scrupule [ skrypyl ] n. m.
• 1375; lat. scrupulus « petite pierre pointue; embarras », de scrupus « pierre pointue »
I ♦
1 ♦ Incertitude d'une conscience exigeante au regard de la conduite à avoir ou du caractère de faute d'une action passée; inquiétude sur un point de morale. ⇒ doute, hésitation (cf. État d'âme). « Les scrupules sont des craintes morales que des préjugés nous préparent » (A. Gide). « Cette déviation qui transporte les scrupules de conscience du domaine des affections et de la moralité aux questions de pure forme » (Proust). Scrupules religieux (cf. Cas de conscience). « Une dévote tourmentée de scrupules » (Sand). Être dénué de scrupules, sans scrupules : agir par pur intérêt, sans se poser de problèmes moraux. Étaler son luxe sans scrupule. ⇒ pudeur. Les scrupules ne l'étouffent pas. Scrupule excessif. « Des scrupules personnels infiniment louables » (Duhamel).
♢ Loc. Se faire scrupule de qqch. : hésiter ou renoncer à faire cette chose par scrupule. « Je ne me ferais aucun scrupule de le tuer comme un chien » (Chateaubriand). — Avoir scrupule à faire qqch. : hésiter à faire qqch. J'aurais scrupule à vous en parler.
2 ♦ (1694; scropule 1611) Exigence, délicatesse morale très poussée; tendance à juger avec rigueur sa propre conduite (selon des critères religieux, sociaux, personnels). « L'excès de conscience dégénère en infirmité. Méfiez-vous des scrupules. Ils mènent loin » (Hugo). « Elle était même portée aux scrupules. Les petits manquements ne la tracassaient pas moins que les gros péchés » (Romains). — Un homme de scrupule. Exactitude poussée jusqu'au scrupule.
3 ♦ (1549) Doute, souci, ou appréhension sur un point précis. Des scrupules d'érudition.
4 ♦ (1907) Psychol. Maladie du scrupule : forme de psychasthénie caractérisée par l'hésitation avant l'action, la manie de la vérification, etc.
II ♦ (scrupel XIVe; repris XVIIe; lat. scrupulum « petit caillou ») Anciennt Unité de poids valant un vingt-quatrième d'once. Le scrupule valait 24 grains.
● scrupule nom masculin (latin scripulum) Ancienne unité de poids valant la 24e partie de l'once. ● scrupule nom masculin (latin scrupulus, petit caillou) Hésitation à agir, inquiétude morale provenant de la crainte de commettre une faute : Un scrupule me retient. Exigence morale très poussée, née de la crainte de manquer à la perfection : Pousser l'exactitude jusqu'au scrupule. Doute sur un point précis, entraînant une correction, une retouche, etc. : Les derniers scrupules d'un écrivain sur son manuscrit. Inquiétude excessive de conscience, inspirée par un sens aigu de la perfection chrétienne. ● scrupule (citations) nom masculin (latin scrupulus, petit caillou) André Billy Saint-Quentin 1882-Fontainebleau 1971 La maladie du scrupule est un des fléaux de la vie spirituelle. L'Approbaniste Flammarion François de Salignac de La Mothe-Fénelon château de Fénelon, Périgord, 1651-Cambrai 1715 Rien n'est si contraire à la simplicité que le scrupule. Il cache je ne sais quoi de double et de faux. Correspondance, à Mme de Montberon, 26 décembre 1700 saint François de Sales château de Sales, près de Thorens, Savoie, 1567-Lyon 1622 Les scrupules sont fils de l'orgueil le plus fin. Maximes, sentences et pensées Jean de La Fontaine Château-Thierry 1621-Paris 1695 Vos scrupules font voir trop de délicatesse. Fables, les Animaux malades de la peste Jean-François Paul de Gondi, cardinal de Retz Montmirail 1613-Paris 1679 Les scrupules et la grandeur ont été de tous temps incompatibles. Mémoires Jules Tellier 1863-1889 Avec trop de scrupules, on n'eût jamais rien détruit ni rien fait. La Chanson nouvelle ● scrupule (expressions) nom masculin (latin scrupulus, petit caillou) Avoir scrupule à, hésiter à faire quelque chose par peur de commettre une erreur, d'être source d'une gêne, etc. Se faire (un) scrupule de quelque chose, ne pas le faire par délicatesse de conscience. ● scrupule (synonymes) nom masculin (latin scrupulus, petit caillou) Exigence morale très poussée, née de la crainte de manquer...
Synonymes :
- devoir
- soin
scrupule
n. m.
d1./d Trouble de conscience, doute, hésitation d'ordre moral. Se faire (un) scrupule de qqch. Avoir des scrupules.
d2./d Souci extrême du devoir, grande délicatesse morale.
I.
⇒SCRUPULE1, subst. masc.
A. — MÉTROL. Petit poids dont se servaient les apothicaires valant la vingt-quatrième partie de l'once. Un scrupule de rhubarbe (Ac. 1798-1878).
— P. ext., fam. Petite quantité. On dit une idée de citron, un soupçon de vinaigre, un scrupule de cassis, une larme de cognac, pour dire quelques gouttes de chacun de ces liquides (LARCH. 1861, p. 156).
B. — Petite pièce de monnaie d'or en usage à Rome (d'apr. PERRAUD 1963).
Prononc. et Orth.:[]. Homon. scrupule2. Att. ds Ac. 1694-1878. Étymol. et Hist. 1. Ca 1240 scruples « 24e partie de l'once; poids très faible » (Chirurgie de Roger de Salerne, éd. D. J. A. Ross, 244 v ° d'apr. W. ROTHWELL ds Z. fr. Spr. Lit. t. 86 1976, p. 256); XIIIe s. escrupules (Simples Medecines, éd. P. Dorveaux, p. 20); 2. antiq. romaine a) 1538 « tiers d'une drachme, obole » (EST., s.v. scrupus, scrupulus); b) id. « unité de poids » (ibid.). Empr. au lat. scrupulum « petit caillou; 24e partie de l'once », en gén. « la plus petite division d'une unité de mesure ».
II.
⇒SCRUPULE2, subst. masc.
A. — Au sing. et au plur. Trouble de conscience qui fait naître le doute sur la conduite à tenir ou sur la valeur morale d'un acte déjà accompli. Lever les scrupules; vaincre ses scrupules; être dénué de scrupules; ne pas être étouffé par les scrupules; vaincre les scrupules de qqn; faire taire les scrupules de qqn. Celle-là n'était pas troublée par les tâtonnements de la casuistique; sa doctrine semblait une barre de fer; sa foi n'hésitait jamais; sa conscience n'avait point de scrupules (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Boule de suif, 1880, p. 145). V. affaire ex. 13 et lever1 ex. 3:
• Le gouvernement m'a envoyé, comme à des millions d'Américains, des papiers que j'aurai à remplir pour établir ma situation militaire. Ces papiers indiquent, entre autres choses, la marche à suivre dans le cas où l'on aurait une objection de conscience à formuler. Quel autre gouvernement témoignerait de tels scrupules?
GREEN, Journal, 1942, p. 207.
— Loc. verb. Avoir scrupule à; se faire (un) scrupule de qqc. Hésiter ou renoncer à faire quelque chose par scrupule. Sous Louis XIII et Louis XIV, on n'était pas déshonoré pour tricher au jeu, cela faisait, en quelque sorte, partie des règles, et beaucoup d'honnêtes gens ne se faisaient aucun scrupule de corriger, par un adroit escamotage, les caprices de la fortune (PROUDHON, Propriété, 1840, p. 329). Mais le beau baryton, très flatté du trouble de la pauvre linotte se ferait scrupule d'insister (COLETTE, Cl. école, 1900, p. 73).
— Loc. adj. ou adv., péj. Sans scrupules. Sans exigences ni préoccupations morales. La faillite doit cesser d'être le dernier moyen de concurrence de l'industriel sans scrupules ou de l'incompétent qui cherche à éluder les charges (BRUNERIE, Industr. alim., 1949, p. 240).
B. — Au sing. Exigence, délicatesse de conscience qui pousse à agir, à juger avec une extrême rigueur, avec une grande droiture. (Agir) avec (le plus grand) scrupule; pousser le scrupule jusqu'à; homme de scrupule. Le scrupule dominait en lui, comme la passion domine chez les autres. L'étendue de son esprit et de son imagination lui donnait quelquefois la maladie de l'incertitude; il était de plus singulièrement susceptible de regrets, et s'accusait souvent en toutes choses avec une injuste facilité (STAËL, Consid. Révol. fr., t. 1, 1817, p. 53).
C. — Doute, incertitude, embarras sur un point précis. La sagesse, le calcul et, en somme, la perfection ne paraissent qu'au moment de l'économie des forces. Quoi qu'il en soit, l'ère des scrupules [dans le romantisme] commence vers le temps de la jeunesse de Baudelaire. Gautier déjà proteste et réagit contre le relâchement des conditions de la forme, contre l'indigence ou l'impropriété du langage (VALÉRY, Variété II, 1929, p. 134).
— PSYCHOL. Maladie du scrupule. ,,Forme de psychasthénie caractérisée par l'hésitation interminable avant l'action, le mécontentement de l'action effectuée, la manie du retour en arrière et de la vérification`` (PIÉRON 1973).
Prononc. et Orth.:[]. Homon. scrupule1. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1375 [éd. 1486] strupule « inquiétude de conscience » (RAOUL DE PRESLE, Cité de Dieu, IX, 18 ds GDF. Compl.); 1404 scrupul de conscience (CHRISTINE DE PISAN, Fais et bonnes meurs Charles V, III, 54, éd. S. Solente, t. 2, p. 141); 2. 1541 « doute sur un point précis (CALVIN, Instit., III, XXV ds HUG.); 3. 1611 « exigence poussée pour sa propre conduite » (COTGR.). Empr. au lat. scrupulus « petite pierre pointue » fig. « sentiment d'inquiétude, souci, scrupule ».
STAT. — Scrupule1 et 2. Fréq. abs. littér.:1 966. Fréq. rel. littér.: XIXe s.: a) 2 277, b) 2 127; XXe s.: a) 2 947, b) 3 505.
1. scrupule [skʀypyl] n. m.
ÉTYM. 1375; lat. scrupulus « petit caillou » et fig. « embarras, souci, scrupule », de scrupus « pierre pointue » et fig. « souci, inquiétude ».
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1 (Un, des scrupules). Incertitude d'une conscience exigeante au regard de la conduite à avoir ou du caractère de faute d'une action passée; inquiétude sur un point de morale. ⇒ Doute, hésitation (→ Honnêteté, cit. 2; oublier, cit. 6; positif, cit. 7). || Scrupules de conscience. ⇒ Cas (cas de conscience). || Scrupules religieux. ⇒ Religion (I., 4. : point de religion). || Avoir des scrupules, être paralysé de scrupules. ⇒ Scrupuleux (→ Excès, cit. 10; perclus, cit. 6). || Avoir un, des scrupules à… (et inf.). || N'avoir aucun scrupule. || Je n'aurais aucun scrupule à… (et inf.). || Être dénué de scrupules. — ☑ (1734). Sans scrupule, sans scrupules : sans inquiétudes sur le plan moral; qui agit selon son intérêt ou son plaisir. || Il est absolument sans scrupules en affaires : il agit par pur intérêt, sans se poser de problèmes moraux. || Étaler son luxe sans scrupule. ⇒ Honte, pudeur. — Les scrupules ne l'étouffent pas (→ Intelligence, cit. 17). — Invoquer (cit. 9) un scrupule. || Calmer (→ Contribuer, cit. 5), étouffer (cit. 31), faire taire, vaincre ses scrupules (⇒ Accommodement). || Lever, soulager les scrupules de qqn. — Scrupule déplacé (cit. 12), excessif; honorable, louable (cit. 3). || Scrupules et remords (→ Fantôme, cit. 14).
1 Une dévote tourmentée de scrupules de conscience devenait misérable. Elle ne pouvait plus communier sans angoisses, parce que, entre l'absolution et le sacrement, elle ne se pouvait préserver de la crainte d'avoir commis un péché.
G. Sand, Histoire de ma vie, IV, II.
2 (…) cette déviation particulière à la vie de cour sous Louis XIV et qui transporte les scrupules de conscience du domaine des affections et de la moralité aux questions de pure forme.
Proust, le Côté de Guermantes, Pl., t. II, p. 437.
3 Supprimer les scrupules ne suffit pas à nous rendre heureux; il faut mieux. Mais des scrupules suffisent à nous empêcher le bonheur; les scrupules sont des craintes morales que des préjugés nous préparent.
Gide, Journal, 13 sept. 1893.
4 Je me dis qu'elle ruminait ses scrupules, et m'en réjouis bassement : j'ignorais alors l'horreur de cette torture que s'infligent à eux-mêmes les serviteurs de Dieu qui ne savent pas qu'il est Amour.
F. Mauriac, la Pharisienne, XIII.
♦ ☑ Loc., vx. Faire scrupule de qqch. — (XVIIIe). Mod. || Se faire scrupule de qqch. : hésiter ou renoncer à faire cette chose par scrupule (2.), à cause d'un scrupule (1.). ⇒ Conscience (→ Faiblesse, cit. 42). || Je ne me ferais aucun scrupule de le tuer comme un chien (cit. 33). ⇒ Hésiter (sans).
2 (1694; scropule, 1611). || Le scrupule. Exigence, délicatesse morale poussée; tendance à juger avec rigueur sa propre conduite (selon des critères religieux, sociaux, personnels…). || Être porté au scrupule (→ Manquement, cit. 4). || Un homme de scrupule et de devoir (→ Frasque, cit. 4). || Scrupule en affaires. ⇒ Correction. || Exactitude, fidélité, poussée jusqu'au scrupule. || Avec minutie (cit. 2), scrupule (→ Minutieux, cit. 2 et 4).
5 L'excès de conscience dégénère en infirmité. Le scrupule est manchot devant le sceptre à saisir et eunuque devant la fortune à épouser. Méfiez-vous des scrupules. Ils mènent loin.
Hugo, l'Homme qui rit, II, I, I, III.
♦ Psychol. || Maladie du scrupule : forme de psychasthénie caractérisée par l'hésitation avant l'action, la manie de la vérification, etc.
3 (1549). Doute, incertitude, léger remords ou appréhension sur un point précis. || Un scrupule, un repentir (cit. 6). || Un scrupule d'érudition. — Ménagement à l'égard de quelqu'un.
4 Vx. Vétille, petit détail (cf. Molière, le Bourgeois gentilhomme, II, 6).
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CONTR. Cynisme.
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2. scrupule [skʀypyl] n. m.
ÉTYM. XIVe, scrupel; repris XVIIe; lat. scrupulum, spécialisation (→ ci-dessous, 2.) de scrupulus (→ 1. Scrupule).
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1 Anciennt. Vingt-quatrième partie de l'once (unité de poids). || Le scrupule valait 24 grains.
2 (1538). Hist. La plus petite monnaie d'or, à Rome.
Encyclopédie Universelle. 2012.