTR. Bravache, lâche. ⊗ HOM. Héraut, héro (2. héroïne).

héros
n. m.
d1./d MYTH Demi-dieu. Achille, Hercule sont des héros.
d2./d Celui qui s'est rendu célèbre par son courage et son succès dans les faits d'armes. Soundiata Keita et Tchaka sont des héros africains.
d3./d Celui qui se distingue par sa grandeur d'âme exceptionnelle, son dévouement total, etc. Les héros de la science.
d4./d Personnage principal d'une oeuvre littéraire, dramatique ou cinématographique. Le héros d'un film.
Par ext. Le héros d'une aventure, celui à qui elle est arrivée.
Le héros de la fête, en l'honneur de qui elle est donnée.

HÉROS, HÉROÏNE1, subst.
I. — Héros, subst. masc.
A. — MYTH. Être fabuleux, la plupart du temps d'origine mi-divine, mi-humaine, divinisé après sa mort. Synon. demi-dieu. Des hymnes, des traditions sacrées (...) rappelaient à tous les Grecs les hauts faits du héros de Tirynthe, du fameux fils de Jupiter et d'Alcmène, (...) le grand Hercule, le héros des douze travaux, celui-là même à qui les Grecs attribuaient tant d'actions merveilleuses, et qu'ils honoraient sous les formes d'un héros, vêtu de la peau du lion et armé de la massue (DUPUIS, Orig. cultes, 1796, p. 121). Mes guides m'entraînent vers les sculptures du temple de Thésée (...). Si le héros divinisé, plane du haut de l'Olympe immobile, les autres personnages — simples mortels — ont les mouvements les plus animés (MICHELET, Chemins Europe, 1874, p. 181) :
1. Puis, les monstres sortirent avec tumulte de son sein [de la terre], et un peu plus tard les héros. Nul n'ignore que le dernier de ces races évanouies, instruit sur le penchant des collines de Thessalie, naquit de Thétis blanchissante. Ce demi-dieu n'oubliait pas de venir implorer dans les difficultés la déesse dont il avait hérité le courage...
MAURRAS, Chemin Paradis, 1894, p. 204.
B. — Personnage légendaire auquel la tradition attribue des exploits prodigieux. Les étudiants de Gœttingue qui étaient là, pensaient aux héros des Niebelungen, aux personnages des légendes du Rhin (PÉLADAN, Vice supr., 1884, p. 155). Les légendes irlandaises aiment à opposer Ossian, chantant les héros, les guerres, les chasses magnifiques, etc., à saint Patrice et à son troupeau psalmodiant (RENAN, Avenir sc., 1890, p. 520). La longue épopée des héros d'autrefois, contée en d'innombrables chansons de geste (FARAL, Vie temps st Louis, 1942, p. 114).
II. — Héros, héroïne1, subst.
A. — 1. Homme, femme qui incarne dans un certain système de valeurs un idéal de force d'âme et d'élévation morale. Il admirait de loin l'ascète ou le héros, tous ceux dont la grandeur ou le sublime éveillait en lui une sourde résonance vaguement douloureuse (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 139). Non, dit-il, des pacifistes, ce sont des héros. Ce sont des gens qui sacrifient leurs intérêts à une idée qu'ils ont dans la tête (ROY, Bonheur occas., 1945, p. 56) :
2. Chez cette silencieuse, si frêle, déjà l'héroïne se réveillait. Elle ne craignait rien, elle avait une âme ferme, invincible. Dans sa douleur, elle ne songeait plus qu'à ravoir le corps de son mari, pour l'ensevelir.
ZOLA, Débâcle, 1892, p. 367.
En partic.
Homme, femme qui fait preuve, dans certaines circonstances, d'une grande abnégation :
3. Les héros de la science sont ceux qui, capables des vues les plus élevées, ont pu se défendre toute pensée philosophique anticipée, et se résigner à n'être que d'humbles monographes, quand tous les instincts de leur nature les eussent portés à voler aux hauts sommets.
RENAN, Avenir sc., 1890, p. 235.
Combattant(e) remarquable par sa bravoure et son sens du sacrifice. Glorieux, vaillant héros; héros de la Grande Armée, de la Révolution; héroïnes de la Résistance; mourir, se comporter en héros. J'eus l'idée d'une très originale thèse de doctorat. Il s'agissait d'établir un parallèle entre l'héroïne berbère du VIIe siècle, qui lutta contre l'envahisseur arabe, la Kahena, et l'héroïne française qui lutta contre l'envahisseur anglais, Jeanne d'Arc (BENOIT, Atlant., 1919, p. 141). Resté seul avec une poignée de fidèles, il se défendit en héros (GROUSSET, Croisades, 1939, p. 4). Je ne mets en scène ni les maquisards ni les saboteurs des usines (entre autres exemples), qui furent parmi les plus purs et les plus désintéressés héros de la Résistance (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 5).
P. appos. À la vigueur rapide dont ils étaient servis, à la mobilité parfaite dont les bataillons les facilitaient en s'ouvrant et se refermant, on eût pu reconnaître non seulement le peuple héros, mais le peuple militaire (MICHELET, Hist. de la Révol. fr., Paris, Gallimard, t. 2, 1952 [1853], p. 608).
Loc. [Avec le subst. masc.]
Loc. proverbiale. Il n'y a point de héros pour son valet de chambre. Les proches des grands hommes, sont souvent témoins de leurs faiblesses et de leurs défauts. (Ds LITTRÉ, DG, ROB.).
Être le héros de qqn (fam.). Incarner toutes les vertus aux yeux de quelqu'un; être l'objet d'une admiration excessive de la part de quelqu'un. Vous êtes son héros. C'est son héros, il ne cesse de le vanter (Ac. 1835-1935).
2. P. ext.
a) Homme, femme qui porte un trait de caractère à son plus haut degré. Synon. champion (fam.), modèle, parangon de (qqc.). C'est un héros de sagesse, de désintéressement, de constance (Ac. 1835-1935). Ayant à écrire sur Napoléon, je voudrais pouvoir montrer parfaitement cette misère des contemporains du plus grand des hommes, qui eussent dû, à défaut de compréhension supérieure, être des héros de dévouement et d'obéissance, des héros d'admiration (BLOY, Journal, 1903, p. 180).
b) [Avec une intention plais.] Homme, femme qui se distingue dans une activité particulière. On m'accabla de félicitations. Je devins le héros de l'enquête, le champion du travail national (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 239). Elle était, au su de l'univers, une héroïne de l'épargne (DUHAMEL, Notaire Havre, 1933, p. 113).
En partic.
Héros de la fête. Celui en l'honneur de qui la fête est donnée; celui qui y brille. Le suisse et le bedeau se trouvèrent à leur poste, et furent moins étonnés de la magnificence du pourboire en apprenant que le héros de la fête était un marchand de vin (JOUY, Hermite, t. 2, 1812, p. 288).
Héros du jour. Celui qui se trouve sous les feux de l'actualité, qui fait momentanément l'objet de l'attention, de la considération générales. Tout a été dit sur le travail long, inspiré du véritable héros du jour, ce peintre (MALLARMÉ, Dern. mode, 1874, p. 735).
B. — 1. Principal personnage masculin ou féminin d'une œuvre artistique. Héros, héroïne d'un conte, d'un film, d'une pièce de théâtre. Les rêves de modistes parfumées au musc s'attachant à tous les héros des romans d'aventures (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Soir, 1889, p. 1141). Dans Adrienne Mesurat, l'héroïne fait tomber son père dans l'escalier, où elle passe ensuite une partie de la nuit (GREEN, Journal, 1933, p. 137) :
4. Les trois héros [de Volupté, Mademoiselle de Maupin, Le Rouge et le Noir] en sont presque surhumains : le premier, Amaury, par son inépuisable effusion mystique; le second, d'Albert, par son infatigable élan vers le Beau; le troisième, Julien, par l'intarissable jet de sa volonté.
BOURGET, Essais psychol., 1883, p. 104.
Au fig., fam. Héros, héroïne de roman. Homme, femme auxquels arrivent des aventures extraordinaires qui semblent sorties de l'imagination d'un romancier. — Christian (...) : Il me faudrait de l'éloquence! — Cyrano (...) : Je t'en prête! Toi, du charme physique et vainqueur, prête-m'en : Et faisons à nous deux un héros de roman! (ROSTAND, Cyrano, 1898, II, 10, p. 102).
En partic. [Suivi d'un déterm.] Personnage masculin ou féminin propre à un auteur, p. ext., à un genre, à une époque. Héros cornélien; héroïnes balzaciennes, le héros romantique. Tous les héros de Dostoïevsky s'interrogent sur le sens de la vie. C'est en cela qu'ils sont modernes (CAMUS, Sisyphe, 1942, p. 142). V. brave ex. 12.
2. Homme, femme, qui joue le rôle principal (dans un événement). Héros, héroïne de l'aventure; héros, héroïne d'un fait divers. Vous souvenez-vous d'un fait divers qu'on a lu dans les journaux (...), l'histoire du club des suicidées? (...) Je pourrais vous réciter les noms des héroïnes de cette anecdote (DANIEL-ROPS, Mort, 1934, p. 320). Ces collégiens ignorent tout du père Ébé en dehors de sa classe, de son trajet quotidien entre son domicile et le lycée (...). Ils en font le héros de toutes les aventures possibles (THIBAUDET, Réfl. litt., 1936, p. 169). Toute une société desséchée par l'intelligence, avait besoin de recommencer à croire à l'amour, et (...) cet homme déjà vieillissant et qu'on n'avait jamais aimé (...) devint le héros de ce retour à la fidélité et à l'amour (GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1952, p. 71).
Prononc. : [] init. asp., [] init. non asp. Homon. héraut, héroïne (méd.). Au masc., aspiration non étymol. pour empêcher la liaison et éviter le calembour : les héros/les zéros. L'aspiration remonte à l'apparition du mot zéro dans la lang. (XVe s.). Elle n'a pas lieu d'exister dans les autres mots de la famille. Étymol. et Hist. I. 1. 1372-74 mythol. heroes (ORESME, Politiques, éd. A. D. Menut, p. 372a); 2. 1555 herôs « homme de grande valeur, digne d'estime » (RONSARD, Hymnes, Prière à la Fortune, éd. P. Laumonier, t. 8, p. 109, 157); 3. 1651 « personnage principal dans une œuvre littéraire » (SCARRON, Roman Comique, éd. E. Magne, p. 12). II. 1. 1554 « femme qui est le principal personnage dans une œuvre littéraire » (RONSARD, Bocage, t. 6, p. 28, 23); 2. 1578 « femme qui s'est distinguée par une action d'éclat (ici cont. mythol.) » (ID., Sonnets pour Hélène, 47, t. 17, p. 237, 23). I empr. au lat. heros « demi-dieu » et « homme de grande valeur », du gr. « demi-dieu », « tout homme élevé au rang de demi-dieu ». II empr. au lat. , heroina « demi-déesse, héroïne », du gr. « id. ».
STAT. — Fréq. abs. littér. Héros : 4 657. Héroïne : 495. Fréq. rel. littér. Héros : XIXe s. : a) 8 730, b) 5 818; XXe s. : a) 5 505, b) 5 926. Héroïne : XIXe s. : a) 662, b) 563; XXe s. : a) 728, b) 799.
BBG. — BONNAUD-LAMOTTE (D.). Contribution des programmes informat. de dép. et d'analyse à la lexicol. de la crit. littér. marxiste. Trav. Lexicom. Lexicol. pol. 1977, n° 2, p. 37. - DELB. Matér. 1880, p. 164. - HAMON (P.). Analyse du récit. Fr. mod. 1974, t. 42, p. 144.

héros ['eʀo] n. m.
ÉTYM. 1361; lat. heros, grec hêrôs, d'abord « maître, chef » puis « demi-dieu ».
1 Didact. Demi-dieu; homme célèbre divinisé (dans l'Antiquité). Demi-dieu. || Hercule, héros vainqueur d'Antée. || Ajax, héros grec chanté par Sophocle. || Léonidas, Lycurgue et beaucoup d'autres hommes illustres furent élevés après leur mort au rang de héros. || Apothéose des héros dans les champs Élysées. || Héros éponyme d'une cité. || Les dieux et les héros dans l'art antique (→ Attache, cit. 9).(Mil. XVIIe). Par anal. Personnage légendaire auquel on prête un courage et des exploits remarquables (→ Assemblage, cit. 9). || Les géants (cit. 3), héros bibliques. || Siegfried, héros de la tradition germanique (→ Aurochs, cit. 1).Fig. || Une race de héros (→ Entremise, cit. 5).
1 (…) cette ville (Troie),
Si superbe en remparts, en héros si fertile (…)
Racine, Andromaque, I, 2.
2 Ce héros (Achille), si terrible au reste des humains (…)
Racine, Iphigénie, IV, 1.
3 Quand tu me dépeignais ce héros intrépide (Thésée).
Racine, Phèdre, I, 1.
4 (…) qu'on leur apprenne (aux enfants) à chanter les louanges des héros qui ont été aimés des dieux, qui ont fait des actions généreuses pour leurs patries, et qui ont fait éclater leur courage dans les combats (…)
Fénelon, Télémaque, XI.
5 Dans l'Élysée des anciens on ne trouve que des héros et des hommes qui avaient été heureux ou éclatants dans le monde (…)
Chateaubriand, le Génie du christianisme, I, VI, VI.
6 Le dieu de la tribu était ordinairement de même nature que celui de la phratrie ou celui de la famille. C'était un homme divinisé, un héros. De lui la tribu tirait son nom : aussi les Grecs l'appelaient-ils le héros éponyme. Il avait son jour de fête annuelle.
Fustel de Coulanges, la Cité antique, III, I.
6.1 Au cours de son trajet organisateur, le héros des mythes préagricoles, en Amérique ou dans l'Orient, ne se borne pas seulement à donner un nom aux rivières et aux montagnes : il tue pour les fixer les monstres qui sont rivières et montagnes.
A. Leroi-Gourhan, le Geste et la Parole, t. II, p. 179.
2 (1550). Celui qui se distingue par ses exploits (cit. 3) ou un courage extraordinaire (particulièrement dans le domaine des armes). Brave; 1. héroïne. || Qualités de héros. Héroïsme. || Hector, héros de la guerre de Troie. || Les héros fameux de l'Antiquité (→ Fer, cit. 5; franciser, cit. 2). || David, héros de l'Ancien Testament (→ Esquiver, cit. 2). || Mission civilisatrice des premiers héros (→ Enthousiasme, cit. 13). || Chant de guerre à la louange des héros (→ Bardit, cit. 1). || Combattants qui meurent, qui tombent en héros ( Héroïquement; → Garder, cit. 18.) || Héros de la Grande Armée, de la Marne, de la Résistance. || Héros de l'Union soviétique : haute distinction militaire soviétique, décernée depuis 1934. || Guynemer, Mermoz, héros de l'air ( Aviateur). || Compter (cit. 19) ses soldats pour des héros. || Célébrer, chanter (cit. 18) un glorieux (cit. 5) héros. || Avoir l'étoffe (cit. 5), le sang bouillant (cit. 4) d'un héros (→ aussi Chevronné, cit. 1; fier, cit. 21). || La morale du héros. || Il n'y a plus de héros. || Les héros sont fatigués (titre de film). || Le héros moderne, le héros type vingtième siècle (→ Milliardaire, cit. 2).
7 Quand pour vous acquérir je gagnais des batailles,
Que mon bras de Milan foudroyait les murailles,
Que je semais partout la terreur et l'effroi,
J'étais un grand héros, j'étais un digne roi (…)
Corneille, Pertharite, I, 4.
8 (…) Celui-ci, loin de tourner le dos,
Veut vendre au moins sa vie et mourir en héros.
La Fontaine, Fables, X, 13.
9 L'intrépidité est une force extraordinaire de l'âme, qui l'élève au-dessus des troubles, des désordres et des émotions que la vue des grands périls pourrait exciter en elle, et c'est par cette force que les héros se maintiennent en un état paisible, et conservent l'usage libre de leur raison dans les accidents les plus surprenants et les plus terribles.
La Rochefoucauld, Maximes, 217.
10 Il semble que le héros est d'un seul métier, qui est celui de la guerre, et que le grand homme est de tous les métiers (…) Dans la guerre, la distinction entre le héros et le grand homme est délicate : toutes les vertus militaires font l'un et l'autre. Il semble néanmoins que le premier soit jeune, entreprenant, d'une haute valeur, ferme dans les périls, intrépide; que l'autre excelle par un grand sens, par une vaste prévoyance, par une haute capacité, et par une longue expérience. Peut-être qu'Alexandre n'était qu'un héros, et que César était un grand homme.
La Bruyère, les Caractères, II, 30-31.
11 Ce n'est pas à porter la faim et la misère chez les étrangers qu'un héros attache la gloire, mais à les souffrir pour l'État; ce n'est pas à donner la mort, mais à la braver.
Vauvenargues, Maximes et réflexions, 224.
12 Un courage indompté, dans le cœur des mortels,
Fait ou les grands héros ou les grands criminels.
Voltaire, Rome sauvée, V, 3.
13 Divination merveilleuse du patriotisme ! Cet homme (Carnot) aima tant la Patrie, il eut au cœur un désir si violent de sauver la France, que, devant cette foule où les autres ne distinguaient rien, lui, par une seconde vue, il connut, sentit les héros ! Son premier regard lui donna Jourdan. Le second lui donna Hoche. Le troisième lui donna Bonaparte.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., XIII, II.
14 Les héros ont leur accès de crainte, les poltrons des instants de bravoure, et les femmes vertueuses leurs instants de faiblesse.
Stendhal, Journal, p. 16.
15 (…) où serait le mérite, si les héros n'avaient jamais peur (…)
Alphonse Daudet, Tartarin de Tarascon, III, V.
16 (…) l'ivresse de se battre, cette ivresse non raisonnée qui vient du sang vigoureux, celle qui donne aux simples le courage superbe, celle qui faisait les héros antiques.
Loti, Pêcheur d'Islande, III, I.
17 Oui, papa, nous voilà : vingt mille types qui voulaient être des héros et qui se sont rendus sans combattre en rase campagne.
Sartre, la Mort dans l'âme, p. 268.
Par apposition :
18 (…) on eût pu reconnaître (dans nos soldats) non seulement le peuple héros, mais le peuple militaire.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., XIII, VIII.
Iron. → Flatter, cit. 26; (cf. aussi Voltaire, Candide, II et III).
19 Après ce rare exploit, je veux que l'on s'apprête
À me peindre en héros un laurier sur la tête (…)
Molière, l'Étourdi, II, 8.
20 Tue Vandenesse, et ta femme tremble, et ta belle-mère tremble, et le public tremble, et tu te réhabilites, et tu publies ta passion insensée pour ta femme, et l'on te croit, et tu deviens un héros.
Balzac, le Contrat de mariage, Pl., t. III, p. 204.
21 Nous connaissons le vocabulaire. L'homme en temps de guerre s'appelle le héros. Il peut ne pas en être plus brave et fuir à toutes jambes. Mais c'est du moins un héros qui détale.
Giraudoux, La guerre de Troie n'aura pas lieu, I, 6.
Appos. (Choses). || Les villes-héros de l'Union soviétique (calque du russe).
3 Homme digne de l'estime publique, de la gloire par sa force de caractère, son génie, son dévouement total à une cause, une œuvre. Géant (fig.), grand (grand homme). || Une âme, une conduite de héros. Héroïque. || Les héros et les hommes de génie (→ Étincelle, cit. 11). || Les héros dans l'histoire (→ Embellir, cit. 4). || Les peuples, « oubliant le tyran, s'éprirent du héros » (→ Empereur, cit. 5, Hugo). || Pierre le Grand (cit. 63), héros national russe. || Se proposer un héros pour exemple (cit. 18). || Se prendre pour un héros (→ Génie, cit. 44).
22 (…) montrons dans un Prince admiré de tout l'univers (…) ce qui fait les héros, ce qui porte la gloire du monde jusqu'au comble : valeur, magnanimité, bonté naturelle, voilà pour le cœur; vivacité, pénétration, grandeur et sublimité de génie, voilà pour l'esprit (…)
Bossuet, Oraison funèbre de Louis de Bourbon.
23 Lorsque les grands hommes se laissent abattre par la longueur de leurs infortunes, ils font voir qu'ils ne les soutenaient que par la force de leur ambition, et non par celle de leur âme, et qu'à une grande vanité près, les héros sont faits comme les autres hommes.
La Rochefoucauld, Maximes, 24.
24 Il y a des héros en mal comme en bien.
La Rochefoucauld, Maximes, 185.
25 Grand homme est le genre, et héros l'espèce (…) Héros signifie une espèce de grands hommes, mais l'espèce la plus rare et la plus glorieuse. Les héros ne sont pas chose commune; on les compte; c'est une sorte de phénomène (…) Le terme de héros désignait d'abord un demi-dieu, et il lui reste encore quelque chose de cette première signification; il fait toujours concevoir quelque chose de divin (…) En revanche, les héros n'étant qu'une espèce dans le genre des grands hommes, ont par cela même un mérite exclusif et limité. Aussi, sous le rapport intellectuel et moral, et quant aux sentiments d'estime et d'affection qu'ils inspirent, sont-ils souvent inférieurs aux simples grands hommes; d'autant plus que les héros doivent beaucoup au succès, et par conséquent au hasard, ainsi qu'au tempérament.
Lafaye, Dict. des synonymes, Héros, grand homme.
26 La vie, le malheur, l'isolement, l'abandon, la pauvreté, sont des champs de bataille qui ont leurs héros; héros obscurs, plus grands parfois que les héros illustres.
Hugo, les Misérables, III, V, I.
27 Il y a encore des héros, pour qui la vie n'est vécue qu'en fonction d'une vérité qui la transcende, et dont le dévouement, par-delà la cause même qu'ils servent, atteste une valeur de portée universelle.
Daniel-Rops, Ce qui meurt…, p. 24.
27.1 Qu'est-ce qu'un héros ? Celui qui a la dernière réplique. Voit-on un héros qui ne parlerait pas avant de mourir ? Renoncer à la dernière réplique (refuser la scène) relève donc d'une morale anti-héroïque : c'est celle d'Abraham (…)
R. Barthes, Fragments d'un discours amoureux, p. 248.
Héros de la foi (→ Face, cit. 64), de la science (→ Avenue, cit. 9).
28 (…) ces héros du travail, dont l'obstination est sans limites.
Alain, Propos, Métiers, 30 avril 1921.
Héros du travail socialiste : haute distinction civile soviétique, décernée depuis 1938.
Héros de… : personne qui excelle (dans un domaine). || Descartes, héros de l'intelligence humaine (→ Dieu, cit. 26). || Les financiers (cit. 7), héros de la gourmandise.
29 Des pécheurs qu'on regardait comme des héros dans l'impiété.
Massillon, Carême, in Littré.
Un héros de fidélité, de générosité, qui pousse ces vertus à leur plus haut degré ( Modèle).Par anal. || Un héros de fourberie, de vice.Par plaisanterie :
30 J'ai chez moi un garçon qui, pour monter une rhingrave, est le plus grand génie du monde; et un autre qui, pour assembler un pourpoint, est le héros de notre temps.
Molière, le Bourgeois gentilhomme, II, 5.
Loc. prov. Il n'y a pas de héros pour son valet de chambre : ceux qui vivent dans l'intimité des grands hommes ne peuvent les considérer comme des héros, ils en connaissent trop les faiblesses, les petitesses.
4 (V. 1650). Personnage principal (d'une œuvre littéraire, dramatique, cinématographique…) 1. Héroïne. || Les héros d'Homère (→ Apothéose, cit. 3; grandir cit. 16). || Héros de Corneille (→ Difficile, cit. 20). || Un héros de tragédie (→ Façon, cit. 1). || Le comédien et son héros (→ Anéantir, cit. 14). || Héros de roman (→ Fiction, cit. 7; 1. foudre, cit. 14). || Le héros romantique (→ Fatalité, cit. 8). || Fascination (cit. 7) exercée sur les foules par les héros de cinéma.
31 (…) c'est lui qui est le héros de ma tragédie.
Racine, Bajazet, 2e préface.
32 (…) au lieu que d'Urfé, dans son Astrée, de bergers très frivoles avait fait des héros de roman considérables, ces auteurs, au contraire, des héros les plus considérables de l'histoire firent des bergers très frivoles (…)
Boileau, Disc. sur le dialogue des héros de roman.
33 Les héros de Corneille étalent des maximes fastueuses et parlent magnifiquement d'eux-mêmes (…)
Vauvenargues, Maximes et réflexions, 515.
34 Les héros de romans naissent du mariage que le romancier contracte avec la réalité.
F. Mauriac, le Romancier et ses personnages, p. 96.
(1671). Fig. Un héros de roman : une personne qui a connu des aventures extraordinaires.
35 Le comte de Guiche est à la cour, tout seul de son air et de sa manière, un héros de roman, qui ne ressemble point au reste des hommes (…)
Mme de Sévigné, 209, 7 oct. 1671.
36 (…) que ce qu'on avait pris pour un vrai héros de roman n'est, au bout du compte, qu'un bourgeois prosaïque qui met des pantoufles et une robe de chambre !
Th. Gautier, Mlle de Maupin, X.
Par ext. || Le héros d'une aventure, celui à qui elle est arrivée, qui en a été le principal acteur. || Le héros d'une folle équipée. || Le triste héros de ce fait divers.
37 À propos de voleurs, plaçons ici une histoire dont nous avons bien failli être les héros.
Th. Gautier, Voyage en Espagne, p. 96.
(1734). Le héros de la fête, le personnage en l'honneur duquel elle se donne, ou, encore, celui qui s'y montre le plus brillant.
38 (…) et moi, jeune et jovial encore, je puis dire qu'à ces soupers j'étais le héros de la table. J'y avais la verve de la folie.
Marmontel, Mémoires, III.
(XIXe). Fam. Le héros du jour, celui qui accapare l'attention du moment, qui occupe le premier rang de l'actualité.
39 (…) l'on se demande comment le héros du jour (le triomphateur romain) y pouvait passer (dans cette Voie sacrée) sur un char attelé de quatre chevaux, et la foule s'y presser pour l'acclamer !
A. François-Poncet, Réception de J. Carcopino à l'Acad. franç., 16 nov. 1956.
Fig. || Être le héros de qqn, l'objet de sa très vive admiration. || J.-J. Rousseau, héros de Mme de La Tour (→ Factice, cit. 7). || C'est son héros, il en est fou (cit. 31).
40 (…) même si cela finissait par un combat où lui, Léniot, serait certainement vaincu, il garderait l'honneur très grand de s'être tout seul élevé contre le héros du collège (…) « et à propos d'une femme encore ».
Valery Larbaud, Fermina Marquez, VIII.
CONTR. Bravache, lâche. Antihéros.
COMP. Antihéros, super-héros.
HOM. Héraut, héro (V. 2. Héroïne).

Encyclopédie Universelle. 2012.