survivre [ syrvivr ] v. <conjug. : 46> I ♦ V. tr. dir. Vx Survivre qqn, demeurer en vie après lui. « Le roi ne survécut guère le prince son fils » (Mme de La Fayette). II ♦ V. tr. ind. (1538) Mod. SURVIVRE À .
1 ♦ Demeurer en vie après la mort de (qqn). Il a survécu à tous les siens. ⇒fam. enterrer. « Songez à ménager votre vie, car je ne vous survivrai pas d'une heure » (Stendhal).
♢ Vivre encore après (un temps révolu, une chose passée, disparue). Survivre à une époque, à une génération. — Fig. « Il y a de grands hommes qui survivent à leur génie » (R. Rolland).
2 ♦ (v. 1580) (Choses) Exister encore après qu'une personne, une chose a disparu; durer plus longtemps que. L'œuvre d'art survit à l'artiste. « Nous, nous changeons dans des villes immuables et nos maisons, nos quartiers nous survivent » (Sartre).
3 ♦ (XVIe ) Continuer à vivre après (une chose insupportable). Survivre à la honte, à l'humiliation. Je n'y survivrai pas (cf. J'en mourrai).
4 ♦ Échapper à (une mort violente et collective). Survivre à une catastrophe (⇒ survivant) .
♢ Résister à (ce qui fait disparaître). « le christianisme survivait, plus fort que jamais, à l'entreprise philosophique » (Madelin).
III ♦ V. intr.
1 ♦ Continuer à vivre après une cause de mort, rester en vie. L'espoir de survivre.
2 ♦ (Choses) ⇒ se conserver, demeurer, subsister. « Rien ou à peu près ne survivait du beau fonctionnement d'une maison sagement ordonnée naguère » (Courteline).
IV ♦ SE SURVIVRE v. pron.
1 ♦ Vivre encore (dans qqn, qqch. qui perpétue le souvenir) après sa mort. Se survivre dans ses enfants, dans la mémoire des hommes. ⇒ se perpétuer. Ils se sont survécu dans leur œuvre.
2 ♦ (1718 se survivre à soi-même) Vivre encore alors qu'on n'est plus soi-même, qu'on a perdu sa force, ses qualités. Cet auteur se survit, il n'écrit plus rien de bon.
3 ♦ Vivre encore alors qu'on a failli mourir ou que l'on estime sa vie achevée. « les journaux font grand bruit de mon testament : ça me donne comme l'impression de me survivre » (Goncourt).
● survivre verbe transitif indirect Vivre après la mort de quelqu'un d'autre : Elle a survécu dix ans à son mari. Continuer à vivre, à exister après un événement, la fin d'une époque, la disparition de quelqu'un : Cette association n'a pas survécu à son créateur. Rester en vie après quelque chose (accident, catastrophe) susceptible d'entraîner la mort : Survivre à un bombardement. Survivre à de terribles blessures. Subsister en dépit d'une atteinte grave : La démocratie n'a pas survécu à ce coup de force. Être une survivance du passé : Des coutumes qui survivent en quelques régions. ● survivre (citations) verbe transitif indirect Émile Michel Cioran Răşinari, près de Sibiu, 1911-Paris 1995 Nous sommes tous des farceurs : nous survivons à nos problèmes. Syllogismes de l'amertume Gallimard ● survivre (difficultés) verbe transitif indirect Conjugaison Comme vivre.
survivre
v.
rI./r v. tr. indir. Survivre à.
d1./d (Personnes) Demeurer en vie après la mort de (qqn), après la disparition, la fin de (qqch). Survivre à ses enfants.
d2./d (Choses) Rester après la disparition de. Ses oeuvres lui survivront longtemps.
d3./d (Personnes) Rester en vie après (un événement qui a entraîné de nombreuses morts). Il a seul survécu à cet accident.
d4./d (Personnes) Continuer à vivre (après un événement très éprouvant moralement). Il n'a pu survivre à son chagrin.
d5./d (Choses) Résister à ce qui pourrait entraîner une disparition. La religion a survécu au communisme.
rII./r v. intr.
d1./d Continuer à vivre après un événement qui aurait pu entraîner la mort. Seuls trois passagers ont survécu.
d2./d Vivre dans des conditions difficiles. Un salaire qui lui permet à peine de survivre.
rIII/r v. Pron. Se survivre dans ses enfants, dans ses oeuvres: laisser après sa mort des enfants, des oeuvres qui perpétuent son souvenir.
⇒SURVIVRE, verbe
I. — Empl. trans. indir. Survivre à
A. — [Le suj. désigne un animé]
1. Qqn survit à qqn. Vivre au delà de la mort de quelqu'un. Survivre à son époux, à tous ses amis. Il y a aujourd'hui vingt ans que mon frère est mort, aujourd'hui vingt longues années que je lui ai survécu (GONCOURT, Journal, 1890, p. 1192).
— [Le compl. désigne la génération ou l'époque à laquelle appartenait la pers. dont il est question] Quand on a rencontré comme moi Washington et Bonaparte, que reste-t-il à regarder derrière la charrue du Cincinnatus américain et la tombe de Sainte-Hélène? Pourquoi ai-je survécu au siècle et aux hommes à qui j'appartenais par la date de ma vie? (CHATEAUBR., Mém., t. 2, 1848, p. 680). Je viens de voir l'image du vieil homme de lettres qui a survécu à la génération dont il fut le brillant amuseur, du vieux poète sans amis, sans famille, sans enfants (BAUDEL., Poèmes prose, 1867, p. 74).
2. Qqn survit à qqc. [Le compl. désigne une cause considérée comme pouvant entraîner ou réclamer la mort] Rester en vie dans des circonstances où d'autres périssent après des événements rendant la vie insupportable. Synon. réchapper de. Survivre à ses blessures, au déshonneur, à l'humiliation. Je me brûlerai la cervelle plutôt que de survivre à cette honte (MAUPASS., Une Vie, 1883, p. 219). Votre camarade, si même il a survécu à la chute, n'a pas survécu à la nuit (SAINT-EXUP., Terre hommes, 1939, p. 161).
B. — [Le suj. désigne un inanimé]
1. Qqc. survit à qqn. Continuer d'exister après la disparition de la personne qui est à l'origine de la chose dont il est question. Cependant Jocelyn, épisode de poésie intime, va paraître dans peu de jours (...). Je veux que cela me survive un demi-siècle (LAMART., Corresp., 1836, p. 177).
2. Qqc. survit à qqc.
a) Continuer d'exister après la cessation des circonstances qui ont produit la chose dont il est question. Ainsi l'anxiété survit au cauchemar, présence invisible, inexplicable (BERNANOS, Soleil Satan, 1926, p. 150).
b) Continuer d'exister en dépit de causes de disparition. Le cœur ainsi blessé connoît toutes les délicatesses des sentiments; sa tendresse s'accroît dans les larmes et survit aux désirs satisfaits (CHATEAUBR., Martyrs, t. 2, 1810, p. 150). En fait le principe de l'existence de juridictions administratives distinctes des tribunaux judiciaires est solidement établi depuis plus d'un siècle et demi et a survécu à tous les bouleversements constitutionnels (VEDEL, Dr. constit., 1949, p. 564).
II. — Empl. intrans.
A. — [Le suj. désigne un animé]
1. a) Lang. jur. Être en vie après la mort de quelqu'un. Si la clause n'établit le forfait qu'à l'égard des héritiers de l'époux, celui-ci, dans le cas où il survit, a droit au partage légal par moitié (Code civil, 1804, art. 523, p. 281).
b) Rester en vie dans des circonstances où d'autres périssent. Le 9 thermidor arrive (...): on a soif de plaisir; les soirées de l'hôtel Thélusson, du pavillon d'Hanovre, les bals de Richelieu, de Frascati, rassemblent tous ceux qui survivent, et dont le premier besoin paraît être de danser sur des ruines (JOUY, Hermite, t. 3, 1813, p. 22):
• 1. Avec le concours de bon nombre d'officiels et d'une masse de délateurs (...), 60 000 personnes [en France] avaient été exécutées, plus de 200 000 déportées dont à peine 50 000 survivraient.
DE GAULLE, Mém. guerre, 1959, p. 107.
2. a) Rester en vie au delà d'un terme où la mort est probable. Le blessé n'a survécu que quelques heures. Moi aussi, j'avais les fièvres, je les avais rapportées du Tonkin. Mais j'ai survécu; je ne me serais pas cru si robuste (ARLAND, Ordre, 1929, p. 497).
b) [Le suj. désigne un être ou un organisme vivant] Continuer de vivre, ne pas mourir. Les animaux vivent sans elles [les carotides], au moins pendant un certain temps. J'ai conservé en cet état, et durant plusieurs jours, des chiens (...): deux cependant n'ont pu survivre que six heures (BICHAT, Rech. physiol. vie et mort, 1822, p. 261).
— P. anal. Mener une existence précaire, comme réduite aux seules fonctions biologiques. Synon. végéter. Je ne vais pas très bien. Je me sens même très fatigué. Je m'abandonne. Rien ne me dit. Je suis d'une indifférence crevée. L'impression croissante de survivre est insupportable. Il me semble que je ne suis qu'à la surface (VALÉRY, Corresp. [avec Gide], 1914, p. 439).
c) [Le suj. désigne une espèce, une collectivité] Se maintenir en vie en luttant contre un environnement naturel difficile. Lorsque surviennent de telles calamités [la sécheresse, les épidémies], il faut pour survivre avoir recours aux méthodes plus humbles utilisées par les primitifs pour se procurer leur nourriture (LOWIE, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 34). Dans des conditions de vie imposées, la tribu [des Iks] perd peu à peu les liens avec la nature qui donnaient sens à sa vie, et à sa mort. Elle survit, au niveau le plus bas (Le Monde, 21 sept. 1989, p. 35, col. 1).
— Au fig. Résister au déclin. Des nouvelles de France, lettres, revues, toutes disant la même volonté de survivre, de remonter l'horrible pente qui part de 1918 pour aboutir à 1940 (GREEN, Journal, 1941, p. 59).
3. P. anal. ou au fig.
a) [Dans certaines croyances relig.] Continuer d'avoir une existence personnelle après la mort. Les Pharaons veulent vivre coûte que coûte, de gré ou de force (et non survivre), vivre comme ils vivaient sur terre (COCTEAU, Maalesh, 1949, p. 94).
b) Continuer d'exister dans la mémoire collective d'une communauté, après sa mort. Je trouve encore très fort aujourd'hui que les Goncourt aient eu l'idée de survivre grâce à une Académie comme il n'y en a pas deux (MAURIAC, Mém. intér., 1959, p. 97).
B. — [Le suj. désigne un inanimé]
1. Durer au delà du terme normal, au delà des circonstances qui ont fait naître. Synon. subsister. Tant que survit une rougeur On l'entend [une voix] soupirer encore: Elle s'éteint et s'évapore Avec la dernière lueur (M. DE GUÉRIN, Poés., 1839, p. 55). Il n'y avait plus en elle pour son mari que de la cendre d'affection. Pourtant les appellations caressantes, comme cela arrive souvent, avaient survécu (HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 889).
— Survivre dans. Dans l'amour ainsi, survivent, se réfugient des sentiments anciens venus de l'enfance, et dont la fraîcheur vous saisit tout à coup (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 270).
2. a) Se perpétuer dans le temps. Elle seule [la beauté] survit, immuable, éternelle. La mort peut disperser les univers tremblants, Mais la beauté flamboie, et tout renaît en elle, Et les mondes encor roulent sous ses pieds blancs (LECONTE DE LISLE, Poèmes ant., 1852, p. 7).
b) Se maintenir à travers les époques, sous une forme affaiblie ou marginale. Royauté et aristocratie sont deux choses qui survivent; elles ne vivent pas: l'idée démocratique creuse (...): quand la galerie souterraine sera finie, la fougasse chargée, l'étincelle mise à la poudre, les remparts voleront en l'air, et les peuples entreront par les brèches des murs écroulés (CHATEAUBR., Mém., t. 3, 1848, p. 250). Au reste, l'administration des notables n'a, malheureusement, pas totalement disparu. Elle survit en quelques endroits (GUÉHENNO, Journal « Révol. », 1937, p. 73).
III. — Empl. pronom.
A. — [Le suj. est un subst. de l'animé]
1. a) Prolonger son existence au delà d'un terme où la vie est considérée comme achevée. Ce modèle des époux et des pères, persuadé que la mort alloit saisir sa proie, vouloit encore se survivre pour veiller sur sa femme et sur son fils (FIÉVÉE, Dot Suzette, 1798, p. 35).
♦ Se survivre à soi-même. Nous voyons beaucoup de gens qui se survivent à eux-mêmes et se trouvent au milieu de la nouvelle France comme des hommes fossiles, débris d'un vieux monde impossible à reconstruire (BALZAC, Œuvres div., t. 2, 1842, p. 43). [Les vieillards] se contentent de sortir, de manger, de lire les journaux, ils se survivent à eux-mêmes (PROUST, Fugit., 1922, p. 635).
b) Continuer à vivre en ayant perdu ses raisons de vivre, ses capacités créatrices. Si, jusque-là, la peur de la lente déchéance l'avait dévoré, ce n'était qu'un doute; et, maintenant, il avait une brusque certitude, il se survivait, son talent était mort, jamais plus il n'enfanterait des œuvres vivantes (ZOLA, L'Œuvre, 1886, p. 316). À présent, je vais faire comme Anny, je vais me survivre. Manger, dormir. Dormir, manger. Exister lentement, doucement (SARTRE, Nausée, 1938, p. 198).
♦ Se survivre à soi-même. Comme les hommes de talent finissent de bonne heure! Les uns meurent jeunes, comme Byron; les autres se survivent à eux-mêmes et ont la douleur de se sentir éteints avant de finir (J.-J. AMPÈRE, Corresp., 1825, p. 331).
2. Au fig. Se survivre en/dans qqn. Perpétuer la mémoire de son nom, ses idées par l'intermédiaire de quelqu'un. Je me survivrai en vous, mes disciples fidèles. Mes vérités sont de l'ordre de celles qui ne périssent pas (RENAN, Drames philos., Eau jouvence, 1881, IV, 1, p. 486):
• 2. Qu'est-ce donc se continuer? sinon se prolonger, se survivre dans les siens, aux mêmes lieux, par les mêmes moyens, pour les mêmes buts? Où mieux assurer cette survie que sur le bien paternel?
PESQUIDOUX, Livre raison, 1932, p. 128.
B. — [Le suj. est un subst. de l'inanimé]
1. Prolonger son existence au delà du terme où normalement le processus s'achève. Le sort des grandes offensives se règle très vite. Dans les trois ou quatre jours, ou elles réussissent, ou elles ratent (...). Celle-ci dure depuis le 21. Elle a largement dépassé la semaine. Donc elle se survit. Ce sont les derniers remous (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1938, p. 102).
2. Continuer d'exister sous une forme affaiblie ou marginale. Michel-Ange mort, que fait cette misérable architecture qui se survivait à elle-même à l'état de spectre et d'ombre? (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 220). Le judaïsme vit, malgré tant de crises qui semblaient devoir, selon les prévisions humaines, avoir raison de lui. Il se survit, disent détracteurs ou sceptiques. Il s'est montré, en tout cas, capable de multiples renaissances (WEILL, Judaïsme, 1931, p. 195).
Prononc. et Orth.:[], (il) survit [-vi]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 « vivre plus tard que » (Roland, éd. J. Bédier, 2616: Ço est l'amiraill, le viel d'antiquitet, Tut survesquiest e Virgilie e Omer); 1160-74 sorvivre (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, II, 1967), rarement empl. trans. dep. le XVIIIe s., v. Ac. 1718; 1290 part. prés. subst. sourvivant (Cart. de Cysoing, p. 254 ds GDF. Compl.); 2. 1580 fig. survivre à « subsister après la perte de » (MONTAIGNE, Essais, II, 8, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 400); 3. 1694 (Ac.: Survivre à soy-mesme [...] Perdre avant la mort l'usage des facultez de la vie); 1718 se survivre (Ac.). Dér. de vivre verbe; préf. sur-. Cf. le lat. supervivere « survivre », dér. de vivere (vivre), préf. super- marquant la supériorité. Fréq. abs. littér.:1 473. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 2 236, b) 1 822,; XXe s.: a) 1 773, b) 2 305.
survivre [syʀvivʀ] v. [CONJUG. vivre.]
ÉTYM. 1080, Chanson de Roland; var. sorvivre, sourvivre, XIIe; de sur-, et vivre.
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I V. tr. (Vx).
1 Survivre qqn : demeurer en vie après qu'il est mort.
1 Le roi ne survécut guère le prince son fils; il mourut deux ans après.
Mme de La Fayette, la Princesse de Clèves, I.
2 Survivre qqch. : perpétuer une chose ayant appartenu à un défunt.
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II V. tr. ind. (1538). Mod. || Survivre à.
1 (Sujet n. de personne). Demeurer en vie, vivre après la mort de (qqn). || Survivre à ses enfants. ⇒ Enterrer (fam.). || Ceux qui devaient lui survivre (→ Apaisant, cit. 2). || Les deux années qu'il lui survécut (→ Pauvre, cit. 26). || Survivre à qqn de (une durée).
2 Songez à ménager votre vie, car je ne vous survivrai pas d'une heure.
Stendhal, Mina de Vanghel.
3 (…) mon cousin (…) citait un mot de Gordon-Bennett (…) « Le meilleur moyen de triompher de son adversaire, c'est de lui survivre ».
Colette, l'Étoile Vesper, p. 74.
♦ Vivre encore après (un temps révolu, une chose passée, disparue). || Survivre à une époque, à une génération (cit. 24; et → Passer à la postérité).
4 Viens, tu fais ton devoir, et le fils dégénère
Qui survit un moment à l'honneur de son père.
Corneille, le Cid, II, 2.
5 (…) Brutus et Caton étaient la république romaine incarnée; ils ne lui pouvaient survivre, pas plus que le cœur ne peut battre quand le sang se retire.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. VI, p. 89.
♦ Fig. || Survivre à soi-même, à son génie… : vivre encore alors qu'on n'est plus soi-même; qu'on n'a plus de génie. || « Un poète mort (2. mort, cit. 24) jeune à qui l'homme survit » (Musset).
6 Il y a de grands hommes qui survivent à leur génie. Mais, chez Berlioz, c'est le génie qui survit à la volonté (…)
R. Rolland, Musiciens d'aujourd'hui, p. 29.
2 (V. 1580). Sujet n. de chose. Exister encore après qu'une personne, une chose a disparu; durer plus longtemps que… || Exposition (cit. 7) qui survit à la solennité qui l'a fait naître. || « Le buste survit à la cité » (→ Art, cit. 85). || Les passions qui procèdent (cit. 2) du cerveau survivront aux passions émanées du cœur.
7 (…) l'ambition, survivant à tout le reste, battait encore en lui.
Ed. et J. de Goncourt, Sœur Philomène, p. 241.
8 Nous, nous changeons dans des villes immuables et nos maisons, nos quartiers nous survivent; les villes américaines changent plus vite que leurs habitants et ce sont eux qui leur survivent.
Sartre, Situations III, p. 99.
♦ Impersonnel :
8.1 Mais quand disparaît une croyance, il lui survit (…) un attachement fétichiste aux anciennes qu'elle avait animées (…)
Proust, À la recherche du temps perdu, t. II, p. 278.
3 (Sujet n. de personne). || Survivre à qqch. : continuer à vivre après une chose insupportable (perte, chagrin, humiliation, etc.). || Survivre à la honte (cit. 6) d'une faillite, à l'humiliation (cit. 12) d'un refus. || Il ne survécut pas longtemps à l'asservissement (cit. 1) de sa patrie. || Je n'y survivrai pas (→ J'en mourrai).
♦ Échapper à (une mort violente et collective). || Elle survécut à l'exécution de tous les siens (→ Hache, cit. 10). || Survivre à un accident, à une catastrophe. ⇒ Survivant (3.). || Les organismes forts qui ont survécu à l'épidémie (→ Assainir, cit. 2).
9 On m'a dit qu'après avoir lu cette lettre Frédéric avait fait sur lui-même une funeste tentative. Je n'en parlerai pas ici; les indifférents trouvent trop souvent du ridicule à des actes semblables, lorsqu'on y survit.
A. de Musset, Nouvelles, « Frédéric et Bernerette », X.
4 (XIXe). Sujet n. de chose. Résister à (ce qui fait disparaître). || Institution qui n'a pas survécu aux attaques des opposants (→ aussi Apophyse, cit. 1).
10 (…) le christianisme survivait, plus fort que jamais, à l'entreprise philosophique un instant triomphante grâce au bras séculier de la Révolution, et ce christianisme ne lui survivait que sous sa forme catholique.
Louis Madelin, Hist. du Consulat et de l'Empire, Le Consulat, VII.
5 Absolt. a (Sujet n. de personne). Continuer à vivre (après une cause de mort), rester en vie. || L'espoir de survivre (→ Instinct, cit. 5).
11 Vivre, survivre… après tant d'années de guerre, ces mots-là tiennent une place énorme. Le besoin de survivance est si vif chez nous, femmes (…)
Colette, l'Étoile Vesper, p. 74.
♦ Spécialt. Continuer à vivre, sans avoir d'activités intéressantes ou agréables. ⇒ Végéter; → ci-dessous, Se survivre (3.).
11.1 Blâmant mon ancienne inertie, je ne trouvai rien à faire, non à vivre, à survivre, en attendant mieux.
S. de Beauvoir, la Force de l'âge, p. 484.
b (Choses). ⇒ Conserver (se), demeurer, subsister. || Cette coutume ne survivra plus longtemps. || Seuls les souvenirs ont survécu. ⇒ Surnager.
12 Mais rien ne survivra, pas même ta poussière,
Pas même un de vos os, enfants du meurtrier !
Leconte de Lisle, Poèmes barbares, « Qaïn ».
13 Rien ou à peu près ne survivait du beau fonctionnement d'une maison sagement ordonnée naguère, tombée depuis entre des mains furieuses, et devenue comparable à ces horloges détraquées (…)
Courteline, Messieurs les ronds-de-cuir, Ve tableau, I.
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se survivre v. pron.
1 (V. 1690). Vivre encore, continuer à être, se perpétuer dans un être, dans la mémoire…, après sa mort. || Se survivre dans ses enfants, dans la mémoire des hommes. ⇒ Perpétuer (se).
14 (…) sous ce désir, sans cesse formulé par le testateur, de servir la cause du spirituel, il était assez troublé de reconnaître partout une secrète hantise (…) le souci de se survivre dans le temporel.
Martin du Gard, les Thibault, t. IV, p. 229.
2 (1718). Vivre encore alors qu'on n'est plus soi-même, qu'on a perdu sa force, ses qualités, son pouvoir. || Cet auteur se survit, il n'écrit plus rien de bon. || Il mourut après (cit. 24) s'être longtemps survécu.
3 Vivre encore alors qu'on a failli mourir ou que l'on estime sa vie achevée.
15 (…) la destinée recommence, sans que la confiance des premières années se renouvelle; l'on change de monde, sans avoir changé de cœur. Ainsi l'exil condamne à se survivre (…)
Mme de Staël, De l'Allemagne, I, XIII.
16 Ces jours-ci, les journaux font grand bruit de mon testament : ça me donne comme l'impression de me survivre.
Ed. et J. de Goncourt, Journal, 24 juin 1882, t. VI, p. 147.
17 Il avait beaucoup de raisons pour se réjouir : en particulier, il aurait pu se féliciter d'avoir coupé à la péritonite, d'être guéri. Au lieu de ça, il pensait : « Je me survis » et il s'affligeait.
Sartre, la Mort dans l'âme, p. 51.
❖
DÉR. Survivance, survivant.
Encyclopédie Universelle. 2012.