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REPRODUCTION
REPRODUCTION

Tout être vivant tend à se conserver en tant qu’individu et à se perpétuer en tant qu’espèce; ces deux tendances reposent l’une et l’autre sur une faculté fondamentale de la matière vivante, la faculté de se reproduire. La reproduction a pu être définie par Buffon (1748) comme «cette propriété commune à l’animal et au végétal, cette puissance de produire son semblable, cette chaîne d’existences successives d’individus qui constitue l’existence réelle de l’espèce». La reproduction apparaît comme une propriété essentielle de la vie, comme l’un des principaux critères séparant le monde vivant du monde inanimé.

À vrai dire, la reproduction est plus qu’une propriété de la vie: se reproduire est pour le vivant une nécessité. Chaque individu est voué à l’usure, à la destruction, à la mort, mais la vie en tant que phénomène est continue, et c’est la reproduction qui assure sa continuité. Qui plus est, c’est à la reproduction que la vie doit son pouvoir de diffusion et d’invasion.

Il y a deux ou trois milliards d’années se sont formés quelque part sur Terre, dans l’océan primitif, des ensembles de molécules capables de s’autodupliquer, en puisant dans le milieu environnant la matière et l’énergie nécessaires à leur reproduction. C’est ainsi qu’on peut se représenter, très schématiquement, la naissance de la vie. Depuis, comme l’a dit M. Caullery, «nous ne voyons jamais la vie commencer. Elle ne fait que se continuer».

La reproduction de ces premiers systèmes macromoléculaires «vivants» devait être un mécanisme de copie conforme relativement simple, tel qu’on le voit fonctionner aujourd’hui pour les molécules d’acides nucléiques de tous les systèmes vivants. Le processus de reproduction va ensuite se compliquer, permettant à des formes de vie de plus en plus variées de se répandre sur Terre en s’adaptant à des milieux de plus en plus divers.

L’étude de la reproduction conduit donc à passer en revue ces modalités nombreuses et variées par lesquelles la vie se maintient, se propage, se diversifie, se perfectionne, conduisant de la macromolécule à l’homme: duplication des molécules d’acides nucléiques; division et multiplication des êtres pluricellulaires par reproduction asexuée et sexuée.

Si la reproduction est de toute évidence une fonction biologique fondamentale pour la vie de l’espèce, elle a pu être considérée, du point de vue de la physiologie, comme une fonction «de luxe» pour l’individu, celui-ci pouvant survivre sans se reproduire. Il s’agit là d’une opinion erronée. En réalité, la fonction de reproduction représente pour tout être vivant un aspect essentiel de sa physiologie, intégré à l’ensemble des autres grandes fonctions de l’organisme et indissociable d’elles. Il est de même impossible d’étudier le comportement d’un être vivant sans se préoccuper de sa reproduction, car cette fonction conditionne tout le cycle biologique d’un individu, et dans tous les domaines, à tel point que, lorsqu’on parle de la «biologie» d’une espèce vivante, on entend souvent par là l’étude de son cycle reproducteur. Ainsi que l’écrit non sans poésie F. Jacob: «Dans un être vivant, tout est agencé en vue de la reproduction. Une bactérie, une amibe, une fougère, de quel destin peuvent-elles rêver sinon de former deux bactéries, deux amibes, plusieurs fougères?»

1. Aspects généraux du phénomène

Reproduction au niveau de la molécule

D’une génération à l’autre, l’être vivant se reproduit identique à lui-même. Cette invariance suppose l’existence d’une mémoire qui se transmet de génération en génération, de parent en enfant, de cellule mère en cellule fille. Or cette mémoire n’est pas portée par l’ensemble de toutes les espèces chimiques qui constituent la matière vivante. Une seule substance, au sein du protoplasme, détient l’information nécessaire à l’édification de tous les constituants de l’être vivant et possède en même temps la propriété de se copier elle-même avec exactitude, c’est l’acide désoxyribonucléique ou ADN. La reproduction rigoureusement fidèle de la molécule d’ADN repose sur sa structure. L’ADN est une longue molécule polymérisée composée de deux chaînes accolées et enroulées en hélice l’une autour de l’autre. Chacune de ces chaînes est constituée d’unités comprenant un phosphate, un sucre et une base. Il existe quatre bases: adénine, thymine, guanine, cytosine. Il y a donc quatre types de chaînons ou nucléotides qui se répètent tout au long de la chaîne en séquences d’une variété infinie. La séquence des bases est un langage qui est transcrit (formation de l’ARN messager), puis traduit lors de la synthèse protéique. Les deux hélices d’ADN sont liées l’une à l’autre, leurs bases étant unies deux à deux. Chaque base ne peut se lier qu’avec une seule des trois autres. Ainsi, sur la double hélice, l’adénine sera toujours unie à la thymine et la guanine à la cytosine, de sorte que les deux chaînes sont complémentaires. Lorsqu’une molécule d’ADN se reproduit, les deux chaînes se séparent, puis chacune d’elles dirige la synthèse d’une nouvelle chaîne qui lui sera complémentaire. Une molécule d’ADN aura donc donné naissance à deux molécules «filles» qui sont rigoureusement identiques à la molécule «mère» dont elles reproduisent fidèlement la séquence des bases caractéristique (fig. 1).

Le mécanisme de la duplication de l’ADN, ceux de la transcription et de la traduction, autrement dit les mécanismes fondamentaux de la reproduction au niveau moléculaire, ont été bien étudiés dans le cas de l’infection d’une cellule par des virus. Les particules virales (virions) sont formées d’acide nucléique, molécule (ADN souvent, parfois ARN) enveloppée d’une couche protectrice de protéines. Le virus est incapable de se reproduire par lui-même; il doit s’introduire à l’intérieur d’une cellule: par exemple, les bactériophages sont des virus qui pénètrent dans une cellule bactérienne; l’ADN viral injecté dans la bactérie détourne de son activité normale la machinerie cellulaire de la bactérie. La cellule bactérienne se met alors à fabriquer des protéines virales sous le contrôle de l’ADN viral (fig. 2). Une des premières protéines synthétisées est une enzyme nécessaire à la duplication de l’ADN du virus. Puis d’autres gènes viraux se mettent à diriger la fabrication des protéines de structure qui formeront la tête et la queue du phage: la morphogenèse d’un nouveau virus peut alors s’effectuer. Les virions se multiplient ainsi à l’intérieur de la bactérie jusqu’à ce que, devenus très nombreux (200, par exemple, pour le bactériophage T4), ils fassent éclater la cellule bactérienne. Ainsi libérés, ils peuvent aller infecter de nouvelles bactéries.

Reproduction au niveau de la cellule

Le virus ne dispose pas des enzymes nécessaires à la duplication de son ADN et à l’édification de sa propre structure, il doit utiliser celles de la cellule qu’il infecte. Il possède l’équipement génétique , non l’équipement enzymatique nécessaire à sa reproduction. Pas plus qu’une molécule d’ADN, il ne mérite pleinement le nom d’être vivant , bien qu’il soit souvent considéré comme le plus petit être vivant connu. Le véritable être vivant, c’est la cellule ; elle contient dans son noyau le matériel génétique porteur de l’information nécessaire à toutes les synthèses qui assurent sa survie, et dans son cytoplasme les enzymes grâce auxquelles pourront s’effectuer ces synthèses. C’est la cellule qui doit se reproduire pour que se maintienne et se propage la vie. Le processus par lequel une cellule donne naissance à deux cellules filles est la mitose , qui est fondée sur le dédoublement du matériel génétique, c’est-à-dire de l’ADN de la cellule. La mitose est un mécanisme complexe et précis qui permet la transmission du patrimoine héréditaire, dans son intégralité, de la cellule mère à ses descendantes. Ainsi se maintiennent constants, de génération en génération, les caractères propres à chaque catégorie cellulaire. L’ADN étant le constituant principal des chromosomes contenus dans le noyau cellulaire, la mitose est le phénomène par lequel les chromosomes se dédoublent, chacun d’eux produisant deux chromosomes fils, puis se répartissent en deux lots identiques qui vont échoir à chacune des cellules filles [cf. DIVISION CELLULAIRE].

La mitose représente le mode de reproduction et de multiplication fondamental chez les Protistes. Pour les êtres pluricellulaires, elle assure le maintien en vie de l’organisme: c’est par mitose que se renouvellent les tissus de l’hydre d’eau douce, les cellules sanguines, les muqueuses, l’épiderme d’un Vertébré. Un être vivant dont toutes les cellules, pour une raison ou une autre, deviendraient inaptes à la mitose (effet des radiations sur les cellules de la moelle osseuse, par exemple) est irrémédiablement voué à la mort. La survie d’un individu, c’est la reproduction des cellules qui le constituent.

L’universalité des phénomènes de duplication de l’ADN et de division cellulaire par mitose est frappante. Le monde vivant tout entier repose sur ces deux mécanismes fondamentaux. Que l’on étudie la mitose dans un méristème radiculaire de plante, chez un animal unicellulaire ou dans un tissu embryonnaire de Mammifère, les aspects cytologiques observés sont remarquablement constants.

Reproduction au niveau de l’organisme

Le processus de la duplication de l’ADN, sur lequel est fondée la mitose, permet de comprendre pourquoi les cellules filles sont rigoureusement identiques à leur mère. Mais à lui seul il n’explique pas l’évolution des êtres vivants organisés, dont l’aboutissement est l’extraordinaire variété des organismes végétaux et animaux actuels. L’évolution suppose une possibilité de variation. Et le maintien de la vie, à l’échelle des âges géologiques, passe par l’évolution: l’environnement changeant impose une sélection des formes les mieux adaptées, qui ne peuvent être toujours les mêmes et doivent évoluer. C’est ici qu’interviennent, d’une part, le phénomène de la mutation qui, au hasard, introduit des changements dans le matériel génétique d’un individu et, d’autre part, le mécanisme de la reproduction sexuée , dont l’avantage évolutif apparaît clairement. L’hérédité biparentale, en effet, permet à l’enfant de ressembler à ses parents, de les «reproduire», c’est-à-dire de les continuer, tout en étant différent de chacun d’eux. Contrairement aux cellules résultant d’une division mitotique, un jeune produit par reproduction sexuée n’est pas une copie conforme de l’un ou l’autre de ses parents. Issu de l’union de deux gamètes, l’un provenant du père, l’autre de la mère, il est un mélange, une recombinaison des caractères parentaux. Chaque gamète n’étant porteur que de la moitié de l’héritage du parent dont il provient, le nombre des combinaisons possibles est quasiment infini. La reproduction sexuée est donc une source presque inépuisable de variation. C’est elle qui a permis l’immense variété des formes vivantes.

Aussi n’est-il pas étonnant de voir apparaître la reproduction sexuée très précocement au cours de l’évolution. Même les êtres unicellulaires, bactéries, levures, Protistes, qui se multiplient normalement par simple division, présentent de temps à autre des phénomènes de conjugaison. La sexualité n’est donc pas pour les individus le mode normal et nécessaire de reproduction et de multiplication, mais elle est pour l’espèce une assurance supplémentaire de survie par la diversification qu’elle permet. De même, nombre d’animaux pluricellulaires, comme les Éponges, les Cœlentérés, certains Vers, se reproduisent presque uniquement par multiplication asexuée ; pourtant, rares sont les espèces qui ne manifestent jamais de reproduction sexuée. Presque toutes les formes douées du pouvoir de reproduction agame sont capables de se reproduire selon les deux méthodes, utilisant tantôt l’une, tantôt l’autre. Il est permis de penser que, même pour ces Invertébrés inférieurs, la reproduction sexuée est le mode de reproduction primordial, et que la reproduction agame n’y est apparue que secondairement au cours de l’évolution.

Une autre condition nécessaire pour que les organismes évoluent est la mort . En mourant, les parents laissent la place à leurs descendants, éventuellement porteurs de caractères nouveaux qui, s’ils sont avantageux, seront sélectionnés. La mort n’est pas un accident, elle est prévue par le programme génétique. Bien souvent, dans le monde animal, les êtres vivent le temps qu’il faut pour se reproduire, pour assurer leur descendance. Le sexe et la mort ne sont une nécessité que pour les organismes pluricellulaires. Une bactérie, un Protiste, pour qui la reproduction par simple division est primordiale, sont des êtres immortels. Pour eux, la mort de l’individu est accidentelle.

Vivre, c’est lutter contre son entropie: c’est faire naître l’ordre à partir du désordre, en puisant dans le milieu environnant la matière et l’énergie nécessaires. C’est créer une organisation à partir de la matière inorganique (cas des êtres vivants autotrophes: plantes vertes) ou fabriquer avec des matériaux organiques une organisation spécifique plus complexe, plus élaborée (cas des êtres vivants hétérotrophes: animaux). Vivre, c’est donc réaliser un certain nombre de transformations dont l’ensemble constitue le métabolisme. C’est se nourrir et croître.

La nutrition a pour résultat la croissance, et la croissance a pour conséquence la reproduction. En effet, c’est lorsqu’un être vivant atteint la taille caractéristique de son espèce, autrement dit lorsqu’il arrive à l’état adulte, qu’il se reproduit. Il transmet alors à ses descendants son propre programme d’activités métaboliques. Il leur lègue la possibilité de se nourrir et de croître à leur tour (cf. CROISSANCE BIOLOGIQUE, MÉTABOLISME).

Pour la cellule, la reproduction découle de la croissance de manière particulièrement évidente et nécessaire. Quand une cellule se nourrit, elle s’accroît. Supposons qu’elle grandisse jusqu’à doubler son diamètre. Dans ce cas, son volume est multiplié par huit (23); sa surface n’est multipliée que par quatre (22). Elle aura donc une masse de protoplasme plus importante à nourrir, pour une superficie relativement plus faible. Or c’est évidemment par sa surface que la cellule effectue ses échanges nutritifs. Pour maintenir son rapport surface-volume à une valeur convenable, cette cellule devra donc se diviser, autrement dit se reproduire, lorsqu’elle aura atteint la taille limite. Cette taille limite représente pour la cellule l’état «adulte».

La reproduction apparaît donc comme une forme de croissance. Une colonie bactérienne, un organisme pluricellulaire, une population animale croissent par la reproduction et la multiplication des individus, cellules ou animaux, qui les composent.

2. La reproduction dans le règne animal

Les animaux disposent de deux procédés de reproduction et de propagation: la reproduction sexuée et la reproduction asexuée ou agame.

La reproduction sexuée est caractérisée par son déroulement: deux cellules reproductrices différentes selon le sexe, le gamète mâle et le gamète femelle, fusionnent en produisant une cellule œuf qui est à l’origine du nouvel individu; cette fusion est précédée, dans les cellules qui formeront les gamètes, d’une modification de la garniture chromosomique: la réduction chromatique transforme le nombre diploïde (2 n ) des chromosomes en nombre haploïde (n ), de telle sorte que l’assemblage de deux gamètes de sexe opposé reconstitue le stock chromosomique 2 n . La reproduction sexuée repose donc sur deux phénomènes: la réduction chromatique ou méiose et la fécondation (fig. 3). Leurs manifestations cytologiques (méiose, fusion des gamètes, structures morphologiques de l’ovule et surtout du spermatozoïde) sont d’une remarquable homogénéité.

Dans la reproduction asexuée , un fragment pluricellulaire de l’animal parent s’isole physiologiquement de celui-ci, puis s’en détache. Ce blastozoïde est à l’origine du nouvel individu. Souvent, les individus fils restent rattachés à l’animal souche: la reproduction agame produit alors une colonie (Cœlentérés, Bryozoaires, Tuniciers). Ce type de reproduction repose sur la seule division mitotique, au cours de laquelle le nombre de chromosomes reste constant, de sorte que le patrimoine héréditaire est transmis en entier. Génétiquement, l’individu fils est le frère jumeau de l’individu parent.

En somme, les deux modes de reproduction diffèrent essentiellement par le critère génétique: brassage de deux patrimoines, donc formation d’un patrimoine modifié, rénové, dans un cas; transmission d’un patrimoine inchangé dans l’autre.

Origine des cellules totipotentes

Lorsqu’un animal pluricellulaire atteint l’état adulte, la majorité de ses cellules sont spécialisées. Elles sont physiologiquement et morphologiquement différenciées; elles constituent les tissus et les organes dont cet animal a besoin pour survivre: elles forment ce que l’on appelle le soma (corps) de l’animal. Du fait de leur différenciation, ces cellules somatiques ont perdu leurs potentialités morphogénétiques. Pour se reproduire, cet animal a besoin de cellules restées totipotentes, donc capables de donner naissance à un nouvel individu: cellules germinales ou gamètes, dans le cas de la reproduction sexuée, cellules blastogénétiques pour la multiplication agame. Comment et à quel moment, dans l’ontogenèse de l’animal, ces cellules totipotentes reproductrices se dégagent-elles des autres lignées cellulaires destinées à former les tissus et organes somatiques?

Origine de la lignée germinale

Chez de nombreux animaux, la ségrégation de la lignée germinale est dite précoce, car elle s’établit dès les premiers stades du développement embryonnaire. Chez l’ascaris du cheval, l’œuf fécondé est polarisé: un pôle «animal» et un pôle «végétatif» différent morphologiquement par l’aspect des inclusions cytoplasmiques; autrement dit, l’œuf est anisotrope. Dès la première division de segmentation, l’une des cellules filles ou blastomères est constituée de l’hémisphère animal, l’autre de l’hémisphère végétatif. C’est du blastomère végétatif que va sortir la lignée germinale, dont la ségrégation est définitive et totale dès la quatrième division de segmentation, au stade 16 blastomères (fig. 4). Il existe donc dans l’œuf non segmenté un «déterminant germinal» qui, de division en division, ne se transmet jamais qu’à un seul des blastomères, et se retrouve finalement au stade 16 dans une seule cellule, la cellule mère de la lignée germinale.

Chez les Insectes, des preuves expérimentales ont été données de l’existence du déterminant germinal. À l’aide des rayons ultraviolets, on peut détruire, dans l’œuf indivis de la drosophile (mouche du vinaigre), la région cytoplasmique polaire contenant le déterminant germinal. Cet œuf peut malgré tout se développer normalement. Il donne naissance à une larve puis à une imago normales possédant tous les organes somatiques, mais entièrement stériles car dépourvues de cellules germinales. Il est donc possible de détruire la lignée germinale sans endommager les lignées somatiques. Réciproquement, les régions somatiques de l’œuf sont incapables de donner naissance à des cellules reproductrices.

L’existence dans l’œuf d’un territoire à déterminant germinal, lié à une ségrégation précoce de la lignée germinale, se retrouve chez les Crustacés, les Poissons, les Amphibiens, les Reptiles, les Oiseaux, les Mammifères.

Le territoire germinal de l’œuf est souvent caractérisé morphologiquement par ses enclaves cytoplasmiques et par ses acides ribonucléiques (ARN).

Quel que soit le lieu où, dans l’embryon, les cellules germinales se ségrègent des autres ébauches, elles doivent ensuite migrer vers l’endroit où elles subiront la transformation en gamètes, c’est-à-dire vers la gonade . La gonade est fondamentalement un organe somatique où règnent des conditions physiologiques favorables à la gamétogenèse. Elle se constitue généralement à partir d’un massif de tissu mésodermique (Vertébrés, Insectes) où vont se loger les cellules germinales.

Dans de nombreux groupes zoologiques, la ségrégation tardive de la lignée germinale est la règle: les cellules reproductrices apparaissent très tard, à la fin de l’organogenèse ou à l’état adulte, au moment de la reproduction sexuée. C’est le cas chez la plupart des animaux doués du pouvoir de reproduction asexuée et du pouvoir de régénération: Spongiaires, Bryozoaires, Cœlentérés, Turbellariés. Les gonocytes dérivent de cellules mésenchymateuses ou mésodermiques: amœbocytes du mésenchyme chez les éponges, néoblastes du parenchyme chez les planaires (Turbellariés), cellules du feuillet mésodermique chez les Bryozoaires, cellules interstitielles chez les Cœlentérés. Toutes ces cellules ont en commun le fait d’être restées (ou redevenues) embryonnaires, indifférenciées et pluripotentes. Ce sont elles en effet qui sont encore responsables de la régénération et de la reproduction asexuée. Les mêmes cellules sont capables en effet de donner naissance à un blastozoïde ou à un régénérat, c’est-à-dire à des formations du soma et aux gamètes, autrement dit à la lignée germinale. Il n’y a donc pas de lignée germinale préétablie, préformée chez ces animaux.

Ces faits montrent que le débat au sujet de la séparation du soma et du germen , et de la continuité du germen n’a plus qu’un intérêt historique. Selon Nussbaum, l’organisme d’un animal est une dualité constituée de deux tissus nettement séparés, le soma et le germen. Le germen est un stock de cellules immortelles qui assurent la continuité de l’espèce, le soma est une enveloppe mortelle renouvelée à chaque génération. Le soma appartient à l’individu, le germen à l’espèce. D’après cette conception, les cellules somatiques ne sauraient en aucun cas donner naissance à des cellules germinales. Pour A. Weismann, moins radical que Nussbaum, la continuité germinale n’est pas celle d’une lignée cellulaire, mais celle d’une substance, d’ailleurs hypothétique, le plasma germinatif mis en réserve dans les cellules germinales. Les faits observés chez les animaux doués du pouvoir de régénération rendent ces opinions caduques, puisque, chez de nombreuses espèces, les gonades se régénèrent aussi bien que tous les autres organes. Il n’y a pas de continuité germinale, il n’y a pas de séparation soma-germen. La formation des gamètes au cours de l’ontogenèse est une différenciation qu’on pourrait qualifier de «banale» au même titre que la différenciation de tout autre tissu ou organe somatique. Elle découle de la physiologie de l’animal, des conditions physico-chimiques, internes et externes qui règnent à un moment donné. Elle peut donc être précoce ou tardive, et s’effectuer soit au cours de la vie embryonnaire, soit chez l’adulte. Quel est le déterminisme de cette différenciation germinale et dans quelles conditions une cellule devient-elle un gamète? C’est sous cette forme que le problème de la «lignée germinale» continue à se poser.

Origine des cellules blastogénétiques

La reproduction agame se réalise essentiellement selon deux modalités: le bourgeonnement et la scissiparité. Dans les deux cas, le germe qui est à l’origine du nouvel individu est un fragment pluricellulaire de l’animal souche (alors que, dans la reproduction sexuée, le germe est une cellule unique, l’œuf).

Les cellules qui constituent ce germe, ce blastozoïde , proviennent-elles d’une lignée cellulaire spéciale, ségrégée tôt ou tard des autres catégories cellulaires du corps de la souche, ou sont-elles issues de cellules somatiques précédemment engagées dans la physiologie de l’animal, et qui retrouveraient par dédifférenciation leurs potentialités morphogénétiques embryonnaires? Ces deux cas coexistent, comme le montrent divers exemples.

Bourgeonnement

L’hydre d’eau douce, qu’on peut considérer comme un Cœlentéré type, servira d’exemple (fig. 5). Sa structure est relativement simple: composé d’un feuillet externe, l’ectoderme, et d’un feuillet interne, l’endoderme, le corps ou polype comprend une colonne gastrique couronnée de tentacules au milieu desquels s’ouvre la bouche, et un pédoncule, simple prolongement rétréci de la colonne gastrique, par lequel l’hydre est fixée à son support. L’hydre adulte, bien nourrie, bourgeonne en une région nettement définie, la zone blastogénétique qui se trouve à la base de la colonne gastrique. L’animal souche porte généralement plusieurs bourgeons de divers âges formés par une véritable hernie ectoendodermique de la paroi. Ce sont d’abord de simples boursouflures pariétales qui résident dans la région supérieure de la zone blastogénétique. Au fur et à mesure de leur organogenèse et de la croissance de l’hydre souche, ils glissent vers le bas de la colonne gastrique qui est en perpétuel renouvellement et ils se pédiculisent. Lorsqu’ils ont achevé leur maturation, les jeunes polypes se trouvent à la partie inférieure de la zone blastogénétique, près du niveau d’insertion du pédoncule, d’où ils se détacheront. L’hydre n’est pas à proprement parler un animal colonial. Chez de nombreux Cœlentérés, les individus nouvellement formés, eux-mêmes bourgeonnants, restent attachés à la souche: ainsi se constituent des colonies aux aspects si divers.

L’ectoderme des Cœlentérés contient des cellules embryonnaires polyvalentes, les cellules interstitielles , douées d’un grand pouvoir de multiplication; elles assurent la croissance normale du polype. Au point blastogénétique, ainsi que dans le bourgeon en formation, elles se divisent activement. Leur rôle dans l’édification du nouveau polype est considérable, mais non exclusif. En effet, une hydre privée de ses cellules interstitielles par une irradiation reste capable de bourgeonner et ses bourgeons se différencient normalement. Mais cette hydre irradiée, privée des cellules qui assurent sa croissance, donc sa survie, mourra avec ses descendants. Cette expérience montre clairement que l’organogenèse des bourgeons de l’hydre a une double origine: elle s’effectue à la fois à partir des tissus différenciés ectodermiques et endodermiques de l’animal souche et à partir des cellules interstitielles embryonnaires.

Les cellules interstitielles peuvent être tenues pour des cellules blastogénétiques. Mais elles ne constituent pas une lignée, une «réserve» blastogénétique comme l’ont prétendu certains auteurs. Il en est de même chez les autres animaux bourgeonnants, dont la plupart sont coloniaux: Spongiaires, Bryozoaires, Tuniciers. Le bourgeon est toujours formé par des tissus somatiques de la souche, tissus précédemment engagés dans la morphologie et la physiologie de l’animal, cela même lorsqu’il existe des cellules embryonnaires de remplacement comme les cellules interstitielles de l’hydre ou les archéocytes des Spongiaires.

Souvent une dédifférenciation des tissus est nécessaire. Des cellules très spécialisées perdent leurs caractères particuliers, retrouvent un aspect embryonnaire (cytoplasme plus condensé, moins vacuolaire, plus basophile, enrichissement en ARN, accroissement du nucléole) et deviennent capables de différenciations nouvelles. Elles sont redevenues pluripotentes. C’est le cas chez les Bryozoaires, où l’ectoderme à lui seul forme tous les organes ecto-, méso- et endodermiques du polypide (système nerveux, muscles, tube digestif), chez les Tuniciers, où c’est parfois le mésenchyme qui peut jouer un rôle polyvalent (Claveline), ou encore l’endoderme (Polyclinides) ou l’ectoderme (Botryllides).

Schizogenèse ou scissiparité

De nombreux vers se reproduisent asexuellement par scissiparité. Ils se débitent en deux ou plusieurs tronçons dont chacun reconstitue un adulte en régénérant les parties qui lui manquent. Il en est ainsi pour les Planaires et pour certaines Annélides (fig. 6). Chez la Salmacine, par exemple, la zone de scissiparité se situe dans la région antérieure de l’abdomen. Toute la portion d’abdomen qui se trouve en arrière de cette zone constitue le blastozoïde qui est à l’origine du nouveau ver. Cette région blastogénétique prend un aspect caractéristique, opaque, dû à la refonte des tissus, en particulier du mésenchyme, et à la dédifférenciation des fibres musculaires. L’anneau antérieur du blastozoïde édifie une tête avec son panache de branchies, tandis que les segments abdominaux situés en arrière de la nouvelle tête se transforment en segments thoraciques caractérisés par leurs parapodes. En même temps, le zoïde géniteur reconstitue son pygidium, en avant de la tête du blastozoïde. Dix jours après le début de sa morphogenèse, le blastozoïde se détache de la souche. Cette première scissiparité est généralement suivie de plusieurs autres. Chez certaines espèces de Polychètes, Autolytus par exemple, les blastozoïdes successivement formés restent attachés à la souche un certain temps après l’achèvement de leur différenciation. Cette scissiparité hâtive donne donc des chaînes d’individus, dont les plus développés sont situés le plus en arrière.

Chez les Vers scissipares comme chez les animaux bourgeonnants, il existe des cellules «de remplacement», histoblastes ou néoblastes (en particulier chez les Oligochètes, tel le Lombric, ou chez les Planaires). Ces cellules participent à l’histogenèse du blastozoïde sans en être les seules responsables. Là encore, on observe d’importants phénomènes de refonte tissulaire et de dédifférenciation.

En résumé, tous les animaux qui se multiplient asexuellement sont doués d’un fort pouvoir régénérateur. Les processus morphogénétiques et histogénétiques observés dans la reproduction agame présentent d’étroites ressemblances avec ceux de la régénération.

Déterminisme de la blastogenèse et de la gamétogenèse

Blastogenèse

La reproduction asexuée ne se déclenche que lorsque l’animal atteint une certaine taille. Elle est la conséquence de la croissance. Il en est ainsi pour l’hydre, qui commence à produire des bourgeons quand la colonne gastrique, qui est en perpétuelle croissance, a une longueur suffisante.

Le bourgeonnement d’un Tunicier, la Claveline, est localisé aux stolons. L’allongement des stolons par suite de la croissance y rend la circulation sanguine de plus en plus difficile. Il se forme une dilatation variqueuse qui devient une chambre bourgeonnante. Celle-ci, d’abord isolée physiologiquement par le manque de circulation, se sépare ensuite mécaniquement du stolon et devient le siège de la morphogenèse qui sera à l’origine d’un nouvel individu.

Le ver Autolytus n’entre en scissiparité que lorsqu’il a au moins soixante segments. Si on raccourcit un tel ver en sectionnant des segments postérieurs, la schizogenèse s’arrête.

Ces exemples permettent de tenir la croissance pour le facteur qui détermine la blastogenèse. La croissance a pour effet d’affaiblir les actions coordinatrices qui font de l’animal un tout morphologique et physiologique. Il se crée ainsi une zone où les cellules différenciées morphologiquement et physiologiquement échappent à l’emprise de l’organisme, à sa dominance: les tissus de cette zone blastogénétique sont placés dans un isolement physiologique , selon l’expression de Child, isolement qui leur permet de se dédifférencier et de retrouver leurs potentialités morphologiques embryonnaires. Selon une interprétation de la théorie des gradients physiologiques de Child, la dominance exercée par l’organisme sur ses parties serait due à des substances inhibitrices diffusibles (E. Wolff).

Gamétogenèse

Quel est le déterminisme de l’état sexuel, c’est-à-dire de l’état physiologique dans lequel doit se trouver un organisme pour que ses cellules germinales, ségrégées tôt ou tard des autres lignées cellulaires, se différencient en subissant la gamétogenèse? La question se pose d’une part pour les animaux chez lesquels le cycle biologique comporte les deux modes de reproduction, agame et sexuée; d’autre part pour ceux qui se reproduisent seulement sexuellement.

Le conditionnement gamétique de l’hydre a fait l’objet de recherches expérimentales approfondies. P. Brien a montré qu’une hydre en bourgeonnement continu peut présenter soudain une «crise» de sexualité, sous l’influence de facteurs externes: changement de température du milieu en particulier. Des ampoules testiculaires ou des ovaires apparaissent alors sur la colonne gastrique. Des facteurs internes entrent aussi en jeu, comme le montrent des expériences de parabiose greffant l’une à l’autre une hydre sexuée et une hydre de souche asexuée: cette dernière est induite à former des gamètes et des gonades par le contact avec l’animal sexué. Il y a donc passage de substances de type hormonal de l’une à l’autre.

Chez les Annélides Polychètes, la phase sexuée, caractérisée par l’épitoquie (transformation morphologique des segments porteurs de gamètes), est sous la dépendance d’une sécrétion hormonale du cerveau. Le cerveau du ver jeune sécrète une substance inhibitrice de la gamétogenèse et de l’épitoquie. Chez l’animal mûr, le taux d’hormone baisse et la transformation épitoque s’effectue. On peut induire expérimentalement l’épitoquie et la gamétogenèse chez un ver immature en l’amputant de la tête, donc du cerveau. Puis on peut le faire revenir en phase atoque en lui greffant un cerveau juvénile sécréteur d’hormone inhibitrice de la gamétogenèse.

De même, la gamétogenèse des Insectes est sous le contrôle des glandes endocrines. On a démontré chez les Insectes sociaux (abeilles, termites) l’existence des phéromones qui sont des médiateurs chimiques agissant à distance, d’un individu à d’autres à l’intérieur d’une colonie. La reine des abeilles est la seule femelle féconde de la société. Les ouvrières sont des femelles stériles. Des expériences ont prouvé que c’est la présence de la reine dans la ruche qui inhibe le développement des ovaires des ouvrières. Si la reine est enlevée, l’ovaire des ouvrières grossit, certaines d’entre elles peuvent devenir fertiles. De plus, les ouvrières se mettent aussitôt à fabriquer des loges royales pour l’élevage des larves qui seront nourries à la gelée royale et sont destinées à donner de nouvelles reines. La ruche représente donc une sorte de superorganisme dont la régulation est assurée par des corrélations complexes [cf. SOCIÉTÉS ANIMALES].

L’étude de la sexualité de ces divers Invertébrés fait ressortir le caractère épisodique et contingent du phénomène, qui se déclenche sous l’influence de facteurs variés.

Chez les Vertébrés, où la reproduction sexuelle est la règle et semble plus inéluctable que chez les Invertébrés, la sexualité n’en est pas moins soumise à un enchaînement de facteurs contingents. Ainsi, chez les Oiseaux, un facteur externe, la lumière, par l’intermédiaire de la perception sensorielle, suscite des réactions neuro-endocriniennes qui influencent à leur tour la gonade et la gamétogenèse. De nombreux Vertébrés présentent ainsi une périodicité saisonnière de la reproduction sexuée, qui retentit non seulement sur l’activité génitale, mais sur l’ensemble du comportement de l’animal. La migration des Oiseaux en est un exemple.

Coexistence de la blastogenèse et de la gamétogenèse. Parthénogenèse

Les deux reproductions coexistent simultanément dans de nombreux groupes d’Invertébrés: Hydraires, plusieurs Ascidies, Bryozoaires.

De nombreuses colonies d’Hydroïdes produisent en même temps deux sortes de bourgeons: les bourgeons polypiens, qui restent attachés à la souche et constituent la colonie par reproduction asexuée, et les bourgeons médusaires. La «méduse» porte les gonades; c’est une forme libre, nageante, qui se détache de la souche et assure en même temps la reproduction sexuée et la diffusion de l’espèce [cf. CNIDAIRES].

Chez de rares animaux, l’état blastogénétique est incompatible avec l’état gamétique. Il y a alors alternance de générations, c’est-à-dire succession d’une forme sexuée et d’une forme asexuée.

Il est un mode de reproduction qui peut être considéré comme un intermédiaire entre la reproduction agame et la reproduction sexuée: c’est la parthénogenèse , c’est-à-dire le développement d’un nouvel individu à partir d’un ovule non fécondé. La parthénogenèse normale se rencontre dans plusieurs espèces d’Invertébrés, chez les Insectes en particulier. Les ovules parthénogénétiques peuvent être diploïdes: ils se développent sans avoir subi la réduction chromatique et donnent, comme chez les Pucerons, des femelles par parthénogenèse dite «thélytoque». Dans d’autres cas, le développement parthénogénétique s’accomplit à partir d’un ovule haploïde qui a subi la méiose; c’est la parthénogenèse «arrhénotoque» qui ne donne que des mâles, par exemple chez divers Hyménoptères. Dans ce cas interviennent des phénomènes de régulation rétablissant le nombre chromosomique normal, au moins dans les cellules somatiques; les cellules germinales restent haploïdes.

Sexualisation

La reproduction sexuée pose un problème qui lui est propre. C’est celui de la différenciation en deux sexes distincts ou sexualisation . En effet, la gamétogenèse s’effectue dans deux directions différentes. La gamétogenèse mâle produit des gamètes mâles ou spermatozoïdes ; c’est une spermatogenèse. La gamétogenèse femelle donne des ovules ; c’est une ovogenèse. La différence entre les sexes se manifeste donc en premier lieu au niveau des gamètes, qui présentent dans l’immense majorité des cas un dimorphisme prononcé.

Le phénomène fondamental de la reproduction sexuée est la fécondation, c’est-à-dire la rencontre et la fusion des deux gamètes. Le dimorphisme des gamètes mâle et femelle favorise leur rencontre. L’ovule est une cellule volumineuse, chargée de réserves cytoplasmiques qui seront nécessaires au développement de l’embryon, mais qui font de l’ovule une cellule passive et immobile. Le spermatozoïde, au contraire, est une cellule très petite, dont le cytoplasme réduit à l’extrême ne contient aucune réserve. Sa petite taille et un important flagelle confèrent au spermatozoïde une très grande mobilité qui compense le manque d’activité de l’ovule. C’est donc au gamète mâle qu’incombe la responsabilité de l’union, et au gamète femelle la charge d’assurer la nutrition du nouvel être vivant en cours de développement.

La différence sexuelle apparaît non seulement au niveau des gamètes, mais également au niveau des organes génitaux. Dans l’immense majorité des cas, les appareils génitaux mâle et femelle sont portés par des individus différents. Ces animaux à sexes séparés sont dits gonochoriques . Les mâles se distinguent des femelles par toute une série de caractères morphologiques et physiologiques: ce sont les caractères sexuels, qui concernent non seulement l’appareil reproducteur lui-même (caractères sexuels primaires ), mais également un grand nombre d’autres organes (caractères sexuels secondaires ).

Il convient de distinguer, chez les espèces gonochoriques, le sexe génétique du sexe génital.

Le sexe génétique d’un être vivant est fixé dès la fécondation, il se manifeste dans la formule chromosomique de chaque cellule de l’organisme. La différence porte sur une seule paire de chromosomes, dits chromosomes sexuels ou hétérochromosomes. Ainsi, chez l’homme, la formule mâle est 44 + XY, la formule femelle 44 + XX, les chromosomes sexuels ou gonosomes étant désignés par les lettres X et Y. Le dimorphisme chromosomique a pour conséquence le maintien d’une proportion constante de 50 p. 100 de mâles et de 50 p. 100 de femelles dans une population gonochorique: c’est la sexratio .

Le sexe génital est le sexe apparent de l’animal, il concerne les différences morphologiques et physiologiques entre individus mâles et femelles; il se forme progressivement par différenciation au cours de la vie embryonnaire puis de la vie pastorale. Il n’est définitivement fixé qu’à l’âge adulte, après la puberté. Chez un Mammifère (cf. appareil GÉNITAL) ou un Oiseau par exemple, la différenciation du sexe génital s’effectue en deux étapes: d’abord, la formation des caractères sexuels primaires (gonades et tractus génital) au cours de la première moitié de la vie embryonnaire; la deuxième étape a lieu pendant la puberté et aboutit à la différenciation des caractères sexuels secondaires (par exemple la crête et les barbillons, le plumage, le chant et le comportement chez le coq).

Très généralement, le sexe génital coïncide avec le sexe génétique. Mais il est des cas d’inversion sexuelle , totale ou partielle, naturelle ou provoquée expérimentalement, qui prouvent que le sexe génital est contingent. L’œuf fécondé, bien que son sexe soit déterminé génétiquement, est sexuellement indifférent, ou plutôt bivalent. C’est lentement que son sexe se réalise; c’est en effet sous l’influence des hormones sexuelles que les cellules germinales de l’embryon peuvent évoluer, soit en spermatozoïdes, soit en ovules. Il est remarquable que les hormones sexuelles soient sécrétées non par les cellules germinales elles-mêmes, mais par les tissus somatiques de la gonade qui les héberge, ou encore par d’autres glandes (surrénales). On peut provoquer une inversion sexuelle plus ou moins stable, en administrant expérimentalement des hormones sexuelles à des stades assez précoces du développement embryonnaire. De nombreuses expériences de ce type ont été réalisées chez divers Invertébrés et Vertébrés [cf. INTERSEXUALITÉ].

Chez les Mammifères, le cas des free-martins des Bovidés représente une expérience naturelle d’inversion du sexe. Un free-martin est une génisse stérile d’un couple de jumeaux de sexes différents. En fait, il s’agit de veaux intersexués qui possèdent des testicules plus ou moins développés associés à des organes femelles rudimentaires. Cette intersexualité est due au fait que les circulations sanguines placentaires des deux embryons jumeaux sont en communication. Ces jumeaux de sexes différents peuvent donc s’influencer mutuellement par la voie sanguine: les hormones sécrétées par les gonades d’un des fœtus agissent sur la différenciation sexuelle de l’autre.

Une autre expérience naturelle extrêmement démonstrative est réalisée chez la bonnellie, ver marin Échiurien. La femelle possède une importante «trompe» pour la préhension des aliments. Le mâle est microscopique, de structure rudimentaire; il n’a pas de trompe et vit en parasite de la femelle. D’abord fixé sur la trompe de celle-ci, il descend dans son tube digestif puis s’installe dans son utérus où il féconde les œufs. Or une même larve peut donner ces deux types de structures mâle et femelle si différentes. Si la larve reste libre, elle se développe normalement et donne une femelle. Si elle se fixe sur la trompe d’une femelle adulte, son développement est entravé et elle donne un mâle. C’est la trompe de la femelle adulte qui sécrète les substances inhibitrices du développement et inductrices de la différenciation mâle. Dans cet exemple, la sexualisation n’est donc pas due à l’action génétique; la détermination du sexe de la bonnellie dépend de facteurs contingents externes, qui ne sont même pas d’origine gonadique comme chez les Vertébrés. De tels faits interviennent sans doute dans les cas de castration parasitaire comme celle des crabes par la Sacculine (cf. CIRRIPÈDES, fig. 3).

Les travaux expérimentaux effectués sur les Crustacés ont montré que, là aussi, la source hormonale contrôlant la différenciation sexuelle est en dehors de la gonade. Les Crustacés mâles possèdent une glande androgène , absente chez la femelle et responsable de la différenciation des glances génitales en testicules et de la formation des caractères sexuels secondaires mâles. La différenciation femelle est une autodifférenciation qui a lieu en l’absence de toute action hormonale, et le mâle est une femelle induite en mâle.

Des observations et expériences de ce type prouvent que le sexe ne peut se différencier que grâce à un mécanisme hormonal: «Le véritable tissu et probablement le seul qui réagisse directement à l’action des gènes sexuels est un tissu endocrinien» (E. Wolff). La différenciation du sexe est un phénomène épigénétique, comme toute autre organogenèse. Pas plus que la lignée germinale, le sexe n’est préétabli.

Hermaphrodisme

Chez les animaux hermaphrodites, il ne saurait être question de sexe génétique de l’individu, puisque le même être possède les deux sexes. Parmi les Invertébrés, il existe de nombreuses espèces normalement hermaphrodites, alors que, chez les Vertébrés, l’hermaphrodisme est toujours une anomalie. On peut supposer que, dans le corps d’un animal hermaphrodite, le tissu germinal, initialement bivalent, est orienté dans le sens mâle ou femelle selon la position qu’il occupe et selon les conditions physiologiques qu’il rencontre.

L’hermaphrodisme simultané , dans lequel un même animal possède en même temps les deux appareils génitaux mâle et femelle, se rencontre principalement chez les Plathelminthes, chez les Vers Annélides Oligochètes, par exemple le lombric. Souvent les appareils mâles et femelles sont situés dans des endroits différents du corps. Les deux appareils ne fonctionnent jamais en même temps: l’animal passe généralement de l’état physiologique mâle à l’état femelle. Un escargot ne possède qu’une seule glande génitale qui est un ovotestis . Dans l’hermaphrodisme successif , un même animal ne possède jamais en même temps les deux appareils mâle et femelle; il passe au cours de sa vie d’un sexe à l’autre. C’est le cas de l’huître qui est mâle dans sa jeunesse et devient femelle par la suite.

En définitive, que le déterminisme du sexe soit génétique ou non, l’animal présente toujours une période plus ou moins longue de bivalence sexuelle. Chez les hermaphrodites, cette période où le sexe de l’animal est labile dure toute la vie. Chez les animaux gonochoriques, elle se termine en général au cours de la vie embryonnaire. Mais quelle que soit l’époque à laquelle un sexe prévaudra sur l’autre, que l’un des deux sexes se fixe définitivement (gonochorisme) ou se manifeste de manière transitoire (hermaphrodisme), la détermination sexuelle s’effectue toujours sous l’influence de facteurs contingents, internes (hormones, croissance, âge) ou externes (nutrition, température).

3. La reproduction dans le règne végétal

La reproduction sexuée des végétaux n’est pas fondamentalement différente de celle des animaux. La formation d’un nouvel organisme implique, dans les deux règnes, au travers de la méiose et de la fécondation, un brassage des gènes qui aboutit, à chaque génération, à la création d’individus génétiquement originaux. Dans ses modalités, cependant, la reproduction végétale présente des différences sensibles avec celle des animaux.

Les animaux, sauf de rares exceptions, sont des êtres diploïdes chez lesquels la gamétogenèse est étroitement liée aux processus méiotiques. Cette situation est, par contre, exceptionnelle dans le règne végétal; on ne l’observe que chez quelques Thallophytes dont le cycle de développement est monogénétique diploïde (Algues des genres Fucus , Codium ). Plus fréquente chez de nombreux Thallophytes (Algues, Champignons) est la situation inverse, dans laquelle les individus sont haploïdes (cycle de développement monogénétique haploïde), le zygote, issu de la fécondation, subissant une méiose avant même d’engendrer de nouveaux individus. Enfin, nombre de Thallophytes et la totalité des Cormophytes (Bryophytes, Ptéridophytes, Spermaphytes) ont un cycle de développement où alternent deux générations: l’une, gamétophytique, issue de la méiose et donc haploïde, engendre les gamètes, l’autre, sporophytique, issue de la fécondation et donc diploïde, produit après une méiose des tétraspores (ou méiospores) qui seront à l’origine de nouveaux gamétophytes et ainsi de suite (cycle digénétique). Un cycle de développement particulier est celui de nombreuses Algues rouges; ce cycle est dit trigénétique, car son tronçon sporophytique est représenté par deux générations morphologiquement distinctes mais également diploïdes [cf. ALTERNANCE DE PHASES]. La diversité des cycles de développement dans le règne végétal, opposée au cycle de reproduction quasi unique des animaux, constitue sans aucun doute la différence la plus remarquable entre les deux règnes, quant à la reproduction. Il en est d’autres; ainsi, l’absence de lignée germinale et l’impossibilité qui en découle de distinguer un soma et un germen chez les plantes. Chez celles-ci, en effet, la différenciation des organes reproducteurs et des cellules sexuelles se fait à partir de cellules végétatives banales (cas des végétaux inférieurs) ou à partir de tissus indifférenciés permanents (les méristèmes des végétaux supérieurs) qui participent également à la croissance végétative. Par ailleurs, les rapports entre milieux de vie des plantes et modes de fécondation, certains aspects de la détermination du sexe et l’existence de barrières physiologiques à l’autofécondation chez les végétaux bisexués sont aussi des caractères particuliers de la reproduction végétale, qui sont précisés dans la suite de ce texte.

À côté de la reproduction par voie sexuée, il existe chez les plantes, comme chez les animaux, un mode de multiplication des individus qui ne fait intervenir aucun phénomène sexuel. Cette reproduction asexuée, observée dans tous les groupes végétaux, est nommée multiplication végétative car elle s’effectue toujours à partir de fragments d’un appareil végétatif, plus ou moins spécialisés dans ce mode de reproduction [cf. MULTIPLICATION VÉGÉTATIVE].

Modes de fécondation et milieux de vie des plantes

La fusion des gamètes implique, au préalable, un déplacement de ceux-ci, ou tout au moins de l’un d’entre eux. Pour les végétaux, on peut, d’une façon générale, établir un rapport entre le mode de déplacement des gamètes et la nature du milieu où vivent les plantes: milieu aquatique ou milieu terrestre.

Chez les Végétaux fondamentalement aquatiques que sont les Algues, les gamètes, ou seulement l’un d’eux, sont libérés dans le milieu extérieur, eau marine ou douce (cf. ALGUES, fig. 3). Ce ou ces gamètes se meuvent grâce à des flagelles, et la fécondation résulte d’une activité propre d’au moins un des deux gamètes. Selon que les gamètes sont identiques ou non, on parle d’isogamie ou d’anisogamie ; lorsque seul le gamète mâle est mobile tandis que le gamète femelle est une volumineuse cellule inerte, il s’agit d’une oogamie . Chez les Algues rouges, cependant, le gamète mâle est immobile; il est néanmoins émis dans le milieu extérieur où il est capté ensuite par une dépendance filiforme et flexueuse de l’appareil femelle, le trichogyne (fig. 7 a). Dans tous ces cas, la rencontre des gamètes se fait par l’intermédiaire du milieu aquatique extérieur à la plante. Une exception cependant: les Algues vertes Conjuguées (ou Zygophycées) n’émettent aucun gamète à l’extérieur; une communication est d’abord réalisée entre les cellules, ou gamétocystes, qui contiennent les gamètes, avant que ceux-ci, demeurés à l’intérieur, ne s’unissent à leur tour (cystogamie).

Le passage au milieu terrestre a été accompagné d’une évolution des modes de fécondation adaptant ceux-ci à ce nouveau milieu. Le cas des Champignons, d’une part, celui des Végétaux supérieurs, d’autre part, illustrent cette adaptation.

Un certain nombre de Champignons inférieurs, d’ailleurs aquatiques, ont conservé une fécondation de type algal, un ou deux gamètes nageurs assurant, après leur libération, la fécondation (Phycomycètes aquatiques). Mais, chez le plus grand nombre des Champignons, ceux qui mènent une vie terrestre, l’évolution a supprimé la libération des gamètes et rendu possible une fécondation indépendante du milieu extérieur. Ainsi, la reproduction par siphonogamie est réalisée chez les Saprolegnia et divers autres Phycomycètes: des siphons copulateurs, émis par le gamétocyste mâle, pénètrent dans le gamétocyste femelle et déversent dans les oosphères les noyaux fécondants (fig. 7 b). Chez les Zygomycètes, les zygotes résultent d’une cystogamie , c’est-à-dire de la fusion de deux gamétocystes dont le contenu ne se différencie même plus en gamètes (cf. CHAMPIGNONS, fig. 5). La trichogamie des Ascomycètes est définie par la présence d’un trichogyne surmontant le gamétocyste femelle et dans lequel le contenu fécondant du gamétocyste mâle est déversé (fig. 7 a). Indiquons, pour achever cette revue rapide, que certains Ascomycètes et les Basidiomycètes ne différencient plus d’organes reproducteurs, la fécondation se faisant par union de deux cellules végétatives banales.

Une autre illustration de l’adaptation de la reproduction à la vie terrestre est fournie par les Végétaux supérieurs, les Cormophytes ou Archégoniates. Certains groupes, tels les Bryophytes et les Ptéridophytes, ont conservé un mode archaïque de fécondation: les gamètes mâles, mobiles, doivent nager dans de l’eau extérieure à la plante pour atteindre et féconder les gamètes femelles. Mais, avec les Spermaphytes ou Phanérogames, la reproduction sexuée est totalement libérée du milieu extérieur grâce à un mode de transport très particulier des gamètes mâles. Chez ces végétaux, en effet, ce sont les gamétophytes mâles, ou grains de pollen, qui sont disséminés et transportés en milieu aérien sur l’organe femelle récepteur: ovule chez les Gymnospermes, stigmate du pistil chez les Angiospermes. Sans quitter leur gamétophyte, les gamètes mâles sont alors conduits jusqu’au niveau du gamétophyte femelle et parfois même dans le gamète femelle par un tube pollinique qui s’insinue dans les tissus de l’ovule (Gymnospermes) ou d’abord dans ceux du pistil, puis ensuite dans ceux de l’ovule (Angiospermes). Il s’agit d’une siphonogamie (fig. 7 b) présentant une certaine analogie avec celle décrite précédemment chez les Champignons du genre Saprolegnia .

Deux groupes de Végétaux fort éloignés l’un de l’autre, les Champignons et les Spermaphytes, mais vivant principalement dans des habitats terrestres, ont donc réalisé des modes de fécondation dans lesquels le déplacement des gamètes est devenu totalement indépendant du milieu extérieur.

Détermination du sexe, sexualité relative

Les gamètes mâles et femelles sont produits par un même individu (espèces monoïques ou hermaphrodites) ou par deux individus différents (espèces à sexes séparés dites dioïques). Ces situations rappellent celles qui sont observées chez les animaux, mais, dans le cas des plantes, la distribution des sexes et par conséquent son déterminisme sont compliqués par l’alternance des générations et le fait que la sexualisation peut affecter l’une ou l’autre de celles-ci.

Dans le cas des végétaux monoïques, il n’existe aucune différence génétique chromosomique entre les cellules qui engendrent les organes mâles et celles qui engendrent les organes femelles. Le mécanisme de l’apparition de ces organes entre dans le cadre général de la différenciation cellulaire au cours du développement d’un organisme. Ces processus de différenciation sexuelle se manifestent parfois dans la phase haploïde du cycle (Champignons monoïques, Algues haploïdes monoïques, Bryophytes monoïques, Ptéridophytes homosporées) ou dans sa phase diploïde (Ptéridophytes hétérosporées, Phanérogames monoïques).

Par contre, dans le cas des végétaux dioïques, le sexe des individus est déterminé par des structures génétiques chromosomiques qui sont, selon les cas, mises en place à la méiose ou lors de la fécondation; on parle d’une détermination chromosomique du sexe.

Quand la sexualité est déterminée au moment de la méiose, la ségrégation des facteurs de sexualité entraîne la sexualisation de la phase haploïde du cycle avec formation de deux sortes de gamétophytes, les uns mâles, les autres femelles. Cela est observé chez un certain nombre de Champignons, d’Algues (Ulva , Laminaria ) et chez les Bryophytes dioïques. Ce déterminisme de la sexualisation de la phase haploïde est rapporté à l’existence de chromosomes sexuels, parfois morphologiquement distincts, réunis lors de la fécondation mais disjoints pendant la méiose. Ainsi chez l’Hépatique Sphaerocarpus texanus , un chromosome X, de grande taille, détermine le sexe femelle du gamétophyte et un chromosome Y, de plus petite taille et plus riche en hétérochromatine, induit la sexualité mâle (fig. 8).

Quand la sexualité est déterminée au moment de la fécondation, il en résulte, évidemment, une sexualisation de la phase diploïde sporophytique. Cela est principalement observé chez les Spermaphytes dioïques, mais aussi chez certaines Algues diploïdes (Fucus vesiculosus , Codium tomentosum ). L’existence de paires de chromosomes sexuels ou hétérochromosomes a été constatée chez certaines espèces dioïques; ainsi, la formule chromosomique du Melandrium album (Angiosperme) est-elle 2 A + XX pour les pieds femelles et 2 A + XY pour les pieds mâles (fig. 8). Lors de la ségrégation méiotique, chez cette espèce, les individus femelles produisent une seule sorte de gamétophytes et donc de gamètes de formule A + X (femelles monogamétiques), tandis que les plantes mâles engendrent deux types de gamétophytes et donc de gamètes de formules A + X et A + Y (mâles digamétiques). La fécondation, en rétablissant la diploïdie, est, statistiquement, à l’origine d’autant de plantes mâles que de plantes femelles. Cette détermination chromosomique du sexe de la phase sporophytique paraît donc très comparable à celle de nombreux animaux. Toutefois, une analyse du rôle relatif des hétérochromosomes et des autosomes, donc la balance génique sexuelle, révèle des différences sensibles. Alors que, pour la drosophile, par exemple, l’étude de la balance génique a montré que le sexe était essentiellement déterminé par le rapport A/X du nombre de ploïdie des autosomes A au nombre de chromosomes X, le chromosome Y ne jouant qu’un rôle négligeable, la même étude appliquée à Melandrium a révélé que la sexualisation de cette espèce est induite principalement, sinon exclusivement, par l’interaction de gènes portés par X et de ceux portés par Y, les autosomes n’intervenant que secondairement. Le cas de Melandrium est sans doute le mieux connu, mais les conclusions qu’on en tire ne peuvent être généralisées; ainsi, Rumex hastatus semble présenter un mécanisme de détermination du sexe plus proche de celui de la drosophile que de celui de Melandrium.

La notion de sexualité relative a été établie par M. Hartmann (1925) à la suite de ses travaux sur la reproduction de l’Algue Ectocarpus siliculosus. Cette espèce présente fondamentalement deux sortes de gamétophytes dont le sexe est génétiquement déterminé à la méiose. Mais Hartmann a démontré qu’en fait plusieurs catégories de gamétophytes, et non deux seulement, pouvaient être distinguées quant à leur comportement sexuel. Si certains gamétophytes sont incontestablement soit des mâles, soit des femelles, d’autres produisent des gamètes dont le comportement sexuel dépend de celui des gamètes avec lesquels ils sont confrontés; leur sexualité est donc relative. Par exemple, certains gamétophytes produisent des gamètes qui se comportent soit comme des gamètes mâles s’ils sont mis en présence de gamètes incontestablement femelles, soit comme des gamètes femelles s’ils se trouvent en présence de gamètes mâles typiques.

Depuis les travaux d’Hartmann, une sexualité relative a été observée chez d’autres Algues qu’Ectocarpus siliculosus (Bryopsis mucosa , Enteromorpha granulosa ) ainsi que chez certains Champignons (Dichtyuchus monosporus , Achlya ambisexualis ). Le déterminisme de la sexualité relative, peu étudié, est mal connu. Une analyse déjà ancienne (J. N. Couch, 1926) des résultats de croisements réalisés entre des souches purement mâles et des souches purement femelles de Dichtyuchus monosporus a montré que les thalles haploïdes issus de ces croisements présentent les divers degrés d’une sexualité relative (fig. 9). Cela conduit à penser que les phénotypes sexuels variés qui caractérisent une sexualité relative sont l’expression de différents équilibres entre gènes multiples intervenant dans la détermination des sexes dans la phase haploïde, et non le résultat de l’activité variable d’un seul gène sexuel.

Les phénomènes d’auto-incompatibilité

L’autofécondation, reproduction uniparentale, est interdite par la séparation des sexes, mais, de plus, chez certaines espèces bisexuées, un mécanisme physiologique s’oppose aux possibilités d’autofécondation. Il s’agit du phénomène d’auto-incompatibilité, connu chez les Végétaux supérieurs, les seules Angiospermes, semble-t-il, mais aussi, sous le nom d’hétérothallisme, chez de nombreux Thallophytes haploïdes.

L’auto-incompatibilité ou hétérothallisme chez les Thallophytes haploïdes

L’hétérothallisme a été mise en évidence chez des Champignons isogames (Mucor ) en démontrant que la formation d’organes reproducteurs et la fécondation n’étaient possibles qu’entre deux classes de thalles génétiquement distincts, mais morphologiquement identiques, désignés par les signes + et —. Tenu au départ pour la manifestation d’une différence sexuelle qui serait masquée par l’isogamie, l’hétérothallisme est considéré actuellement comme un phénomène distinct de la sexualisation. En effet, hétérothallisme et sexualité peuvent coexister sans se superposer et, de plus, les diverses modalités de l’hétérothallisme (hétérothallisme bipolaire et hétérothallisme quadripolaire) ne permettent pas de réduire celui-ci à un cas particulier de différenciation sexuelle (fig. 10).

L’hétérothallisme bipolaire s’exprime par l’existence de deux classes de thalles incompatibles désignées par + et —, ou mieux par A1 et A2. Il est déterminé par un couple d’allèles, A1 et A2, qui est disjoint lors de la méiose. On doit remarquer que, chez les espèces à sexes séparés, la disjonction de A1 et A2 est indépendante de celle des facteurs de sexualité.

L’hétérothallisme quadripolaire, fréquent chez les Champignons Basidiomycètes, est déterminé par deux couples d’allèles, A1 et A2, B1 et B2, et s’exprime par quatre classes de thalles haploïdes: A1B1, A2B1, A1B2, A2B2. La fécondation n’est possible qu’entre classes complémentaires (A1B1 et A2B2, A1B2 et A2B1). Les deux couples d’allèles sont disjoints indépendamment lors de la méiose.

L’hétérothallisme des Thallophytes se manifeste lors de confrontations d’organismes haploïdes issus d’une méiose au cours de laquelle les facteurs d’incompatibilité sont séparés. De ce fait, une fécondation entre deux individus produits par une même méiose, donc issus d’un seul zygote, demeure possible.

L’auto-incompatibilité chez les Angiospermes bisexuées

Chez les Angiospermes bisexuées, l’incompatibilité se traduit par l’impossibilité pour le pollen issu d’un génotype donné de réaliser une fécondation efficace lorsqu’il est déposé sur un pistil appartenant au même génotype (non-pénétration du tube pollinique dans le stigmate, inhibition de la croissance du tube pollinique dans le style, avortement du zygote ou du jeune embryon). Si les mécanismes physiologiques de cette incompatibilité ne sont pas encore élucidés, les contrôles génétiques sont assez bien compris et deux systèmes ont pu être définis: le système gamétophytique et le système sporophytique.

Dans le système gamétophytique (ou multiallélique), les allèles multiples d’un même gène, S, interviennent dans le contrôle de l’incompatibilité. Il a été démontré que les tubes polliniques ne peuvent croître normalement dans un style portant le même allèle qu’eux. Ainsi, dans un cas simple, celui du tabac, trois allèles d’incompatibilité, S1, S2, S3, déterminent trois classes de plantes auto-incompatibles: S1/S2, S1/S3, S2/S3. L’une d’elles, S1/S2, par exemple, produit des grains de pollen (haploïdes) du type S1 ou S2; les tissus diploïdes du style, de structure S1/S2, inhibent donc tous les grains de pollen issus de cette classe de plantes. Par contre, ce style est compatible avec les grains de pollen S3 produits par les autres classes. Le nombre d’allèles d’incompatibilité peut être très élevé; il atteint quelquefois plusieurs centaines chez certaines espèces.

Le système sporophytique (ou diallélique) est le plus souvent associé à une hétéromorphie florale, l’hétérostylie, qui permet d’identifier immédiatement les classes de plantes auto-incompatibles (Primula , Forsythia , Lythrum ). Dans les populations de primevères, par exemple, il existe deux catégories d’individus qui diffèrent, entre autres caractères, par la longueur du style de leurs fleurs: les plantes brévistylées et les plantes longistylées. Une pollinisation n’est efficace qu’entre ces deux catégories. Ces deux caractères sont respectivement déterminés par l’allèle S, dominant, et l’allèle s , récessif, les plantes brévistylées ayant un génotype S/s , le génotype des longistylées étant s /s. La pollinisation efficace ne peut être réalisée qu’entre les génotypes S/s et s /s .

L’auto-incompatibilité des Angiospermes, contrairement à l’hétérothallisme des Thallophytes, interdit une reproduction à l’intérieur d’une même structure génétique diploïde et favorise donc au maximum le brassage génétique.

Il est assez vraisemblable que les phénomènes d’hétérothallisme et d’auto-incompatibilité, en imposant une fécondation croisée, aient participé à l’évolution diversifiante de certains Thallophytes, les Champignons en particulier, et des Angiospermes.

4. Maîtrise de la reproduction

Le contrôle des différents aspects de la reproduction ayant pour finalité d’optimaliser les productions animales: insémination artificielle, synchronisation de l’œstrus, transfert d’embryons, induction de la parturition et de la lactation, stérilisation, etc. est actuellement réalisé ou en voie de l’être.

Nous passerons en revue quelques-unes de ces techniques qui révolutionnent l’élevage.

Insémination artificielle

À chaque accouplement, le mâle, en déposant son sperme dans le tractus génital femelle, émet des millions et même des milliards de spermatozoïdes. Or, pour chaque ovule fécondé, un seul gamète mâle participe à l’acte de la fécondation. Ce gaspillage de gamètes, c’est autant de facteurs héréditaires, de gènes, conditionnant des aptitudes économiques (viande, lait, laine...) qui sont perdus. Afin de tirer le meilleur parti des reproducteurs sélectionnés, l’homme a mis au point cette technique.

L’insémination artificielle consiste à recueillir le sperme par un artifice variable, à le diluer et à le conserver avant de l’introduire dans les voies génitales de la femelle au moyen d’instruments appropriés.

Elle a pour but:

– de supprimer le rapprochement sexuel afin d’éviter la transmission de certaines maladies infectieuses;

– de lutter contre certains cas de stérilité;

– d’utiliser au maximum les propriétés fécondantes d’un mâle de qualité en vue d’une amélioration rapide de l’élevage.

L’insémination artificielle aurait été pratiquée par les Arabes pour la reproduction des chevaux dès le XIVe siècle. Toutefois, la première expérience scientifique fut réalisée avec succès par Spallanzani (1779) qui obtint trois chiots 62 jours après avoir inséminé artificiellement une chienne de la race des Barbets. Claude Bernard proposait dans ses Cahiers de notes de féconder des chiennes ou des lapines en injectant du sperme dans la cavité péritonéale, à proximité des ovaires. La première mention scientifique de l’application de l’insémination artificielle au cheval est due au vétérinaire Repiquet (1887). E. Ivanow, qui pratiqua en Russie les premières inséminations artificielles chez les ovins entre 1901 et 1905, fit passer cette technique dans la pratique de l’élevage. Les premières démonstrations furent effectuées en France, à Alfort, par Letard (1937). Laplaud et ses collaborateurs mirent au point les techniques dès 1944 et le premier centre d’insémination fut créé, en France, en 1946. En 1950, on insémina pour la première fois des vaches avec du sperme congelé à — 79 0C.

En 1991, pour la France, plus de 5 millions de vaches (70 p. 100 des femelles en âge d’être fécondées), 750 000 brebis et 520 000 truies ont été inséminées artificiellement.

Rappelons que l’insémination artificielle comporte différentes phases pour lesquelles nous allons fournir des précisions techniques complétées par des renseignements relatifs aux catégories zoologiques en cause.

Récolte du sperme par différentes méthodes

L’utilisation du vagin artificiel consiste à faire éjaculer le mâle dans un réceptacle au moment où l’animal se cabre ou monte pour l’accouplement, soit sur un mannequin (sorte de cheval d’arçon adapté à l’espèce) figurant grossièrement une femelle, soit sur une femelle réelle mais qui ne sera pas inséminée.

Le corps du vagin artificiel (fig. 11) est constitué par un cylindre de métal, d’ébonite ou de caoutchouc épais. Le cylindre comporte un robinet permettant d’introduire de l’eau chaude dans une manche de caoutchouc mince qui double intérieurement le corps du vagin. À l’une des extrémités, on adapte un tube collecteur gradué, en verre, dans lequel le sperme éjaculé s’accumulera. L’autre extrémité ouverte sert à introduire le pénis dans le vagin artificiel.

Il va sans dire qu’avant chaque utilisation les éléments de cet appareil doivent être soigneusement lavés, désinfectés et que l’ensemble doit réaliser trois conditions: température, lubrification et pression, car le gland est très sensible à la température et à l’attouchement.

L’animal donneur est amené auprès du mannequin ou d’une femelle. Au moment où le mâle se cabre, l’opérateur saisit d’une main le fourreau du pénis afin d’introduire ce dernier dans le vagin artificiel, tenu de l’autre main. Dès que le pénis est au contact de la surface interne lubrifiée et tiède du vagin, l’animal éjacule. Aussitôt après l’éjaculation, le vagin artificiel est relevé de façon que le sperme s’écoule dans le tube collecteur. Après de nombreux examens au laboratoire, le sperme est dilué puis conservé avant son utilisation. Cette méthode est la plus utilisée.

L’électroéjaculation est l’émission de sperme provoquée par une excitation électrique au niveau des nerfs érecteurs et éjaculateurs. On utilise ainsi une électrode rectale bipolaire chez les bovins.

La stimulation mécanique est utilisée, par exemple, chez le chien. Mis en présence d’une chienne, l’opérateur masse à la main la base du pénis (légère pression et mouvement de va-et-vient de la main sur la peau du fourreau, dans la région des muscles bulbo-caverneux du pénis).

Dilution et conservation du sperme

La dilution permet de réaliser, à partir d’un seul éjaculat, l’insémination d’un grand nombre de femelles.

Les dilueurs ou milieux de dilution doivent répondre à un certain nombre de conditions:

– conserver le pouvoir fécondant des spermatozoïdes,

– maintenir l’intégrité de la structure des cellules,

– fournir l’énergie nécessaire au métabolisme des cellules,

– tamponner les variations de pH,

– éviter le développement de germes microbiens.

Le sperme frais peut se conserver à la température de + 5 0C pendant 1 à 4 jours. La congélation du sperme à basse température a marqué un progrès considérable dans sa conservation. Cela fut possible à partir du moment où l’on a réussi, après avoir refroidi des cellules vivantes, à les conserver très longtemps et à obtenir leur reviviscence après réchauffement.

Applications particulières (tableau)

Bovins

La récolte du sperme se pratique au moyen d’un vagin artificiel. Un prélèvement tous les 6 jours n’est pas préjudiciable à la qualité du sperme.

Pour le sperme frais, on utilise des dilueurs contenant du jaune d’œuf, des dilueurs à base de lait et des dilueurs gélatinés.

Pour le sperme congelé, les dilueurs le plus souvent utilisés sont au jaune d’œuf citraté, ou au lait.

Le volume de sperme utilisé a été diminué jusqu’à 0,2 ml. Dans les meilleurs cas, le nombre de spermatozoïdes peut être réduit à 5 憐 106 par dose. Après dilution, le sperme à congeler est réparti dans des paillettes d’acétate de cellulose. Ces paillettes sont congelées dans des vapeurs d’azote liquide. L’abaissement de la température de + 5 0C à — 196 0C est réalisé en une vingtaine de minutes. On peut utiliser la semence plusieurs années après la congélation.

Ovins

Le spermatozoïde du bélier est très fragile, mais la congélation peut être obtenue. La dose inséminée contient 500 憐 106 spermatozoïdes dans un volume de 0,2 ml.

Équins

Il est nécessaire de diluer fortement et rapidement la semence d’étalon après sa récolte. L’insémination de sperme frais utilisé dans la journée est au point. La conservation du sperme congelé a été réalisée avec succès.

Porcins

Le sperme dilué, conservé entre 15 et 20 0C, conserve son pouvoir fécondant pendant 3 jours. La congélation est possible. Le sperme reste fécondant plusieurs années.

Autres animaux

L’insémination artificielle peut être pratiquée chez les Carnivores, les Rongeurs et Lagomorphes, et aussi chez les Oiseaux domestiques.

Synchronisation de l’œstrus

L’accroissement du nombre des grandes unités d’élevage, la mise au point des techniques d’insémination artificielle et l’avantage économique représenté par la possibilité de fournir d’abondantes productions au moment le plus favorable font que la planification de la reproduction, grâce à la maîtrise du cycle sexuel ou synchronisation de l’œstrus, s’avère souhaitable sinon indispensable.

Principes de la méthode

Le rôle inhibiteur de la progestérone sur l’ovulation, chez les femelles du rat et du cobaye, a été reconnu depuis longtemps. La progestérone, agissant par rétroaction négative sur l’hypothalamus, diminue le taux des hormones gonadotropes avec réduction de la croissance folliculaire. Après l’arrêt des injections de progestérone, l’œstrus et l’ovulation se produisent régulièrement.

Mais cette méthode présentait des inconvénients: administration par injections; taux de fécondité relativement bas, du moins lors du premier œstrus.

La découverte essentielle fut la possibilité d’administration de progestagènes par voie vaginale.

Chez la brebis, on utilise des éponges en polyuréthanne imprégnées de progestérone à la dose de 500-800 mg, insérées dans la partie antérieure du vagin où elles sont maintenues pendant 17 jours. L’œstrus survient 2 ou 3 jours après l’enlèvement de l’éponge; le pourcentage de fécondation est excellent.

Mais, chez la truie, l’irrégularité des résultats, le faible taux de fécondité, la nécessité d’injections quotidiennes et la présence fréquente de kystes folliculaires limitent l’utilisation de la progestérone.

La découverte des progestatifs de synthèse ouvre une nouvelle voie.

Produits utilisés

Les progestatifs stéroïdiens sont bien sûr tout indiqués, et on utilise le plus souvent ceux dont la formule chimique est donnée dans la figure 12.

Plus récemment encore, des médiateurs chimiques tels que les prostaglandines, et en particulier la Pg2 見 (acide 9 見, 11 見, 15 見-trihydroxy-5cis , 13-trans -prostadiénoïque), qui a une activité lutéolytique chez les Bovins et les Ovins (fig. 13).

Des analogues de synthèse sont utilisés, comme le cloprosténol.

Applications

Bovins

Administration de deux injections de cloprostenol à 11 jours d’intervalle. Le taux de fertilité est normal quand l’insémination est pratiquée 72 heures et 96 heures après.

Pose d’un dispositif intravaginal libérant de la progestérone pendant 9 jours et injection de cloprosténol 1 jour avant d’enlever le dispositif. L’œstrus survient entre 30 et 60 heures après.

Ovins

Injection de cloprosténol à 8 jours d’intervalle avec œstrus moins de 48 heures après.

Pose d’éponges vaginales imprégnées d’acétate de flurogestérone ou d’acétate de médroxyprogestérone qui restent en place 10 à 16 jours. L’œstrus apparaît 24 à 36 heures après le retrait. On synchronise l’ovulation dans le troupeau en ôtant toutes les éponges le même jour.

Porcins

L’administration d’altrenogest dans la nourriture pendant 18 jours détermine les chaleurs 6 jours plus tard.

Transfert d’embryons

Principes de la méthode

Cette méthode consiste à prélever plusieurs embryons obtenus après superovulation et fécondation in vivo d’une femelle donneuse et à les transférer dans l’utérus d’une femelle receveuse où ils poursuivront leur développement jusqu’à la parturition, cela dans le but de multiplier la descendance de femelles au-delà de leurs possibilités naturelles. Déjà appliquée à diverses espèces domestiques, cette technique s’est développée en France, à partir de 1979, chez les bovins.

Application chez les bovins

La méthode consiste à prélever, 7 ou 8 jours après l’insémination sur une vache donneuse, d’excellent potentiel génétique, soumise à une technique de superovulation, plusieurs embryons qui sont ensuite introduits dans les cornes utérines de vaches préalablement synchronisées avec la femelle donneuse.

Ce procédé est actuellement proposé aux éleveurs sélectionneurs afin de contribuer à l’amélioration génétique du cheptel.

Technique

Superovulation hormonale. En phase lutéale (10e jour environ du cycle), on injecte de la PMSG et, 48 heures plus tard, un agent lutéolytique (cloprosténol par exemple). Ce traitement permet de provoquer de 1 à 40 ovulations chez la vache donneuse. Lors de cet œstrus superovulatoire, on pratique deux inséminations artificielles (fig. 14).

Collecte des embryons . À l’aide d’une sonde introduite dans le col de l’utérus de la vache donneuse, on injecte une solution physiologique tampon phosphate qui permet d’irriguer la cavité utérine et de récupérer les embryons de 6 à 12 jours après les inséminations.

Examen et conservation des embryons. Un examen morphologique est pratiqué (taille, stade de développement du blastocyste). Des critères d’appréciation de la viabilité des embryons sont en cours d’étude.

La possibilité d’utiliser des embryons congelés une fois mise au point leur conservation à basse température ôte les contraintes de la synchronisation des vaches receveuses. Par ailleurs, le sexage des embryons (analyse chromosomique, détection de l’antigène HY, utilisation d’une sonde moléculaire spécifique du chromosome Y) apporte un avantage supplémentaire.

Transfert des embryons. La mise en place ou inovulation des embryons dans la lumière de la corne utérine se fait à l’aide d’un pistolet d’insémination introduit dans le col de l’utérus des vaches receveuses ayant été préalablement synchronisées avec un analogue d’une prostaglandine. Ultérieurement, la gestation est contrôlée par un diagnostic précoce à 21 jours (dosage de progestérone dans le sang ou le lait).

Induction de la parturition

Dans le cadre d’une parturition programmée, pour prévenir des dystocies ou pour des raisons médicales (vie de la gestante compromise), il peut être utile d’avancer la date de mise bas. Sachant que l’élévation du taux de corticostéroïdes est un des facteurs qui déclenche la parturition, les chercheurs ont provoqué le part en administrant aux femelles gravides différents composés de la famille des corticostéroïdes (dexaméthasone, bétaméthasone, fluméthasone). Mais ces produits ne sont pas sans danger pour la mère (diminution des défenses immunitaires) et ne peuvent avoir une action que si le fœtus est vivant.

Les analogues de la prostaglandine Pg2 見, qui s’avèrent efficaces même sur un fœtus mort et qui, en déclenchant la lutéolyse du corps jaune, entraînent une baisse du taux de progestérone, induisent la parturition. Ainsi, une administration de Pg2 見 provoque chez la vache un vêlage 3 jours après.

Induction de la lactation

Le principe consiste à reproduire chez une femelle non gravide l’état hormonal existant chez une femelle en fin de gestation et au moment de la parturition.

La croissance de la glande mammaire est obtenue grâce à l’administration conjuguée d’œstradiol (E2) et de progestérone pendant 7 jours consécutifs. En cessant ce traitement, le taux de prolactine augmente. L’adjonction d’hormones lactogènes telles que les glucocorticoïdes accroît la production lactée. Ainsi, chez la vache, après injections d’œstradiol et de progestérone pendant 7 jours, l’animal reçoit de l’hydrocortisone pendant 5 jours (du 18e au 23e jour à compter du départ du traitement). La traite peut débuter le 21e jour à partir du début du traitement, et la production lactée atteint son maximum au bout de 30 à 40 jours.

Interruption de gestation

Dans le cas de saillies accidentelles et indésirables, de rétention fœtale, la gestation peut être interrompue rapidement par induction de la régression du corps jaune.

Chez la vache, l’emploi de la prostaglandine Pg2 見 provoque l’avortement durant les 100 premiers jours de la gestation. L’avorton est expulsé 2 à 5 jours après, le retour de l’œstrus est très rapide.

Chez la chienne et la chatte, l’administration d’œstrogènes (diéthylstilbœstrol) respectivement avant le 15e et le 13e jour après la saillie permet d’interrompre la gestation. L’emploi de cette technique devra rester exceptionnel, et on n’en fera pas usage pour maîtriser la reproduction.

Stérilisation médicale

En dehors de la stérilisation chirurgicale (castration, vasectomie...), la maîtrise médicale de la reproduction chez les femelles carnivores peut se réaliser en utilisant des progestagènes ou des stéroïdes à activité androgénique. Citons l’acétate de médroxyprogestérone, l’acétate de chlormadinone et l’acétate de mégestrol pour les progestagènes et le mibolérone pour la seconde catégorie citée.

Ces molécules inhibent la sécrétion des gonadotrophines hypophysaires en bloquant la libération de l’hormone hypothalamique GnRH. Il ne se produit ni maturation folliculaire ni chaleurs mais un anœstrus de durée et d’intensité très variables selon les produits administrés (de quelques jours à 14 mois chez la chienne).

Notons que, pour les mâles, on utilise également des progestagènes qui inhibent là aussi la libération de FSH et de LH (spermatogenèse et synthèse d’androgènes stoppées).

Modification expérimentale du sex-ratio

La valeur du sex-ratio représente le rapport du nombre de naissances d’animaux du sexe mâle au nombre total de naissances. De très nombreux essais de modification expérimentale du sex-ratio ont été tentés. Mais, actuellement, aucune méthode pratique ne permet d’obtenir une déviation systématique du sex-ratio.

Chez les bovins, les manipulations du sperme par centrifugation, sédimentation et électrophorèse sont les plus anciennes. Une modification du pH du sperme par adjonction au diluant d’acide ascorbique ou de soude a permis d’obtenir respectivement plus de femelles et plus de mâles.

Dans la ration, le facteur calcium favoriserait la naissance de femelles, et le facteur potassium la naissance de mâles.

Au moment de l’insémination, une calcithérapie réservée aux vaches à haut niveau de production et ayant produit un veau de sexe femelle au terme de la gestation précédente pourrait favoriser une nouvelle naissance de femelle tout en améliorant la fertilité.

Manipulations des gamètes et des embryons de Mammifères

La manipulation et la culture des gamètes et des embryons en dehors du tractus génital femelle ont fait des progrès considérables. Nous envisagerons successivement la maturation ovocytaire, la fécondation in vitro, la cryopréservation, la manipulation d’embryons, le clonage, les chimères, les jumeaux et la parthénogenèse.

Maturation ovocytaire

L’ovaire des Mammifères possède un important stock d’ovocytes dont seule une faible proportion évoluera jusqu’à la maturation et à l’ovulation (1/200) chez la rate. Or le moyen le plus sûr d’obtenir la maturation complète des ovocytes chez les espèces domestiques consiste à les cultiver à l’intérieur de follicules intacts. Cela limite donc l’utilisation à grande échelle de cette méthode. Une fois la maturation extrafolliculaire maîtrisée, on disposera d’un grand stock d’ovocytes.

Fécondation in vitro

La fécondation des ovocytes mûrs peut être accomplie in vitro avant transfert, ou in vivo après transfert dans les oviductes de femelles receveuses au moment de l’insémination.

La production de jeunes issus d’ovocytes fécondés in vitro a été réalisée notamment chez le lapin, la souris, le rat et la vache. L’approvisionnement en ovocytes est obtenu après superovulation de femelles donneuses, maturation d’ovocytes immatures prélevés dans les ovaires de femelles impubères.

Les spermatozoïdes sont recueillis après récolte de sperme dans un vagin artificiel.

Le milieu de fertilisation, dont le pH est de 7,7, contient les minéraux Na+, K+, Cl, Ca2+, Mg2+.

Cryopréservation

La congélation du sperme de Mammifères est réalisée depuis 1950. Cette technique a permis le développement considérable de l’insémination artificielle.

Les premiers embryons congelés de Mammifères congelés ont été obtenus en 1972 chez la souris. Depuis, les embryons de différentes espèces, après congélation, ont donné naissance à des jeunes. Les taux de survie sont supérieurs à 50 p. 100.

Des banques de lignées consanguines, de mutants ont été créées chez la souris. En élevage, le stockage d’embryons permettra aussi bien de conserver des races rustiques que d’améliorer rapidement le potentiel génétique d’une population.

Par ailleurs, il est maintenant possible de congeler des ovules de différentes espèces de Rongeurs. Ces ovules ont pu être fécondés in vitro.

Les spermatozoïdes de différentes espèces peuvent pénétrer in vitro dans l’ovule de hamster préalablement débarrassé de sa zone pellucide. Il sera possible de tester le pouvoir fécondant du sperme. Des banques d’ovocytes hamster en tant que «récepteurs» faciliteraient les examens en cas d’infertilité du mâle.

Manipulation d’embryons

La possibilité de manipuler l’embryon en vue d’éliminer ou de réparer certaines tares et anomalies du patrimoine hériditaire, ou en vue d’introduire de nouvelles caractéristiques génétiques, sera très intéressante. De même, la détermination du sexe des embryons, permettant d’éliminer certaines affections liées au sexe, d’éviter le free-martinisme (infécondité du fœtus femelle chez les faux jumeaux) et d’obtenir le sex-ratio souhaité, présente des avantages considérables.

Dans le seul domaine zootechnique, les perspectives d’applications des manipulations d’embryons vont de la constitution de banques d’embryons à la création de nouvelles races par manipulation nucléaire (micro-injection d’ADN...).

Clonageanimal

Le clonage animal consiste à développer, à partir d’une cellule diploïde, une progéniture dont les individus sont identiques.

Chez les Mammifères, le clonage a été réussi notamment chez la souris, le veau, le mouton et le lapin. On implante des noyaux de cellules embryonnaires d’une lignée de souris dans un ovule actif, mais énucléé, d’une autre lignée, et, en transférant ces œufs dans l’utérus d’une troisième lignée porteuse, on obtient des souriceaux génétiquement identiques aux embryons donneurs de noyaux. Des cellules isolées d’embryons (blastomères) de rat, de lapin, de bovin peuvent se développer jusqu’à terme lorsqu’elles sont placées dans une coque pellucide réimplantée chez une femelle receveuse.En 1996, Ian Wilmut a obtenu le développement complet d’une brebis (la célèbre Dolly) en introduisant dans un ovocyte énucléé une cellule somatique apportant le noyau nécessaire.

Chimères

On appelle chimère un organisme composé de deux variétés de cellules ayant des origines génétiques différentes, c’est-à-dire provenant de deux zygotes différents.

On a pu obtenir une chimère de souris en fusionnant en un seul massif cellulaire des paires d’embryons (morula) privés de leur zone pellucide. Des agneaux à quatre parents distincts pourront être ainsi obtenus ainsi que des bovins en vue de la création de nouvelles races pouvant cumuler de multiples potentialités intéressantes (productions améliorées, résistance aux maladies, rusticité...).

Jumeaux

L’objectif recherché est l’obtention de jumeaux à partir d’un seul embryon.

Les naissances gémellaires chez les bovins sont peu fréquentes. On distingue:

– des jumeaux dizygotes (faux jumeaux) provenant de deux ovocytes fécondés par deux spermatozoïdes différents; il est possible d’augmenter le nombre des naissances gémellaires dizygotes après une superovulation modérée ou un transfert de deux embryons dans l’utérus d’une receveuse; mais les femelles naissant avec un jumeau mâle sont stériles (phénomène du free-martinisme), ce qui limite l’intérêt de cette manipulation;

– des jumeaux monozygotes (vrais jumeaux) issus du dédoublement d’un même œuf; ils possèdent le même patrimoine génétique et sont donc du même sexe; leur fréquence naturelle d’apparition est très faible (de 0,1 à 0,4 p. 100 du total des naissances).

La production de jumeaux monozygotes a été tentée avec plus ou moins de succès.

Après collecte sur des vaches donneuses et élimination de la zone pellucide qui les enveloppe, on sectionne en deux parties égales les embryons. Chaque moitié d’embryon est replacée dans une zone pellucide vide. Les couples d’embryons monozygotes sont alors transplantés dans l’utérus d’une femelle receveuse. Cette méthode permet d’obtenir des taux de gémellité supérieurs à 60 p. 100.

Après microchirurgie de l’embryon, culture in vitro et analyse chromosomique, on peut espérer créer des banques d’embryons congelés, sexés et monozygotes. L’application pratique de ces méthodes est à envisager dans un avenir relativement proche.

Parthénogenèse

La parthénogenèse est le développement d’un ovule sans fécondation, ce qui doit obligatoirement fournir des individus femelles. Aucun Mammifère n’a été produit par parthénogenèse mais seulement des embryons parthénogénétiques.

Chez la souris, on élimine un des pronuclei de l’œuf, et on obtient le dédoublement de l’autre avec segmentation et développement. Les souriceaux étaient des doubles homozygotes de la mère donneuse d’ovules.

La parthénogenèse partielle d’ovules de souris a été réalisée en fusionnant in vitro deux ovocytes d’une même souris donneuse.

Les manipulations des gamètes et des embryons ont permis d’enregistrer des progrès spectaculaires en zootechnie et en biologie. La production d’embryons à haut potentiel génétique doit améliorer rapidement les performances de nos animaux domestiques. La manipulation d’embryons constituera un outil précieux pour l’étude des processus de différenciation cellulaire, pour mieux connaître les cartes chromosomiques des différentes espèces. Les ovocytes, en tant que réactifs biologiques, serviront pour analyser des propriétés toxiques et tératogènes des nouvelles molécules chimiques.

Ces nouvelles technologies, aux retombées économiques considérables, mais aux risques biologiques un peu inquiétants, appellent la plus grande vigilance de la part des scientifiques et des gouvernements. Des détournements idéologiques (eugénisme, etc.) peuvent toujours apparaître. Le maintien de la diversité génétique fait la richesse des espèces.

reproduction [ r(ə)prɔdyksjɔ̃ ] n. f.
• 1690 « action par laquelle une chose renaît »; de reproduire, d'apr. production
Action de reproduire, de se reproduire. ILa reproduction.
1Fonction par laquelle les êtres vivants d'une espèce produisent d'autres êtres vivants semblables à eux-mêmes; production d'êtres vivants par la génération. « Cette abominable loi de la reproduction qui fait de la femme normale une simple machine à pondre des êtres » (Maupassant). Reproduction sexuée des végétaux ( hologamie) , des animaux ( gamète, gonade) . Reproduction sans fécondation. androgenèse, parthénogenèse. Reproduction asexuée. bourgeonnement, gemmation, scissiparité, sporulation; clonage; multiplication. Démogr. Taux de reproduction, mesurant le remplacement d'une génération par la suivante.
2Action de se reproduire ou de faire se reproduire. Rapprochement des individus mâle et femelle pour la reproduction. accouplement, coït; zool. monte, saillie. Reproduction par insémination artificielle. Jument poulinière, destinée à la reproduction. reproducteur. Méthode de reproduction. croisement, hybridation, métissage, sélection. La reproduction des plus aptes. eugénique. Reproduction des plantes par semis, bouturage, marcottage.
II(1758 « action de recréer, de reconstruire ») Action de reproduire par imitation, par répétition; ce qui est ainsi reproduit.
1Action de représenter, de donner l'équivalent fidèle de. La reproduction de la nature par l'art. imitation . Reproduction des sons par un magnétophone. Reproduction du son en stéréophonie.
2(1870) Copie (d'un objet). Reproduction d'une clé.
3(1839) Le fait de reproduire (un original), d'en multiplier les exemplaires par un procédé technique approprié. Reproduction d'un tableau. Droit de reproduction, pour des passages cités. Reproduction interdite, réservée. Reproduction frauduleuse de logiciels. piratage. Absolt « La reproduction a créé des arts fictifs [...] en faussant systématiquement l'échelle des objets » (Malraux). Le délit de contrefaçon suppose la reproduction matérielle et la mauvaise foi. Procédés de reproduction. autocopie, gravure (3o), imprimerie, photocopie, photographie, polycopie, reprographie, xérographie. Reproduction au stencil, au duplicateur, au moyen d'un cliché. Service de reproduction des thèses dans une université.
Par ext. Une, des reproductions. Image, réplique obtenue en partant d'un original, au moyen d'un procédé de reproduction. Reproductions en noir et blanc, en couleur. « une haïssable reproduction lithographique de la Sainte Face » (Bloy). Reproduction d'un tableau dans un livre d'art.
4Didact. Le fait de perpétuer, de se perpétuer, par une production analogue. La reproduction du savoir, des modèles idéologiques.
III(1758) Écon. Lois de la reproduction : schéma décrivant la répétition continue du cycle de production capitaliste. — Reproduction simple : reconstitution à l'identique du capital, l'intégralité de la plus-value étant dépensée de façon improductive. — Reproduction élargie : accroissement du capital résultant du processus d'accumulation de la plus-value.

reproduction nom féminin (de reproduire, avec l'influence de production) Propriété caractéristique des structures vivantes qui consiste à édifier, à toutes les échelles d'observation (macromolécule, cellule, organisme), des structures vivantes identiques ou presque identiques à elles-mêmes. Fait de se produire une nouvelle fois, de se répéter : La reproduction des mêmes erreurs. Action de reproduire les êtres, les choses, d'en donner une représentation fidèle : L'art n'est jamais la reproduction pure et simple de la réalité. Action d'exécuter quelque chose afin d'obtenir une réplique exacte de l'original : Reproduction de clefs. Action de restituer aussi fidèlement que possible l'original : Techniques de reproduction des sons. Action de reproduire, de publier de nouveau un écrit ou une illustration : La reproduction d'un article, dans un ouvrage. Imitation d'un œuvre originale : Une reproduction de tableau imprimée en quadrichromie. Sociologie Processus par lequel une société se perpétue dans ses institutions et sa culture par la socialisation, l'éducation et la formation de ses jeunes, pour qu'ils assument les mêmes fonctions et jouent les mêmes rôles sociaux que ceux qui la caractérisent. ● reproduction (expressions) nom féminin (de reproduire, avec l'influence de production) Taux brut de reproduction, nombre moyen de filles mises au monde par un groupe donné de femmes, tout au long de la période de procréation. Taux net de reproduction, nombre moyen de filles par femme parvenant à l'âge de la procréation, issues d'un groupe donné de femmes. (Le remplacement des générations exige que le taux net de reproduction soit supérieur à 1.) Droit de reproduction, droit de fixer matériellement une œuvre littéraire ou artistique par tous procédés qui permettent de la communiquer au public. (Le droit de reproduction, qui exige le consentement de l'auteur, est un de ses droits patrimoniaux.) Gravure de reproduction, gravure, estampe qui, par opposition à une gravure originale, n'a pas été exécutée par l'auteur du dessin. ● reproduction (synonymes) nom féminin (de reproduire, avec l'influence de production) Fait de se produire une nouvelle fois, de se répéter
Synonymes :
- renouvellement
- répétition
Action de reproduire les êtres, les choses, d'en donner une...
Synonymes :
- calque
- double
- imitation
- réplique
Imitation d'un œuvre originale
Synonymes :
- copie
Gravure et lithographie. Gravure de reproduction
Synonymes :
- gravure d'interprétation

reproduction
n. f.
d1./d Processus par lequel un être vivant produit d'autres êtres semblables à lui-même par la génération.
d2./d Action de reproduire, d'imiter. Reproduction photographique.
|| Résultat de cette action; imitation, copie, réplique. Une reproduction de "la Joconde".
|| ECON Reproduction simple (ou élargie): reconstitution des conditions de production à l'identique (ou sur des bases accrues).
Encycl. Biol. - La reproduction asexuée s'effectue à partir d'un seul individu, soit par fragmentation naturelle ou accidentelle, soit par bourgeonnement, essaimage. Elle aboutit à la production d'individus rigoureusement semblables à l'individu initial. Ce mode de reproduction est répandu chez les bactéries, les végétaux, les invertébrés inférieurs, et n'existe chez les animaux supérieurs que dans quelques rares cas. Dans la reproduction sexuée, répandue chez de nombreux végétaux et chez la plupart des animaux, il y a fusion (fécondation) des équipements génétiques de deux cellules et association des gènes portés par des individus différents. V. méiose.

⇒REPRODUCTION, subst. fém.
A. — 1. BIOLOGIE
a) Action par laquelle les êtres vivants produisent des êtres semblables à eux-mêmes. Synon. génération, multiplication, procréation, propagation. Adam était immortel par la reproduction; il restera immortel par la reproduction. Seulement ayant goûté à la science, il connaîtra la mort, et c'est ainsi qu'il mourra (P. LEROUX, Humanité, 1840, p. 528):
1. Nous inventerions bien quelque fusée interplanétaire dont nous céderions le brevet aux Américains, moyennant la livraison de deux ou trois millions de béliers. Trois millions, fichtre! En petit-fils de paysan, je trouvai que Bichat n'avait que des idées de puceau sur la capacité de reproduction de la race ovine.
ABELLIO, Pacifiques, 1946, p. 26.
SYNT. Reproduction des animaux, des plantes, des virus, du gibier, des poissons; reproduction sexuelle, sexuée, asexuée, agame, virginale, ovipare, vivipare, alternante, annuelle, unisexuée, naturelle; reproduction virale, animale, végétale; reproduction par graine, par bourgeonnement, par gamète, par spore, par parthénogénèse; facteur, mécanisme, système, organe, cycle, instinct, faculté, mode, loi de reproduction; physiologie de la reproduction; reproduction eugénique.
DÉMOGR. Taux brut, net de reproduction. ,,En démographie on appelle taux de reproduction le nombre de naissance de filles, pour 1 000 femmes qui sont en âge de procréer. Le taux brut de reproduction donne la descendance moyenne d'une génération de femmes en l'absence de mortalité (dont tient compte le taux net)`` (BIROU 1966).
b) P. ext. Fait d'assurer la perpétuation, la continuité de soi-même, d'une race, d'une espèce. Le devoir religieux qui lui est imposé [au Sultan] cette nuit-là [la première nuit de Baïram] répond autant que possible de la reproduction de la race (NERVAL, Voy. Orient, t. 3, 1851, p. 262). Les êtres vivants ne préparent l'avenir que par habitude et la reproduction de l'espèce n'est souvent qu'une forme de l'imprévoyance, même chez les hommes (RUYER, Esq. philos. struct., 1930, p. 341).
P. iron. Les Grecs n'avaient pas de foyers; ils possédaient au logis une machine à reproduction, niaise et lourde, qui était là pour leur donner des enfants; ils avaient au dehors des amantes, toutes blanches et toutes lumineuses, belles et savantes (ZOLA, Mes haines, 1866, p. 92).
c) Spécialement
AGRIC., ÉLEV. Production de plantes, d'animaux à des fins économiques, grâce à l'intervention de l'homme. Reproduction par bouturage, par sélection de souches, par greffe, par insémination. On pourrait comparer ces organisations végétales aux plantes qu'on multiplie par bouture et dont on ne fait point servir les fruits et les graines à la reproduction de la plante-mère (PASTEUR ds Travaux, 1881, p. 282). Ce mode de reproduction [la fécondation artificielle des vaches] tardivement adopté en France y connaît récemment des progrès rapides (WOLKOWITSCH, Élev., 1966, p. 81).
MICROBIOL. Multiplication par division, scissiparité d'une cellule, d'un organisme unicellulaire. La reproduction des organismes unicellulaires consiste en cela même, l'être vivant se divise en deux moitiés dont chacun est un individu complet (BERGSON, Évol. créatr., 1907, p. 14).
2. PHYSIOL., vieilli. Reconstitution d'un membre, d'une partie du corps mutilée chez certains animaux. Synon. mod. régénération. Étudier la reproduction des pattes d'écrevisse ou de salamandre — il y a un germe à la base du membre sans doute (Cl. BERNARD, Notes, 1860, p. 57).
3. P. anal. Génération, production d'éléments inanimés semblables. Reproduction des neutrons. Après avoir, dès 1949, montré la possibilité d'une solution, J. Von Neumann en proposait en 1952, deux modèles détaillés. Alors que le premier se rapproche des modes de reproduction des cristaux et sans doute des gènes, le second fait penser à la reproduction animale (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 109).
B. — Action par laquelle on produit une copie, une représentation de quelque chose.
1. Le fait de produire une représentation plus ou moins fidèle du réel, d'une réalité. Reproduction du réel. [Renoir] a le sens inné d'une notion naturelle, niée par l'académisme, celle du but même de la peinture, qui n'est pas la reproduction, mais l'interprétation des détails (MAUCLAIR, Maîtres impressionn., 1923, p. 109):
2. Chez Molière, plus que chez aucun auteur dramatique en France, le théâtre, si profondément vrai, n'est pas du tout, quant aux détails, une copie analysée, ni une imitation littéralement vraisemblable d'alentour; c'est une reproduction originale, une création, un monde.
SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 3, 1848, p. 226.
2. a) [En parlant le plus souvent d'une œuvre d'art] Le fait d'exécuter une copie, une imitation de quelque chose, à l'aide d'une technique, dans un format, une matière différents de l'original. Synon. duplication. Reproduction en petit, en grand, en couleur, en cire, en bois; reproduction en lithographie, en photographie, en fac-similé, en pyrogravure, en tapisserie. En 1900, la lithographie de reproduction est morte; le bois de reproduction garde encore quelque vie grâce au livre illustré; la taille-douce de reproduction se prolonge grâce à l'enseignement de l'École des Beaux-Arts (DACIER 1944, p. 129).
P. méton. L'objet ainsi produit. Synon. copie, fac-similé, réplique. Reproduction en noir et en couleurs. Ses livres d'art étaient près de la fenêtre, dans une bibliothèque tournante. Je le revois, au cours d'une conversation, rejetant la couverture dont il enveloppait ses jambes, pour aller jusque-là choisir un de ces beaux ouvrages à reproductions (MARTIN DU G., In memor., 1921, p. 574). Elle habitait, dans un hôtel de la rue Saint-Sulpice, une petite chambre très bleue; elle avait accroché aux murs des reproductions de Cézanne, de Renoir, du Gréco, et les dessins d'un ami espagnol qui voulait peindre (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 284).
b) Mod. Le fait de produire des copies d'un original à l'aide d'une technique, d'un procédé particulier. Synon. duplication. Reproduction par photocopie, par reprographie, par moulage; reproduction sur microfilm, sur bande vidéo; reproduction de clé, de document; système, technique de reproduction. D'ailleurs les procédés de reproduction se perfectionnant de jour en jour, les formes les plus courantes de l'épreuve photographique sont actuellement l'héliogravure, l'offset ou le simili (PRINET, Phot., 1945, p. 49). Le mot « microfilm » qui fait partie du vocabulaire international, est né de l'emploi des films de cinéma de 35 puis de 16 mm pour la reproduction à échelle réduite sur une pellicule négative de documents de toute espèce (L'Hist. et ses méth., 1961, p. 783).
En partic. Le fait de restituer un son direct ou enregistré par un procédé technique permettant soit une écoute directe soit une écoute différée. Reproduction par haut-parleur, par bande magnétique, sur disque. En effet, on demande seulement au téléphone une reproduction intelligible de la parole (Arts et litt., 1935, p. 40-4):
3. Une double révolution a permis de franchir le dernier pas: la « longue durée » offrant la possibilité d'une écoute suivie et les progrès de la « haute fidélité » — avec la stéréophonie — qui, dans des conditions idéales, permettent la reproduction exacte de l'écoute directe, ont, en dix ans, bouleversé les données de l'invention de Charles Cros.
SAMUEL, Art mus. contemp., 1962, p. 631.
c) Le fait de recopier, de retranscrire, d'imprimer un écrit, un propos partiellement ou intégralement. Les rédacteurs sont chargés d'assurer la reproduction des séances publiques, conformément aux règles prescrites par l'Assemblée. Ils surveillent les copies, les envoient à l'imprimeur, corrigent les épreuves; ils prennent les mêmes soins pour les procès-verbaux des séances secrètes, quand l'Assemblée en ordonne l'impression (Règlement Ass. nat., 1849, p. 41). P. méton. Le texte ou l'écrit ainsi reproduit. Synon. double, duplicata. Je vous envoie, avec une bonne poignée de main, la reproduction du paragraphe de Théophile Gautier qui vous est consacré (MALLARMÉ, Corresp., 1868, p. 274).
d) DR. Copie et diffusion d'une œuvre littéraire, artistique que l'auteur ou le propriétaire de cette œuvre a le droit de permettre ou de refuser. Synon. édition. J'aurai même grand soin, dût-il m'en coûter cher, de mettre à la première page de mes livres que la reproduction en est permise, afin qu'on voie que je ne suis pas de la Société des gens de lettres, car j'en renie le titre d'avance (FLAUB., Corresp., 1854, p. 17). [Les producteurs de disques] revendiquent deux sortes de droits:le droit d'autoriser et d'interdire la reproduction des disques (Disques Fr., 1963, p. 12).
Droits de reproduction. Somme d'argent perçue par le propriétaire ou l'auteur d'une œuvre pour chaque copie de celle-ci. Synon. copyright. Enfin, ayant une caisse de crédit littéraire, elle [la Société des gens de lettres] consentira à ses membres des avances sur les produits futurs de leurs travaux intellectuels: traités d'édition, droits de reproduction à recouvrer; elle se substituera à eux dans la perception de leurs droits (Arts et litt., 1936, p. 84-4).
En partic. Production synthétique d'une matière, d'une substance naturelle. Citons parmi les synthèses les plus intéressantes: la reproduction du marbre en partant du calcaire (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 1, 1961, p. 368). En un demi-siècle, l'endocrinologie est passée de l'empirisme le plus grossier à une précision quasi scientifique, qui va jusqu'à la connaissance chimique exacte et à la reproduction par synthèse des produits d'excrétion glandulaire (BARIÉTY, COURY, Hist. méd., 1963, p. 738).
C. — Répétition, recommencement d'un phénomène, d'un fait. Elle rend facile à comprendre la reproduction des accidents stratigraphiques du système du Rhin à une époque géologique moderne; mais elle ne dispense pas d'admettre l'existence, dans le sous-sol fondamental, de ces accidents de date ancienne (ÉLIE DE BEAUMONT, Stratigraphie, 1869, p. 323). Comme il s'agit d'une tâche qui n'a jamais figuré dans les expériences de dressage, il ne peut user du détour de la reproduction et dans ces conditions les expériences de dressage restent sans influence (MERLEAU-PONTY, Phénoménol. perception, 1945, p. 26).
En partic.
♦ Répétition d'un élément, d'un motif dans une œuvre d'art. Le développement musical s'obtient surtout par l'imitation, c'est-à-dire par la reproduction d'une phrase ou d'un membre de phrase par une autre partie ou par d'autres parties que celle qui a énoncé cette phrase (RATEZ, Harm., 1908, p. 120).
♦ Le fait de reproduire expérimentalement un phénomène. D'autres types de reproductions expérimentales ont apporté d'importantes indications sur l'origine de certaines microstructures observées dans les minerais métalliques ou sur les conditions de formation de leurs minéraux constituants (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 493).
D. — SOCIOL., ÉCON. POL.
1. SOCIOL. Maintien des rapports sociaux, culturels, idéologiques par les appareils d'État, la pression sociale, les institutions. Il ne faudrait pas voir seulement un effet d'hysteresis lié à la durée structurale du cycle de reproduction pédagogique dans la tendance de tout corps professoral à retransmettre ce qu'il a acquis selon une pédagogie aussi semblable que possible à celle dont il est le produit (P. BOURDIEU, J.-Cl. PASSERON, La Reproduction, Paris, éd. de Minuit, 1970, p. 76). La reproduction culturelle est la reconstitution permanente des structures d'organisation de la société (classes ou couches sociales, famille, institution...) et des significations attachées à ces structures (Éduc. 1979).
2. ÉCON. POL.
a) Vx. Remplacement, production nouvelle de ce qui a été consommé. La reproduction de chaque année offre une portion disponible, puisqu'elle n'est destinée à payer, ni le travail dont cette reproduction est le fruit, ni celui qui doit assurer une nouvelle reproduction égale ou plus abondante (CONDORCET, Esq. tabl. hist., 1794, p. 153).
b) Mod. ,,Le concept marxiste de reproduction désigne la reconstitution permanente des conditions et des rapports de production, qui effectue tout procès social de production et qui fait du mode de production une structure sociale`` (Marxisme 1982); reconstitution du capital, toutes plus-values étant consommées ou avec le réinvestissement d'une partie des plus-values. La civilisation occidentale, par le jeu combiné de la découverte, des investissements et de la reproduction amplifiée du capital, est parvenue à un très haut degré de satisfaction des besoins matériels des hommes (Univers écon. et soc., 1960, p. 22-9).
REM. Repro, subst. fém., abrév. [Corresp. à supra B 2 b] ,,En langage publicitaire: un tirage photographique`` (Public. 1976).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1. a) 1690 « action par laquelle les êtres vivants perpétuent leurs espèces » (FUR.); b) 1762 bot. « moyen naturel ou artificiel de multiplier les végétaux » (Ac.); c) 1769 zool. « action par laquelle de nouvelles parties succèdent à celles qui ont été arrachées » (BONNET, Palingénésie, t. 1, p. 349); 2. a) 1754 « action de reconstruire, de recréer » reproduction des idées (ID., Psychologie, p. 46); b) 1758 « action de reproduire industriellement les valeurs consommées » (QUESNAY, Tableau économique, p. 73 d'apr. BRUNOT t. 6, 1, p. 178); c) 1839 « action de publier de nouveau un ouvrage littéraire » (BALZAC, Corresp., p. 692); d) 1839 « copie d'une œuvre d'art » (R. TÖPFFER, Réflexions et menus propos d'un peintre genevois, Livre LI, p. 165 ds QUEM. DDL t. 28). Dér. de reproduire d'apr. production. Fréq. abs. littér.:561. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 862, b) 500; XXe s.: a) 735, b) 940. Bbg. QUEM. DDL t. 14, 28.

reproduction [ʀ(ə)pʀɔdyksjɔ̃] n. f.
ÉTYM. 1690, « action par laquelle une chose renaît, est produite de nouveau »; de reproduire, d'après production.
Action de reproduire, de se reproduire.
———
I
1 Fonction par laquelle les êtres vivants d'une espèce produisent d'autres êtres vivants semblables à eux-mêmes ( Espèce); exercice de cette fonction : production d'êtres vivants selon l'espèce, par la génération. Génération (cit. 2). || Conservation, accroissement de l'espèce par la reproduction. Perpétuer, propager, propagation. || Transmission des caractères propres par la reproduction. Hérédité, héréditaire. || Reproduction sexuée ( Sexe, sexualité, sexuel; gamète, œuf). || Reproduction des végétaux : bactéries, algues, champignons, fougères, mousses, végétaux supérieurs ( Anthérozoïde, oosphère). || Reproduction des animaux ( Spermatozoïde; oocyte, ovule). || Modes de reproduction sexuée des animaux. Ovipare, ovovivipare, vivipare. || Organes de reproduction des végétaux supérieurs ( Fleur; étamine, 1. graine, ovaire), des animaux ( Génital). || Rôle de l'élément femelle ( Ovulation, ponte), de l'élément mâle ( Fécondation) dans la reproduction. || Reproduction sans mâle. Parthénogenèse (cit. 2). || Aptitude ( Fécond, fécondité), inaptitude ( Stérilité) à la reproduction.Reproduction asexuée. Bourgeonnement, fissiparité, gemmation, scissiparité (ou bipartition); spore, sporulation.REM. En physiologie végétale on parle plutôt de reproduction pour la sporulation et la reproduction sexuée (ou sexuelle), et de multiplication végétative.
Démogr. || Taux de reproduction : taux mesurant le remplacement d'une génération par la suivante. || Taux brut, taux net de reproduction.
Action de se reproduire ou de faire se reproduire (des animaux). Accouplement, coït; appareillement, monte, saillie. || Reproduction par insémination artificielle. || Jument poulinière, destinée à la reproduction. || Méthode de reproduction, en zootechnie. Croisement, hybridation, métissage, sélection. || Reproduction du bétail, de l'espèce chevaline ( Haras). || La reproduction des plus aptes. Eugénique (cit. 1).
1 C'est toute la jeunesse, toute la beauté, toute l'espérance de succès, tout l'idéal politique de vie brillante, qu'un sacrifice à cette abominable loi de la reproduction qui fait de la femme normale une simple machine à pondre des êtres.
Maupassant, l'Inutile Beauté, III (→ Reproduire, cit. 6).
Bot., hortic. || Reproduction des plantes par semis. Semence, semer. REM. Il s'agit alors de développement d'individus nouveaux, et non de leur reproduction biologique. — Reproduction (végétative) par bouture, greffage, marcottage, etc.
2 Vx. Reconstitution naturelle d'une partie d'un organisme. Régénération. || Reproduction de la queue d'un lézard.
———
II (1758, Voltaire, « action de recréer, de reconstruire »). Action de reproduire par imitation, par répétition; ce qui est ainsi reproduit.
1 Action de créer, de faire exister des choses semblables ou identiques (à un modèle). || La reproduction de la nature par l'art (réalisme, naturalisme). || Reproduction et représentation.
Reproduction artificielle d'un objet naturel. Imitation.Reproduction inversée d'un objet dans un miroir. Image, reflet.
Psychol. || Reproduction mentale : réapparition d'une image dans l'esprit. Image (II.).
Spécialt. || Reproduction des sons par le phonographe.
2 (1850). Nouvelle publication, nouvelle impression d'un texte ( Édition). || Reproduction d'un texte dans un journal, une revue. || Autoriser, interdire la reproduction. || Reproduction interdite, réservée ( Copyright).On dit plutôt droits d'édition, pour les écrits, droit de reproduction, pour les œuvres d'art et la musique, sauf en droit.
Dr. || Le délit de contrefaçon suppose la reproduction matérielle et la mauvaise foi. Auteur (droit d'). || Reproduction des œuvres littéraires (distinguée du plagiat, des citations, des parodies), des œuvres musicales (distinguée des adaptations, arrangements…), des modèles de robes. || Procédés de reproduction : imprimerie, dactylographie, lithographie; phonographie, instruments mécaniques…; décalquage, pochoir, etc. || Reproduction manuelle.
2 (…) ces longues œuvres littéraires de notre temps, au fronton desquelles on lit : La reproduction en est interdite.
Balzac, la Cousine Bette, Pl., t. VI, p. 471.
3 Le fait de reproduire (une image, un texte, un matériel), de multiplier les exemplaires par un procédé technique. Duplication. || Reproduction d'un dessin, d'un tableau. Absolt. || Procédés de reproduction. Autocopie, chromolithographie, gravure (II., 3.), héliochromie, impression, imprimerie, lithographie, offset, photographie (et préf. photo- : photochromie, photocopie, phototypie); polycopie, reprographie, xérographie. || Reproduction au stencil, au duplicateur, au moyen d'un cliché.Reproduction des sculptures par moulage…
3 La reproduction a créé des arts fictifs (ainsi le roman met-il la réalité au service de l'imagination), en faussant systématiquement l'échelle des objets, en présentant des empreintes de sceaux orientaux et de monnaies comme des estampages de colonnes, des amulettes comme des statues (…)
Malraux, les Voix du silence, p. 22.
Par ext. Image obtenue, en partant d'un original, au moyen d'un procédé de reproduction. Copie, épreuve, gravure, fac-similé, réplique. || Reproduction calquée. Calque. || Découper une reproduction dans une revue. || Reproductions en noir et en couleurs.Reproduction d'un texte. Double, duplicata.
4 Une petite veilleuse, à lueur rose, était suspendue au devant du grand crucifix pâle et une autre semblable, mais un peu plus grande, teignait vaguement d'incarnat une haïssable reproduction lithographique de la Sainte Face (…)
Léon Bloy, le Désespéré, p. 172.
4 (1893). Didact. Le fait de se répéter, de se perpétuer par une production analogue, semblable (processus sociaux, etc.). || La reproduction des processus sociaux; des modèles idéologiques; du savoir par l'institution pédagogique (cf. la Reproduction, par C. Bourdieu et J.-Cl. Passeron).
5 (…) la production de rapports sociaux. Enfin, pris dans toute son ampleur, le terme enveloppe la reproduction. Non seulement il y a reproduction biologique (relevant de la démographie) mais reproduction matérielle des outillages nécessaires à la production, instruments et techniques, et de plus reproduction des rapports sociaux. Jusqu'à ce qu'une destruction les brise, les rapports sociaux inhérents à une société se maintiennent; mais ce n'est pas par inertie, passivement. Ils sont re-produits dans un mouvement complexe.
Henri Lefebvre, la Vie quotidienne dans le monde moderne, p. 63.
6 L'étude de l'activité créatrice (de la production dans le sens le plus ample) mène vers l'analyse de la re-production, c'est-à-dire des conditions dans lesquelles les activités productrices d'objets ou d'œuvres se re-produisent elles-mêmes, re-commencent, re-prennent leurs rapports constitutifs ou bien au contraire se transforment par modifications graduelles ou par bonds.
Henri Lefebvre, la Vie quotidienne dans le monde moderne, p. 40.
———
III (1758). Écon. Vx. Production nouvelle de ce qui a été consommé (cf. Raynal, in Littré).Mod. || Reproduction simple : reconstitution du capital (les plus-values étant consommées). || Taux de reproduction : taux d'accroissement du capital.
DÉR. Reproductible, reproductif.

Encyclopédie Universelle. 2012.