romance [ rɔmɑ̃s ] n. f.
• 1719; « poème espagnol » 1599 n. m. ou f.; esp. romance, du provenç. romans → 1. roman
♦ Hist. littér. Aux XVIIIe et XIXe s., Pièce poétique simple, assez populaire, sur un sujet sentimental et attendrissant; plus cour. Musique sur laquelle une telle pièce est chantée. ⇒ cantilène, 1. chant. La romance de Chérubin, dans le « Mariage de Figaro ». — Pièce instrumentale romantique, de caractère mélodique.
♢ Cour. Chanson sentimentale. La romance napolitaine. Pousser la romance.
● romance nom masculin (espagnol romance) Poème en vers de huit syllabes dont les vers pairs sont assonancés, et les impairs, libres. ● romance nom féminin (de romance) Ancienne chanson populaire espagnole de caractère narratif. Mélodie accompagnée, d'un style simple et touchant. (On doit la plus célèbre, Plaisir d'amour [éditée en 1785], à Jean-Paul Martini.) Pièce instrumentale inspirée de la mélodie du même nom, de caractère intimiste et sentimental (Beethoven, Schubert, Brahms). Chanson à couplets dont les paroles, accompagnées d'une musique facile, ont un caractère tendre et sentimental. ● romance (citations) nom féminin (de romance) Guillaume Apollinaire de Kostrowitzky, dit Guillaume Apollinaire Rome 1880-Paris 1918 Moi qui sais des lais pour les reines Les complaintes de mes années Des hymnes d'esclave aux murènes La romance du mal-aimé Et des chansons pour les sirènes. Alcools, la Chanson du Mal-Aimé Gallimard Gérard Labrunie, dit Gérard de Nerval Paris 1808-Paris 1855 La connais-tu, Dafné, cette ancienne romance. Les Chimères, Delfica ● romance (synonymes) nom féminin (de romance) Mélodie accompagnée, d'un style simple et touchant.
Synonymes :
- antienne
- refrain
- rengaine
- scie (familier)
romance
n. f.
d1./d LITTER Poème de forme très simple sur un sujet sentimental, destiné à être chanté, en vogue en France à la fin du XVIIIe s. et au début du XIXe s.
|| Air sur lequel on le chantait.
d2./d Mod. Chanson sentimentale.
⇒ROMANCE, subst. fém. et adj.
A. — HIST. LITTÉR. Poème espagnol en vers généralement octosyllabiques (les vers pairs étant assonancés et les impairs libres) et qui traite de sujets historiques, épiques, amoureux, etc. [Corneille] ne nous a fait connaître qu'une très-faible partie des dicts, faits et gestes du Cid contenus dans les quatre ou cinq premières romances (BALZAC, Œuvres div., t. 1, 1830, p. 401):
• 1. ... on voit surgir l'épopée espagnole dans ces fameuses Romances, qui forment pour l'Espagne une gloire à part, (...) où sont enregistrées toutes les luttes et les beautés de son histoire (...) et qui ont réfléchi (...) l'élégance et la galanterie des Maures, sans jamais perdre ce sévère caractère catholique...
MONTALEMBERT, Ste Élisabeth, 1836, p. LXXX.
Rem. Romance s'emploie aussi au masc. dans ce sens: Il y a un romance fameux du romancero espagnol, où un chevalier (...) cherche refuge sous un chêne. « Sur la branche la plus haute, il vit que se tenait une petite infante » (MONTHERL., Pte Inf. Castille, 1929, p. 604).
B. — 1. LITT., MUS. Pièce de vers, d'inspiration populaire, naïve, qui traite de sujets élégiaques, amoureux et qui peut être mise en musique. Ancienne romance. Te rappelles-tu les derniers vers de la romance de Zoé; (...) les voici: Puisque je trouve dans mon ame Et l'innocence et la vertu, Le bonheur peut m'être rendu (GENLIS, Chev. Cygne, t. 1, 1795, p. 106). V. luth ex. 1:
• 2. ... Goethe nous conduit en Asie, par une romance pleine de charmes, La Bayadère (...). Zelter (...) a mis sur cette romance un air tour à tour voluptueux et solennel qui s'accorde singulièrement bien avec les paroles. (...) on se croit au milieu de l'Inde et de ses merveilles; et qu'on ne dise pas qu'une romance est un poëme trop court pour produire un tel effet.
STAËL, Allemagne, t. 2, 1810, pp. 185-187.
— P. méton. Air sur lequel (peut) se chante(r) cette composition poétique. Mon père a fait sur son absence une romance très-remarquable comme musique (...): Octave, de te retrouver Ne reste-t-il plus d'espérance? C'est le seul morceau de musique qui me soit resté de lui (SAND, Hist. vie, t. 2, 1855, p. 85). Il (...) essaya quelques vieux airs et joua le Troubadour et l'antique romance du Croisé (...) les vieilles romances d'amour, de petits airs gais, mais toujours de l'amour (ERCKM.-CHATR., Ami Fritz, 1864, p. 93).
2. MUSIQUE
a) Courte pièce vocale d'un style assez élevé, généralement divisée en couplets et refrains, et portant sur des sujets tendres, mélancoliques. Paroles de(s) romance(s). Dans un salon agréablement décoré, une jeune personne (...) prenait sa leçon de musique, et chantait d'une voix douce, en s'accompagnant sur le piano, la romance du beau pays de l'Ibérie (JOUY, Hermite, t. 4, 1813, p. 295). Martini (...). Compositeur de plusieurs opéras (...) est un de ceux qui ont créé le genre romance. Celle ayant pour titre Plaisir d'amour a popularisé son nom (ROUGNON 1935, p. 347).
b) Parfois péj. Chanson populaire, d'un caractère généralement sentimental, émouvant (jusqu'à l'excès). Romance plaintive, populaire, sentimentale; petite romance. Les romances d'amour à l'usage des ouvrières pauvres dont la vertu est en péril, et qui ont besoin des consolations de la musique (BLOY, Femme pauvre, 1897, p. 151). Les bras tendus dans des gestes emphatiques et maladroits, il chanta d'une voix forte une romance patriotique (MOSELLY, Terres lorr., 1907, p. 137).
— Pop., iron. Pousser la romance. V. pousser V B 2 ex. de Camus.
c) Pièce instrumentale assez courte, de caractère mélodique. Romance en fa majeur pour violon et orchestre [de Beethoven] (PROD'HOMME, Symph. Beethoven, 1921, p. 174). On croit généralement que la forme-type de l'Andante est celle de la « Romance sans Paroles », composée de deux Expositions d'un premier thème, séparées par un milieu qui occupe la même place que dans le Trio ou le Menuet (DUPRÉ, Improvis. orgue, 1925, p. 115).
C. — P. anal. Ce qui rappelle une romance par sa douce musicalité. Jamais sous cette voûte immense, ténébreuse, L'oiseau n'a soupiré sa romance amoureuse (BAOUR-LORMIAN, Veillées, 1827, p. 275). Tous ces braves gens qui n'admirent la nature que passés les poteaux frontières et trouvent aux omelettes italiennes je ne sais quelle romance dans la friture (TOULET, Notes art, 1920, p. 101).
— P. iron., arg. Piquer une romance. Ronfler, dormir. On a bien pioncé. (...) on a piqué une romance (...). Heureusement qu'la dame-là nous a réveillés en criant sur le théâtre comme une perdue (G. CHEPFER, Textes et chansons, La Marraine du poilu de Saizerais, 1983 [1917], p. 145).
D. — Au fig., gén. iron., péj.
1. Ce qui évoque une romance par une sentimentalité souvent excessive, une joliesse facile, un aspect désuet. Cinquante générations de notre pays (...) ont subi cette formation. Il n'y a pas à appeler cela une vieillerie, ou une sombre romance (BARRÈS, Cahiers, t. 5, 1906, p. 56). Yves se faisait de cet amour des représentations simples et précises; il imaginait des regards de langueur, des baisers furtifs, des mains longuement pressées, toute une romance qu'il méprisait (MAURIAC, Myst. Frontenac, 1933, p. 67).
— [Peut-être p. allus. à Chérubin chantant une romance à la Comtesse Almaviva dans Le Mariage de Figaro, II, 4] Chanter la romance (à Madame), roucouler sa romance. Courtiser une femme, lui débiter des propos galants, etc. Il se coucha à ses genoux et lui roucoula sa romance favorite, à savoir: qu'elle était charmante, pâle comme la lune, douce comme un mouton; mais qu'il l'aimait surtout à cause des beautés de son âme (MURGER, Scènes vie boh., 1851, p. 255). L'amour doit être un rêve voluptueux, une parole troublante, un désir aigu, (...) pas plus... Ce qui m'a rendu implacable envers tous ceux qui sont venus me chanter la romance à Madame, c'est que le mâle, en eux, aimait la femelle en moi (PÉLADAN, Vice supr., 1884, p. 73).
— En loc. adj. De romance. Qui rappelle la romance par son penchant (un peu trop marqué) à l'amour, à la sentimentalité. Synon. à l'eau de rose. Un gendre de romance, un chérubin qui eût enchanté l'amour conjugal par son art savant de dire tendrement les choses (AYMÉ, Bœuf cland., 1939, p. 28). Ce patriotisme de romance sentimental, voire pleurnichard, et (...) plein de jactance qui fait rigoler même les enfants de troupe (L'Œuvre, 28 févr. 1941).
— Empl. adj. Qui est très/trop sentimental, mièvre, suranné. Oui!... c'est bête!... c'est vieux jeu!... c'est romance!... vous vous moquez de moi n'est-ce pas? (GYP, Passionn., 1891, p. 268). Il est plus facile (...) de sentir le côté joli, romance, d'une phrase bien enjolivée, que la valeur d'une idée originale (LÉAUTAUD, Théâtre M. Boissard, 1943, p. 43).
2. Fam., vieilli
a) Discours inlassablement répété, discussion indéfiniment reprise. Synon. antienne, chanson, couplet2, refrain, rengaine, scie. J'y vais de ma petite romance. — Patron, j'y dis, je suis pas un mauvais diable, chacun sa chance sous le soleil. Je demande pas de soupe pour rien (GIONO, Baumugnes, 1929, p. 62). Te fatigue pas... On connaît la romance... Trop jeune. Ça ne prend plus... Fini de nous empaumer (AYMÉ, Vogue, 1944, p. 131).
♦ Faire romance. Susciter des discussions sans fin. Elle ne s'est convertie au catholicisme que pour son mariage avec Barrel. Même que c'était cela qui avait fait romance dans ce mariage (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 21).
b) Phénomène qui se reproduit régulièrement, au risque de lasser. On nous augmente le picon (...). Ça va faire, pour les clients, quatre sous par verre. Et l'anisette, même romance (PAGNOL, Fanny, 1932, I, 1er tabl., 2, p. 46).
Rem. gén. Pour langue romance, v. roman2.
REM. 1. Romancer, verbe trans., rare. Chanter une romance. Je ne vous dirai donc point (...): « Je m'appelle Ruy Blas et je suis garçon de café. » Encore moins vous romancerai-je la sentimentale romance de jeune fille: « Je m'appelle Mignon » (BERNANOS, Lettres inéd., 1904, p. 1723). Part. passé en empl. adj. [La comtesse] se mit à perler de petits rires fins, romancés (D'ESPARBÈS, Dern. lys, 1898, p. 74). 2. Romancier, -ière, subst. Chanteur, chanteuse spécialisé(e) dans la romance. Les artistes de café-concert se spécialisèrent dans des genres multiples: (...) parmi les femmes, les chanteuses réalistes, les « romancières » (Mme Duparc qui chante Les écrevisses) (Hist. spect., 1965, p. 1545). 3. Romancine, subst. fém. a) Petite romance. Il suffisait de lui chanter bien doucement (...) une chanson plaisante, (...) je commençai à basse voix ma romancine: Gente pastourelle, Viens, ton pastoureau, T'appelle (FABRE, Chevrier, 1867, p. 53). b) Au fig., vx. Plainte, réprimande. Giton (...) m'accusa, non sans âpreté, de mener une vie scandaleuse. À l'entendre, le domestique tout entier se plaignait avec force de mes comportements. (...) Je conclus de la romancine qu'il était fort au courant de mes affaires (PÉTRONE, Le Satyricon, trad. par L. Tailhade, 1913, p. 296).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1718. Étymol. et Hist. 1. 1599 subst. fém. « vieille chanson espagnole » (BRANTÔME, Rodomontades esp. ds Œuvres, éd. L. Lalanne, t. 7, p. 162); 1606 subst. masc. « composition poétique espagnole en vers octosyllabiques dont les vers pairs sont assonancés et les impairs libres » (NICOT, s.v. garite); 2. 1719 « chanson naïve et sentimentale » (N. GUEUDEVILLE, trad. des Comédies de Plaute, Le Curculion, t. 3, pp. 31-32 ds QUEM. DDL t. 7); 1768 « id. » (ROUSSEAU); 3. 1870 « court morceau instrumental sur un motif gracieux et chantant » (LITTRÉ: Mendelssohn a composé des romances sans paroles); 4. 1883 arg. piquer une romance « dormir » (FUSTIER, Suppl. dict. Delvau, p. 541); 5. 1929 « propos couramment répétés » (GIONO, loc. cit.). Empr. à l'esp. romance, att. au sens 1 dep. la 1re moit. du XVe s. (marqués de SANTILLANA ds G. BLEIBERG et J. MARÍAS, Dicc. de lit. esp., Madrid, 1964), d'abord « roman de chevalerie, en vers ou en prose » (dep. ca 1240, BERCEO d'apr. FEW t. 10, p. 455b), prob. empr. à l'a. fr. ou à l'a. prov. romanz « œuvre narrative en langue vulgaire » (roman1; v. FEW, loc. cit. et p. 457a, note 26). Le sens 3 représente une trad. du titre all. Lieder ohne Worte, pièces pour piano de Mendelssohn. Fréq. abs. littér.:543. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 901, b) 928; XXe s.: a) 784, b) 565.
1. romance [ʀɔmɑ̃s] adj.
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HOM. 2. Romance.
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2. romance [ʀɔmɑ̃s] n. f.
ÉTYM. 1599, Brantôme, n. f.; n. m., 1606; masc. et fém. au XVIIe, empr. esp. romance, lui-même du provençal romans; du lat. pop. romanice. → 1. Roman.
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1 Hist. littér. Bref poème épique espagnol en octosyllabes, dont les vers pairs sont assonancés. ⇒ Romancero. || Le Cid, romances espagnoles imitées en romances françaises, ouvrage de Creuzé de Lesser (1814). — Par ext. || Les romances de Gongora. — REM. Les spécialistes de la littérature espagnole emploient le masc. dans ce sens.
2 (1718). Aux XVIIIe et XIXe siècles, pièce poétique simple, assez populaire, sur un sujet sentimental et « attendrissant » (Marmontel); musique sur laquelle une telle pièce est chantée. ⇒ Cantilène, chant. || Auteur de romances (paroles). ⇒ Romanciste. || « Comme une monotone et sensible romance » (→ Papier, cit. 9). || La romance de Chérubin, dans le Mariage de Figaro. || La romance moyenâgeuse à la mode pendant le romantisme (genre « troubadour »). || Les romances écossaises (→ 1. Harpe, cit. 7). ⇒ aussi Lied.
1 (…) le Roussillon (…) ses romances catalanes, si douces, à recueillir le soir de la bouche des filles du pays.
Michelet, Hist. de France, III.
♦ Mus. Chant d'amour sans élément dramatique (à la différence de la ballade). || « La romance française est presque toujours strophique, à couplets et ritournelles » (A. Hodeir). || Romances et nocturnes (spécialt). — Pièce instrumentale romantique, de caractère mélodique. || Romances pour violon et orchestre, de Beethoven. || Romances sans paroles, de Mendelssohn (Verlaine a repris ce titre pour un recueil de poèmes).
3 (Après 1750). Cour. Chanson sentimentale (→ Feuilleton, cit. 5). || La romance napolitaine. ⇒ Canzonette. || Pousser la romance. || La sentimentalité facile des romances populaires. Fig., vx. || C'est de la romance. — (En fonction d'adjectif). || Je le trouve un peu romance.
2 À la classe de musique, dans les romances qu'elle chantait, il n'était question que de petits anges aux ailes d'or, de madones, de lagunes, de gondoliers, pacifiques compositions qui lui laissaient entrevoir, à travers la niaiserie du style (…) l'attirante fantasmagorie des réalités sentimentales.
Flaubert, Mme Bovary, I, VI.
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DÉR. Romancero, romanciste.
HOM. 1. Romance.
Encyclopédie Universelle. 2012.