soupirer [ supire ] v. <conjug. : 1>
1 ♦ V. intr. Pousser un soupir, des soupirs. Une halte « où je puisse moi, manger, boire, soupirer d'aise » (Bosco). Soupirer d'ennui, de désespoir. PROV. Cœur qui soupire n'a pas ce qu'il désire.
♢ Vx Pousser des soupirs amoureux, être amoureux. Soupirer pour une belle. — Vieilli « Ce n'est pas le bonheur après quoi je soupire » ( Molière),auquel j'aspire.
♢ Poét. Faire entendre de doux sons, murmurer. « Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire » (Lamartine).
2 ♦ V. tr. (1389) Poét. Chanter sur le mode élégiaque. « Les vers que je te soupire » (Verlaine).
♢ Cour. Dire en soupirant. « elle soupira : — Ce qu'il y a de plus lamentable [...] c'est de traîner, comme moi, une existence inutile » (Flaubert).
● soupirer verbe intransitif (latin suspirare) Pousser des soupirs, exprimant la satisfaction ou le déplaisir, un état agréable ou pénible : Soupirer de plaisir, d'ennui. Littéraire. Être amoureux : Soupirer pour une jeune beauté. ● soupirer (citations) verbe intransitif (latin suspirare) Nicolas Boileau, dit Boileau-Despréaux Paris 1636-Paris 1711 La Mollesse, oppressée, Dans sa bouche à ce mot sent sa langue glacée, Et, lasse de parler, succombant sous l'effort, Soupire, étend les bras, ferme l'œil et s'endort. Le Lutrin Théocrite Syracuse vers 300-vers 250 avant J.-C. Ceux qui soupirent vieillissent en un jour. Idylles, XII, 2 (traduction Legrand) ● soupirer verbe transitif Dire quelque chose avec des soupirs, dans un soupir : C'est impossible, soupira-t-il. ● soupirer verbe transitif indirect Littéraire. Soupirer après quelque chose, le désirer vivement, l'attendre avec impatience. ● soupirer (expressions) verbe transitif indirect Littéraire. Soupirer après quelque chose, le désirer vivement, l'attendre avec impatience. ● soupirer (synonymes) verbe transitif indirect Littéraire. Soupirer après quelque chose
Synonymes :
- rêver de
soupirer
v. intr. Pousser des soupirs.
— Soupirer d'aise.
⇒SOUPIRER, verbe
A. — Empl. intrans.
1. Pousser un, des soupirs. Soupirer faiblement, profondément; soupirer d'aise, de contentement. Harriet ne voulut pas sortir ce jour-là. Son père, la trouvant plus pâle et plus concentrée que de coutume, se garda de la presser, et, en soupirant, s'en alla (GOBINEAU, Pléiades, 1874, p. 143). Suzanne étirait ses beaux bras en soupirant, pour rompre l'enchantement de l'immobilité (DUHAMEL, Suzanne, 1941, p. 232).
— P. métaph. On comprend que je ne veuille point louer la philosophie couchée, même quand elle fait voir une subtilité rare, et une rigueur d'expression quasi miraculeuse. En d'autres termes, je n'aime pas des pensées qui se soulèvent à peine et qui soupirent avant l'effort (ALAIN, Propos, 1929, p. 855).
2. En partic., vieilli. Pousser des soupirs amoureux; éprouver de façon discrète un amour profond et souvent malheureux. Soupirer pour qqn. Il paraît que le mariage était assez éloigné encore (...) les deux jeunes gens eussent encore soupiré longtemps en vain l'un pour l'autre (DUMAS père, Mlle de Belle-Isle, 1839, IV, 1, p. 67).
3. Soupirer après, pour. Aspirer profondément, ardemment à. Même lorsqu'il est le mieux traité et le plus choyé dans ses voyages à Paris, lorsque chacun le caresse et veut le retenir, Bernardin ne soupire pas moins après sa solitude champêtre; il sent que la vie s'écoule, que ses dernières pages à achever le réclament (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t. 6, 1852, p. 448):
• Il me faut être nu et puis plonger dans la mer, encore tout parfumé des essences de la terre, laver celles-ci dans celle-là, et nouer sur ma peau l'étreinte pour laquelle soupirent lèvres à lèvres depuis si longtemps la terre et la mer.
CAMUS, Noces, 1938, p. 18.
4. [Dans la poésie romant.] Se laisser aller à un lyrisme plaintif. Frère! le temps n'est plus où j'écoutais mon âme Se plaindre et soupirer comme une faible femme Qui de sa propre voix soi-même s'attendrit, Où par des chants de deuil ma lyre intérieure allait multipliant comme un écho qui pleure Les angoisses d'un seul esprit! (LAMART., Œuvres, Recueill., Paris, Gallimard, 1963 [1837], p. 1109).
— [Suivi d'un compl. introd. par de] Cependant, si ton cœur soupire De quelque poids mystérieux (LAMART., Œuvres, Nouv. Médit., Paris, Gallimard, 1963 [1823], p. 157).
5. Littér. [En parlant de choses ou d'animaux] Faire entendre des bruits légers et rythmés, des sons mélancoliques et harmonieux. Le vent avec un bruit de musique et de rire Mène sa danse noire, il respire, il soupire (NOAILLES, Éblouiss., 1907, p. 405). Maintenant, les arbres s'étaient peuplés d'oiseaux. La terre soupirait lentement avant d'entrer dans l'ombre (CAMUS, , Noces, 1938 p. 25).
B. — Empl. trans.
1. Dire faiblement, dans un soupir. Là, en guise de signet, il y avait quelques feuilles de rose éparpillées, à demi desséchées déjà, mais exhalant encore un parfum discret et assourdi, comme l'adieu que Laurence avait soupiré tout à l'heure en s'éloignant (THEURIET, Mais. deux barbeaux, 1879, p. 145). Attaché sur la croix, les mains clouées, il ne poussa pas une plainte; seulement, il soupira à plusieurs reprises: « J'ai soif! » (FRANCE, Thaïs, 1890, p. 110).
2. Littér. Faire entendre des sons légers et mélodieux, exprimer sur un ton plaintif et doux. [D'Arthez] lui dit [à la princesse]: « Sommes-nous maintenant assez amis pour que vous me disiez ce que vous avez souffert? (...) » — Oui, dit-elle en sifflant cette syllabe comme la plus douce note qu'ait jamais soupirée la flûte de Tulou (BALZAC, Secrets Cadignan, 1839, p. 346). L'instrument datait de 1810, un vieux piano d'Erard (...). Dans la boîte d'acajou dévernie, les cordes soupiraient des sons lointains, d'une douceur voilée (ZOLA, Joie de vivre, 1884, p. 839).
REM. Soupireur, subst. masc., rare. Amoureux, celui qui courtise une femme, qui aspire à son amour. Allons donc! Et puis vous n'êtes pas le premier qui me fasse la cour. Toute femme un peu en vue traîne un troupeau de soupireurs (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Porte, 1887, p. 1075).
Prononc. et Orth.:[], (il) soupire [-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. Intrans. A. 1. fin Xe s. « pousser des soupirs sous le coup d'une émotion » (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 51: De son piu cor greu suspiret [Jesus]); ca 1188 gérondif (CONON DE BÉTHUNE, Chans., éd. A. Wallensköld, IV, 2, p. 225: m'en vois sospirant en Surie); 2. 1867 par dérision « péter » (DELVAU, p. 454a). B. Fig. 1. ca 1160 « exprimer une peine amoureuse » (Eneas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 1204: Amors la [Didon] point, amors l'argüe, Sovent sospire et color müe); id. sospirer d'amor (ibid., 7923); ca 1220 part. prés. subst. soupirant « amoureux » (Lai de l'Ombre, 435 ds T.-L.); 2. 1174-76 « exprimer sa peine, ses regrets par son attitude, sa parole » (GUERNES DE PONT-STE-MAXENCE, St Thomas, éd. E. Walberg, 3249: Encontre saint'iglise, qui grief en suspira, L'onur que vus avez, vus conquist e duna); 3. 1538 souspirer apres [qqn] (EST., s.v. suspirare); 1606 soupirer pour [qqc.] (RÉGNIER, Satires, éd. G. Raibaud, IX, 197, p. 104); 4. 1823 « s'abandonner à un lyrisme plaintif » (LAMARTINE, Nouv. Méditations poét., XVI, Préludes ds Œuvres, éd. M.-Fr. Guyard, p. 157); 1830 (ID., Harm., p. 317: Au pied de vos troncs immobiles, Colonnes, je viens soupirer). C. 1515-20 « (en parlant d'un inanimé) faire entendre des sons légers ou mélancoliques » (Cl. MAROT, Temple de Copido, 4 ds Œuvres lyriques, éd. C. A. Mayer, p. 87: Et son amy Zephyrus les esvente Quand doucement en l'air souspire et vente). II. Trans. A. fig 1. 1380-83 « déplorer, regretter, se lamenter sur » (GASTON PHÉBUS, Livre des Oraisons, éd. G. Tilander et P. Tucoo-Chala, 23, p. 92, 1: soupirant les mauls que mauvaisement j'ay fais); 2. 1551 « chanter sur le mode élégiaque » soupirer un chant [en parlant des Sirènes] (RONSARD, Tombeau de Marguerite de Valois, Ode, 17 ds Œuvres, éd. P. Laumonier, t. 3, p. 43); 3. 1565 « exprimer sur le mode élégiaque » (R. BELLEAU, Bergerie, 1re journée ds Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 1, p. 232: Ce berger amoureux va souspirant son dueil); 1842 p. ext. en parlant d'un inanimé (MUSSET, Poésies nouv., Après la lecture, XI, éd. M. Allem, Paris, Garnier, 1950, p. 158: quand la brise étouffée Soupire au fond des bois son tendre et long chagrin). B. XIVe s. [ms.] « (d'un inanimé) exhaler » (Sydrac, Ars. 2320, VI ds GDF. Compl.: la terre soupire les froidures). Du lat. suspirare intrans. « respirer profondément, soupirer; soupirer à propos de quelqu'un, après quelqu'un »; trans. « exhaler; soupirer après quelqu'un (suspirare aliquem) ». Fréq. abs. littér.:2 246. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 2 610, b) 3 000; XXe s.: a) 3 356, b) 3 696. Bbg. VALOGNES (J.). Les Verbes du désir en français... Thèse, Strasbourg, 1977, pp. 116-122.
soupirer [supiʀe] v.
ÉTYM. XIIe; suspirer, v. 980; lat. suspirare, de sub « sous », et spirare « souffler, respirer ».
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I V. intr.
1 Pousser un soupir, des soupirs (→ Poitrine, cit. 11). || Pleurer et soupirer (→ Élancer, cit. 8; langueur, cit. 7). || Gémir (cit. 1) et soupirer. || Soupirer involontairement (→ Haleine, cit. 16). || Soupirer de… (et compl. de cause). || Soupirer d'aise (→ Halte, cit. 5), de regret (→ Promenade, cit. 1). || « Soupirer à ses pieds moins (cit. 5) d'amour que de rage. » — Dire qqch. en soupirant (→ Empêcher, cit. 3; perdre, cit. 69).
1 Et, lasse de parler, succombant sous l'effort,
Soupire, étend les bras, ferme l'œil, et s'endort.
Boileau, le Lutrin, II.
2 (…) il se coucha si triste que, de toute la nuit, il ne fit que soupirer et rêver de malheur dans sa famille.
G. Sand, la Petite Fadette, XXIX.
2 (V. 1240). Littér., vieilli, archaïque. Pousser des soupirs amoureux; être amoureux. || « Mais je suis trop barbon pour oser soupirer » (→ Crever, cit. 13). || Amants (cit. 11) qui soupirent l'un pour l'autre (→ aussi Coup, cit. 6; 1. harpe, cit. 2). || « L'amour… Fait soupirer les bois, les nids, les fleurs, les loups » (→ Conjuguer, cit. 2, Hugo).
♦ (1538). Vieilli ou littér. || Soupirer pour (→ Âge, cit. 30 et 35; franchise, cit. 1) qqn, qqch. : éprouver un ardent désir pour une personne ou une chose, un sentiment d'insatisfaction ou le regret de l'avoir perdue… ⇒ Aspirer, respirer. — Vx ou littér. || Soupirer après… || « Ce n'est pas le bonheur après (cit. 50) quoi je soupire ». || « Ainsi, n'espérez pas qu'après vous je soupire » (→ Étaler, cit. 12; et aussi autre, cit. 7). || Soupirer après les faveurs (cit. 11) de celle qu'on aime.
3 Quand une malle-poste les croisait dans les rues, ils sentaient le besoin de partir avec elle. Le quai aux Fleurs les faisait soupirer pour la campagne.
Flaubert, Bouvard et Pécuchet, I.
3.1 Un mot (classique) vient du corps, qui dit l'émotion d'absence : soupirer : « soupirer après la présence corporelle » : les deux moitiés de l'androgyne soupirent l'une après l'autre, comme si chaque souffle, incomplet, voulait se mêler à l'autre (…)
R. Barthes, Fragments d'un discours amoureux, p. 21.
3 (V. 1530). Poét. Faire entendre de doux sons, murmurer. || « Que le vent qui gémit (cit. 8), le roseau qui soupire… ». || La brise soupire (→ Harmonieux, cit. 2; respirer, cit. 3). || « … une flûte (1. Flûte, cit. 2) invisible Soupire dans les vergers. »
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II V. tr. (1389).
1 Poét. Chanter sur le mode élégiaque. || « … ce chant… Qu'un soir, au bord d'un lac (cit. 2), tu nous as soupiré ? » (→ aussi Luth, cit. 4). || Les vers que je te soupire (→ Inspirer, cit. 4). — Par analogie :
4 Celui qui ne sait pas, quand la brise étouffée
Soupire au fond des bois son tendre et long chagrin.
A. de Musset, Poésies nouvelles, « Après une lecture », XI.
♦ Vx (langue classique). Se lamenter de, pleurer, déplorer. || « Être veuve à mon âge, et toujours soupirer la perte d'un mari » (Corneille).
2 Dire en soupirant. || Soupirer quelques plaintes. || Elle lui soupira de se taire. || Soupirer que… (En incise : → Bribe, cit. 2; caprice, cit. 9; rêche, cit. 5).
5 Cependant, elle soupira : — Ce qu'il y a de plus lamentable, n'est-ce pas ? c'est de traîner, comme moi, une existence inutile.
Flaubert, Mme Bovary, III, I.
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DÉR. Soupir, soupirail, soupirant, soupireur.
Encyclopédie Universelle. 2012.