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ENCÉPHALE
ENCÉPHALE

L’encéphale, défini comme le contenu de la boîte crânienne, est composé, d’avant en arrière, du cerveau, du cervelet et du tronc cérébral (dont le bulbe rachidien est la partie postérieure), avec les nerfs qui s’y rattachent; son poids moyen est de 1 500 g et il renferme entre 15 et 20 milliards de cellules nerveuses. Les Égyptiens ne s’y intéressaient pas, car ils croyaient que les fonctions vitales siégeaient au cœur et au diaphragme. Les Grecs, malgré leur faible connaissance de l’anatomie du cerveau, lui attribuaient beaucoup plus d’importance. Déjà, au Ve siècle avant J.-C., Alcméon de Crotone considérait que la sensation consciente se situait dans le cerveau. Hippocrate le reconnaissait comme centre de la sensation, de la motricité et de l’émotion. Il fallut attendre les Grecs d’Alexandrie, Hérophile et Érasistrate, suivis du Gréco-Romain Galien, pour avoir une nette description de la morphologie du cerveau. Ces auteurs disséquaient surtout le cerveau du bœuf, et leurs observations ont été copiées avec très peu de changements jusqu’à la fin de la Renaissance. Le premier livre consacré au cerveau humain fut celui de Thomas Willis (1664), avec des illustrations par le célèbre architecte Christopher Wren.

Pour l’étude microscopique du cerveau, il fallut attendre non seulement l’invention du microscope lui-même, mais également la découverte des moyens adéquats de conservation et de fixation des tissus. Ainsi, à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe, trouve-t-on les premières descriptions histologiques, où figurent notamment les noms de Vicq d’Azyr et de Reil. Avec l’avènement des méthodes de coloration, dans la première moitié du XIXe siècle, apparaissent des descriptions de la plupart des amas cellulaires du système nerveux central (Goll, Magendie). Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, en employant les colorations spécifiques des cellules et des fibres nerveuses, on aboutit à une véritable avalanche de connaissances sur l’anatomie microscopique du cerveau qu’étudiaient maints savants de tous les pays de l’Europe, tels Wallenberg (Allemagne), Golgi (Italie), Retzius (Suède), Betz (Russie), Gowers (Angleterre), Luys (France), Winkler (Hollande), von Economo (Autriche) et surtout Ramón y Cajal (Espagne).

On a cru longtemps, à la suite des Gréco-Romains, que les nerfs étaient creux et qu’ils conduisaient des fluides ou «esprits animaux» élaborés dans les ventricules du cerveau. Ce ne fut qu’avec le Suisse A. von Haller, au cours du XVIIIe siècle, que l’on commença d’avoir des idées plus conformes à la réalité (cf. EXCITATION ET EXCITABILITÉ, système NERVEUX). Vers la fin de ce siècle débuta avec Galvani l’ère de l’électrophysiologie nerveuse. Au cours du XIXe siècle, il suffit de mentionner Du Bois-Reymond en Allemagne et Claude Bernard en France pour témoigner du grand progrès que connut alors la neurophysiologie. Les travaux antérieurs s’achevèrent par l’œuvre capitale de Sherrington (Angleterre) qui inaugura la neurophysiologie moderne, aujourd’hui étroitement associée à la neuro-anatomie. La notion de la localisation des fonctions cérébrales, prévue en quelque sorte par la phrénologie de F. J. Gall, à la fin du XVIIIe siècle, fut introduite dans la science par les grands neurologues P. Broca et Hughlings Jackson entre 1860 et 1870.

1. Morphologie générale

Développement au cours de l’embryogenèse

Le cerveau se forme chez l’embryon par la croissance et le développement du tube creux qui provient initialement d’une invagination du feuillet ectodermalique. C’est donc par rapport au canal central de ce tube que l’on décrira la disposition des diverses parties de l’encéphale et les rapports qu’elles entretiennent les unes avec les autres (fig. 1). Ce canal est le prolongement du canal central de la moelle épinière (canal de l’épendyme), qui conserve sa forme primitive de tube. La partie adjacente du cerveau, entourant le canal central localement élargi (quatrième ventricule ), s’appelle le rhombencéphale. La partie postérieure de celui-ci, ou myélencéphale , se place dans le prolongement de la moelle épinière; c’est la moelle allongée (bulbe rachidien). La partie antérieure du rhombencéphale, plus épaisse, forme ventralement le pont et dorsalement le cervelet. Ce dernier se développe largement au-dessus du toit du quatrième ventricule. L’ensemble du pont et du cervelet forment le métencéphale. En avant du pont et donc du quatrième ventricule, autour de l’aqueduc , se situe le mésencéphale. Plus loin encore, le tissu nerveux qui forme les parois du troisième ventricule s’appelle le diencéphale . Celui-ci comporte trois divisions: celle du milieu est le thalamus ; au-dessus se trouve l’épithalamus , vestigial chez les Vertébrés supérieurs; en dessous est situé l’hypothalamus , centre de contrôle des fonctions végétatives (fig. 7).

Toutes ces parties du cerveau sont placées selon la ligne médiane du névraxe (nom donné à l’ensemble du système nerveux central), formant ainsi une sorte de tige centrale qui peut être considérée comme le prolongement endocrânien de la moelle épinière. Par contre, les parties du cerveau qui entourent les ventricules latéraux (numérotés I à gauche et II à droite) forment le télencéphale ou hémisphères cérébraux. Chez l’Homme et les Primates, l’énorme croissance de ces structures bilatérales cache dorsalement tout le reste du cerveau en avant du bulbe et du cervelet; le diencéphale, enfoncé entre les hémisphères cérébraux, assure la connexion avec le reste du névraxe.

Chez les Vertébrés supérieurs, les hémisphères sont liés l’un à l’autre par plusieurs bandes de fibres nerveuses qu’on appelle des commissures. La plus grosse et la plus évidente d’entre elles est le corps calleux , qui recouvre le toit du troisième ventricule et donc le diencéphale.

Bien qu’il y ait quelques flexures le long du tronc cérébral (bulbe, pont, mésencéphale et diencéphale), on peut admettre que ces organes sont alignés; mais le cas des hémisphères cérébraux est tout à fait différent. Ils se sont développés en tournant autour d’un axe transversal qui passe à travers le trou de Monro , trou de communication entre le troisième ventricule et les ventricules latéraux (fig. 2, 7, 14). Ce mode de développement a pour effet de masquer les structures télencéphaliques qui se trouvent sur l’axe (comme l’insula ) et d’entraîner les structures télencéphaliques qui sont situées en dehors de l’axe de telle sorte qu’elles prennent la forme arquée de l’hémisphère correspondant (noyau caudé et ventricule latéral , par exemple, fig. 2).

Structure histologique

Le névraxe primitif, comme la moelle épinière définitive, est construit de telle sorte que les cellules nerveuses (substance grise ) sont situées à l’intérieur, autour du canal central, tandis que leurs prolongements ou fibres nerveuses (substance blanche ) se trouvent à l’extérieur (fig. 3). Il en est ainsi dans le tronc cérébral ; mais aux niveaux du cervelet et des hémisphères cérébraux, en plus de la substance grise centrale, on trouve aussi une écorce externe (cortex ) de cellules nerveuses, recouvrant la substance blanche. Cette écorce peut être plissée, ce qui réalise une augmentation de sa superficie par rapport à celle des structures sous-jacentes. Le cortex cérébelleux est plissé de façon plus ou moins régulière chez tous les Vertébrés; au niveau du cortex cérébral des Mammifères, le plissement dépend du niveau d’évolution de l’espèce envisagée. Ainsi les Mammifères inférieurs, au cortex peu plissé, sont lissencéphales , tandis que les Mammifères supérieurs, au cortex fortement plissé, sont gyrencéphales. Chez l’Homme, on remarque que les deux tiers de la superficie du cortex cérébral se trouvent dans les profondeurs des sillons. La superficie totale du cortex cérébral humain serait, s’il était étalé, de l’ordre de 0,25 mètre carré.

La substance grise du névraxe primitif forme une colonne continue au centre du système nerveux central. Dans la moelle épinière et le tronc cérébral définitifs, la partie centrale de cette colonne consiste en une masse de cellules nerveuses non spécifiques, c’est-à-dire de fonction généralisée, qu’on appelle souvent la formation réticulée (fig. 4). À la périphérie de la colonne se différencient, également en colonnes (souvent discontinues au niveau du tronc cérébral), des amas de neurones de fonctions spécifiques, qui sont les noyaux des nerfs crâniens (et spinaux). Certains de ces noyaux donnent naissance à des axones qui alimentent des structures extranerveuses effectrices (muscles, glandes), et sont donc des noyaux moteurs. D’autres reçoivent des nerfs afférents des récepteurs situés dans les organes des sens, la peau, les articulations, les muscles, ou les viscères; ceux-ci sont des noyaux sensoriels .

La colonne centrale continue, avec ses neurones aspécifiques centraux et ses noyaux spécifiques périphériques, constitue tout le long du tronc cérébral (y compris le diencéphale) le tegmentum ; à ce niveau, la partie aspécifique est connue sous le nom de formation réticulée , ses cellules étant éparses parmi des fibres entrelacées. Toujours au niveau du tronc cérébral, certains amas cellulaires, qui n’ont aucun rapport fonctionnel ou morphologique les uns avec les autres, sont situés au-dessus ou au-dessous du tegmentum. Dorsalement par rapport au tegmentum, à la hauteur du bulbe rachidien postérieur, se trouvent les noyaux gracilis et cuneatus (ou de Goll et Burdach, fig. 14), centres de relais de la voie somesthésique spécifique; au niveau du mésencéphale, ce sont les tubercules quadrijumeaux (fig. 7), dont la paire antérieure (ou colliculus supérieurs) est un centre de réflexes visuels, tandis que la paire postérieure (colliculus inférieurs) est un relais de la voie auditive spécifique. En dessous du tegmentum, au niveau du bulbe, se trouve l’olive inférieure (fig. 15), noyau en forme de bourse, qui sert de relais entre le cervelet et les voies motrices extrapyramidales contrôlant la tonicité et la posture des muscles; au niveau du tronc cérébral antérieur, sont situés certains noyaux appartenant au système moteur extrapyramidal susnommé, à savoir le noyau rouge et la substance noire (ou locus niger, fig. 15) dans le mésencéphale et le noyau subthalamique (ou corps de Luys ) dans le diencéphale.

La plus grande partie de la substance grise à l’intérieur des hémisphères cérébraux est représentée par les noyaux de la base (fig. 5, 14). Ceux-ci sont constitués par le noyau caudé , qui suit le contour du ventricule latéral, et le noyau lenticulaire , qui se trouve sur l’axe transversal. Le noyau lenticulaire est divisé en une partie externe, le putamen , et une partie interne, le globus pallidus. L’ensemble du noyau caudé et du putamen forme les corps striés ; tous les deux envoient leurs axones au globus pallidus, qui à son tour communique avec les centres inférieurs de la voie motrice extrapyramidale contrôlant la tonicité musculaire et la posture.

Entre les noyaux caudé et lenticulaire télencéphaliques d’une part et le thalamus diencéphalique de l’autre se trouve un ruban de substance blanche, la capsule interne (fig. 5). C’est une sorte d’entonnoir par lequel passent obligatoirement toutes les fibres qui, sortant de l’écorce cérébrale, se rendent vers les niveaux inférieurs du névraxe, ainsi que celles qui, provenant du diencéphale, aboutissent aux hémisphères cérébraux.

Phylogenèse

Sur le plan évolutif, on peut soutenir la thèse selon laquelle le télencéphale s’est développé préférentiellement parce que les premiers Vertébrés marins dépendaient surtout de leur sens olfactif (chimique) pour chercher leur nourriture et assurer leur reproduction. Or, les nerfs olfactifs (première paire de nerfs crâniens) vont directement des narines au télencéphale, lequel, en se différenciant (paléocortex ), permet une analyse à la fois précise et complexe des signaux provenant des chémorécepteurs que sont les terminaisons périphériques des nerfs olfactifs. Au fur et à mesure qu’on s’élève dans l’échelle phylogénétique, on trouve de plus en plus de signaux extra-olfactifs qui arrivent au niveau du télencéphale. Cependant, chez les Vertébrés inférieurs, ces influx, remontant le névraxe, s’acheminent presque uniquement vers les noyaux de la base, se relayant au niveau du thalamus et laissant cependant le cortex cérébral (paléocortex) essentiellement consacré à l’analyse des afférences d’origine olfacto-chimique. Mais, chez les Mammifères, se différencie un nouveau cortex, le néocortex , entièrement indépendant de toute influence olfactive: une fissure rhinale (fig. 6) sépare le cortex primitif ou rhinencéphale du néocortex. Chez l’Homme et les Primates, le néocortex s’est accru à tel point qu’il refoule et cache la plupart du paléocortex rhinencéphalique.

Des commissures du télencéphale (fig. 7), trois appartiennent au rhinencéphale. Ce sont les commissures antérieure et postérieure , et la commissure de l’hippocampe. La plus grande des commissures (chez l’Homme) est le corps calleux , reliant en général des points analogues du néocortex de l’hémisphère gauche et de l’hémisphère droit. Son importance est cependant non seulement fonction du volume du néocortex, mais également de celle du croisement de la voie optique. Chez les Vertébrés inférieurs, la voie optique est entièrement croisée, tandis que chez les Mammifères supérieurs, et selon le niveau de complexité cérébrale, un contingent de plus en plus important de fibres nerveuses reste homolatéral. Chez l’Homme, la voie optique, comportant environ un million de fibres pour chaque œil, soit 40 p. 100 de l’ensemble des afférences sensorielles du système nerveux central, n’est croisée qu’à 50 p. 100. Parallèlement, le corps calleux de l’homme, avec ses 10 millions de fibres, est le plus important de toutes les espèces, non seulement sur le plan absolu (parce que le néocortex humain est le plus grand), mais également sur le plan relatif (parce que la voie optique de l’homme possède le plus grand pourcentage de fibres non croisées).

2. Anatomie du cerveau humain

Le rhinencéphale

Les nerfs olfactifs , dont les terminaisons périphériques se trouvent au sommet de la cavité nasale, traversent la lame criblée de l’os ethmoïde pour aboutir dans le bulbe olfactif (fig. 6). Les axones issus des neurones du bulbe olfactif forment le pédoncule olfactif ; celui-ci se dirige vers l’arrière, où, au niveau du chiasma optique, il se divise en une racine externe et une racine interne. La racine externe envoie quelques-uns de ses axones au noyau amygdalien (fig. 5), situé dans la base du lobe temporal directement au-dessus de la racine externe; ce noyau appartient en partie au rhinencéphale proprement dit et en partie aux noyaux de la base. La plupart des fibres de la racine externe du pédoncule olfactif se terminent dans le cortex rhinencéphalique (fig. 6). Tout cortex, par définition, est formé de couches de cellules nerveuses ou neurones. Le cortex rhinencéphalique, relativement primitif, possède trois couches. Ce cortex se trouve sur la face inféro-interne de l’hémisphère cérébral, séparé du néocortex par la fissure rhinale. Son côté interne est à proximité du tronc cérébral (région mésencéphalique), qui le délimite intérieurement. Une partie importante du rhinencéphale s’enroule à l’intérieur de l’hémisphère: c’est l’hippocampe , avec de grosses cellules pyramidales, dont les axones forment le trigone cérébral ou fornix (fig. 6). Les fibres du fornix entourent le diencéphale pour aboutir dans les noyaux non spécifiques de ce dernier ainsi que dans l’hypothalamus. Notons que l’hippocampe se projette par la voie des corps mamillaires et des noyaux antérieurs du thalamus sur le gyrus cingulaire (allocortex). La racine interne du pédoncule olfactif se termine dans un territoire de substance grise, très réduit chez l’Homme, juste en dessous de l’extrémité antérieure du corps calleux, et qui s’appelle la région septale .

Les efférences de la région septale passent en partie au-dessus du thalamus – atteignant par là les noyaux habénulaires de l’épithalamus – et en partie en arrière, à travers l’hypothalamus, comme un composant du faisceau médian du télencéphale. Ce dernier, ainsi que les efférences des noyaux habénulaires, se projette au tegmentum du mésencéphale.

Bien que l’Homme ait un odorat relativement peu développé (espèce microsmatique), et bien que son rhinencéphale soit refoulé et caché par la surcroissance du néocortex, son hippocampe est relativement le plus grand que l’on connaisse dans le règne animal. Il semble jouer un rôle important: un sujet privé de ses deux hippocampes devient incapable de mémoriser, mais conserve les anciennes acquisitions de sa mémoire.

Le néencéphale

Le néencéphale comprend le néocortex, les noyaux de la base et le thalamus du diencéphale, dont l’évolution est liée.

Le néocortex

Ce cortex est formé par six couches de cellules nerveuses, numérotées de I à VI de l’extérieur vers l’intérieur (fig. 8). Les couches I et VI contiennent des interneurones de liaison, et varient peu d’une région à l’autre. Les couches II à V comportent ou des petites cellules granulaires (II et IV) ou des grosses cellules pyramidales (III et V). Il y a des différences régionales non seulement de l’épaisseur de l’ensemble du cortex (de 1,5 mm à 4,5 mm) mais également de l’importance des diverses couches. En général, les aires non spécifiques, ou associatives, du cortex ont les couches de II à V d’épaisseur à peu près égales. Par contre, les régions sensitives spécifiques montrent un accroissement considérable des couches des grains II et IV aux dépens des couches pyramidales III et V; dans le cas des aires motrices, c’est juste le contraire.

On peut considérer comme une dépendance du thalamus la plupart des territoires du cortex: chaque point de la surface corticale représente la projection d’un point thalamique (fig. 9). Ainsi chaque région fonctionnelle du cortex est-elle la zone de projection d’un noyau thalamique donné; c’est à cette liaison thalamo-corticale qu’elle doit non seulement sa particularité fonctionnelle, mais également sa structure histologique. Les corps striés, eux aussi, reçoivent des afférences qui leur sont projetées «point par point» à partir de certains noyaux thalamiques. Compte tenu d’une rotation (théorique) d’environ 450 du thalamus dans le plan transversal vers le bord externe de l’hémisphère cérébral, l’ensemble de la projection thalamo-corticale est approximativement radial dans le sens antéro-postérieur et dans le sens médio-latéral.

Le thalamus et les noyaux de la base

À l’intérieur du thalamus (fig. 9), de forme ovoïde, se trouve une cloison gliale, la lame médullaire interne: elle fait défaut dans l’extrémité postérieure (pulvinar ) du thalamus. Par rapport à la lame médulaire interne, la partie dorso-médiane du thalamus forme le noyau dorso-médian. En avant, la lame médullaire interne se divise pour délimiter le groupe antérieur des noyaux thalamiques. Le noyau dorso-médian et les noyaux antérieurs ont des rapports importants avec l’hypothalamus et, moins directement, avec le rhinencéphale. La partie postérieure de la lame médullaire interne se divise, elle aussi, pour inclure les noyaux dits intralaminaires. Ces derniers peuvent être considérés comme la partie la plus antérieure de la formation réticulée (aspécifique) du tegmentum du tronc cérébral (fig. 4), avec laquelle ils sont en continuité. La partie du thalamus latéral ou ventro-latéral par rapport à la lame médullaire interne comporte deux groupes de noyaux thalamiques: ventralement se trouvent les noyaux ventraux y compris les corps genouillés médian et latéral ; dorsalement, le groupe latéral qui se prolonge vers l’arrière, où il forme le pulvinar.

Les noyaux intralaminaires, en tant que tête de la formation réticulée, reçoivent des afférences aspécifiques du système primitif non différencié. Ces noyaux, anciens sur le plan évolutif, se projettent de façon précise sur les corps striés. Ces derniers formant avec le globus pallidus les noyaux de la base, commandent, rappelons-le, un système de contrôle de la motricité. Or, les noyaux de la base forment, dans leur ensemble, la première structure télencéphalique qui échappe à la dominance des sens chimiques.

La vision étant, après les sens chimiques, le sens qui se perfectionne le premier en faisant appel à une analyse télencéphalique, on ne s’étonnera pas que le relais thalamique de la voie visuelle soit le premier à se différencier, sous la forme du corps genouillé latéral , qui appartient au groupe nucléaire ventral du thalamus définitif. Au fur et à mesure qu’apparaissent d’autres voies sensorielles spécifiques, d’autres noyaux ventraux du thalamus se différencient: ainsi, le corps genouillé médian pour la voie auditive, et le noyau ventral postérieur pour la somesthésie (sensibilité générale de la peau et des articulations). Des informations (inconscientes) sur la tension musculaire, après être passées par le cervelet, sont transmises aux noyaux ventral latéral et ventral antérieur du thalamus.

Relations thalamo-corticales

Les territoires corticaux dépendant des noyaux ventraux du thalamus (fig. 9) sont connus sous le nom d’aires primaires du cortex. Chez les Mammifères inférieurs, les aires primaires comprennent la plus grande partie du néocortex. Grâce à des contrôles cortico-thalamiques, grâce au rôle des interneurones qui s’interposent au niveau des divers relais, y compris dans le thalamus même, les messages sensoriels qui parviennent au cortex primaire sont pour ainsi dire «mis au point» et les informations sont ainsi mieux différenciées. Les régions corticales où se projettent les fibres venant des corps genouillés latéral et médian, et du noyau ventral postérieur, sont respectivement les aires visuelle, auditive, et somesthésique.

Le complexe «noyau ventral latéral-noyau ventral antérieur» envoie ses afférences sur le cortex moteur (primaire), où il apporte des renseignements sur le degré de tension des muscles. Signalons que ces noyaux thalamiques, en plus des afférences cérébelleuses d’origine musculaire, reçoivent aussi des afférences en provenance du globus pallidus, ce qui permet un contrôle thalamo-cortical du système moteur de la posture et du tonus.

Les noyaux thalamiques du groupe antérieur se projettent sur la partie la plus ancienne du néocortex, le gyrus cingulaire (fig. 9) qui fait partie, avec le paléocortex rhinencéphalique, du lobe limbique (fig. 6). Le noyau dorso-médian envoie ses efférences au cortex frontal et orbitaire, en avant de l’aire motrice. Sachant que le cortex frontal de l’Homme est très vaste par rapport à celui des Mammifères inférieurs, maints auteurs en ont conclu que ce cortex est le siège des opérations intellectuelles, auxquelles l’Homme doit sa prééminence au sein du règne animal. En fait, il est plus probable que l’étendue de ce cortex chez l’Homme se trouve liée à une émotivité, à une affectivité plus forte et plus nuancée que chez les animaux inférieurs.

Les noyaux du groupe latéral du thalamus se projettent sur des régions du cortex voisines des aires primaires. Ces circuits thalamo-corticaux sont de nature associative, chacun par rapport à la fonction spécifique du cortex primaire adjacent; ainsi on reconnaît des régions associatives visuelles, auditives et somesthésiques, dont la fonction est cognitive.

En ce qui concerne le néocortex du lobe temporal, il reçoit, dans sa partie arrière, et en proportion assez faible, des afférences du pulvinar (lui-même bien développé chez les Primates); mais dans sa plus grande partie, il reste indépendant du thalamus. Par contre, il recueille un grand nombre de fibres en provenance d’autres régions corticales, surtout des autres aires associatives (fig. 10). Ce néocortex temporal, dont l’évolution est la plus récente, devient de plus en plus important lorsqu’on remonte l’échelle phylogénétique. Étant donné ses connexions, il est possible de le concevoir comme une région «d’association des associations» correspondant, sur le plan fonctionnel, à ce qu’on pourrait qualifier d’association interprétative.

Pour expliquer la notion des deux types de cortex associatif, prenons un exemple: une pièce de monnaie que l’on tient entre les doigts a ses seules caractéristiques physiques traduites par le cortex somesthésique primaire, c’est-à-dire qu’elle est circulaire, dure, froide, etc. Le cortex associatif somesthésique (cognitif) lui ajoute un nom, donc une connaissance de ce qu’elle est. C’est au niveau du cortex associatif temporal (interprétatif) qu’on reconnaîtrait ses fonctions, sa valeur, etc. L’importance du cortex consacré à des fonctions d’association, de raisonnement et d’émotivité chez l’Homme est soulignée par le fait que le cortex primaire n’occupe que 20 p. 100 de la superficie totale du néocortex.

Fissuration du cortex cérébral

Ayant discuté l’aspect topographique de l’organisation thalamo-corticale, on abordera de façon plus compréhensible la question de la fissuration du cortex cérébral (fig. 9). Certains gros sillons, tels que la scissure de Sylvius , doivent leur position uniquement au développement du télencéphale. D’autres ont une signification fonctionnelle. Parmi eux, on note la scissure de Rolando qui sépare les cortex primaires moteur et somesthésique, et la scissure calcarine , entourée du cortex visuel primaire. Un troisième groupe de sillons sépare le néocortex du paléocortex, comme le fait la fissure rhinale que nous avons déjà mentionnée. À ce groupe peut s’ajouter le sillon cingulaire , situé entre l’allocortex (cortex transitionnel) du gyrus cingulaire (du lobe limbique) et le néocortex proprement dit. Seuls ont été mentionnés les sillons les plus importants appartenant à chacun de ces trois groupes; mais il faut reconnaître que la grande majorité des sillons ne sont compris dans aucun de ces groupes. Ils sont déterminés par l’épaisseur relative du cortex à un point donné. Cette épaisseur dépend à son tour, comme on l’a vu, de la projection thalamique, donc de la valeur fonctionnelle du cortex intéressé. Parce que les projections thalamo-corticales sont plus ou moins semblables chez tous les êtres humains, il y a une certaine analogie de la disposition d’un certain nombre de sillons. Un petit nombre de sillons constants, même sans valeur fonctionnelle, peuvent servir de points de repère, mais on ne saurait trop souligner qu’une neuro-anatomie, comme il en existe, qui consiste à énumérer et à nommer un nombre immense de sillons, très variables d’ailleurs, ne sert qu’à cacher sous une nomenclature impressionnante, mais sans valeur, une ignorance profonde des données scientifiques fondamentales.

Système spécifique et système non spécifique

Jusqu’à présent, sur le plan anatomo-fonctionnel, nous n’avons considéré les relations thalamo-télencéphaliques que dans un cadre topographique. Cependant, il existe, on le sait, un autre rapport thalamo-cortical (fig. 11), qui intéresse les noyaux intralaminaires du thalamus et le néocortex non primaire. Cette relation, connue à l’heure actuelle (probablement à tort) sous le nom de «projection thalamo-corticale diffuse», est largement responsable des processus rythmiques ou, au contraire, désynchronisants de l’électroencéphalogramme, de la «réponse à recrutement» et des phénomènes de sommeil, d’éveil, et de niveau de vigilance. On ne sait encore, malgré des recherches assidues, comment les impulsions d’origine intralaminaires parviennent au cortex. Une liaison directe entre ces noyaux et le cortex n’est pas entièrement exclue, mais paraît peu probable. Par contre, on peut exclure avec certitude un relais par l’intermédiaire des corps striés: rappelons que ces derniers reçoivent des afférences des noyaux intralaminaires, mais n’envoient pas leurs efférences au cortex. Malgré notre ignorance des circuits exacts impliqués dans la projection thalamo-corticale diffuse, on sait qu’elle est d’une importance capitale sur le plan fonctionnel.

Le dualisme des rapports thalamo-corticaux se traduit dans l’ensemble du névraxe par l’existence parallèle mais indépendante (sauf à l’entrée dans le système nerveux central) de deux systèmes afférents, appelés spécifique et non spécifique (ou aspécifique ). Les voies spécifiques, comme nous l’avons vu, aboutissent aux noyaux ventraux du thalamus; leurs signaux sont élaborés par des circuits que l’on peut schématiser comme dans la figure 11 b.

Une voie spécifique possède les caractères suivants: a ) le premier neurone central est mis en jeu par un type bien défini de récepteur qui, à son tour, n’est sensible qu’à une seule modalité d’énergie physique; b ) les neurones centraux ont des connexions restreintes avec les autres neurones de la même voie; c ) à chaque niveau de relais, il y a des circuits fermés d’interneurones susceptibles de moduler les signaux.

Les voies aspécifiques, par contre, sont caractérisées par les particularités suivantes: a ) à partir du premier neurone central, les neurones de ce système reçoivent des afférences convergentes et sont donc mis en jeu par divers types de récepteurs (sauf par les récepteurs articulaires et les fuseaux neuro-musculaires) et par des stimulations provenant de maintes régions du corps; b ) chacun des neurones a des connexions efférentes nombreuses et divergentes avec d’autres neurones du système aspécifique; c ) il n’y a pas d’interneurones intranucléaires dans les voies aspécifiques.

Une particularité cytologique permet de distinguer entre des neurones spécifiques et aspécifiques: l’arbre dendritique d’un neurone spécifique peut avoir beaucoup de branches, mais ne dépasse pas les limites du noyau de substance grise à l’intérieur duquel il est situé, tandis que les dendrites des neurones aspécifiques sont longs, relativement droits, et ont peu de branches; ils dépassent les limites du centre où se trouve le corps cellulaire, pour s’enchevêtrer avec les arbres dendritiques d’autres centres aspécifiques. C’est ainsi qu’on peut facilement concevoir le système aspécifique (ou formation réticulée) comme une formation continue tout le long de la majorité du névraxe (fig. 4). D’autre part, la plupart des neurones du système aspécifique ont des axones bifurqués, dont une branche descend et l’autre monte; on sait que, dans certaines zones, la branche descendante est plus importante, tandis que dans d’autres c’est la branche montante qui importe le plus. On ne sait pas, jusqu’à présent, s’il y a des neurones à axone bifurqué de la même façon à l’intérieur des systèmes spécifiques, mais s’il y en a, ils sont peu nombreux.

Nous avons déjà décrit les six couches du néocortex. Sur le plan purement morphologique, les afférences thalamo-corticales spécifiques se concentrent au niveau de la quatrième couche. Cependant, on sait que sur le plan fonctionnel les six couches dans leur ensemble sont intéressées par les influx afférents, une colonne de neurones corticaux entourant chaque afférence thalamique. Or, on sait actuellement que le cortex comporte des neurones des deux types, spécifique et aspécifique; mais on n’est pas encore arrivé à déceler comment ils sont organisés les uns par rapport aux autres. Comme dans le reste du névraxe, le nombre total de neurones au niveau du cortex n’augmente pas après la naissance; et les différences entre individus normaux semblent peu importantes à cet égard. On peut se demander si les variations de capacité mentale qui existent entre individus ne sont pas associées à d’autres différences.

À ce propos, certaines constatations sur la répartition des synapses permettent d’avancer une hypothèse:

– on sait que chez les animaux supérieurs les neurones corticaux sont plus espacés que chez les animaux inférieurs;

– parmi des animaux d’une même espèce, élevés soit dans un «environnement enrichi», soit dans un «environnement appauvri», les premiers auront un cortex plus épais, mais avec un même nombre de neurones, répartis de façon moins dense. Mis à part les cellules gliales , il n’y a que des synapses pour remplir cet espace. Il serait intéressant de savoir s’il s’agit, chez les animaux à cortex plus épais, d’un nombre accru de synapses, ou s’il s’agit d’une croissance volumétrique d’un même nombre de synapses.

3. Organisation des systèmes du cerveau

Les systèmes spécifiques

Pour comprendre les voies spécifiques de façon globale, il faut retracer leur apparition sur le plan évolutif.

Voies sensitives

Nous avons déjà vu que le premier sens à évoluer est celui de l’olfaction. Le système sensoriel qui se différencie ensuite est probablement celui de l’équilibre (appareil vestibulaire ou labyrinthe). Ce n’est que plus tard que se développe la vision, dont les fibres afférentes au cerveau sont d’abord entièrement croisées. Or, les voies spécifiques qui se développent avant celle de la vision restent non croisées, tandis que celles qui sont postérieures à la vision sont croisées. Enfin, quelques voies qui n’ont évolué qu’après le décroisement partiel des voies visuelles montrent, elles aussi, un certain décroisement.

La voie olfactive est déjà décrite; la voie vestibulaire intéresse pour la plus grande part le bulbe et la moelle rachidienne. Considérons les grandes voies de la vision (fig. 12), de l’ouïe (fig. 13) et de la somesthésie (fig. 14).

Les récepteurs de la vision sont les cônes et les bâtonnets rétiniens. Les autres éléments de la rétine (cellules bipolaires et cellules ganglionnaires) appartiennent au système nerveux central. Cette émigration de neurones du cerveau jusqu’à la rétine illustre le principe de la neurobiotaxie selon lequel des cellules nerveuses ont tendance, au cours de l’ontogenèse, à se déplacer vers la source de leurs influx afférents. Chez l’Homme, la moitié des afférences rétiniennes (celles en provenance de la moitié nasale de la rétine) se croisent à la décussation optique ou chiasma. La plupart des fibres de la voie optique gagnent le corps genouillé latéral, à partir duquel les influx sont projetés sur le cortex autour de la scissure calcarine. Il est à noter que les deux cortex visuels ne sont pas reliés l’un à l’autre par le corps calleux, bien que le développement de ce dernier aille de pair avec le degré de non-croisement des fibres optiques. Un petit nombre de fibres optiques, au lieu de se terminer au niveau du corps genouillé latéral s’acheminent jusqu’aux tubercules quadrijumeaux antérieurs. Ces derniers représentent l’aboutissement primitif de l’ensemble de la voie optique, mais chez les Mammifères ils ne servent que de centre de réflexes visuels et n’ont pas de rapport avec la vision consciente.

La voie auditive (fig. 13) se différencie du système vestibulaire primitif au cours de l’évolution. Elle comporte donc quelques caractéristiques archaïques en même temps qu’une organisation évoluée. Chez l’Homme il y a à peu près 30 000 fibres en provenance de l’organe récepteur (organe de Corti ), donc une fibre pour chaque cellule réceptrice. Lorsque les fibres primaires arrivent au niveau des noyaux cochléaires du bulbe, elles divergent sur un plus grand nombre de neurones secondaires. À partir des noyaux cochléaires, la voie auditive (lemnisque latéral ) s’achemine au corps genouillé médian; elle présente un relais au niveau des tubercules quadrijumeaux postérieurs ou inférieurs. D’autres amas cellulaires situés au sein de la voie auditive sont les noyaux trapézoïdes et l’olive supérieure. Cette dernière envoie des fibres efférentes (faisceau olivo-cochléaire) à l’organe de Corti, exerçant ainsi un contrôle centrifuge sur les récepteurs.

Entre les noyaux cochléaires et le corps genouillé médian, la voie auditive possède les caractéristiques primitives suivantes: le nombre de neurones intercalés est variable; il y a des fibres croisées et des fibres non croisées, sans l’organisation topographique qui existe au niveau de la voie visuelle. Cet arrangement semble avoir lieu au hasard, comme s’il n’y avait pas de latéralisation à l’intérieur du système auditif, ainsi qu’à l’intérieur du système aspécifique.

Par contre, il y a des caractéristiques spécifiques et évoluées au niveau de la voie auditive, surtout dans le fait que la voie conserve, dans toute sa longueur et à travers ses synapses, un caractère tonotopique absolu (localisation nerveuse des hauteurs tonales). Il y a aussi des interneurones focalisateurs à l’intérieur des relais auditifs. À partir du corps genouillé médian, il y a une projection point par point (elle aussi strictement tonotopique) sur le cortex auditif primaire, situé dans le gyrus temporal supérieur (fig. 9 et 13).

La voie somesthésique discriminative est la plus récemment évoluée des grandes voies sensorielles (fig. 14). En accord avec cette évolution récente, elle montre le plus nettement le croisement total (sauf pour la face). Les fibres primaires en provenance de récepteurs cutanés et articulaires du corps remontent la moelle, à l’intérieur des colonnes dorsales, jusqu’aux noyaux de Goll et de Burdach (gracilis et cuneatus ) ou noyaux des colonnes dorsales du bulbe; celles en provenance des récepteurs faciaux gagnent le noyau sensitif principal du nerf trijumeau , situé dans la protubérance annulaire, et homologue des noyaux des colonnes dorsales.

À la suite des modifications synaptiques à la hauteur des noyaux gracilis et cuneatus et du noyau sensitif principal du trijumeau, les messages parcourant les fibres efférentes de ces noyaux empruntent le lemnisque médian pour atteindre le noyau ventral postérieur du thalamus. Les efférences des noyaux des colonnes dorsales subissent un croisement total, tandis que celles du noyau sensitif du trijumeau sont soit croisées, soit ipsilatérales. Le noyau ventral postérieur du thalamus se projette sur le cortex somatosensoriel primaire, situé en arrière de la scissure de Rolando, de façon strictement somatotopique, c’est-à-dire selon une correspondance point par point du corps au cerveau. Le demi-homoncule ainsi représenté au niveau du cortex n’est pas cependant une projection homothétique de la surface du corps: la zone occupée par chaque partie est en fonction directe de la densité de son innervation périphérique.

En plus de cette voie somesthésique, il apparaît chez les Primates d’autres fibres d’une fonction somesthésique analogue qui, rejoignant le lemnisque médian au niveau du bulbe, naissent directement de la corne dorsale de la moelle ou du noyau descendant (spinal) du trijumeau. Ces fibres, dites «néo-spino-thalamiques», peu nombreuses par rapport à celles du lemnisque médian, sont en partie croisées et en partie ipsilatérales. On ne sait encore si on assiste là au début d’un nouveau système très évolué, s’adaptant au décroisement partiel de la voie optique, ou s’il s’agit d’une voie plutôt primitive, donc non latéralisée.

Pour terminer la liste des voies spécifiques afférentes aux noyaux ventraux du thalamus, il faut mentionner le bras conjonctif issu du cervelet. Rappelons que les informations (inconscientes) sur la tension des muscles et des tendons parviennent au cervelet, où elles sont traitées avant d’être renvoyées par les efférences des noyaux cérébelleux, noyaux dentelé et interposé , aux centres cérébraux. Ces efférences atteignent les noyaux ventrolatéral et ventral antérieur du thalamus contralatéral; il s’agit donc ici d’une voie entièrement croisée. Ces noyaux thalamiques se projettent ensuite sur le cortex moteur primaire, en avant de la scissure de Rolando; de façon également somatotopique, cette fois en fonction de la densité d’innervation musculaire.

Voies motrices

Ce cortex moteur primaire, à son tour, donne naissance à la plus grande voie de la motricité, la voie pyramidale (fig. 15). Certaines de ces fibres sont parmi les plus longues du système nerveux central, car elles vont du cortex aux motoneurones les plus bas situés dans la moelle épinière. Les corps cellulaires des neurones de la voie pyramidale sont disposés au niveau du cortex moteur primaire de la façon somatotopique ci-dessus exposée. Les axones sortent du télencéphale en passant par la capsule interne. Au niveau du tronc cérébral, les axones qui proviennent de la région faciale du cortex moteur aboutissent dans les noyaux moteurs des nerfs crâniens [cf. BULBE RACHIDIEN]. La plupart des fibres descendent plus bas, étant destinées aux motoneurones de la moelle rachidienne. Au niveau le plus inférieur du bulbe, 70 p. 100 de ces fibres quittent la pyramide bulbaire pour croiser au côté opposé de la moelle, et descendent en formant la voie pyramidale croisée. L’autre partie continue, sans croiser, dans le faisceau ventral de la moelle en donnant la voie pyramidale directe. Ainsi se reflète sur la voie motrice le décroisement partiel de la voie optique.

Avant d’aborder l’organisation, plus complexe, des voies non spécifiques, nous devons mentionner une autre voie, beaucoup plus ancienne sur le plan évolutif, mais qui montre néanmoins une organisation somatotopique, la voie rubrospinale. Le noyau rouge se situe en dessous du tegmentum du mésencéphale. Ses efférences, destinées soit aux motoneurones, soit aux interneurones avoisinant ces derniers, croisent dans leur totalité dès leur origine pour descendre dans le côté opposé du tronc cérébral et de la moelle. Il y a deux systèmes moteurs somatotopiques qui prennent naissance en dessous du télencéphale: la voie rubrospinale (croisée) et la voie vestibulospinale (non croisée). Chez les Mammifères, toutes les deux sont assujetties à un contrôle cortical, car des efférences en provenance du cortex les atteignent. Cela illustre le principe d’encéphalisation , énoncé par Henry Head, selon lequel des centres inférieurs (anciens) sont toujours placés sous contrôle des centres supérieurs plus récemment évolués. Il faut supposer que, chez les animaux primitifs, des centres tels le noyau rouge et le noyau vestibulaire latéral sont capables d’agir indépendamment tandis que chez les animaux supérieurs, le néencéphale «s’empare» de leur contrôle. Dans des conditions expérimentales artificielles, chez un Mammifère, ces centres, privés de leur contrôle télencéphalique, sont d’abord inactifs, mais deviennent capables, au bout d’un certain temps, de reprendre leur activité autonome.

Les systèmes aspécifiques

Les systèmes aspécifiques manifestent d’emblée une organisation plus complexe. Il est vrai que leurs connexions sont moins bien connues que celles des voies spécifiques, mais cela est dû au fait que ces systèmes ne sont pas organisés en noyaux, ce qui ne permet pas de tracer des voies définies. Il s’agit, comme nous l’avons déjà dit à plusieurs reprises, d’une colonne centrale plus ou moins continue le long du névraxe (fig. 4) à l’intérieur duquel se trouvent à la fois des axones remontants et descendants, souvent naissant d’un même neurone. Par exemple, la «voie» descendante consiste en une chaîne de neurones recueillant tous les influx descendants en provenance des divers centres supérieurs tels le rhinencéphale, l’hypothalamus, les noyaux de la base. Il s’agit donc d’une «voie commune» pour tous les systèmes moteurs aspécifiques. À ceux-ci, il faut ajouter les centres, situés au niveau du tronc cérébral, qui contrôlent les rythmes cardiaque et respiratoire.

Les voies aspécifiques remontantes sont organisées de la même manière. Il faut d’abord souligner que l’afférence primaire, en provenance du récepteur périphérique, se divise dès son entrée dans le système nerveux central en deux branches collatérales, dont une va faire synapse avec le premier neurone central de la voie spécifique qui lui est consacrée, tandis que l’autre fait contact avec le premier neurone central du système aspécifique (cas de la somesthésie). Donc les systèmes spécifique et aspécifique possèdent une afférence périphérique commune mais au-delà de son entrée dans le système nerveux central, leurs voies n’ont plus aucun rapport l’une avec l’autre, sauf au niveau suprême du cortex. Dans le cas des voies des sens spéciaux, la division entre les systèmes spécifique et aspécifique a lieu plus loin, à partir de l’entrée dans le système nerveux central (corps quadrijumeaux supérieurs dans le cas de la voie visuelle, olive supérieure dans celui de la voie auditive), mais elle est également nettement marquée.

Il s’agit donc ici d’une chaîne ou plutôt de chaînes de neurones à afférences convergentes qui remontent le névraxe de façon continue jusqu’au niveau des noyaux intralaminaires du thalamus. Étant donné que les convergences sont additives, il y en a de plus en plus à chaque niveau successif. Mais, à cause des bifurcations et des collatérales des axones, il y a des boucles à chaque niveau entre le système remontant et le système descendant. Ceci permet l’opération d’activités réflexes à chaque niveau, plus ou moins élaborées selon le niveau.

Le système aspécifique remontant est également une voie commune pour presque toutes sortes d’afférences. Les terminaisons supérieures comportent non seulement les noyaux intralaminaires du thalamus, se projetant au système moteur somatique des corps striés, mais également l’hypothalamus, donc les systèmes qui contrôlent le milieu intérieur. Rappelons ici la liaison étroite entre l’hypothalamus et le rhinencéphale, permettant ainsi l’expression somatovégétative des émotions (par exemple tachycardie végétative, raideur musculaire somatique).

Les réflexes aspécifiques sont surtout des réflexes homéostatiques, c’est-à-dire qu’ils tendent à la conservation du statu quo dans les rapports de l’organisme avec son environnement. Il est vrai, cependant, que les réflexes intéressant les systèmes spécifiques peuvent être, eux aussi, interprétés comme homéostatiques, mais avec la grande différence que, dans ce dernier cas, le niveau d’opération du réflexe se trouve précontrôlé selon les conditions présentes dans l’organisme, grâce à l’action des interneurones et des influx descendants.

4. Alimentation sanguine

L’alimentation sanguine de l’encéphale est assurée par les deux artères carotides internes et les deux artères vertébrales. Ces quatre artères contribuent à la formation du cercle de Willis , cercle anastomotique situé à la base du cerveau, d’où partent les principales artères qui irriguent le tissu nerveux. Bien que le cerveau ne constitue que 2 p. 100 du poids total du corps, il consomme 20 p. 100 de l’oxygène utilisé par l’ensemble du corps, ce qui témoigne de l’importance de son activité. Cela dit, il convient d’insister sur la répartition des capillaires à l’intérieur du cerveau. En règle générale, les capillaires sont moins denses dans la matière blanche (fibres nerveuses) que dans la matière grise (cellules nerveuses). D’autre part, au sein de la matière grise, les parties les plus récemment évoluées, comme le néocortex, sont plus richement pourvues de capillaires que les parties anciennes telles que globus pallidus ou hippocampe. Il y a cependant une exception capitale à cette règle: l’hypothalamus qui, bien que très ancien, possède une densité capillaire plus riche que nulle autre région du cerveau; cette richesse de l’hypothalamus est liée à sa fonction neurosécrétrice et à la sensibilité de ses cellules à la composition chimique du sang.

Le phénomène de la barrière hémato-encéphalique se rattache à la question de l’alimentation sanguine du système nerveux. Tandis que dans les autres tissus du corps il existe un espace extracellulaire, permettant la circulaiton de plasma et des produits du métabolisme, à l’intérieur du tissu nerveux il n’y en a pas. L’espace entre les neurones d’une part et les capillaires d’autre part est occupé par les cellules gliales et leurs prolongements. Un groupe d’entre elles, l’astroglie , sert comme échangeur actif entre les neurones et le sang, au lieu de l’échangeur passif qu’est l’espace extracellulaire des autres tissus. C’est ainsi que s’explique le phénomène de «barrière» entre le sang et les cellules nerveuses. Ces dernières sont d’ailleurs trop sensibles pour supporter sans dommages les fluctuations de composition chimique du sang que subissent les cellules des autres tissus.

En l’absence d’un espace extracellulaire, il manque évidemment un liquide intercellulaire au niveau du tissu nerveux. Cette fonction est remplie par le liquide céphalo-rachidien , sécrété par les plexus choroïdes des ventricules cérébraux. Il circule dans ces ventricules et dans l’espace extra-nerveux constitué par les méninges: entre la fine membrane qui couvre la surface du névraxe (la pie-mère ) et celle (l’arachnoïde ) qui double la membrane conjonctive épaisse (dure-mère ) tapissant la cavité osseuse où est placé le névraxe. Cet espace – l’espace sous-arachnoïdien – sert en quelque sorte de coussin liquide amortisseur, réalisant en outre la distribution égale des pressions sur l’ensemble des centres nerveux.

encéphale [ ɑ̃sefal ] n. m.
• 1755; adj. « qui est dans la tête » 1700; gr. egkephalos
Anat. Ensemble des centres nerveux contenus dans la cavité crânienne, comprenant le cerveau, le cervelet et le tronc cérébral. cerveau.

encéphale nom masculin (grec egkephalos) Partie du système nerveux central et de ses enveloppes contenue dans la boîte crânienne des vertébrés. ● encéphale (expressions) nom masculin (grec egkephalos) Encéphale dédoublé, intervention chirurgicale consistant à sectionner les fibres unissant les deux hémisphères cérébraux et en particulier le corps calleux. (Elle a permis de vérifier cliniquement la spécificité fonctionnelle de chaque hémisphère cérébral.) ● encéphale (synonymes) nom masculin (grec egkephalos) Partie du système nerveux central et de ses enveloppes contenue...
Synonymes :
- cerveau
- cervelle

encéphale
n. m. ANAT Masse nerveuse contenue dans la boîte crânienne, comprenant le cerveau, le cervelet et le tronc cérébral.

⇒ENCÉPHALE, subst. masc.
A.— ANAT. Ensemble des centres nerveux (cerveau, cervelet, tronc cérébral) contenus dans la boîte crânienne des vertébrés (cf. cerveau ex. 2 et bulbe ex. 3) :
1. Le cerveau antérieur proprement dit, encore appelé cerveau hémisphérique, constitue la portion la plus volumineuse de l'encéphale.
QUILLET Méd. 1965, p. 321.
SYNT. Étage, partie, portion, région de l'encéphale; substance nerveuse, vaisseaux de l'encéphale; congestion, lésion de l'encéphale.
P. méton., rare. Tête :
2. ... cette huile, (...) empêche toute action de l'air extérieur sur les têtes, prévient ainsi les rhumes, le coryza, et toutes les affections douloureuses de l'encéphale...
BALZAC, César Birotteau, 1837, p. 181.
B.— Littér. [Considéré comme l'organe de la vie psychique] Synon. de cerveau (cf. ce mot I B 1) :
3. ... depuis quelque temps, il se taraudait l'encéphale pour arriver à construire une sainte Philomène menacée par plusieurs lions, qu'il comptait offrir à un bonhomme d'archiprêtre toulousain qui lui avait fait avoir des commandes.
BLOY, La Femme pauvre, 1897, p. 50.
Rem. 1. Encéphale entre comme 2e élément de composition dans la formation de termes savants : diencéphale, mésencéphale, myélencéphale, télencéphale. 2. On rencontre ds la docum. a) Encéphaloïde, adj. pathol. Qui a l'aspect, la consistance de l'encéphale. La forme encéphaloïde, rare et caractéristique des cancers à évolution rapide (Roussy ds Nouv. Traité Méd., fasc. 5, 2, 1924, p. 203). En partic. Tumeur encéphaloïde (cf. NÉLATON, Pathol. chir., t. 1, 1844, p. 39). P. ell. du déterminé. Un encéphaloïde. Vous opérerez demain la nouvelle arrivée (...) Vous avez vu : un encéphaloïde lardacé au sein droit (GONCOURT, Sœur Philom., 1861, p. 216). Reprenant avec aplomb l'exercice de la médecine, ils soignèrent, (...) la mère Varin, dont l'encéphaloïde sous la clavicule exigeait pour se nourrir, des emplâtres de viande (FLAUB., Bouvard, t. 2, 1880, p. 71). b) Encéphalithe, subst. masc., rare. Pierre à forme d'encéphale. De fort belles gravures, représentant des lithocardites, des pierres de cœur, des encéphalithes, préludant à la cervelle, des pierres qui imitent la mâchoire, le pied, le rein (BACHELARD, Poét. espace, 1957, p. 112).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1762-1932. Étymol. et Hist. 1. « Ver parasite » a) 1700 subst. (N. ANDRY DE BOISREGARD, De la génération des vers dans le corps de l'homme, Paris, 41 ds R. Ling. rom., t. 35, p. 216 : les Encephales naissent dans la tête); b) 1700 adj. vers encephales (ID., ibid., p. 425); 2. 1732 adj. « qui est dans la tête » (Trév.); 1806 subst. « cerveau, cervelet » (J. CAPURON, Nouv. dict. de méd., de chir., Paris). Empr. au gr. proprement « qui est dans la tête » d'où « cervelle, cerveau ». Fréq. abs. littér. :42.
DÉR. Encéphalique, adj. a) Qui concerne l'encéphale. Irritation, lésion encéphalique; mouvement encéphalique. Parvenues dans la cavité encéphalique, elles [ces artères] se partagent chacune en trois rameaux (CUVIER, Anat. comp., t. 2, 1805, p. 186). Tu nous écoutes, n'est-ce pas? Mais ne remue pas tes membres; tu es encore aujourd'hui sous notre magnétique pouvoir, et l'atonie encéphalique persiste (LAUTRÉAM., Chants Maldoror, 1869, p. 314). b) Qui appartient à l'encéphale. Région encéphalique; isthme, ventricule encéphalique. Dans les conditions normales, les centres encéphaliques inférieurs (par exemple, le bulbe rachidien) ajoutent leur action à celle de la moelle épinière (CAMEFORT, GAMA, Sc. cnat., 1960, p. 262). c) Qui est de la nature de l'encéphale. Masse encéphalique. Les cavités à sang rouge, cessant de recevoir ce sang, ne peuvent le pousser à la tête : plus de mouvement, par conséquent; et, par la même, bientôt plus de vie dans la masse encéphalique (BICHAT, Rech. physiol. vie et mort, 1822, p. 269). []. Ds Ac. 1835-1932. 1re attest. 1771 (J.-J. SCHIMDLIN, Dict. univ. de la lang. fr., Catholicon, s.v. encéphale ds Z. fr. Spr. Lit., t. 23, p. 26); de encéphale, suff. -ique.
BBG. — ARVEILLER (R.). R. Ling. rom. 1971, t. 35, p. 216.

encéphale [ɑ̃sefal] n. m. et adj.
ÉTYM. 1700, au sens I; grec egkephalos « cerveau », littéralt « ce qui est dans (en-) la tête (kephalê) ». → -céphale, céphal(o)-.
———
I Adj. Vx. Qui prend naissance dans la tête. || Vers encéphales.N. || Les encéphales.
———
II N. m. (1755). Mod. Anat. Ensemble des centres nerveux contenus dans la cavité crânienne, comprenant le cerveau, le cervelet et le tronc cérébral (bulbe rachidien, protubérance annulaire et mésencéphale). Cerveau. || Isthme de l'encéphale, qui réunit le cerveau et le cervelet au bulbe rachidien. || Le liquide céphalo-rachidien remplit les cavités ou ventricules de l'encéphale.
1 Le cerveau, le bulbe et le cervelet logés dans la boîte crânienne, font partie de ce qu'on appelle l'encéphale, qui constitue avec la moelle le système nerveux central (…) De l'encéphale se détachent les douze paires de nerfs crâniens destinés à la face et aux organes des sens (…)
P. Vallery-Radot, Notre corps, p. 109.
Fam. et plais. Cerveau (dans quelques expressions).
2 Mais l'autre jour qu'elle me galopait sur l'encéphale avec ses vers libres, je lui ai demandé de m'en réciter.
M. Aymé, Maison basse, p. 121.
DÉR. (Du sens II) Encéphalique, encéphalisation, encéphalite, encéphalose.
COMP. Anencéphale, diencéphale, mésencéphale, métencéphale, myélencéphale, prosencéphale, rhombencéphale, télencéphale. Électro-encéphalogramme, électro-encéphalographie. V. Néencéphale.

Encyclopédie Universelle. 2012.