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lier

lier [ lje ] v. tr. <conjug. : 7>
leier, loierXe; lat. ligare
IMettre ensemble.
1Entourer, serrer avec un lien (plusieurs choses ou les parties d'une même chose pour qu'elles tiennent ensemble). attacher. Lier de la paille en bottes ( botteler) , en gerbes, en rouleaux. Lier avec une corde, une ficelle. ficeler. Un chirurgien « qui lie les artères et suture la plaie » (Suarès). ligaturer.
2Assembler, joindre. Lier les pièces d'une construction. Lier ses lettres, les joindre l'une à l'autre par de légers traits, en écrivant. Lier des sons. Lier les mots, les prononcer en faisant une liaison. — Mus. Lier les notes (opposé à piquer) ( louré) . Lier un passage, le jouer legato.
3Joindre à l'aide d'une substance ou d'un ingrédient qui opère la réunion ou le mélange ( liaison). Lier des briques avec du ciment ( cimenter) , des pierres avec du mortier ( conglomérer) . Cuis. Lier une sauce, l'épaissir.
4(Abstrait) Unir par un rapport logique, fonctionnel, structural. Lier des mots, des propositions par une conjonction. associer, coordonner, relier; ligature. Lier les plans d'un film. agencer, enchaîner. Rapport qui lie la cause à l'effet.
P. p. adj. Dans cette affaire, tout est lié, tout se tient. ⇒ interdépendant. Affaires étroitement liées. connexe. « ces souvenirs, indissolublement liés à l'éveil de sa première jeunesse » (Renan). Ling. Forme liée, constamment attachée à un autre élément. Les affixes, les désinences sont des formes liées (opposé à libre) . Morphème lié.
Pronom. « les idées se liant les unes aux autres » (France). s'enchaîner, se rattacher, se relier.
5Unir par des liens d'affection, de convenance, de solidarité, d'intérêt. Leur communauté de goûts les liera vite. rapprocher. « Une silencieuse fraternité liait [...] Rivière et ses pilotes » (Saint-Exupéry).
Pronom. SE LIER (avec qqn). (Réfl.) Avoir des relations d'amitié. s'attacher. Je me suis lié d'amitié avec lui. Absolt Il se lie facilement. liant. (Récipr.) Ils se sont liés d'amitié.
(Pass.) ÊTRE LIÉ à, avec (qqn). Ils sont très liés (ensemble). familier, intime.
6Faire naître (un lien). Lier amitié (avec qqn) : contracter un lien d'amitié. Lier connaissance avec qqn. Lier conversation. nouer.
Loc. Avoir partie liée (avec qqn) : être associé d'une manière durable; avoir des intérêts communs.
IIFixer, retenir (qqn).
1Attacher, enchaîner. On l'avait lié sur une chaise. ligoter. Loc. Être fou à lier, complètement fou. — Pieds et poings liés.
(XVIe) Lier les mains à (ou de) qqn, lui ôter toute possibilité d'action. Loc. Avoir les mains liées.
2Imposer une obligation (juridique, morale) à. astreindre, obliger. Au passif Être lié par un serment, une promesse, un contrat. engager, garrotter. « Je ne suis liée que pour deux ans; [...] les clauses de mon contrat me protègent » (Romains).
Théol. Refuser d'absoudre. « le pouvoir de lier et de délier les âmes » (Chateaubriand).
3 ♦ LIER À. attacher. « On la lia par les cheveux [...] à la queue d'un cheval indompté » (Michelet).
Fig. Retenir par un lien de dépendance. Contrat liant le débiteur au créancier. Par ext. Lier sa vie à celle d'une femme. unir. Lier son destin à celui d'une entreprise, l'en faire dépendre.
⊗ CONTR. Délier, couper, délivrer, 1. détacher, rompre , séparer. ⊗ HOM. Lie : lis; lierai : lirai (1. lire).

lier verbe transitif (ancien français leier, du latin ligare) Attacher, maintenir ensemble divers éléments au moyen d'un lien : Elle lia ses cheveux avec un ruban. Fermer quelque chose au moyen d'un lien : Lier un paquet avec de la ficelle. Attacher quelqu'un ou ses membres de telle sorte qu'il perde sa liberté de mouvement : Lier les mains d'un prisonnier. Maintenir des choses ensemble dans une substance : Lier des pierres avec du ciment. Unir quelque chose à quelque chose d'autre par un lien logique, relier : Lier une phrase à la précédente par un mot de liaison. Exécuter les phases successives d'un mouvement de façon qu'elles s'enchaînent harmonieusement. Placer quelqu'un, quelque chose dans une étroite dépendance par rapport à une autre personne, une autre chose, etc. : Contrat qui lie l'employé à son employeur. Unir, attacher par des rapports d'affection, d'intérêt, etc. : Tous ces souvenirs me lient à cette maison. Calligraphie Unir des lettres par un trait, une liaison. Cuisine Épaissir une préparation liquide en y ajoutant, au dernier moment, farine, fécule, jaune d'œuf, sang de gibier ou de volaille, etc. Musique Rendre des notes par une seule émission de voix, par un seul coup d'archet. Théologie Refuser d'absoudre un pécheur ; soumettre à une pénitence, à une censure. ● lier (citations) verbe transitif (ancien français leier, du latin ligare) Georges Adrien, dit Georges Darien Paris 1862-Paris 1921 […] Je crois qu'il ne faut se laisser lier par rien, surtout par les serments qu'on se fait à soi-même. Ils coûtent toujours trop cher. Le Voleur Stocklier (expressions) verbe transitif (ancien français leier, du latin ligare) Lier sa vie, son sort à quelqu'un, quelque chose, s'enchaîner moralement à eux : Il avait lié son sort à celui de cette femme. Fou à lier, complètement fou. Lier amitié, connaissance, conversation avec quelqu'un, commencer une relation d'amitié, faire connaissance, entamer une conversation. Lier la langue à quelqu'un, l'empêcher de parler, le contraindre au silence. Lier les mains à quelqu'un, ne lui laisser aucune possibilité d'action. Lier des mots, les prononcer en faisant une liaison. ● lier (homonymes) verbe transitif (ancien français leier, du latin ligare)lier (synonymes) verbe transitif (ancien français leier, du latin ligare) Attacher, maintenir ensemble divers éléments au moyen d'un lien
Synonymes :
Contraires :
- dénouer
Fermer quelque chose au moyen d'un lien
Synonymes :
Contraires :
- défaire
- délier
Attacher quelqu'un ou ses membres de telle sorte qu'il perde...
Synonymes :
- enchaîner
Contraires :
- détacher
Maintenir des choses ensemble dans une substance
Synonymes :
Contraires :
- désunir
- séparer
Unir quelque chose à quelque chose d'autre par un lien logique, relier
Synonymes :
- réunir
Contraires :
Placer quelqu'un, quelque chose dans une étroite dépendance par rapport à...
Synonymes :
- enchaîner
Contraires :
- délivrer
- libérer
Unir, attacher par des rapports d'affection, d'intérêt, etc.
Contraires :
- détourner
- éloigner

lier
v. tr.
rI./r Lier qqch.
d1./d Attacher, serrer avec un lien. Lier un fagot. Syn. (Acadie, Réunion, Saint-Pierre-et-M.) amarrer (sens 2).
d2./d Unir, établir une liaison entre (divers éléments solides); donner une certaine consistance, de la cohésion à (une substance). Le ciment lie les pierres. Lier une sauce.
|| Par anal. Lier deux mots: prononcer deux mots consécutifs en faisant une liaison.
MUS Pratiquer la liaison de notes consécutives.
rII./r Lier qqn (ou un animal).
d1./d Attacher, immobiliser avec un lien. Lier qqn avec une corde.
Pp. adj. Un poulet aux pattes liées, offert à la vente.
|| Fig. Avoir les mains liées: être réduit à l'impuissance.
d2./d Unir. Contrat qui lie l'employé à l'employeur.
d3./d Engager.
(Au pass.) être lié par une promesse.
rIII/r établir (des relations entre personnes). Lier amitié avec qqn. Lier connaissance. Lier conversation avec qqn, entrer en conversation avec lui.
|| v. Pron. Se lier d'amitié.

⇒LIER, verbe trans.
I. — [Dans le domaine matériel]
A. — Lier qqc., lier qqn
1. Entourer quelque chose ou quelqu'un en serrant avec un lien (pour réunir deux ou plusieurs éléments de même nature, assurer la cohésion des parties d'un tout, empêcher une action ou un mouvement). Synon. ficeler, ligaturer, ligoter. [Lors de l'accouchement] avec l'un de ces cordonnets on lie le cordon avant de retirer l'enfant de dessus le petit lit (BAUDELOCQUE, Art accouch., 1812, p. 218). Les gerbes sont liées, les unes, avec une corde, les autres, avec un lien de paille (RENARD, Journal, 1902, p. 770) :
1. ... de l'autre main il dénoua la corde qui lui servait de ceinture, et, en quelques minutes, Benoît fut ficelé, lié, enchevêtré, de manière à ne pouvoir faire le plus léger mouvement...
SUE, Atar-Gull, 1831, p. 10.
SYNT. Lier un paquet, un fagot; lier le blé, l'avoine, la javelle; lier en bottes, en gerbes; lier une artère, un nerf, un vaisseau; lier qqn, lui lier la langue, les membres; lier un prisonnier, un fou; lier fortement, étroitement.
P. hyperb. Être fou à lier (v. fou I A) et p. ell. être à lier. Avoir un comportement, des idées, des propos extravagants. Ma parole, elle est à lier, s'écria Cadignan, stupéfait. Tu n'as pas un grain de bon sens, Mouchette, avec tes phrases de roman (BERNANOS, Soleil Satan, 1926, p. 81).
Absol., AGRIC. Lier en gerbes, en bottes. Synon. gerber, botteler. Si le beau temps dure, on liera demain (LITTRÉ). Celui qui a été le dernier à faucher ou à lier est le plus souvent contraint de monter auprès du mai et, de crainte de le voir renversé par les cahots, reste debout auprès de lui (MENON-LECOTTÉ, Vill. Fr., t. 2, 1954, p. 12).
P. méton. Lier dans qqc. Envelopper, enfermer dans quelque chose que l'on noue. Lier qqn dans un sac. La dame, sans me demander si l'on m'a payé ma course, tire un napoléon du coin de son mouchoir, où il était lié (JOUY, Hermite, t. 3, 1813, p. 33).
Au fig.
a) Locutions
Lier les mains, (ou plus rarement) les bras à qqn. Le rendre impuissant à agir, le réduire à la passivité. Avoir les mains liées :
2. Parcourez l'univers connu, vous trouverez l'homme fort et tyran, la femme faible et esclave; que si quelquefois elle a l'adresse de lier les mains à son maître et de commander à son tour, ce cas est extrêmement rare.
LACLOS, Éduc. femmes, 1803, p. 457.
Lier la langue. Rendre incapable de parler. Quelque chose comme un souffle venu de l'au-delà, qui oppressait les poitrines et qui liait les langues (MOSELLY, Terres lorr., 1907, p. 291).
Pieds et poings liés. Dans une situation de dépendance complète. L'idée géante de racheter toutes les actions, pour tenir les vendeurs à découvert, pieds et poings liés, à sa merci (ZOLA, Argent, 1891, p. 339). Elle [la solitude] sait bien ce qui lui livre, pieds et poings liés, les hommes nés solitaires comme d'autres sont nés bossus ou aveugles (MAURIAC, Journal 3, 1940, p. 273).
Rem. On relève de légères var. dans des expr. du même type : Si paresse vous lie les doigts, faites-moi écrire par l'ami commun (COURIER, Lettres Fr. et Ital., 1825, p. 741). Il est triste de n'être pas libre, de ne pouvoir aller où l'on veut et que la fortune toujours nous lie les pieds (FLAUB., Corresp., 1847, p. 56).
b) Lier qqn. Priver quelqu'un de la possibilité ou de la liberté d'agir ou de réagir; paralyser, asservir. Par le traité qui termina la seconde guerre punique, Rome avait lié Carthage (MICHELET, Hist. romaine, t. 2, 1831, p. 100). Terrifiées, liées par la peur, une de ces peurs de campagne qui ferment toutes les bouches (POURRAT, Gaspard, 1931, p. 164).
Vx. Paralyser en jetant un charme. Elle [une musique aérienne] attache, elle entraîne, elle subjugue l'attention, qui ne peut se délivrer de son empire. Elle rappelle ces accords redoutables et doux des divinités marines, qui lioient les voyageurs et qui attiroient leur navire dans des écueils inévitables (NODIER, J. Sbogar, 1818, p. 122).
2. P. anal.
a) Serrer quelqu'un (dans ses bras), enlacer, étreindre. Les deux amoureuses firent venir dans leur chambre l'amant enorgueilli de sa double bonne fortune; et tandis que l'une le liait passionnément de ses bras, l'autre passionnément le poignardait dans le dos (ROLLAND, J.-Chr., Buisson ard., 1911, p. 1360).
b) CHASSE. [Le suj. désigne un faucon ou p. anal. un autre rapace] Lier la proie. La saisir avec ses serres. Un faucon lie la perdrix, le gibier (Ac. 1798). Il [le hibou] rase le sol : les prés, les guérets, les landes fauchées, les ruisseaux dont les éclats intermittents le guident, s'il veut lier une taupe, un rat, un levraut (PESQUIDOUX, Chez nous, 1923, p. 208).
c) ESCR. Lier l'épée (le fer, la lame). Faire tourner son épée autour de celle de l'adversaire, en exerçant sur elle une pression continue. Au moment où, Bastien rendait à demi l'épée, le baronnet la lui lia rapidement tierce sur tierce, l'enleva d'un énergique coup de poignet (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 1, 1859, p. 370).
B. — Lier qqc./qqn à qqc.
1. Attacher, fixer au moyen d'un lien. Lier un homme à un arbre, à un poteau (Ac. 1798-1935). Une perche pointue, liée au bras de l'homme, oscillait avec ses mouvements (ADAM, Enf. Aust., 1902, p. 133). Le thème du Prométhée (...) : c'est le héros humain réduit à l'immobilité, lié au roc (THIBAUDET, Réflex. litt., 1936, p. 87).
Emploi pronom.
réfl. Ceux qui ne veulent pas mourir sans être montés au Matterhorn, et qui vont se lier à la corde en se recommandant à leur guide ou à Dieu (PEYRÉ, Matterhorn, 1939, p. 204).
réciproque. Aussi, les colons s'étaient-ils liés les uns aux autres au moyen d'une corde (VERNE, Île myst., 1874, p. 164).
En partic. [L'obj. désigne le lien ou ce qui en tient lieu] En attacher les deux bouts, les nouer. Lier les cordons de ses souliers, lier des rubans (Ac. 1798-1935). On ne refuse rien à qui lie et délie les cordons du sac (BALZAC, Gobseck, 1830, p. 398).
Emploi pronom. à valeur passive. Le chapeau, fortement enfoncé et sur lequel une courte voilette noire se liait (DANIEL-ROPS, Mort, 1934, p. 533).
P. méton. Des infirmiers, des médecins, des aides, le grand tablier lié sous les bras, allaient et venaient (ERCKM.-CHATR., Conscrit 1813, 1864, p. 139).
2. P. anal.
a) Réunir, joindre (deux ou plusieurs choses) par un élément d'assemblage ou de liaison. Dans les chiens le cœcum (...) repose sur l'iléon, auquel il adhère par du tissu cellulaire. Ce tissu lie aussi entre eux les tours du cœcum (CUVIER, Anat. comp., t. 3, 1805, p. 485).
Emploi pronom. à valeur passive. En revenant nous montâmes, dans la tour du nord, sans doute celle que commença Richard III. À mi-ceinture, elle se lie aux deux tours de la porte par un parapet, qui est sans garde-fou du côté de la cour (MICHELET, Journal, 1834, p. 133).
BÂT. Assembler (des matériaux) à l'aide d'un liant (v. ce mot II A 1) ou les disposer en liaison (v. ce mot A 1 a). Avec la truelle le maçon étale le ciment, lie les pierres des édifices (ADAM, Enf. Aust., 1902, p. 27).
MAR. ,,Mettre en place et fixer les liaisons`` (SOÉ-DUP. 1906; cf. liaison A 1 b). Lier les couples (Lar. 19e-Lar. encyclop.).
ÉCRITURE. Lier des lettres. Réunir, relier des lettres entre elles. Liez bien vos lettres (Ac. 1798-1935). Des lettres mal liées (LITTRÉ, s.v. lié).
PHONÉT. Lier des mots. Prononcer les mots d'un énoncé en faisant les liaisons (v. ce mot A 4). Deux, trois, dans les dates, peuvent être liés avec le nom du mois : le deux-z-avril, le trois-z-octobre, mais la prononciation « soignée » (ou recherchée) ne les lie pas : le deu(x) avril, le troi(s) octobre (GREV. 1964, § 100).
MUS. Lier les notes, les sons. Les jouer ou les chanter en les enchaînant, en passant des uns aux autres sans interruption. Synon. couler; anton. piquer, détacher. L'art de lier les sons est un des principaux mérites d'un bon chanteur ou d'un bon instrumentiste (BRENET, Dict. prat. et hist. mus., 1926, p. 223). Les contrepoints exécutés au piano doivent l'être avec certaine douceur, en liant les notes, sans qu'on perçoive aucune attaque martelée (KOECHLIN, Règles contrepoint, 1926, p. 17).
b) En partic. Assurer la cohésion (d'un mélange, d'une préparation). Lier le mortier. Le sable [dont on couvre les fonds des cazettes d'encastage] doit (...) être (...) lié par un peu d'eau argileuse (Al. BRONGNIART, Arts céram., t. 1, 1844, p. 203).
ART CULIN. Lier une préparation. La rendre consistante et homogène en faisant une liaison (v. ce mot A 2). Versez le potage sur le pain, liez avec six jaunes d'œufs et deux décilitres de crème double (Gdes heures cuis. fr., J. Gouffé, 1877, p. 183). Veux-tu mon idée, gosse de gosse? Eh bien, ton fricot serait meilleur si t'ajoutais un peu de riz... ça te lierait ta sauce (DORGELÈS, Croix de bois, 1919, p. 70).
Emploi pronom. Il faut remuer cette sauce jusqu'à ce qu'elle se lie (Ac. 1935).
BEAUX-ARTS. Lier des couleurs. Les mettre en accord, en harmonie. Des reflets bleus adoucissent et fondent ces couleurs ennemies; le bleu du ciel lie toutes les nuances (ALAIN, Propos, 1910, p. 74).
II. — Au fig.
A. — Lier qqc. à qqc., lier deux ou plusieurs choses entre elles. Associer étroitement, mettre ensemble, réunir par un rapport logique ou nécessaire, par une relation de ressemblance, de continuité, de dépendance. Synon. attacher, rattacher, coordonner, conjuguer, faire dépendre.
1. [Le suj. désigne une pers. ou une faculté humaine telle que l'esprit, l'intelligence] Lier son sort, son nom à qqc.; lier ses idées, ses pensées, ses phrases. Les scélérats et les lâches qui ont lié leur destinée au mensonge, à l'iniquité (CLEMENCEAU, Vers réparation, 1899, p. 28). L'artillerie et l'infanterie ne cherchaient point à lier leurs efforts (...) les différentes armes ignoraient profondément les besoins et les possibilités les unes des autres (JOFFRE, Mém., t. 1, 1910-14, p. 33) :
3. Le rapport est cette vue de notre esprit, cet acte de notre faculté de penser par lequel nous rapprochons une idée d'une autre, par lequel nous les lions, les comparons ensemble d'une manière quelconque.
DESTUTT DE TR., Idéol. 1, 1801, p. 51.
2. [Le suj. désigne le rapport existant ou établi par l'esprit] La connaissance des faits, sans la connaissance des rapports qui les lient, n'est que le savoir non digéré d'un commis de bureau (SAY, Écon. pol., 1832, p. 8). On dira (...) que la phrase est une suite de mots liés entre eux par un rapport logique. (...) la phrase constate les relations multiples, directes ou inverses, des idées, des êtres, des actes (GOURMONT, Esthét. lang. fr., 1899, p. 279) :
4. L'abolir [un objet] est agir sur lui dans le temps et peut-être aussi dans l'espace; c'est accepter, par conséquent, les conditions de l'existence spatiale et temporelle, accepter la solidarité qui lie un objet à tous les autres et l'empêche de disparaître sans être remplacé aussitôt.
BERGSON, Évol. créatr., 1907, p. 284.
3. Emploi pronom. Les arts mécaniques commencèrent à se lier aux sciences (CONDORCET, Esq. tabl. hist., 1794, p. 68). Dans les premiers [poèmes] les idées se lient comme les faits, les transitions sont bien ménagées, l'intérêt suit la marche progressive (BAOUR-LORMIAN, Ossian, 1827, p. XI) :
5. ... voici que l'objet virtuel naît de l'objet réel, qu'il devient réel à son tour, voici qu'ils font image, du réel au réel, comme un mot avec tous les autres. On ne se trompe plus d'objet, puisque tout s'accorde, se lie, se fait valoir, se remplace.
ÉLUARD, Donner, 1939, p. 76.
Au part. passé. Souvenir lié à un lieu, à une époque; choses intimement, indissolublement liées entre elles; tout est lié. Deux faits psychologiques simultanés sont liés si étroitement que l'analyse ne peut les séparer sans les mutiler. En est-il de même pour deux faits physiques? (H. POINCARÉ, Valeur sc., 1905, p. 48).
B. — [Dans le domaine des relations hum.]
1. Lier qqn (à qqn, avec qqn)
a) Mettre dans un état de dépendance, entraver la liberté en imposant des obligations, engager. Lier qqn par un pacte; contrat liant réciproquement deux personnes; être lié par un vœu, par une promesse, par le devoir, par un serment. À Rome enfin, une régression nouvelle et encore plus accusée se manifeste. Les seules obligations de famille que consacre la loi pénale sont celles qui lient le client au patron et réciproquement (DURKHEIM, Divis. trav., 1893, p. 130). C'était sans doute le contentement de lui être agréable (...). C'était aussi celui de le lier par un marché, un donnant-donnant, un moyen de pression (MONTHERL., Songe, 1922, p. 71) :
6. Si un contrat, naturel ou civil, pouvait encore lier le roi et son peuple, il y aurait obligation mutuelle; la volonté du peuple ne pourrait s'ériger en juge absolu pour prononcer le jugement absolu.
CAMUS, Homme rév., 1951, p. 150.
Emploi abs. C'est à vingt ans qu'on est sage : on sait alors que rien n'engage ni ne lie, et qu'aucune maxime n'est plus basse que la fameuse phrase sur les pensées de jeunesse réalisées dans l'âge mûr (NIZAN, Conspir., 1938, p. 24).
Emploi pronom. réfl. La dévotion des pêcheurs et habitants de la côte, qui dans les périls se liaient par quelque vœu (SAINTE-BEUVE, Volupté, t. 1, 1834, p. 78).
Vieilli, au part. passé. (Être) lié à + inf. Obligé, tenu de. Ne vous croyez pas lié à venir pour cela (STAËL, Lettres L. de Narbonne, 1794, p. 271).
RELIG. Lier les pécheurs et p. méton., les péchés. ,,Refuser d'absoudre, soumettre à une loi, une pénitence, une censure`` (MARCEL 1938). Il demanda des conseils à celui qui conféra aux apôtres le pouvoir de lier et de délier les âmes (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 87).
Emploi abs. Le pouvoir, le droit de lier et de délier. (...) le Mot sacramentel Suffit, lie et délie; et l'unique blasphème Est de nier qu'un mot lave un péché mortel (LECONTE DE LISLE, Poèmes trag., 1886, p. 121).
b) Unir (deux ou plusieurs personnes) par des relations d'ordre affectif ou social. Lier qqn avec qqn; être lié d'amitié avec qqn; être lié à qqn (cf. aussi lié I A 2 a). Qu'elles sont belles et utiles ces institutions sociales! Comme elles lient et unissent les hommes! Comme elles servent à entretenir l'amitié, à encourager le commerce, à propager les connoissances! (CRÈVECŒUR, Voyage, t. 1, 1801, p. 190). Lisbeth, que le baron Hulot désirait lier avec Mme Marneffe pour avoir un œil dans ce ménage (BALZAC, Cous. Bette, 1846, p. 92) :
7. Il s'avisait peu à peu que cet homme était sûrement un ami, qu'une étroite amitié, une amitié céleste, d'une céleste lucidité, les liait ensemble, les avait sans doute toujours liés.
BERNANOS, Soleil Satan, 1926, p. 187.
Emploi pronom. Contracter des rapports d'amitié, de société.
réfl. Se lier d'amitié, se lier avec qqn; se lier facilement, se lier peu. Locke s'y lia [dans la société de Londres] avec les personnages les plus importans de l'époque (COUSIN, Hist. philos. XVIIIe s., t. 1, 1829, p. 71). C'est l'âme même d'Éveline dont mon âme s'était éprise, à laquelle elle s'était liée par les liens les plus indissolubles (GIDE, Robert, 1930, p. 1336).
réciproque. Ils ont vite découvert d'autres jeunes gens que le même goût particulier rapproche d'eux, comme dans une petite ville se lient le professeur de seconde et le notaire qui aiment tous les deux la musique de chambre, les ivoires du moyen âge (PROUST, Sodome, 1922, p. 618).
2. Lier qqc. avec qqn
a) Vieilli. [Le compl. dir. exprimant un type de relation est déterminé] Établir, organiser, s'engager dans. Lier des relations, une partie. J'offris à Sara de lier une correspondance, qui la formerait au style épistolaire (RESTIF DE LA BRET., M. Nicolas, 1796, p. 52). Mais voilà qu'aujourd'hui je reçois du gouverneur l'avertissement de ne chercher à lier aucun rapport secret dans l'île (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 1056).
b) Loc. Lier amitié, connaissance, conversation avec qqn. Contracter une amitié, entrer en relation, engager la conversation avec quelqu'un. Il l'a maintes fois entretenu de vous (...) lui témoignant un vif désir de lier avec vous connaissance et amitié (M. DE GUÉRIN, Corresp., 1834, p. 154). Mon père voulut lier conversation et plaisanter avec le jeune tringlot (GUÉHENNO, Journal homme 40 ans, 1934, p. 42).
Lier partie avec qqn. S'entendre, s'accorder avec lui en vue d'une certaine fin. M. de Saint-Gilles passait en Hollande pour lier directement partie avec le cardinal de Retz (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 3, 1848, p. 130). Si la jeune finance veut remplir sa mission (...) elle doit entretenir commerce et même lier partie avec les forces spirituelles du pays et du monde entier (DUHAMEL, Nuit St-Jean, 1935, p. 203).
Avoir partie liée (avec qqn). Être solidaire, agir de concert, être de connivence. De plus en plus, l'Autriche a partie liée avec l'Allemagne comme l'ont montré les incidents de Bosnie et d'Herzégovine (JOFFRE, Mém., t. 1, 1931, p. 107) :
8. ... plus que jamais je dépends du temps, des courants, de l'entourage, des circonstances. (...) que nous le voulions et sachions ou non, chacun de nous fait partie de l'ensemble, a partie liée, reste, fût-ce à son insu, dépendant.
GIDE, Journal, 1941, p. 78.
Prononc. et Orth. : [lje], (il) lie [li]. Homon. formes du verbe lire. À ce sujet, BUBEN 1935 § 58 souligne, que dans la bonne prononc. parisienne il n'y a aucune différence de durée entre je lierai et je lirai [], malgré la présence de e dans le premier qui induit en erreur les étrangers en les incitant à allonger la voyelle. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. Entourer d'un lien; attacher ensemble, réunir par un lien. A. Un animé 1. 2e moitié Xe s. « entourer quelqu'un de liens, l'entraver pour le maintenir captif » (St Léger, éd. J. Linskill, 150 : [Ewruins] Penre'l rovat, lïer lo fist [Sanct Lethgier]); ca 1100 (Roland, éd. J. Bédier, 3965 : Puis si li lient e les piez e les mains [a Guenelun]); id. liier a « attacher à l'aide de » (ibid., 3738 : Les mains li lient a curreies de cerf [id.]); 1668 lier un fou (RACINE, Plaideurs, I, VIII); 2. liier (aucun) a « attacher (quelqu'un) à (quelque chose) »; ca 1130 une personne (Couronnement de Louis, 758 ds T.-L. : Et a l'estache leiez et arestez); ca 1170 un cheval (CHRÉTIEN DE TROYES, Erec, éd. M. Roques, 466 : A la mangëoire le loie); 3. 1160-74 « lacer (une femme), lui attacher les liens de ses vêtements » (WACE, Rou, éd. J. Holden, III, 576); 4. ca 1200 liier les plaies « bander les plaies » (Chanson de Guillaume, éd. D. McMillan, 521); 5. 1377 p. ext. cynégétique « (en parlant d'oiseaux dressés à la chasse) saisir sa proie pour la plaquer à terre ou l'enlever » (GACE DE LA BUIGNE, Deduis, 2242 ds T.-L.); ca 1393 (Ménagier, II, 281, ibid.). B. Un inanimé 1. « unir par un lien les différents éléments d'un assemblage » a) ca 1150 tonneaus loier (Charroi de Nîmes, éd. D. McMillan, 966); b) ca 1393 liier [un potage, une sauce], part. prés. adj. « (d'un potage) dont les éléments font corps, moelleux, épais » (Ménagier, II, 15 ds T.-L. : Gravé d'oiselets... ne doit point estre trop , mais claret; doncques ne convient il que le pain ou les foies pour lïer); c) 1396 « unir, lier avec du ciment » cloquier bien loyés et bien ferme (doc. ap. Pièces et doc. relatifs au siège de Péronne, p. 79, Techener ds GDF. Compl.); 2. ca 1170 liier aucune rien a « fixer, assujettir par un lien (quelque chose) à » (MARIE DE FRANCE, Lais, Fresne, éd. J. Rychner, 128); 1606 vitic. (NICOT); 3. fin XIIIe-début XIVe s. [ms.] « fermer (un sac) par un lien » (Erberie, texte anonyme du ms. BN fr. 19152, fol. 89, publ. ds Œuvres de Rutebeuf, éd. E. Faral et J. Bastin, t. 2, p. 268 : s'il la met en un sac et il loie bien la bouche); 4. 1386 « attacher entre eux divers éléments d'un vêtement (ici, d'une armure) » (doc. ap. LOBIN, Hist. de Bret., II, 672 ds GDF. Compl.); 1530 « lacer [cf. A 3] » (PALSGR., p. 560 b : je lie ma chause); 5. « établir une continuité entre divers éléments » a) 1690 lier ses lettres (FUR.); b) 1771 mus. notes liées (Trév.). II Fig. A. 1174 cont. biblique synon. de vetare, interdicere, non remittere [BLAISE Liturg., § 280] « ne pas pardonner, imposer des obligations, des peines en relation avec le péché » v. Théol. cath. t. 1, 1, p. 139 b (GUERNES DE PONT-STE-MAXENCE, St Thomas, éd. E. Walberg, 2269 : lïer et deslïer [cf. Matthieu, XVI, 18-19]). B. Établir un lien affectif, moral, logique. 1. 1160-74 lien religieux, moral (WACE, Rou, éd. J. Holden, 1717 : Gardez vous de mal fere, que pechié ne vous lit); 1er quart XIIIe s. (RECLUS DE MOLLIENS, Carité, 130, 10 ds T.-L. : Moine ... cui li liiens de l'ordre lie); ca 1245 (St Alban, 488, ibid. : A lui [Dieu] vus cumant e abandun e li); 1269-78 lien du mariage (JEAN DE MEUN, Rose, éd. F. Lecoy, 8752); 2. 1176 lien affectif (CHRÉTIEN DE TROYES, Cligès, éd. A. Micha, 6663); 3. 1269-78 soi loier « engager son service contre rétribution » (JEAN DE MEUN, Rose, 7595); 4. 1283 lien jur. (BEAUMANOIR, Coutumes de Beauvaisis, éd. A. Salmon, § 1263); 5. av. 1563 lien log. (LA BOÉTIE, 200 ds LITTRÉ). C. « Inhiber, entraver, assujettir » ca 1200 (Renart, éd. M. Roques, 10982 : la parole m'enpire et lie); 2e moitié XIIIe s. (EUDES DE LA COURROIRIE, V, 37 ds Z. fr. Spr. Lit. t. 32, 1908, p. 213 : ...la langue me lie); 1269-78 (JEAN DE MEUN, Rose, 16348 : Qui se fie en fame ... Il se lie Les mains e se cope la gueule), ca 1274 (ADENET LE ROI, Berte, éd. A. Henry, 453 : Les mains li ont loiies par lour desloiauté); 1408 lier [aucun] « lier l'aiguillette [à quelqu'un] » (Arch. nat. JJ 162, pièce 240 ds GDF.). Du lat. ligare « attacher, lier, assembler, bander; entourer, encercler; fixer, maintenir; unir, joindre » au propre et au fig. Les formes régulières issues de - étant leie, loie - leiier, loier (formes qui demeurent dans de nombreux dial., notamment du quart nord-est de la France, FEW t. 5, p. 319 a), le type très anc. [il] lie - lier est le plus souvent expliqué p. anal. avec prie < , scie < , nie < , avec extension à la conjug. entière, du rad. du prés. de l'ind. 3 (FOUCHÉ, p. 448; BL.-W.5; v. aussi l'hyp. de FOUCHÉ, p. 282 qui, constatant l'ancienneté du type lie - lier, suppose qu'il pourrait reposer sur un - que postuleraient de même l'a. prov. liar, ligar, le cat. lligar, le cast. et port. ligar). Fréq. abs. littér. : 2 241. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 4 220, b) 2 818; XXe s. : a) 2 261, b) 3 063. Bbg. BARB. Misc. 29 1944-52, p. 433.

lier [lje] v. tr. [CONJUG. prier.]
ÉTYM. Xe, lïer; du lat. ligare.
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I Mettre ensemble, rapprocher, unir.
1 Entourer, serrer avec un lien (plusieurs choses ou les parties d'une même chose pour qu'elles tiennent ensemble). Attacher. || Lier de la paille en bottes ( Botteler), en faisceaux, en gerbes. || Lier des branches avec une corde, une ficelle. Ficeler. || Centaine qui lie un écheveau.Lier les feuilles de composition en paquet.Chir. || Lier un vaisseau ( Ligature).
1 Voyez si vous romprez ces dards liés ensemble.
La Fontaine, Fables, IV, 18.
2 Suivre les moissonneurs et lier la javelle.
André Chénier, Élégies, X.
3 (…) à la manière du chirurgien, sûr de sa méthode, qui lie les artères et suture la plaie.
André Suarès, Trois hommes, « Ibsen », V.
Spécialt. Nouer. || Lier les cordons de ses souliers (Académie).Par métaphore. || Lier le nœud d'une intrigue (→ Intérêt, cit. 30).
2 Compl. n. de chose. Assembler, joindre.Techn. || Lier les pièces d'un assemblage ( Assembler, fixer). || Lier des éléments par des moises ( Moiser).
Lier ses lettres, les joindre l'une à l'autre par de légers traits.Phonét. || Lier les mots : les prononcer en faisant une liaison.Mus. Liaison. || Lier des notes; lier un passage, le jouer legato.Pron. (sens récipr.). || Se lier. Accoler (s').
4 Les montagnes du haut Limousin se lient à celles de l'Auvergne, et celles-ci avec les Cévennes.
Michelet, Extraits historiques, Hist. de France, p. 86.
3 Compl. n. de chose. Joindre à l'aide d'une substance ou d'un ingrédient qui opère la réunion ou le mélange. Maçonn. || Lier des briques avec du ciment ( Cimenter), des pierres avec du mortier ( Conglomérer).Cuis. || Lier une sauce, l'épaissir avec une liaison.Pron. (sens passif). || Sauce qui se lie mal.
5 (…) on ne lierait la sauce de la blanquette qu'au moment de se mettre à table.
Zola, l'Assommoir, t. I, VII, p. 254.
Peinture :
6 Tous les tons y sont fondus, fusionnés, pour une couleur neuve, inconnue, unique à chaque endroit de la toile, — et si intimement liés qu'on n'en peut plus détacher rien ni rajouter aucune touche (…)
Gide, Journal, Feuilles de route, 16 déc. 1895.
4 Compl. n. de chose (abstraite). Unir par un rapport logique, fonctionnel, structural… || Lier les idées. Associer, coordonner, relier (→ Ailleurs, cit. 9; éloquence, cit. 9). || L'art de lier ses pensées (→ Écrire, cit. 2). || Lier les scènes d'une pièce de théâtre. Agencer, coudre.Chaîne (cit. 34), rapport qui lie la cause (cit. 31) à l'effet.
7 (…) cette comédie n'a été faite que pour lier ensemble les différents morceaux de musique, et de danse (…)
Molière, la Comtesse d'Escarbagnas, VII.
8 Je sais tout ce qu'on peut dire et tout ce qu'on a dit pour tâcher de lier ensemble les deux moitiés si disparates de la vie politique de M. de Chateaubriand (…)
Sainte-Beuve, Chateaubriand…, t. II, p. 238.
9 Quand elle s'égarait en ces souvenirs, indissolublement liés à l'éveil de sa première jeunesse (…)
Renan, Souvenirs d'enfance…, II, IV.
10 (…) il était une seconde fois dans cette Suisse qui l'avait si grassement nourri. Alors, les idées se liant les unes aux autres, il pensa à manger et dit : — Je voudrais du lait et du pain.
France, le Livre de mon ami, Livre de Suzanne, II, II.
11 Le réalisme politique des clercs, loin d'être un fait superficiel, dû au caprice d'une corporation, me semble lié à l'essence même du monde moderne.
Julien Benda, la Trahison des clercs, p. 242.
5 Compl. n. de personne. Unir par des liens d'affection, de convenance, de solidarité, d'intérêt. || Leur communauté de goûts les liera vite. Rapprocher.Pron. || Se lier avec (qqn). Sens réfl. || Se lier avec qqn. Accointer (s'), attacher (s'); intimité (entrer dans l'intimité de qqn). → 3. Fronde, cit. 5; gobelotter, cit. || Je me suis lié d'amitié avec lui.Absolt. || Personne qui se lie facilement ( Liant).Sens récipr. || Ils ne tardèrent pas à se lier.Absolt. || Comment on se lie à Paris (→ Insinuer, cit. 18). || Nous nous étions liés (→ Lécher, cit. 9).
12 Avant que nous lier, il faut nous mieux connaître (…)
Molière, le Misanthrope, I, 2.
13 (…) l'amitié qui me lie à Monsieur votre frère (…)
Molière, les Femmes savantes, V, 4.
14 (…) le besoin rapproche mutuellement les hommes, les lie, les réconcilie (…)
La Bruyère, les Caractères, XVI, 48.
15 Rien ne lie tant les cœurs que la douceur de pleurer ensemble.
Rousseau, les Confessions, X.
16 Puis on se lie davantage; il vous mène au café, vous invite à venir dans sa maison de campagne, vous fait faire, entre deux vins, toutes sortes de connaissances (…)
Flaubert, Mme Bovary, II, VI (→ Insinuer, cit. 18).
17 Ce fut à ce dîner de baptême que les Coupeau achevèrent de se lier étroitement avec les voisins du palier.
Zola, l'Assommoir, t. I, IV, p. 133.
18 Pourtant, dans cette lutte, une silencieuse fraternité liait, au fond d'eux-mêmes, Rivière et ses pilotes.
Saint-Exupéry, Vol de nuit, XI.
19 Elle le tutoyait parfois, en l'absence d'Antoine : si naturellement, que Léon n'en était pas surpris. De furtives et tacites connivences les liaient.
Martin du Gard, les Thibault, t. V, p. 155.
6 Créer (un lien). || Lier amitié (avec qqn) : contracter un lien d'amitié (avec lui).Lier connaissance (cit. 28). || Lier conversation. Nouer.
20 (…) vous aviez lié quelque amitié avec une demoiselle d'Angélique (…)
Racine, Lettres, 27, 30 avr. 1662.
21 (…) j'ai lié conversation avec une espèce de grand voyou (…)
Valery Larbaud, Barnabooth, Journal, II, p. 220.
Loc. Vx. Lier partie : convenir d'une partie de plaisir, d'une rencontre. — ☑ Mod. Avoir partie liée (avec qqn) : se mettre ou être entièrement d'accord (avec lui) pour une affaire où sont engagés des intérêts communs.
22 (…) les exclusifs, républicains ardents, semblaient portés à lier maintenant partie avec les Chouans.
Louis Madelin, Hist. du Consulat et de l'Empire, Avènement de l'Empire, III.
23 Vous n'ignorez pas que Quesnel a tout à fait partie liée avec Wisner.
Aragon, les Beaux Quartiers, I, XXIV.
Jouer (cit. 35, fig.) en partie(s) liée(s) : « jouer avec la condition que l'enjeu appartiendra à celui qui aura gagné le plus de parties sur un nombre déterminé » (Académie).
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II Compl. n. de personne, ou désignant une partie du corps. Fixer, retenir (qqn).
1 Attacher, enchaîner. || On l'avait lié sur une chaise (→ Fusiller, cit. 1). Attacher, garrotter, ligoter. || Lier les membres d'un prisonnier (→ 1. Arche, cit. 7).Au p. p. || Captif qu'on amène pieds et poings liés (→ par métaphore S'emparer, cit. 5).Anciennt. || Lier un fou, le mettre hors d'état de nuire en lui passant la camisole de force (→ Folie, cit. 3).Par exagér.Il est fou, elle est folle (1. Fou, cit. 39) à lier, complètement fou, folle (→ À enfermer).
24 Vous voulez donc nous rendre fous à lier (…)
Balzac, le Cousin Pons, Pl., t. VI, p. 711.
25 (…) une jeune fille qui se débattait pendue aux branches d'un chêne, — et moi que le bourreau liait échevelé sur les rayons de la roue.
Aloysius Bertrand, Gaspard de la nuit, La nuit et ses prestiges, VII.
26 (…) un beau matin, les gardiens se trouvèrent pieds et poings liés, et jetés dans les cabanons, où ils furent surveillés comme fous par les fous eux-mêmes (…)
Baudelaire, Trad. E. Poe, Histoires grotesques et sérieuses, « Le système du Dr Goudron ».
Spécialt (en parlant de rapaces). || Lier la proie, la saisir et l'immobiliser dans ses serres (→ Aigle, cit. 2).
Sujet n. de la chose qui lie. Assujettir (1., cit. 8). || Chaînes (cit. 7 et 16) qui lient quelqu'un.
(XVIe). Fig. Lier les mains à (ou de) qqn, lui ôter toute possibilité d'action.Au p. p. || Avoir les mains liées, pieds et poings liés. Impuissance, inaction (être réduit à l'). || Se livrer à quelqu'un pieds et poings liés, se mettre entièrement à sa merci.Pron. (sens réfl.). || Se lier les mains : perdre toute liberté d'action, en s'engageant pour l'avenir.
27 Je ne crois point que la nature
Se soit lié les mains, et nous les lie encor,
Jusqu'au point de marquer dans les cieux notre sort.
La Fontaine, Fables, VIII, 16.
28 Le pape est une idole à qui on lie les mains et dont on baise les pieds.
Voltaire, le Sottisier, Souveraineté réelle des papes.
29 — Il me livrera le citoyen Montauran, pieds et poings liés, reprit Hulot en se parlant à lui-même, et je me trouverai embêté d'un conseil de guerre à présider.
Balzac, les Chouans, Pl., t. VII, p. 1044.
30 Il eût donc fallu que Louis XIV, pour conserver l'amitié des Hollandais, abandonnât le traité de partage, se liât les mains pour l'avenir et que la France renonçât à parfaire son territoire. Le sage Lionne lui-même conseilla de ne pas signer un pareil engagement (…)
J. Bainville, Hist. de France, XIII, p. 231.
Lier la langue à (ou de) qqn, le contraindre au silence. || La timidité lui lie la langue (→ Fléau, cit. 7).
(1899, Petiot). Escr. Compl. n. de chose. || Lier l'épée : exercer une pression enveloppante sur l'épée de l'adversaire pour le contraindre à changer de ligne.
2 Imposer une obligation juridique ou morale à. Astreindre, obliger. || Les paroles, les contrats lient les hommes (Académie).(Au passif). || Être lié par un serment, une promesse. Engager, garrotter (cit. 5).Pron. (sens réfl.). || Se lier par un vœu.
31 Par les mêmes serments Britannicus se lie (…)
Racine, Britannicus, V, 5.
32 Vous vous trouveriez parjure en renonçant à Cinq-Mars ? Mais rien ne vous lie; vous vous êtes plus qu'acquittée envers lui en refusant, durant plus de deux années, les mains royales qui vous étaient présentées.
A. de Vigny, Cinq-Mars, XXIII.
33 Je ne suis liée que pour deux ans; et, en principe, les clauses de mon contrat me protègent.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. II, XI, p. 116.
Spécialt (théol.). Refuser d'absoudre.
34 Il se recueillit, il demanda des conseils à Celui qui conféra aux apôtres le pouvoir de lier et de délier les âmes. Alors (…) il se prépare à me donner l'absolution.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, I, II, 8, t. I, p. 88 (éd. Levaillant).
3 Sujet n. de personne ou de chose. || Lier à… Assujettir (3.), attacher. || Lier qqn, un forçat à sa chaîne. Enchaîner, river.
35 La vieille Brunehaut (…) fut traitée avec une atroce barbarie; on la lia par les cheveux, par un pied et par un bras, à la queue d'un cheval indompté qui la mit en pièces.
Michelet, Hist. de France, II, I.
Par métaphore :
36 Il (Ferdinand II) commençait à resserrer cette ancienne chaîne qui avait lié l'Italie à l'Empire, et qui était relâchée depuis si longtemps.
Voltaire, Essai sur les mœurs, CLXXVIII.
Sujet n. de chose. Créer un lien de dépendance. || Contrat liant le débiteur au créancier (→ Faute, cit. 26). || Lier deux personnes ensemble. || Époux indifférents (cit. 18) que l'habitude lie l'un à l'autre. Enchaîner.Pron. (sens réfl.). || Le vassal se liait au seigneur par l'hommage (cit. 3). Engager (s').
Par ext. || Lier sa vie à celle d'une femme. Enchaîner (→ Insensibilité, cit. 7). || Lier son destin à celui d'une entreprise (→ Enrichir, cit. 3). Attacher, dépendre (faire dépendre de).
37 (…) tous les gouvernements d'Europe sont liés de telle façon les uns aux autres par des traités d'alliance, par des conventions plus ou moins secrètes, par des promesses, qu'il se peut très bien que, si la guerre éclate, elle gagne toute l'Europe.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. I, IV, p. 53.
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se lier v. pron.
Voir ci-dessus à l'article, notamment I., 2., 4. et 5.
——————
lié, liée p. p. adj. REM. Certains emplois, dont l'explication dépend de celle de l'actif ou du pronominal, sont traités dans l'article et renvoyés ci-après.
1 Choses. (Au sens I). Entouré, serré par un lien. || Bouquet (cit. 5) de fleurs liées par un ruban. || Serviettes liées avec un galon (cit. 3) rouge.Feuilles liées. Liasse.Blason. Réuni(s) par un lien.
Fig. || Propositions liées par la conjonction « et » (cit. 9). Relié.Mus. || Notes liées. Legato. || Jeu lié.N. m. || Le lié. || Un beau lié.
Sauce liée, épaissie avec une liaison.Tons liés, en peinture (→ ci-dessus, cit. 6).Événements liés par un enchaînement singulier (→ Histoire, cit. 15). || Institutions non point juxtaposées (cit. 3), mais liées entre elles. || Organisme où tout est lié, où tout se tient. Solidaire (→ Contrecoup, cit. 3). || Affaires étroitement liées. Connexe.
2 Personnes. (Sens I, 5). || Ils sont liés d'amitié. || Être lié étroitement, intimement, indissolublement (cit. 2) à quelqu'un, avec quelqu'un (→ Adulte, cit. 6). || Ils sont très liés. Familier, intime. || Gens peu liés entre eux (→ Assortir, cit. 11). || Deux amis, deux frères (cit. 6) liés entre eux comme le pouce et l'index.REM. Lié à met l'accent sur le caractère affectif, et durable de l'union; lié avec marque plutôt l'existence même de relations.
Avoir partie liée avec qqn (→ Lier partie; et aussi ci-dessus, cit. 23).
3 (Sens II). || Captif lié. — ☑ Loc. Pieds et poings liés (→ ci-dessus cit. 26, et, au fig., cit. 29).Avoir les mains liées : ne pouvoir agir.Forçat lié à sa chaîne (cit. 5), enchaîné, rivé.
Attaché par des liens affectifs, sentimentaux ou amicaux. || Jeune homme lié à une gourgandine (cit. 1).Sort lié à la fatalité (→ Fatalisme, cit. 3).
CONTR. Délier. — Concasser, couper, délivrer, détacher, rompre, séparer. — Fâcher (se).(Du p. p.) Libre.
DÉR. Liage, liaison, liant, liasse, lierne, lieur, lieuse. — V. Liaison.
COMP. Allier, délier, relier, surlier.

Encyclopédie Universelle. 2012.