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chanter

chanter [ ʃɑ̃te ] v. <conjug. : 1>
Xe; lat. cantare, fréquent. de canere
I V. intr.
1Former avec la voix une suite de sons musicaux. moduler, vocaliser; 1. chant. Chanter bien, avec expression. Chanter à livre ouvert. déchiffrer, solfier. Chanter juste, faux ( détonner) . Chanter doucement, à mi-voix, mezza-voce. chantonner, fredonner. Chanter fort, à pleine voix, à pleins poumons, à tue-tête. Chanter fort et mal. beugler, brailler, braire, bramer, s'égosiller, hurler. Chanter sur une note. psalmodier. Chanter en solo; en chœur, dans une chorale. Chanter en direct, en play-back. « Avant d'écrire, chaque peuple a chanté » (Nerval). Par ext. Avoir des intonations qui rappellent le chant. Une langue qui chante ( chantant) .
2Produire des sons, des bruits (oiseaux, certains insectes). gazouiller, siffler. L'alouette, le rossignol, le coq chantent. « La cigale ayant chanté tout l'été » (La Fontaine). Produire un son harmonieux. La bouilloire chante.
3Fig. et littér. « Ce ne sont pas ses pensées, ce sont les nôtres que le poète fait chanter en nous » (France). Des lendemains qui chantent.
4Loc. C'est comme si on chantait : c'est sans effet (cf. Comme si on pissait dans un violon). — Faire chanter qqn, exercer un chantage sur lui. — Fam. Si ça vous chante : si ça vous dit, vous convient, vous plaît. Comme ça vous chante : comme vous préférez. « Le jeune pianiste jouait, mais seulement si “ça lui chantait”, car on ne forçait personne » ( Proust).
II V. tr.
1Exécuter (un morceau de musique vocale). Chanter un air, une chanson. Chanter la messe. « ce qui ne vaut pas la peine d'être dit, on le chante » (Beaumarchais). Fig. (Péj.) Il chante cela sur tous les tons. rabâcher, répéter. Qu'est-ce que tu nous chantes là ? 1. dire, raconter. Chanter pouilles à qqn.
2Célébrer par des chants. Chantons Noël, l'An neuf !
3Poét. Célébrer. exalter, proclamer, vanter. Homère a chanté les exploits d'Ulysse. « Allons ! Chantons Bacchus, l'amour et la folie » (Musset). Chanter victoire. Chanter les louanges de qqn, en faire de grands éloges.

chanter verbe intransitif (latin cantare) Faire entendre un chant ; produire par la voix des sons mélodieux, une œuvre musicale : Chanter juste. Produire des sons plus ou moins modulés : Le grillon chante. L'eau chante dans la bouilloire. Apporter une note de gaieté, produire un effet harmonieux et gai, en parlant de quelque chose : Couleurs qui chantent.chanter (citations) verbe intransitif (latin cantare) Louis Aragon Paris 1897-Paris 1982 Jamais peut-être faire chanter les choses n'a été plus urgente et noble mission à l'homme… Le Crève-Cœur, la Rime en 1940 Gallimard Pierre Augustin Caron de Beaumarchais Paris 1732-Paris 1799 Aujourd'hui, ce qui ne vaut pas la peine d'être dit, on le chante. Le Barbier de Séville, I, 2 Jean de La Fontaine Château-Thierry 1621-Paris 1695 Vous chantiez ? j'en suis fort aise : Eh bien ! dansez maintenant. Fables, la Cigale et la Fourmi Alphonse de Prât de Lamartine Mâcon 1790-Paris 1869 Aimer, prier, chanter, voilà toute ma vie. Nouvelles Méditations, le Poète mourant Alphonse de Prât de Lamartine Mâcon 1790-Paris 1869 Je chantais, mes amis, comme l'homme respire, Comme l'oiseau gémit, comme le vent soupire, Comme l'eau murmure en coulant. Nouvelles Méditations, le Poète mourant Alphonse de Prât de Lamartine Mâcon 1790-Paris 1869 Honte à qui peut chanter pendant que Rome brûle, S'il n'a l'âme et le cœur et la voix de Néron. Poésies diverses, À Némésis Nathalie Sarraute Ivanovo, Russie, 1900-Paris 1999 On a dit que ce que les gens supportent le moins, c'est d'être accusés de chanter faux. Je crois que d'être soupçonné de manquer de goût est plus pénible. Les Fruits d'or Gallimard Jules Mazarin, en italien Giulio Mazarini Pescina, Abruzzes, 1602-Vincennes 1661 Qu'ils chantent, pourvu qu'ils paient. Commentaire On rapporte ce mot comme étant de Mazarin, qui fut sans doute l'homme d'État français le plus chansonné. Apprenant qu'on le brocardait dans Paris après l'institution d'un nouvel impôt, il aurait dit : « Ils chantent, ils paieront. » Théodore Aubanel Avignon 1829-Avignon 1886 Qui chante son mal enchante. Quau canto Soun mau encanto. Commentaire Devise d'Aubanel. Konstanty Ildefons Gałczyński Varsovie 1905-Varsovie 1953 Si le concombre ne chante pas, Et ceci en aucune saison, Il faut croire que, par la volonté du ciel, Probablement, il ne le peut pas. Dziełá, I, 2 Frédéric Mistral Maillane, Bouches-du-Rhône, 1830-Maillane, Bouches-du-Rhône, 1914 Le soleil me fait chanter. Lou soulèu me fai canta. Commentaire Cette devise accompagnait le blason poétique que Mistral s'était lui-même composé : une cigale d'or sur champ d'azur chantant sous un soleil, elle est faite de sept syllabes, chiffre de la sagesse (parce qu'il est la somme des chiffres symboliques de l'action : 4, et de la mystique : 3). ● chanter (expressions) verbe intransitif (latin cantare) Familier. C'est comme si on chantait, cela n'avance à rien, cela n'a aucun effet. Faire chanter quelqu'un, exercer sur lui un chantage. ● chanter (synonymes) verbe intransitif (latin cantare) Faire entendre un chant ; produire par la voix des sons...
Synonymes :
- vocaliser
Produire des sons plus ou moins modulés
Synonymes :
- gazouiller
- pépier
- roucouler
- siffler
- striduler
chanter verbe transitif Faire entendre un chant, une chanson, les produire par la voix : Elle chantait un air de Puccini. Littéraire. Célébrer quelque chose, quelqu'un, les louer par des chants, des récits poétiques : Chanter les exploits d'un héros.chanter verbe transitif indirect Familier. Si cela vous (lui, etc.) chante, comme cela vous (lui, etc.) chante, si cela vous (lui, etc.) plaît ; comme cela vous (lui, etc.) plaît. ● chanter (expressions) verbe transitif Chanter victoire, proclamer avec joie son succès. Pain à chanter, pain azyme, dont on fait les hosties. Familier. Qu'est-ce que tu nous chantes là ?, tu nous racontes des sottises. ● chanter (synonymes) verbe transitif Faire entendre un chant , une chanson, les produire par...
Synonymes :
- entonner
- fredonner
Littéraire. Célébrer quelque chose, quelqu'un, les louer par des chants, des récits...
Synonymes :
- glorifier
Familier. Qu'est-ce que tu nous chantes là ?
Synonymes :
- débiter
- raconter
chanter (expressions) verbe transitif indirect Familier. Si cela vous (lui, etc.) chante, comme cela vous (lui, etc.) chante, si cela vous (lui, etc.) plaît ; comme cela vous (lui, etc.) plaît. ● chanter (synonymes) verbe transitif indirect Familier. Si cela vous (lui, etc.) chante, comme cela vous (lui, etc.) chante
Synonymes :
- agréer
- convenir
- sourire

chanter
v.
rI./r v. intr.
d1./d Former avec la voix une suite de sons musicaux. Chanter juste, faux. Chanter en choeur.
d2./d Produire des sons harmonieux (en parlant des oiseaux, de certains insectes, etc.). Le rossignol chante.
Par anal. L'eau chante dans la bouilloire.
d3./d Loc. Fam. Faire chanter qqn, exercer sur lui un chantage.
Si cela vous chante: si vous en avez envie.
rII./r v. tr.
d1./d Exécuter une partie ou un morceau de musique vocale. Chanter des chansons.
Que me chantez-vous là?: que me dites-vous?
d2./d Poét. Célébrer, vanter, raconter. Les griots chantent les hauts faits des anciens.
Chanter les louanges de qqn, faire son éloge.

⇒CHANTER, verbe.
I.— Emploi intrans. Moduler sur les différents degrés de l'échelle diatonique.
A.— [Le suj. désigne une pers.] Chanter en chœur, à (de)mi-voix, en duo, à plein gosier, de mémoire, au piano, à l'unisson, à voix basse. Artiste jusqu'au bout des doigts : elle chante à ravir et dessine dans la perfection (MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 2, Boule de suif, 1880, p. 151).
Expr. fig., fam. Dire. Que me chantez-vous là? Le commandeur. Mais que me chante donc ce garçon-là, mademoiselle Marton? (A. DUMAS Père, Un Mariage sous Louis XV, 1841, III, 2, p. 146). Plaire. Si cela me chante. Si cela me plaît. — Alors, je dois revenir demain? — Si ça vous chante (É. ESTAUNIÉ, Madame Clapain, 1932, p. 162). C'est comme si je chantais (péj.). Mes observations ne servent à rien. Tes domestiques ont la manie de toujours toucher à ce qui m'appartient (...) Je leur ai défendu cent fois de ranger mes papiers, c'est comme si je chantais! (É. AUGIER, Les Lionnes pauvres, 1858, II, p. 52).
B.— P. anal. [Le suj. désigne un animal, un élément naturel, un instrument de musique, un obj.] Le coq, les grenouilles, les oiseaux chante(nt); le feu, la forêt chante; le clairon, la cloche chante; la lampe chante. À la porte du cimetière, dans un cyprès, un rossignol chantait d'une voix éperdue (BARRÈS, Mes cahiers, t. 7, 1908-09, p. 165).
C.— P. métaph. Les lendemains qui chantent. Elle [l'Étoile polaire] a mis le masque mais chantera toute la nuit, pour nous éclairer (A. ARNOUX, Abisag, 1919, p. 253). Prodige de légèreté, toute en nerfs, elle [la cathédrale de Reims] vivait, elle palpitait, elle chantait (SEM, La Ronde de nuit, 1923, p. 85). Et ses yeux qui chantaient tout le temps comme de beaux verdiers (GIONO, Le Chant du monde, 1934, p. 121) :
1. Celui qui est seul debout dans la nuit, chante comme un arbre, et il est tout bouleversé par la chanson de sa chair.
GIONO, L'Eau vive, 1943, p. 187.
II.— Emploi trans.
A.— [L'obj. désigne un morceau de musique vocale, une composition lyrique] Chanter une chanson, un refrain (cf. chant I B).
SYNT. Chanter un air, sur un air, sur l'air du...; chanter une ballade, une cantate, la carmagnole, une complainte, un couplet, l'épître, un hymne, du grégorien, un lai d'amour, les laudes, les litanies, une mélodie, un motet, l'office des morts, un psaume, des ritournelles, une sérénade. Nous chantions ensemble à tue-tête tantôt des chœurs d'opéra-comique, tantôt la messe et les vêpres (G. SAND, Histoire de ma vie, t. 3, 1855, p. 57). Ce qui ne peut pas se dire, on le chante (SAINTE-BEUVE, Nouveaux lundis, t. 1, 1863-69, p. 14). Le soir, elle se mit au piano et chanta en ukrainien des chansons d'amour (S. DE BEAUVOIR, Mémoires d'une jeune fille rangée, 1958, p. 275).
Vieilli. Ce prince leur donna des statuts où l'on remarque le privilége de fabriquer le pain à chanter messe (BRILLAT-SAVARIN, Physiol. du goût, 1825, p. 274).
P. métaph. Cf. chant III B :
2. ... j'ai vu à Olympie de grandes colonnes couchées dans l'herbe, et elles chantaient encore la gloire de l'inconnu qui, il y a vingt-sept siècles, les avait dressées vers les dieux.
MAURIAC, Mémoires intérieurs, 1959, p. 202.
B.— Littér., poét., laud. [Le suj. désigne un poète, un écrivain, un orateur, etc.] Célébrer par un poème; vanter, louer une personne, un pays, des actions, etc. Chanter les exploits d'un héros, les louanges de qqn :
3. Voltaire, pressé par la duchesse du Maine qui y avait ses fils et qui lui demandait de célébrer Lawfeld comme il avait chanté Fontenoy, ne le fit pourtant qu'à son corps défendant et dans une mince Épître...
SAINTE-BEUVE, Nouveaux lundis, t. 11, 1863-69, p. 140.
SYNT. Chanter la beauté, l'éloge, la vertu de qqn; chanter la Grèce, l'Italie.
Absol. Le poète chante; il n'écrit pas (V. LARBAUD, Ce Vice impuni, la lecture, Domaine français, 1941, p. 281).
Fam., usuel. Chanter victoire. Se glorifier d'un succès, le proclamer partout :
4. — Ne chantons pas victoire, lui dit Théodose [à Brigitte] : le délai de la surenchère n'expire que dans huit jours.
BALZAC, Les Petits bourgeois, 1850, p. 157.
Rare. Chanter merveille. Exprimer des louanges :
5. Adrienne Monnier a eu la gentillesse de m'envoyer la Vie de Milarépa, dont elle et Jean Schlumberger chantaient merveille.
GIDE, Journal, 1931, p. 1043.
C.— Loc. et expr. diverses
Chanter ses gammes à qqn. Lui dire ses quatre vérités :
6. [Le garçon du Secrétariat :] — ... Il [le secrétaire général] me chanterait une gamme d'enfer s'il savait qu'elle [une lettre] n'est pas à son adresse...
BALZAC, Les Employés, 1837, p. 223.
Chanter goguettes, pouilles à qqn :
7. ... mais enfin vingt-cinq journaux ne se mettraient pas d'un côté à crier haro à ce pauvre animal, à le huer sur tout ce qu'il ferait, lui chanter pouille sans désemparer; ...
MUSSET, Lettres de Dupuis et Cotonet, 1837, p. 754.
Chanter magnificat à matines. Faire tout à contre-temps.
Région. (Canada). Chanter matines (à propos d'un coq). Chanter le matin. Chanter la pomme à qqn. Lui faire la cour.
Chanter la romance à qqn. Se mettre en frais pour quelqu'un; chercher à lui plaire :
8. — ... Charles-Albert est un Faust dont l'âme est disputée depuis plus de vingt ans par deux forces inconciliables : Mazzini et Metternich (...) Il y a vingt ans que Charles-Albert chante la romance à Mazzini, ou plutôt qu'ils se chantent la romance l'un à l'autre.
GIONO, Bonheur fou, 1957, p. 278.
Prononc. et Orth. :[], (je) chante []. FOUCHÉ Prononc. 1959, p. 100, souligne que ,,même lorsqu'il n'est précédé que d'une seule consonne prononcée, l'e muet intérieur se conserve devant le groupe []. Ainsi aux 1re et 2e pers. plur. du conditionnel du verbe en -er et du verbeêtre : nous chanterions; vous chanteriez; nous aimerions; vous aimeriez; nous serions; vous seriez``. Cf. aussi ROUSS.-LACL. 1927, p. 147. Attesté ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. Trans. 1. a) Xe s. cantomps de (1re pers. plur. ind. prés.) « célébrer quelqu'un avec des chants » (St Léger, éd. J. Linskill, v. 3); b) av. 1528 « célébrer avec lyrisme » (C. MAROT, Chanson, XII, 23 ds Œuvres lyriques, éd. C. A. Mayer, p. 185); 1796 p. ext. chanter victoire (RESTIF DE LA BRETONNE, M. Nicolas, p. 188); 2. Xe s. « faire entendre (un chant) exécuter (un morceau) » Missae cantat (St Léger, éd. J. Linskill, v. 82); 3. 1165-70 « dire, conter » (CHR. DE TROYES, Erec, éd. Foerster, 2802). B. Intrans. mil. XIe s. « faire entendre des chants (ici en signe de joie) » (Alexis, 112e ds T.-L.); p. anal. 1. a) 1re moitié XIIe s. « faire entendre un chant (en parlant des oiseaux) » (Charroi Nîmes, 16, ibid.); b) 2e tiers XIIIe s. « id. (en parlant d'un instrument de musique) » (Poire, 1133, ibid.); c) 1847 fig. « convenir, paraître agréable » (LECONTE DE LISLE, Poèmes antiques, Niobé, p. 202); 2. 1690 « parler, lire avec des inflexions qui rappellent le chant » (FUR.); 3. 1640 faire chanter qqn « (d'un criminel mis à la question) obtenir des aveux » (OUDIN Curiositez); 1674 fam. chanter « céder à des pressions » (MONTFLEURY, Le Comédien poëte, III, 9 ds LITTRÉ); d'où 1808 faire chanter qqn « extorquer par ruse ou par force une somme d'argent » (HAUTEL). Du lat. class. cantare attesté à l'emploi trans. aux sens 1, 2, 3; lat. médiév. missam cantare (HUGEB., Wynneb., 10 ds Mittellat. W. s.v., 192, 33); à l'emploi intrans. aux sens 1 a et b en parlant des oiseaux, d'un instrument de musique; l'hyp. de P. GUIRAUD, Mélanges d'étymol. arg. et pop. ds Cah. Lexicol., 1970, t. 17, n° 2, p. 6 et 7 selon laquelle B 3 serait dér. de chant2 « partie étroite d'un objet » (lat. canthus) dont les dér. canter, achanter, décanter (FEW t. 2, 1, p. 228, s.v. canthus) signifient « s'incliner » ou « incliner », chanter signifiant « s'incliner, se soumettre, céder à des pressions », n'emporte pas la conviction (v. FEW t. 2, 1, p. 224a, note 6); faire chanter signifie vraisemblablement à l'orig. « arracher un aveu sous l'effet de la torture » (v. OUDIN, loc. cit. et J. Brüch ds Z. fr. Spr. Lit., t. 50, 1927, pp. 304-305). Fréq. abs. littér. : 9 691. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 13 808, b) 16 504; XXe s. : a) 15 577, b) 11 218. Bbg. FARAL (E.). Sur trois vers de la Chanson de Roland (vers 1016, 1465, 1517). Modern Philology 1940, t. 38, pp. 235-242. — GOTTSCH. Redens. 1930, passim. — GOUG. Mots t. 1, 1962, pp. 283-284. — GRIMAUD (F.). Petit gloss. du jeu de boules. Vie Lang. 1969, p. 112. — GUIRAUD (P.). Mél. d'étymol. arg. et pop. Cah. Lexicol. 1970, t. 17, pp. 3-6. — LA LANDELLE (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 270, 292, 296. — QUEM. 2e s., t. 1, 1970. — RIGAUD (A.). Autour d'une hostie. Déf. Lang. fr. 1970, n° 53, pp. 12-14. — SAIN. Arg. 1972 [1907], p. 61, 65, 271, 272. — SAIN. Lang. par. 1920, p. 519. — SAIN. Sources t. 3, 1972 [1930], p. 82.

chanter [ʃɑ̃te] v. intr. et tr.
ÉTYM. Xe, Vie de saint Léger; du lat. cantare, fréquentatif de canere.
———
I V. intr.
1 Former avec la voix une suite de sons musicaux. Chanson (cit. 7.1), chant; voix. || Chanter bien, mal; chanter juste, faux (actuellement ou habituellement). || L'amusie rend incapable de chanter. || Chanter avec art, avec goût, avec talent, avec brio, avec expression. Moduler, nuancer; chant; barytonner, ténoriser, vocaliser; jodler. || Chanter en mesure. || Chanter à livre ouvert. Déchiffrer, lire (la musique), solfier. || Chanter en coulant ses notes, en filant les sons… || Chanter doucement, à bouche fermée, à mi-voix, mezza voce, en faux-bourdon. Bourdonner, chantonner, fredonner. || Chanter fort, à pleine voix, à pleins poumons, à tue-tête (→ Pondre, cit. 2). par plais. Beugler, brailler, braire, bramer, crier, égosiller (s'), hurler. || Chanter d'une voix tremblante, trop forte, aiguë et nasillarde; d'une voix qui sort du ton. Chevroter, gueuler, miauler; détonner. || Faire des canards, des couacs en chantant. || Chanter avec mièvrerie. Roucouler. || Chanter avec monotonie, sur une note. Psalmodier. || Chanter en solo. || Chanter en duo, en trio, en quatuor; dans un chœur, une chorale. || Chanter en chœur, à l'unisson; a cappella. || Chanter pour passer (cit. 104) le temps.
1 — Vous chantiez ? j'en suis fort aise :
Eh bien ! dansez maintenant.
La Fontaine, Fables, I, 1.
2 Avant d'écrire, chaque peuple a chanté.
Nerval, la Bohème galante, « Chansons et légendes du Valois ».
3 Continuez de chanter et de souffrir : c'est le plus noble état d'un cœur mortel.
Souffrir sans chanter est trop triste.
Chanter sans souffrir, c'est affaire de gosier.
Sainte-Beuve, Correspondance, t. IV.
4 Ils chantent avec un certain effort du gosier, comme les muezzins des mosquées, en des tonalités hautes.
Loti, Ramuntcho, I, IV, p. 49.
5 Et soudain il se prit à chanter, d'une voix grêle et agréable, en s'accompagnant au piano, avec des fantaisies, des accords, des guirlandes et des arabesques (…)
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, III, p. 325.
5.1 A dix-huit ans Velbar s'était découvert une forte voix de baryton; pendant des journées entières, occupé sur son échafaudage à peindre quelque enseigne, il chantait à pleins poumons maintes romances à la mode, et les passants s'arrêtaient pour l'entendre, émerveillés par le charme et la pureté de son généreux organe.
Raymond Roussel, Impressions d'Afrique, p. 267.
Spécialt et absolt. Maîtriser la technique du chant. || Apprendre à chanter. || Il ne sait pas chanter.
Par ext. Parler, réciter, lire avec des intonations rappelant le chant. || Un bon orateur ne doit pas chanter ( Déclamer). || Les méridionaux chantent en parlant. || Une langue qui chante (langue chantante).
2 Exécuter la partie mélodique d'un morceau, en parlant d'un instrument.
6 Je récolte en secret des fleurs mystérieuses :
Le soir, derrière vous, j'écoute au piano
Chanter sur le clavier vos mains harmonieuses (…)
A. de Musset, À Ninon.
3 Crier, pousser le cri, les cris propres à leur espèce (en parlant des oiseaux et de certains insectes). Gazouiller, ramager (rare), siffler. || L'alouette, le rossignol chantent. || Le coq chante. Coqueriquer. || Le grillon chante.
7 La Cigale ayant chanté tout l'été (…)
La Fontaine, Fables, I, 1.
8 Le chat persan, jeté comme une écharpe de marabout sur le bord de la fenêtre, s'étire et chante (…)
Colette, la Paix chez les bêtes, Automne, p. 131.
Prov. Ce n'est pas à la poule à chanter devant le coq : la femme doit céder à l'homme.
9 La poule ne doit point chanter devant le coq.
Molière, les Femmes savantes, V, 3.
Produire un son assez harmonieux pour être comparé à un chant. || La source chantait. || La bouilloire chante. || La porte chante. Grincer.
4 Loc. fam. C'est comme si on chantait : c'est inutile.
Fig. Je le ferai chanter sur un autre ton. || Il faut qu'il chante sur un autre ton, qu'il se conduise autrement.
5 Littér. Produire un effet poétique. || Les souvenirs chantent dans sa mémoire.
10 Ce ne sont pas ses pensées, ce sont les nôtres que le poète fait chanter en nous.
France, le Jardin d'Épicure, p. 73.
11 (…) n'as-tu pas observé, en te promenant dans cette ville, que d'entre les édifices dont elle est remplie, les uns sont muets; les autres parlent; et d'autres enfin, qui sont les plus rares, chantent !
Valéry, Eupalinos, p. 106.
12 Toute son enfance chrétienne se remit à chanter.
F. Mauriac, l'Enfant chargé de chaînes, p. 187.
13 Mais n'est-ce pas à ces heures-là que le passé chante indéfiniment comme les flots d'une mer calme ?
F. Mauriac, l'Enfant chargé de chaînes, p. 127.
Loc. Les lendemains qui chantent. Lendemain.
6 Faire chanter qqn, exercer un chantage sur lui.
7 Loc. Si ça (me, te, lui, nous, vous) chante. Convenir, plaire, sourire (cf. Si ça me dit). || Cela ne me chante guère.Comme ça vous chante : comme vous préférez.
14 J'aime (…) à aller et venir comme la tête me chante (…)
Rousseau, les Confessions, XII.
15 Le jeune pianiste jouait, mais seulement si « ça lui chantait », car on ne forçait personne (…)
Proust, À la recherche du temps perdu, t. I, p. 256.
15.1 Vous mangerez avec nous quand ça vous chantera et ailleurs quand ça vous chantera davantage.
Jacques Laurent, les Bêtises, p. 33.
8 Pain à chanter : pain azyme dont on fait l'hostie. Pain (cit. 5).
———
II V. tr.
1 Exécuter (un morceau de musique vocale). Chanson, chant. || Chanter un air, une romance, une chanson. || Chanter une berceuse (cit. 2). || Chanter sa partie dans un chœur. || Chanter un cantique, une antienne (cit. 2). || Chanter la messe, les vêpres.
16 Aujourd'hui, ce qui ne vaut pas la peine d'être dit, on le chante.
Beaumarchais, le Barbier de Séville, I, 2.
17 Le monde, tant qu'il y aura un monde, le chantera (ce chant, la Marseillaise) à jamais.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., t. I, p. 927.
2 Loc. fig. (dans des contextes péjoratifs). Il chante toujours la même chanson, la même antienne. Conter, dire, raconter. || Il chante cela sur tous les tons. Rabâcher, répéter.
Loc. vieillies. Chanter pouilles à qqn. — ☑ Chanter la palinodie, se rétracter. — ☑ Chanter à qqn sa gamme, lui adresser des reproches (cf. Sonner les cloches). — ☑ Chanter magnificat à matines : faire tout à contretemps.
Régional (Canada). || Chanter matines (pour un coq) : chanter le matin.
Célébrer par des chants. || Chantons Noël, chantons l'An neuf !
3 Fig. et poét. Célébrer, dire, exalter, louer, proclamer, vanter. || Chanter la gloire, les vertus, la patrie, la victoire, les héros. || Chanter la joie, l'amour. || Homère a chanté les exploits d'Ulysse. Chantre.
18 Je chante ce héros qui régna sur la France
Et par droit de conquête et par droit de naissance.
Voltaire, la Henriade, I, 1.
19 Je ne chante ni l'espérance,
Ni la gloire, ni le bonheur,
Hélas ! pas même la souffrance.
A. de Musset, la Nuit de mai.
20 Allons ! Chantons Bacchus, l'amour et la folie ! (…)
Chantons l'or et la nuit, la vigne et la beauté !
A. de Musset, Rolla, III.
Cour., fam. Chanter victoire : se glorifier. Crier (victoire).
Chanter les louanges de qqn : faire de grands éloges de qqn.
Vx. Chanter fleurette à qqn. Conter.
21 (…) elle lui fit entendre que son garçon de moulin était un petit insolent (…) parce qu'il avait eu l'idée de lui chanter fleurette en revenant de nuit par les bois avec elle.
G. Sand, François le Champi, IX, p. 76.
4 Fam. et iron. (en interrogative). Dire. Que me chantez-vous là ? || Qu'est-ce que tu nous chantes encore ?
5 Vx. Chansonner, railler.
22 L'armée se console de la perte d'une bataille lorsqu'elle a chanté le général.
Montesquieu, De l'esprit des lois, IX, 7.
DÉR. et COMP. Chantable, chantage, chantant, chantefable, chantepleure, 1. chanterelle, chantoir, chantonner. — Déchanter, rechanter. — V. aussi Chanson, 1. chant, chanteur; cantabile, cantate, cantatrice, cantique

Encyclopédie Universelle. 2012.