Akademik

pousser

pousser [ puse ] v. <conjug. : 1>
• 1360; v. intr. 1160; lat. pulsare
I V. tr.
1Soumettre (qqch., qqn) à une force agissant par pression ou par choc et permettant de mettre en mouvement, et de déplacer dans une direction.
(Personnes) Pousser qqn dehors, par les épaules. Il m'a poussée. bousculer. « il pousse sa compagne, lui fait perdre l'équilibre et la jette à terre » (Diderot). Pousser qqn dans le vide. Pousser les gens pour entrer, pour se frayer un passage. Spécialt Pousser qqn du coude, du genou, pour l'avertir ou en signe de connivence. — Loc. Il va comme on le pousse, sans choisir sa direction; fig. il est faible, influençable. Loc. adv. Fam. À la va comme je te pousse : n'importe comment. Ce travail a été fait à la va comme je te pousse. (Choses) Pousser du pied un objet. Pousser une voiture en panne d'essence. « nous n'avons plus qu'à nous barricader en poussant nos lits contre cette porte » (Diderot). Pousser une porte, pour l'ouvrir ou la fermer. Pousser les volets. « le gros loquet poussé sur la petite porte à claire-voie » (A. Daudet).
2Faire aller (un être vivant) devant soi, dans une direction déterminée, par une action continue. « Le vieux meunier poussant devant lui son âne » (A. Daudet). Chien qui pousse un troupeau. Pousser des troupes, les faire avancer. Fam. Pousser au cul.
3Fig. Entraîner (en parlant d'une force). La passion pousse le joueur. emporter. « des grands chefs que l'ambition pousse et que la gloire attire » (Alain). « je ne sais quelle force encore m'a poussé vers vous ! » (Flaubert).
(1538) Fig. POUSSER (QQN) À (qqch.) :inciter. ⇒ conduire, engager, entraîner, inciter, inviter, 1. porter, solliciter, stimuler. Pousser qqn à faire qqch. Quel mobile l'a poussé à agir ainsi ? Il l'a poussée à divorcer. Absolt Vendeur qui pousse à la dépense, à la consommation (aussi pousse-au-crime) .
(1661) Aider (qqn) à atteindre une position meilleure; faciliter la réussite de (qqn). favoriser; pistonner. « cette passion de protéger, de guider, de pousser, propre à tant de femmes du monde » (Madelin). Pousser un élève, le faire travailler.
Pousser qqn à bout, l'acculer, l'exaspérer. « un esprit que la contrariété poussait à bout » (Chateaubriand). Pousser qqn dans ses derniers retranchements.
4(fin XVIe) Faire avancer (qqch.). Pousser une brouette, une voiture d'enfant, sa bicyclette. Pousser un rabot. Pousser ses pions sur l'échiquier. Pousser l'aiguille : coudre. — « le nuage qui change de forme et de route, selon le vent qui le pousse » (Hugo). Le vent, la tempête pousse les flocons, les étincelles. chasser, souffler.
5Fig. Pousser à, jusqu'à, vers, loin, etc. Faire aller jusqu'à un certain point, un certain degré, une limite (une activité, un travail, etc.). Pousser jusqu'au bout une action, une aventure, une œuvre. terminer. Pousser qqch. à la perfection, à l'extrême. Pousser trop loin la logique, la plaisanterie. exagérer. La plaisanterie est un peu poussée. 1. fort. « au lieu de pousser plus loin l'étude de cette langue japonaise, je l'ai négligée » (Loti). « cette fin de scène peut et doit être poussée jusqu'aux limites de la décence » ( A. Gide). Pousser les choses au noir, pousser au noir. Pousser le bouchon trop loin. Spécialt Pousser les enchères. enchérir.
Pousser jusqu'à (avec un inf. marquant le point extrême). Pousser le dévouement, la délicatesse jusqu'à faire telle ou telle chose. (Avec un subst. marquant qu'à ce point extrême la chose devient autre) « J'ai poussé la vertu jusques à la rudesse » (Racine). Amour maternel poussé jusqu'au sacrifice.
6(Sans compl. ind.) Faire parvenir à un degré supérieur de développement, d'intensité. Pousser son travail, les travaux (cf. Faire avancer). (1656) Pousser une affaire, la mener activement. « Jean avait eu l'idée de pousser ses affaires, auprès de Lise, en se déclarant » (Zola). Pousser ses études, une discussion, une enquête. poursuivre, prolonger. Faire des études poussées. approfondi. Pousser le feu, en activer la combustion. ⇒ attiser. Pousse un peu le chauffage. activer, augmenter, monter. Mar. Pousser les feux. Pousser un moteur, une voiture, chercher à lui faire rendre le maximum. ⇒ gonfler. P. p. adj. Moteur poussé, dont les performances ont été améliorées.
7(XVIe ; cf. ci-dessous, II, C) Rare Faire naître, croître. produire; pousse. « Les platanes de la Halle aux vins poussaient leur jeune feuillage » (Duhamel). Par anal. Enfant qui pousse ses premières dents. percer.
8(1re moitié XVIIe) Produire avec force ou laisser échapper avec effort par la bouche (un son). émettre, proférer. Pousser des cris. crier. Pousser un hurlement, un gémissement, des plaintes, des exclamations. Pousser un juron, une gueulante. Pousser un soupir, des soupirs. exhaler. Pousser un ouf de soulagement. « On le mènerait à la boucherie et il ne pousserait pas le moindre bêlement » (F. Mauriac). Fam. « Un lieutenant de gendarmerie, ténor amateur, poussa la chansonnette » ( Billy). chanter. En pousser une (chanson). Pousser la romance.
II V. intr. (1160) A
1Faire effort en poussant qqch. ou qqn, en exerçant une poussée, une pesée, une pression. Voyons, ne poussez pas ! Fam. Poussez pas, y en aura pour tout le monde ! « Je veux pousser aussi, dit Pablo. Sarah s'arc-bouta contre la voiture et poussa de toutes ses forces » (Sartre). Pousser à la roue.
2Faire un effort pour expulser de son organisme (un fœtus, des excréments). « Elle poussait de toutes ses forces en silence, sans respirer » (Giono).
B
1Pousser plus loin, jusqu'à... : aller (plus loin). ⇒ avancer. « à moins qu'il ne soit descendu à Rolleboise, ou qu'il n'ait poussé jusqu'à Pacy » (Hugo). continuer, poursuivre.
2Fig. et fam. Aller trop loin, dépasser la mesure. exagérer; attiger, charrier. Tu pousses un peu ! Loc. Faut pas pousser !
C(1660; de pousser,I, 7o)
1(Végétation) Croître, se développer, grandir. Plantes, arbres qui poussent. Les premiers bourgeons poussent. 2. pointer, 1. sortir. Ces graines poussent vite. 1. lever. Une bonne terre où tout pousse. venir. Un désert où rien ne pousse. Faire pousser des salades. cultiver. « Il faut que l'herbe pousse et que les enfants meurent » (Hugo).
Par anal. Les cheveux poussent lentement. Laisser pousser sa barbe. Ses dents ont poussé. 1. sortir. Les gosses poussent bien. grandir. « elle restait raide, immobile, avec son cou maigre de fille poussée trop vite » (Zola).
Fig. S'accroître, se développer (en parlant de villes, de constructions). Pousser comme un champignon, du chiendent.
2Techn. Le vin pousse, fermente. La pâte pousse, lève, gonfle sous l'effet de la fermentation.
III ♦ SE POUSSER v. pron.
1(Réfl.) Avancer en poussant les autres.
(XVIe) Fig. Conquérir une position meilleure; se mettre en vue (cf. Jouer des coudes). « Il est fort désireux de se pousser dans le monde » (F. Mauriac). Fam. Se pousser du col.
Se retirer, s'écarter pour laisser la place. Pousse-toi, laisse-moi passer. Loc. fam. Pousse-toi de là que je m'y mette. ôter .
2(Récipr.) « Ils se pressent, s'entrechoquent, se poussent en silence » (Martin du Gard).
⊗ CONTR. Haler, immobiliser, tirer; détourner, dissuader, empêcher.

pousser verbe transitif (latin pulsare) Exercer sur quelque chose, une force, une pression qui le déplace dans le même sens : Pousser la porte. Le vent pousse les nuages. Faire aller quelqu'un, un groupe, des animaux devant soi : Pousser les visiteurs vers la sortie. Imprimer à quelqu'un un mouvement involontaire par un choc, une brusque pression de la main, du corps : On m'a poussé et je suis tombé. Inciter quelqu'un, l'engager à faire quelque chose : C'est la curiosité qui l'a poussé à agir ainsi. Faire tout pour que quelqu'un accède à un niveau de plus en plus élevé : Parti qui pousse son candidat. Exiger de quelqu'un un effort, un travail intense : Pousser un élève. Faire marcher un appareil, un moteur plus fort, plus vivement, et en particulier, obtenir plus ou le maximum de rendement : Il fait frais, pousse le chauffage. Faire avancer, approfondir une action : Pousser plus loin ses recherches. Manifester une attitude, une action, un sentiment, les mener jusqu'à tel point, les développer avec excès : Vous poussez un peu loin le scrupule. Faire brusquement entendre un cri, un soupir : Pousser des hurlements. Familier. Chanter une chanson, un air, etc. : Pousser la chansonnette. Familier. Avoir un organe qui croît : Arbre qui pousse une branche. Enfant qui pousse une dent. Beaux-arts Travailler avec soin une œuvre, et spécialement une étude, une esquisse. Cuisine Synonyme de coucher. Photographie Développer une émulsion en modifiant les conditions de traitement pour permettre son utilisation à une sensibilité supérieure à la sensibilité nominale. Reliure Réaliser la décoration d'un livre à l'aide d'une presse appelée « balancier », par opposition à tirer. Zootechnie Donner à un animal une ration supérieure à ses besoins en vue d'augmenter ses productions. ● pousser (expressions) verbe transitif (latin pulsare) Pousser un titre, des filets, procéder à la décoration d'un livre (lettres du titre, filets, ornements, etc.) à l'aide d'un fer à dorer à la main. ● pousser (homonymes) verbe transitif (latin pulsare) poucer verbe poussé adjectif poussée nom fémininpousser (synonymes) verbe transitif (latin pulsare) Exercer sur quelque chose, une force, une pression qui le déplace...
Synonymes :
- faire glisser
Faire aller quelqu'un, un groupe, des animaux devant soi
Synonymes :
- entraîner
Inciter quelqu'un, l'engager à faire quelque chose
Synonymes :
- entraîner
Contraires :
- empêcher
Faire tout pour que quelqu'un accède à un niveau de...
Synonymes :
- épauler
- pistonner (familier)
Exiger de quelqu'un un effort, un travail intense
Synonymes :
Faire avancer, approfondir une action
Synonymes :
- développer
- faire avancer
Faire brusquement entendre un cri, un soupir
Synonymes :
- émettre
- faire entendre
- proférer
Synonymes :
- Cuisine. coucher ● pousser verbe transitif indirect Exercer sur quelque chose une pression, une poussée : Pousser sur un bouton.pousser verbe intransitif Faire un effort pour expulser par les voies naturelles les matières fécales, ou contracter les muscles abdominaux pour aider le fœtus à sortir au moment de l'accouchement. Poursuivre sa route, son chemin, aller plus loin ; aller jusqu'à tel lieu en poursuivant un peu sa route : On pousse jusqu'au carrefour ? Familier. Exagérer, dépasser la mesure : Non vraiment, faut pas pousser. Apparaître, vivre, croître, se développer, en parlant d'un végétal : Le blé pousse bien. Apparaître, se former et grandir sur le corps : Sa barbe pousse vite. Familier. Grandir, se développer, en parlant d'un enfant : Qu'est-ce qu'il a poussé depuis l'année dernière ! Apparaître, se construire, en parlant d'immeubles : Villes qui poussent comme des champignons. Œnologie En parlant d'un vin, refermenter légèrement au printemps. ● pousser (homonymes) verbe transitif indirect poucer verbe poussé adjectif poussée nom fémininpousser (citations) verbe intransitif Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière Paris 1622-Paris 1673 Allons, ferme, poussez, mes bons amis de cour. Le Misanthrope, II, 4, Alceste pousser (expressions) verbe intransitif Faire pousser un végétal, le cultiver : Il fait pousser des tomates. Pousser en dehors, faire ventre et menacer ruine, en parlant d'un mur. ● pousser (homonymes) verbe intransitif

pousser
v.
rI./r v. tr.
d1./d Peser sur, peser contre, pour déplacer, pour faire avancer. Pousser un meuble. Pousser une brouette.
Fam. écarter, mettre de côté. Pousse tes affaires, elles me gênent.
|| v. Pron. Pousse-toi!
d2./d Imprimer un mouvement à (qqch, qqn) en le pressant vivement ou en le heurtant. Il n'est pas tombé tout seul, qqn l'a poussé.
d3./d (Afr. subsah.) Fam. Raccompagner, faire un brin de conduite à (qqn). J'ai du temps, je vais te pousser un peu.
d4./d Fig. Faire avancer, engager, soutenir (qqn) dans une entreprise, une carrière. Son père l'a poussé dans ses études.
d5./d étendre, porter plus loin. Pousser ses conquêtes jusqu'à la mer.
|| Fig. Pousser la plaisanterie trop loin.
d6./d Mettre, amener (qqn) dans un certain état, une certaine situation. Pousser qqn à bout.
d7./d Inciter à, faire agir. Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre?
d8./d Proférer, exhaler (un cri, un soupir, etc.). Il a poussé un grand cri.
d9./d Produire, faire sortir de soi (en parlant d'un être vivant, d'un organisme). L'arbre a poussé des nouvelles feuilles. Bébé qui pousse ses dents.
rII./r v. intr.
d1./d Peser, exercer une poussée.
d2./d Faire effort pour expulser de son corps les fèces, ou lors de l'accouchement le foetus.
d3./d Croître, se développer. Les feuilles poussent déjà.
Fig. Cet enfant pousse vite.
d4./d Pousser plus loin, jusqu'à...: continuer son chemin, aller jusqu'à... Ils poussèrent jusqu'à la ville.

⇒POUSSER, verbe
I. —Exercer une pression physique pour provoquer un déplacement.
A. —[Le suj. désigne une pers. ou, plus rarement, un animal] Exercer une pression avec sa force musculaire sur un corps pour le faire rouler, glisser, basculer, pivoter. Anton. tirer, traîner.
1. Pousser qqc. Pousser le piano dans un coin; pousser la neige avec une pelle; pousser la manette à fond; pousser un landau. Je vas le pousser, tu vas le tirer. En un instant le petit fut monté, poussé, traîné, tiré, bourré, fourré dans le trou sans avoir eu le temps de se reconnaître (HUGO, Misér., t.2, 1862, p.161). Le mode de traction le plus simple, sur les voies ferrées minières, consiste à faire traîner ou pousser les wagonnets par des ouvriers rouleurs, nommés herscheurs (HATON DE LA GOUPILLIÈRE, Exploitation mines, 1905, p.747).
Pousser l'aiguille. Coudre. Et, de temps à autre, tandis qu'elle poussait son aiguille, une grosse larme descendait le long de son nez (FLAUB., Mme Bovary, t.2, 1857, p.99).
Pousser le ballon, les boules. Le, les faire rouler. Les paysans, eux, trouvent leur amusement favori à «chouler», c'est-à-dire à pousser une boule de bois, à coups de crosse ou de maillet (FARAL, Vie temps st Louis, 1942, p.205).
Pousser le bouchon trop loin (au fig.). [P. réf. au jeu de bouchon] Aller trop loin (dans une accusation, une affirmation). Jeannot (...) partit vers sa carrée, faussement dédaigneux, tandis que Martial, brave garçon dans le fond, pensait qu'il avait peut-être poussé le bouchon un peu loin (A.D.G., Les Panadeux, Paris, Gallimard, 1971, p.180).
Pousser un bouton. Appuyer dessus et p.ext. déclencher un mécanisme. Il poussait un bouton qui, dans l'autre pièce, faisait signe de recommencer (TAINE, Notes Paris, 1867, p.340).
Pousser des pions. Faire glisser; p.ext. jouer aux échecs, aux dames. M. Floche et l'abbé poussaient leurs pions sans mot dire (GIDE, Isabelle, 1911, p.647). Au fig. V. pion1 B ex. de Mounier.
Pousser une porte, les persiennes. Faire pivoter pour ouvrir ou fermer et p.ext. fermer, ouvrir. Je ne pouvais pas cependant cesser de regarder à travers la glace, et j'y restai jusqu'au moment où l'on me poussa brusquement la porte sur le visage (VIGNY, Serv. et grand. milit., 1835, p.110).
Pousser + compl. prép. ou adv. désignant le point d'application de la poussée. Ils se servent de petites béquilles au lieu de perches, et, restant assis, ils poussent sur le fond et communiquent à leur bateau une très-grande vitesse (Voy. La Pérouse, t.3, 1797, p.109). Les uns tirant l'ânon par la bride; les autres poussant derrière la voiture (ALAIN-FOURNIER, Meaulnes, 1913, p.259). [Des cyclistes] poussaient sur les pédales de tout le poids de leurs énormes sabots blancs (VAN DER MEERSCH, Empreinte dieu, 1936, p.148).
Pousser à la roue. Pousser un véhicule pour le faire avancer. Le grand-maréchal et le général Gourgaud ont été obligés de mettre pied à terre et de pousser à la roue (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t.1, 1823, p.381). Au fig. Pousser à la roue. Aider. On en voit [des Français] qui souhaiteraient une victoire totale de l'Allemagne, qui sont prêts à pousser à la roue, qui collaborent, comme on dit (GREEN, Journal, 1941, p.102).
[P. ell. du compl.] [Chéri] s'abattit sur la belle épaule large, poussant du front, du nez, creusant sa place familière (COLETTE, Chéri, 1920, p.9). Des fois le tranchant de l'outil s'arrêtait et il avait beau pousser, ça n'entrait plus (GIONO, Gd troupeau, 1931, p.107).
2. Pousser + subst. désignant une partie du corps. Faire saillir. Elle poussait les lèvres en une moue qui signifiait non, tandis que ses yeux disaient oui (MONTHERL., Lépreuses, 1939, p.1409).
3. En empl. abs. Faire des efforts pour expulser quelque chose de son organisme. (Dict. XIXe et XXes.).
4. Vieilli. Synon. de repousser, refouler. Cinq années suffirent pour pousser cette mer [l'ancienne mer de Haarlem] dans l'Océan et pour donner à l'agriculture une terre merveilleuse (DU CAMP, Hollande, 1859, p.107).
Au fig. Pousser le temps (de l'épaule). Reculer le moment de passer à l'acte. Tous les jours voient se former et s'évanouir nos espérances; vous savez ma manière de pousser le temps, de vivre dans les projets et les désirs (CHATEAUBR., Corresp., t.1, 1802, p.63). La tentation de pousser le temps à l'épaule, d'ajourner, de renvoyer, au profit de la rêvasserie inféconde, cette tentation nous enlace et nous paralyse (AMIEL, Journal, 1866, p.332).
B. —Qqn pousse qqn
1. User de sa force pour obliger quelqu'un à se déplacer ou à céder la place. Synon. bousculer, bourrer. Je suis sorti à pied, pêle-mêle avec les soldats qui me poussaient (MAINE DE BIRAN, Journal, 1814, p.15). Monseigneur, j'attendrai, dit l'abbé de Bernis au ministre qui lui criait:Vous n'aurez rien, et le chassait, le poussait dehors par les épaules (COURIER, Pamphlets, Au réd. «Censeur», 1820, p.34):
1. Stefanesco, sans un mot, venait de lui sauter aux épaules; il la poussait, chancelante, à reculons, l'assénait au mur, l'y maintenait comme clouée, à bras tendus.
VERCEL, Cap. Conan, 1934, p.133.
Empl. pronom. réciproque. Il se fit un combat merveilleux à coups de poing, à coups de pied, entre les galopins qui se poussaient et se renversaient pour gagner les deux sous promis (CHAMPFL., Souffr. profess. Delteil, 1853, p.29). Vous les avez donc pas vus? dit-il enfin. Ils [les automobilistes] se poussent au cul les uns les autres: comment voulez-vous qu'ils s'arrêtent? (SARTRE, Mort ds âme, 1949, p.17).
Pousser qqn dans les bras de qqn. Provoquer, favoriser une liaison amoureuse. Quand j'ai voulu le pousser dans vos bras, il a préféré retourner à ceux de Pulchérie (SAND, Lélia, 1839, p.411).
Il ne faut pas pousser grand'mère dans les orties ou absol. faut pas pousser (pop.). Ne pas avoir envers quelqu'un un comportement qui nie les normes sociales, ne pas exagérer.
2. Faire avancer quelqu'un en exerçant une pression de la main. Madame Lyautey entrait, poussant devant elle deux beaux petits garçons en vestes et culottes de coutil blanc (GYP, Souv. pte fille, 1928, p.186). «Allons, asseyons-nous maintenant», dit Antoine, en poussant Jacques vers un accueillant fauteuil de cuir (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p.124).
Au fig.
Pousser qqn. Lui faciliter les moyens d'une ascension sociale. Synon. favoriser, pistonner (fam.). Quel est le juge qui n'a pas un fils ou du moins un cousin à pousser dans le monde? (STENDHAL, Rouge et Noir, 1830, p.201). Les médecins ont encore certaine influence. Ils poussent les infirmières qu'ils ont distinguées (BARRÈS, Cahiers, t.9, 1911, p.177).
Pousser un élève, un sportif. L'inciter à obtenir de meilleurs résultats en travaillant, en s'entraînant davantage.
3. Pousser qqn du coude ou pousser le coude à qqn. Toucher le coude à quelqu'un pour attirer discrètement son attention ou en signe de connivence. J'aperçus (...) la tête boudeuse et indifférente d'une belle jeune paysanne à qui son oncle poussait le coude d'admiration, tandis qu'elle tournait la tête d'un autre côté (MUSSET ds Le Temps, 1831, p.111). Il poussait du coude ses acolytes, comme pour les prévenir d'une intention plaisante (SUE, Atar-Gull, 1831, p.21).
Empl. pronom. réciproque. L'expression ennuyée, effrontée des figurants fait contraste avec la musique; ils se poussent du coude, se gouaillent dans les coulisses (TAINE, Notes Paris, 1867, p.11).
4. Vieilli. [Le suj. désigne un assaillant, une force militaire] Exercer une pression qui oblige l'adversaire à se replier, à reculer. Synon. usuel repousser. Au jour, Joubert attaqua la division qui était devant lui, et la poussa de hauteurs en hauteurs sur la crête supérieure du Montebaldo, qui domine la vallée de l'Adige (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t.1, 1823, p.562). Mortier, surpris de rencontrer les Russes, qu'il croyait devant Vienne, les poussa néanmoins vivement jusqu'à Stein (SAND, Hist. vie, t.2, 1855, p.128).
Cour., au fig. Pousser qqn dans ses derniers retranchements. V. retranchement.
5. (À la) va comme je te pousse, loc. adv., pop., fam. Sans direction ferme, au gré des circonstances. Après quoi, va comme je te pousse, le fossoyeur est là, le Panthéon pour nous autres, tout tombe dans le grand trou (HUGO, Misér., t.1, 1862, p.42). Les rapports continuaient, de bric et de broc, va comme je te pousse, sans que l'un ni l'autre y eût beaucoup de plaisir (ZOLA, Assommoir, 1877, p.675). Il y eut un silence, pendant lequel le marchand de tableaux guignait les merveilles accumulées dans l'atelier à la va comme je te pousse (L. DAUDET, Coeur et abs., 1917, p.53).
C. —[Le suj. désigne une force naturelle, une chose ayant une force interne]
1. Entraîner dans son mouvement, exercer une pression.
Qqc.1 pousse qqc.2 Un organe dont les contractions poussent avec violence ce fluide dans tous les rameaux du tronc artériel (CUVIER, Anat. comp., t.1, 1805, p.14). Les descentes le poussaient [le cheval] en avant, les montées le tiraient en arrière, les débords le jetaient de côté (FLAUB., Champs et grèves, 1848, p.216). Mais elle avait une souplesse de drageon, et des hanches qui mouvaient sous ses cottes à vous pousser le sang au coeur (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p.33).
Au fig. Je passai cette quinzaine dans la plus austère abstinence de ce que j'aime le plus, me faisant une religion de me réserver tout entier à cette oeuvre (...). Le travail poussait le travail et les jours les jours (MICHELET, Journal, 1851, p.170). Une série de tâtonnements et d'oscillations qui finissent par pousser à la surface les idées qui réalisent le progrès (Cl. BERNARD, Princ. méd. exp., 1878, p.190):
2. Je savais qu'une seule troupe d'acteurs gouvernait la France, troupe à peine modifiée par quelques changements et échanges de rôles selon l'emploi de leur âge à mesure que le temps les poussait; que souvent changeait la scène, rarement les hommes...
VIGNY, Mém. inéd., 1863, p.117.
Qqc.1 pousse contre, sur. Exercer une pression, buter contre, sur. Au quai, l'eau poussait dur sur les péniches bien rassemblées contre la crue (CÉLINE, Voyage, 1932, p.617).
ARCHIT. Pousser en dehors. [Le suj. désigne un ouvrage de maçonn.] Se déformer vers l'extérieur. Synon. faire ventre. Un mur qui pousse en dehors (NOËL 1968).
2. P. anal.
[Le suj. désigne un instinct, une force morale] Le désir instinctif qui pousse les peuples à la liberté n'est donc au fond que le désir de l'ordre, puisqu'il n'est que le besoin senti de subordonner la force au droit, la matière à l'intelligence (LAMENNAIS ds L'Avenir, 1831, p.236). En parlant ainsi, Gérard avait des larmes dans la voix; quelque chose d'intérieur le poussait à se jeter aux genoux de Mariette (CHAMPFL., Avent. Mlle Mariette, 1853, p.223).
[Le suj. désigne une source lumineuse, un foyer] Le jour céruséen et velouté de la lune (...) poussoit des gerbes de lumières jusque dans l'épaisseur des plus profondes ténèbres (CHATEAUBR., Essai Révol., t.2, 1797, p.424). Le jardinier allume les feuilles mortes (...). D'abord elles poussent une fumée sans flamme, à chaque instant plus épaisse et plus rapide (MONTHERL., Olymp., 1924, p.369):
3. On a vu la lampe de la cuisine pousser par l'ouverture sa lumière sur la large dalle où il y a eu une place éclairée; là, une femme s'est tenue un instant, la tête sous un fichu, puis elle descend l'escalier.
RAMUZ, Gde peur mont., 1926, p.206.
D.Empl. pronom. réfl.
1. [Le suj. désigne une pers.] Avancer en bousculant. Se pousser au premier rang.
Au fig., fam. Conquérir une position sociale. Synon. faire son chemin, se faire une place au soleil, jouer des coudes. Se pousser dans la société. [Le peuple] appelle faire fortune, se pousser (...). Les honnêtes gens disent, s'avancer, avancer, arriver, termes adoucis, qui écartent l'idée accessoire de force, de violence, de grossièreté, mais qui laissent subsister l'idée principale (CHAMFORT, Max. et pens., 1794, p.22). Chacun maintenant cherche à se placer, ou, s'il est placé, à se pousser. On veut être quelque chose (COURIER, Pamphlets, Au réd. «Censeur», 1819, p.13). Lui qui avait tant compté sur ses relations avec Jacques Schoelzer pour se pousser dans le monde (ARAGON, Beaux quart., 1936, p.289).
a) S'écarter. Pousse-toi de là. Quelqu'un lui demanda aussitôt de se pousser un peu pour lui faire place (GREEN, Moïra, 1950, p.40).
b) Porter le corps en avant. Le jeune baron passa deux ou trois fois sa main sur le crâne du chat, qui se haussait et se poussait pour mieux jouir du grattement amical (GAUTIER, Fracasse, 1863, p.48).
Au fig., fam. Se pousser du col. Se faire valoir. Ce garçon que j'ai connu petit lieutenant (...) mais qui sait se pousser du col (VIALAR, Morts viv., 1947, p.209).
2. [Le suj. désigne une chose ayant une force interne] Se frayer un chemin à travers des obstacles. Une petite eau marchait à côté de vous, au milieu de l'allée, dans une rigole qui se poussait entre les carreaux d'un rose éteint allumé parfois d'une tache bleu vif (MONTHERL., Bestiaires, 1926, p.468). P. anal. Brunet le regarde du coin de l'oeil: il a perdu son air net et gai, les mots se poussent mollement hors de sa bouche (SARTRE, Mort ds âme, 1949, p.279).
E. —[En concurrence avec lancer]
1. Qqn pousse un coup à qqn. Donner, porter (un coup d'épée) avec force, avec élan. S'il vient, de l'embuscade Sortez vite, et poussez au drôle une estocade! (HUGO, Hernani, 1830, II, 1, p.36). V. flanconnade ex. de Gautier.
Pousser une botte, une pointe. Mener une attaque, un assaut. P. plaisant. à double sens. Vous épouserez. Poussons chacun nos pointes! La mienne est en fer et ne mollit jamais, hé, hé! (BALZAC, Goriot, 1835, p.181).
Au fig. Pousser sa pointe. V. pointe IV A 1 ex. de J. de Maistre, Gide, A. Daudet.
[Le suj. désigne un animal] Pousser une ruade. Lancer. Proserpine (...) ne sentit pas plutôt mon pied peser sur l'étrier qu'elle se jeta brusquement de côté, en poussant trois ou quatre ruades superbes (FEUILLET, Rom. j. homme pauvre, 1858, p.112).
2. Vx. Pousser un javelot. Lancer. Occupé à lever la lance et à pousser le javelot (COTTIN, Mathilde, t.2, 1805, p.7).
II. A. —1. Mener (une opération militaire) loin en avant d'une base ou des lignes. Pousser une pointe, une reconnaissance.
Pousser (une troupe, une armée). Établir en position avancée, pénétrer dans les lignes ennemies. L'ennemi avait eu la négligence de ne pas pousser des postes jusqu'à l'Adige (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t.1, 1823, p.549). Une fois la brèche ouverte, les Allemands seront en mesure de pousser, loin derrière nos lignes, une masse rapide et cuirassée appuyée par leur armée de l'air (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p.20).
Pousser sur. Est-ce le déclenchement de leur fameux plan: atteindre la Marne, pousser sur Saint-Mihiel, encercler Verdun (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p.936).
2. Continuer son chemin, sa route jusqu'à, vers. Je n'y pus tenir, et, demandant cheval et guide, je poussai incontinent après souper sur Blois (SAINTE-BEUVE, Volupté, t.2, 1834, p.53):
4. Ma course fut longue ce jour-là. Connaissant tous les environs et voulant voir du neuf, je la poussai jusqu'au village (...) à plus de deux lieues de chez moi.
JOUY, Hermite, t.5, 1814, p.252.
Pousser de l'avant, en avant. Gaspard hésita. Pousser en avant? Secourir les copains? (BENJAMIN, Gaspard, 1915, p.63). J'avais envie de pousser de l'avant jusqu'aux confins du monde civilisé (CENDRARS, Lotiss. ciel, 1949, p.198).
3. Vx. [Avec un compl. interne ou en empl. abs.] Synon. de poursuivre, continuer. Les penchants acquis veulent pousser leur cours (SAINTE-BEUVE, Volupté, t.2, 1834, p.33):
5. FORLIS: Oui mon cher, et sans peine encor, sans résistance. C'étoit les échelons qui faisoient la distance, Les voilà tous rompus. VERSAC: J'enrage; allons, poussez, Intrépide optimiste!
LAYA, Ami loix, 1793, I, 1, p.10.
B. —1. Vieilli. Pousser une mine, une galerie. Creuser dans une certaine direction. Nous essayerons de pousser une galerie transversale à travers la montagne (GAUTIER, Rom. momie, 1858, p.168).
2. Faire exécuter activement. Synon. activer. Pousser une affaire, les travaux. Je vais m'établir chez vous, Christel, huit, dix, quinze jours, pour surveiller et pousser ce travail (ERCKM.-CHATR., Ami Fritz, 1864, p.50).
Empl. pronom. passif. Les travaux de la nouvelle rue (...) se poussent avec la plus grande activité (JOUY, Hermite, t.1, 1811, p.175).
3. Au fig. Conduire, développer. Pousser un raisonnement juqu'à son terme. Je suis fâché que tu aies découvert cela; mais je te laisse la belle. Mon intention d'ailleurs n'était pas de pousser l'amourette plus loin (HUGO, M. Tudor, 1833, 1re journée, 7, p.68). J'ai donc eu pour objet de pousser plus loin l'analyse (Cl. BERNARD, Notes, 1860, p.128).
Pousser son bonheur, son avantage. Le mener à sa conclusion. L'amant (...) demande des assurances plus positives, et veut pousser son bonheur (STENDHAL, Amour, 1822, p.10). Avec les yeux qu'elle me faisait et la façon dont elle buvait mes paroles, il ne tenait probablement qu'à moi de pousser mes avantages (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1939, p.112).
III. A. —Rendre plus intense, plus actif. Pousser les préparatifs; pousser les feux (v. feu1). Si vous le retirez [le pain] ferme et coloré, opérez immédiatement l'immersion, sinon il faut pousser le feu et recommencer l'essai (BRILLAT-SAV., Physiol. goût, 1825, p.125).
Pousser un appareil, un moteur. Le faire marcher pendant un temps à sa puissance maximale pour obtenir le meilleur rendement. (Ds GDEL).
Pousser les enchères sur (un objet). En faire monter le prix dans une vente aux enchères. Synon. enchérir. Il alloit observer dans les ventes comment les marchands poussoient ce que les bourgeois veulent acheter, et comment ils s'entendoient entr'eux (BALZAC, Annette, t.1, 1824, p.43). M. de Galliéra, voyant Hertford pousser, poussa il ne savait quoi, —simplement contre Hertford (GONCOURT, Journal, 1863, p.1216). JEUX (tarot). Faire le jeu en échangeant ses cartes contre celles du talon. V. prendre ex. 2.
Pousser la voix. La hausser. Synon. forcer. Tout à coup elle poussa la voix: «Ho, pauvre! Ho, vous autres!» (POURRAT, Gaspard, 1931, p.123). Comme les politiques, il poussait la voix sur la fin des phrases (DUHAMEL, Combat ombres, 1939, p.169).
[Le compl. désigne une attitude morale] La maintenir jusqu'à un degré où elle devient excessive, où elle change de nature. Cette dernière poussa l'amour jusqu'à ce qui nous semblerait de l'héroïsme en pays de vanité (STENDHAL, Amour, 1822, p.164). Et l'Empereur poussa la bonté jusqu'à faire venir Gentilini pour lui en donner l'ordre de sa propre bouche (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t.2, 1823, p.335). Félicité poussait même ce genre de respect si loin, qu'elle conservait une des redingotes de monsieur (FLAUB., Coeur simple, 1877, p.61).
Pousser qqc. au noir, au tragique. Exagérer en mal. Une vieille cuisinière drapée dans une vie et une ascendance d'honneur, tenait le balai comme un sceptre, poussant son rôle au tragique, l'entrecoupant de pleurs (PROUST, Sodome, 1922, p.778). Il ne s'agit pas de rien pousser au noir. Il s'agit de prendre des précautions (CAMUS, Peste, 1947, p.1256).
B.PEINT., intrans. Pousser au noir. Devenir sombre, foncer. Cette copie [de la Cène de Léonard] (...) a poussé au noir (STENDHAL, Hist. peint. Ital., t.1, 1817, p.221). [Mon mari] avait encore le teint fort jaune, ce qui faisait croire que ce portrait, d'ailleurs si ressemblant, a poussé au noir, ce qui arrive aux tableaux de Girodet (Mme DE CHATEAUBR., Mém. et lettres, 1847, p.31). Si, en leur qualité de taches d'encre, elles poussaient trop au noir (par la faute du papier qui boit beaucoup) vous me le diriez et je vous les remplacerais (HUGO, Corresp., 1858, p.287).
P. ext. Virer, tourner à. [L'avare] portait une petite perruque plate dont le noir poussait au rouge (BALZAC, Illus. perdues, 1839, p.485).
IV. A. —Engager, inciter vivement quelqu'un à. Pousser à accepter, à refuser, à se révolter; pousser au mal, à la rupture, au vice; pousser le pays à la guerre.
Pousser à la consommation. Dans le midi de la France (...) tous les cafés sont peuplés de femmes jeunes et jolies dont la gracieuseté n'a pas de mission autre que celle d'attirer les oisifs, et, en termes techniques, de pousser à la consommation (BURAT-GURGY, Le Lit de camp, 1832, III, p.329 ds QUEM. DDL t.19). Les bras jetés au cou des buveurs, assises en travers de leurs jambes, elles poussaient à la consommation (MAUPASS., Contes et nouv., t.1, Mais. Tellier, 1881, p.1179).
Ne pas pousser beaucoup qqn. Obtenir son accord facilement, sans devoir insister. Et, moi, je tiens mordicus qu'on le peut; que je le fais: —et il ne faudrait pas me pousser beaucoup pour me faire déclarer qu'on le doit (MARTIN DU G., Souv. autobiogr., 1942, p.CVIII).
B. —Exercer une vive pression sur quelqu'un. Par son attitude, elle poussait Pierre, elle l'affolait (ZOLA, Fortune Rougon, 1871, p.266). Il défiait, tutoyait Gaspard du regard. Croyait-on qu'il fût homme à se laisser picoter par des farces ou pousser par des menaces? (POURRAT, Gaspard, 1930, p.193).
Pousser à bout. Acculer et, p.ext., exaspérer. V. bout ex. 23 de Michelet.
C. —Presser de questions, d'arguments. Synon. harceler. Le marquis engagea par un signe l'interlocuteur de Julien à le pousser vivement (STENDHAL, Rouge et Noir, 1830, p.244):
6. —Ah! oui, cet effet... cet effet... —Elle ne l'avait pas vu plus que moi. Une menteuse, d'abord. Je m'amuse à la pousser là-dessus; cela la rend grinchue.
GONCOURT, R. Mauperin, 1864, p.85.
V. —Produire (un cri, un son). Synon. émettre, lancer.
A. —[Le suj. désigne un animé] Pousser des cris, des bêlements, des gémissements plaintifs, des hurlements. Les reinettes poussaient leur note limpide et tous ces petits cris se mêlaient en une sorte de chant à la fois doux et aigu qui variait d'intensité (GREEN, Moïra, 1950, p.57).
P. anal. Les orgues poussèrent un cri puissant, annoncèrent l'entrée de la mariée avec leur grande voix de métal (MAUPASS., Bel-Ami, 1885, p.390). Voir acagnarder, ex.3.
B. —[Le suj. désigne une pers.]
1. Manifester ses réactions par des sons n'appartenant pas au langage articulé. Pousser un ouf de soulagement, des soupirs, un éclat de rire. Insensiblement j'en arrivai à une exaltation terrible; je me mordais les mains, je poussais des sons inarticulés (DU CAMP, Mém. suic., 1853, p.92). Je poussai, cette fois, un «ah!» de stupéfaction. Je ne comprenais plus du tout (MAUPASS., Contes et nouv., t.2, Mme Baptiste, 1882, p.354):
7. ... elles passèrent enlacées, ne cessant de s'embrasser, et, arrivées à notre hauteur, poussèrent des gloussements, des rires, des cris indécents.
PROUST, Sodome, 1922, p.850.
P. ext.
Pousser un appel. Dire en criant. Là il poussa cet appel: —En route pour la bataille! (HUGO, Misér., t.2, 1862, p.251).
Pousser une colère, une beuglante (pop.). Crier de colère. Il était livide, hagard, comme sont certains enfants calmes et secrets qui, une fois ou deux par an, poussent une colère écumante (DUHAMEL, Suzanne, 1941, p.284).
2. Pop., fam. Pousser une chanson, sa chanson. Chanter. Les voiturins, vautrés, la tête en bas au fond de leurs chariots, et poussant, par accès intermittents, les mille et un couplets d'un chant nasillard (ROLLAND, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p.1445). Il la cognait, on entendait ses cris affreux, et tout de suite après, il ouvrait la fenêtre et poussait sa romance préférée: «Femmes, que vous êtes jolies!» (CAMUS, Chute, 1956, p.1492).
En pousser une. On lui demandait d'en «pousser une» (DABIT, Hôtel Nord, 1929, p.99).
Pousser sa beuglante, sa gueulante. Eh! dis! l'appelaient-elles. Pousse-la tout entière ta goualante (CARCO, Équipe, 1919, p.64).
3. Vx ou arg. Synon. de poser. [Il] me poussa des questions. Je fus obligé d'inventer des réponses (STENDHAL, H. Brulard, t.1, 1836, p.334). Les jours de pluie, sous le préau neuf de la cour carrée, alors qu'on ne pouvait jouer ni au pot ni à la grue, nous nous poussions des colles (COLETTE, Cl. Paris, 1901, p.79).
VI. A. —Exciter (de la voix, en aiguillonnant, frappant, etc.) un animal pour qu'il garde ou accélère l'allure. Ils prenaient beaucoup de plaisir à garder l'air hautain, à ne pas prononcer un mot, mais à pousser inexorablement le cheval en avant, en le faisant même un peu danser (GIONO, Bonheur fou, 1957, p.136).
P. anal. [Le compl. désigne une pers.] Derrière nous, des voix nous poussent: —En avant, les gars, en avant! Nom de Dieu! (BARBUSSE, Feu, 1916, p.306):
8. Rouget de L'Isle, en 1792, avait poussé des bataillons aux frontières par la Marseillaise; Béranger allait pousser des milliers d'âmes à l'opposition par ses poëmes chantés.
LAMART., Nouv. Confid., 1851, p.314.
B. —Exciter à la chasse, à la poursuite. Ils poussoient des dogues dans les roseaux (CHATEAUBR., Natchez, 1826, p.298). Il y aurait du monde, cette nuit, au bois de la Sauvagère! Cherchez bien, mes braves gens, poussez vos chiens, hardi! (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p.31).
VII. —[Le suj. désigne une plante ou une production du corps]
A.Empl. intrans.
1. Croître. L'herbe pousse; les blés poussent; laisser pousser ses ongles, ses cheveux, sa barbe. Ces bulbes n'étant pas susceptibles d'être retardées dans leur végétation, à l'époque où elles ont coutume de croître, elles pousseront, quelque chose qu'on fasse (Voy. La Pérouse, t.1, 1797, p.227). Empl. pronom. en constr. factitive. Se laisser pousser la barbe, les cheveux.
Pousser comme un champignon, des champignons (au fig.). Se développer très vite. Époque de ruine et de fondation, si les vieilles fortunes croulaient comme des châteaux de cartes, les fortunes nouvelles poussaient comme des champignons le lendemain d'une pluie d'orage (SANDEAU, Mlle de La Seiglière, 1848, p.28). V. champignon B 1 ex. de Gyp.
Se sentir pousser des ailes (au fig.). Avoir envie de s'élancer, de courir, de sortir. Il pousse des ailes à qqn. Var. Rien que de voir, de l'entrée de notre rue, la vieille vigne à notre porte, ça me faisait un effet! il me poussait des jambes (GONCOURT, G. Lacerteux, 1864, p.7).
Fam., p.iron. [Le suj. désigne un animé] Grandir. Quand à l'enfant, figurez-vous un bambin de sept à huit ans, efflanqué, poussé trop vite (A. DAUDET, Jack, t.1, 1876, p.11).
2. P. métaph. ou p.compar. [Le suj. désigne une pensée, un sentiment] Synon. de naître, germer. À l'écart de la foule, un mysticisme nouveau grandira. Les hautes idées poussent à l'ombre et au bord des précipices, comme les sapins (FLAUB., Corresp., 1853, p.349). Pierre (...) se tourna, et, à voix très basse, communiqua à sa femme une idée qui venait de pousser dans son cerveau (ZOLA, Fortune Rougon, 1871, p.270).
B.Empl. trans. [Le suj. désigne une plante] Faire croître, développer. Ces plants [d'orme] poussent plusieurs racines latérales et des chevelus, qui tracent au loin, et fournissent beaucoup de rejets (BAUDRILLART, Nouv. manuel forest., t.1, 1808, p.140):
9. L'orge verte tapisse tous les champs, qui n'étaient que poussière à notre arrivée; les mûriers, qui poussent leurs secondes feuilles, forment, tout autour des maisons, des forêts impénétrables au soleil...
LAMART., Voy. Orient, t.2, 1835, p.71.
[Le suj. désigne un être animé] Lorsqu'on fait prendre par intervalle de la garance à un animal qui pousse des dents, on voit dans leur intérieur des couches rouges interposées aux autres (CUVIER, Anat. comp., t.3, 1805, p.116).
REM. 1. Poussade, subst. fém. Poussée, bourrade. Cette fois, un père amenait sa fille à force de gifles et de poussades; une troupe d'élèves accourus de tous les bouts du quartier formait le cortège (FRAPIÉ, Maternelle, 1904, p.139). 2. Poussage, subst. masc. a) Mines. Technique consistant à exercer une pression en poussant. V. enfilage ex. de Haton de la Goupillière. b) Nav. fluviale. Technique consistant à pousser un convoi de péniches ou de barges au moyen d'un bateau à moteur (v. pousseur). Le «poussage» va-t-il remplacer le «tracté» (Le Monde, 26 juin 1969 ds GILB. 1971). 3. Poussement, subst. masc. Action de pousser. Toutes les actions auxquelles il avait pu être mêlé, depuis un poussement de coude jusqu'à un frôlement de robe (PROUST, Prisonn., 1922, p.360). Rare, littér. Action de faire croître. Nul ne le sait et ne peut sûrement rien dire, excepté le soleil qui nourrit le poussement de la terre (CLAUDEL, Agamemnon, 1896, p.881).
Prononc. et Orth.:[puse], (il) pousse [pus]. Homon. pouce, poussa, poussah. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Fin XIVes. «exercer une pression sur une chose pour la déplacer» (FROISSART, Chroniques, éd. G. Raynaud, t.9, p.248); av. 1615 «faire avancer une chose placée devant soi» (PASQUIER, Recherches, p.350); av. 1784 pousser le bois «jouer aux échecs ou aux dames» (DIDEROT, Neveu de Rameau, éd. Piazza, 5); 2. 1573 «exercer une pression, en parlant des éléments naturels» (GARNIER, Hippolyte, éd. W. Foerster, II, p.13); 3. 1723 va comme je te pousse (MARIVAUX, Surprise de l'amour, III, p.151); 1917 à la va comme je te pousse (L. DAUDET, loc. cit.); 4. 1538 «faire avancer quelqu'un» et pousser qqn à qqc. (EST.); 1579 «faire tomber quelqu'un» (LARIVEY, La Vefve, éd. Viollet le Duc, V, 131); 1611 pousser du coude (COTGR.); 1664 pousser qqn «l'attaquer, le harceler par des arguments» (MOLIÈRE, Tartuffe, V, 3); 1843 pousser une colle à qqn «raconter un mensonge» (DUPEUTY, CORMON et SAINT-AMAND, Le Trombone du régiment, II, ii ds QUEM. DDL t.6); 5. 1651 pousser son cheval (SCARRON, Roman comique, éd. H. Bénac, p.113); 1656 pousser sa pointe «poursuivre avec vigueur ce que l'on a commencé» (MOLIÈRE, Dépit amoureux, III, 1); 1736 id. «se montrer entreprenant auprès d'une femme» (DESTOUCHES, Le Tambour nocturne, 804); 1668 pousser les beaux sentiments (MOLIÈRE, Amphitryon, I, 4); ca 1770 «activer (le feu)» (C. BONNET, Lett. div., t.XII, p.6 ds POUGENS ds LITTRÉ); 1929 en parlant d'un véhicule (BERNANOS, Joie, p.18); 6. a) 1580 «pousser jusqu'aux dernières conséquences une situation, un comportement» (MONTAIGNE, Essais, éd. P. Villey, V. L. Saulnier, L. I, p.218); 1835 pousser au noir «exagérer en mal» (BALZAC, Fille yeux d'or, p.392); b) 1651 pousser qqn à bout (CORNEILLE, Nicomède, II, 3); 1654 pousser à bout qqc. (CYRANO, Mort d'Agrippine, éd. F. Lachèvre, 340); 1690 pousser les enchères (FUR.); c) 1661-79 «faire progresser dans la hiérarchie, l'échelle sociale» (RETZ, Mémoires, éd. Feuillet, Gourdault, Chantelauze, III, 231); 1798 pousser un élève (Ac.); d) id. pousser ses succès (Ac.); 1884 pousser ses avantages (FEUILLET, Veuve, p.154); 1885 pousser un croquis (A. DAUDET, Tartarin Alpes, p.79); e) 1782 pousser sa route (ROUSSEAU, Confessions, L. IV, p.259); 1833 pousser une reconnaissance (BALZAC, Ferragus, p.54); 1881 pousser une pointe (jusqu'à) (A. DAUDET, N. Roumestan, p.41); 7. a) 1580 «en parlant de plantes, produire, faire naître» (B. PALISSY, Disc. admirable, 422); 1677 «en parlant des dents» (Mme DE SÉVIGNÉ, Lettres, éd. M. Monmerqué, t.5, p.217); b) 1568 pousser un soupir (GARNIER, Porcie, éd. W. Foerster, I, 76); 1863 pousser la romance (A. CAMUS, Bohèmes, p.3); 1866 pousser une chanson (VEUILLOT, Odeurs de Paris, p.224); 1885 en pousser une (COURTELINE, Gaîtés esc., tabl. VI, p.85); c) 1670 escr. (MOLIÈRE, Bourgeois gentilhomme, III, 3); 1694 fig. pousser une botte à qqn (Ac.); 1869 id. «lancer une attaque contre quelqu'un» (LITTRÉ). B. 1. Ca 1150 «respirer, haleter difficilement (d'un cheval)» (Thèbes, éd. L. Constans, 3324); 1306 «id. (d'une personne)» (G. GUIART, Royaux lignages, éd. Wailly Delisle, 12612); 2. ca 1175 «exercer une pression physique» (Chroniques Ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 31335); 1585 pousser à la roue (N. DU FAIL, Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, p.316); 3. a) 1547 absol. poulsez, poulsez (N. DU FAIL, Propos rustiques, éd. J. Assézat, p.95); 1671 «continuer sa marche, son voyage» (POMEY); 1844 pousser au large (SAND, Ctesse de Rudolstadt, t.2, p.181); b) 1656-57 pousser jusqu'à dire (PASCAL, Provinciales, éd. Brunschvicg, V, 307); 1832 pousser à la consommation (BURAT-GURGY, loc. cit.); 1870 pousser à + subst. (POULOT, Sublime, p.106); 1962 faut pas pousser (ROB.); 4. a) 1508 (vin) poussera «se gâtera» (E. D'AMERVAL, Livre de la Deablerie, éd. Ch. Fr. Ward, p.177a); b) 1660 «en parlant de plantes, croître» (OUDIN Fr.-Esp.); av. 1834 «grandir (des enfants)» (BÉRANGER, Jeanne La Rousse ds LITTRÉ); c) 1802 pousser au noir «d'un tableau dont les couleurs noircissent» (FLICK). C. 1. 1544 verbe pronom. «se jeter sur» (M. SCEVE, Délie, éd. E. Parturier, CXX, p.89); 2. 1580 «s'élever dans la société» (MONTAIGNE, Essais, éd. P. Villey et V. L. Saulnier, L. 1, p.237); 1836 «faire des progrès par ses propres moyens» (KOCK, Zizine, p.181); 3. 1660-61 «se déplacer pour laisser de la place» (BOILEAU, Satires, VI, vers 67, éd. A. Cahen, p.86); 1670 fig. «se chasser l'un l'autre en une avance continue» (BOSSUET, Duch. d'Orléans ds LITTRÉ); 4. 1583 «croître» (DU BARTAS, 2e sem. Eden, p.33 ds HUG.); 5. 1680 cela se poussa fort loin «se poursuivre, se continuer» (Mme DE SÉVIGNÉ, op. cit., t.7, p.74). Du lat. pulsare «bousculer, heurter», «pousser violemment, secouer, agiter», «poursuivre», «frapper». Fréq. abs. littér.:13581. Fréq. rel. littér.:XIX:a) 11705, b) 25601; XXes.: a) 23628, b) 19837. Bbg. QUEM. DDL t.6, 9.

pousser [puse] v.
ÉTYM. 1130, v. intr., « haleter » (en parlant d'un cheval), mil. XIIe (→ Pousse, poussif); v. tr., 1360; lat. pulsare, de pulsum, supin de pellere « remuer, pousser ».
———
I V. tr. Soumettre à une force permettant de mettre en mouvement, de déplacer.(Emploi général; sujet n. de chose ou de personne; compl. n. de chose ou de personne).
1 Nous voyons par là que l'eau pousse en haut les corps qu'elle touche par-dessous; qu'elle pousse en bas ceux qu'elle touche par-dessus; et qu'elle pousse de côté ceux qu'elle touche par le côté opposé : d'où il est aisé de conclure que, quand un corps est tout dans l'eau, comme l'eau le touche par-dessus, par-dessous et par tous les côtés : elle fait effort pour le pousser en haut, en bas et vers tous les côtés : mais comme sa hauteur est la mesure de la force qu'elle a dans toutes ces impressions, on verra bien aisément lequel de tous ces efforts doit prévaloir.
Pascal, Traité de l'équilibre des liqueurs…, V, Œ., t. III, p. 177.
1 Spécialt. (Sujet n. de personne; le compl. désigne une personne ou un être animé). Exercer une pression sur (qqn, un animal) de manière à le déplacer ou à le faire tomber. || Ceux qui sont derrière poussent ceux qui sont devant (→ Foule, cit. 5). || Pousser qqn dehors (→ Géant, cit. 7; immoler, cit. 19), par les épaules. Bouter. || Pousser violemment qqn pour le faire tomber. Bousculer, culbuter. || Pousser des chevaux dans les brancards à coups de botte (→ Atteler, cit. 2).
2 (…) il pousse sa compagne, lui fait perdre l'équilibre et la jette à terre, un pied pris dans la basque de son habit et les cotillons renversés sur sa tête.
Diderot, Jacques le fataliste, Pl., p. 507.
Pousser qqn dans…, contre…, sur…Spécialt. || Pousser de, du haut de… : faire tomber en poussant.
3 Le roi de l'île le fit périr (Thésée), par jalousie, en le poussant dans un précipice, du haut d'un rocher où il lui faisait admirer le paysage.
Émile Henriot, Mythologie légère, p. 128.
Pousser qqn, un animal de… (suivi du nom de la partie du corps, d'un instrument qui exerce la poussée). || Pousser qqn des pieds et des mains.Par ext. || Pousser qqn du coude, du genou, en exerçant une légère pression pour avertir, mettre en garde, etc.
4 Et il l'entraîna en avant sur la pente où tout de suite elle s'abattit en hurlant. Mais lui, avec une brusque rage, la poussait des pieds et des mains comme il eût fait d'une barrique.
F. Mauriac, les Anges noirs, XIV.
Spécialt. || Pousser (compl. au plur.) : écarter en poussant. || Pousser les gens pour entrer, sortir : se frayer un passage.
Loc. (1722). Il va comme on le pousse, sans choisir sa direction, en obéissant aux impulsions extérieures. Fig. Se dit d'un homme docile, faible, sans volonté.Vx. || Va comme je te pousse, « se dit d'une affaire qui va de soi et sans qu'on s'en mêle » (Littré). — ☑ Mod. Loc. adv. (fam.). Va-comme-je-te-pousse, à la va-comme-je-te-pousse : n'importe comment, de façon désordonnée. || Ce travail a été fait à la va-comme-je-te-pousse.
5 Ils (nos contemporains) posent au hasard leurs mains innocentes et brusques sur des dièzes et des bémols, et vas-y comme je te pousse.
Léon-Paul Fargue, Lanterne magique, p. 182.
(Le compl. désigne une chose). || Pousser un objet. || Pousser qqch. de toute sa force. || Pousser qqch. du pied, avec le pied (→ Âtre, cit. 4; coulisse, cit. 4). || Pousser un meuble contre le mur, contre la fenêtre… (→ Démantibuler, cit. 1; faire, cit. 193; jour, cit. 10). || Pousser les ordures dans un coin, en balayant. || Pousser une porte, soit pour l'ouvrir (→ Claire-voie, cit. 2; entrouvrir, cit. 10; grand, cit. 18), soit pour la fermer (complètement ou non).Spécialt. || Pousser la porte : entrer. || À peine avait-il poussé la porte… || Pousser une barrière. Lever (→ Forcer, cit. 3). || Pousser les volets (→ Judas, cit. 1). || Pousser le verrou, le fermer (→ Oreille, cit. 17, fig.). || Pousser qqch. vers le bas ( Baisser), le haut ( Hausser, monter).Au p. p. || Porte poussée. || Verrou poussé (→ ci-dessous, cit. 7).
6 À présent, monsieur, dit-il à son maître, nous n'avons plus qu'à nous barricader en poussant nos lits contre cette porte, et à dormir paisiblement (…)
Diderot, Jacques le fataliste, Pl., p. 511.
7 (…) le gros loquet poussé sur la petite porte à claire-voie (…)
Alphonse Daudet, Lettres de mon moulin, « Installation ».
8 Macaire (le chien) se faufila, longea le comptoir sans s'arrêter, poussa du nez une petite porte de communication au battant libre.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, VIII, p. 81.
(Le compl. désigne un instrument, dans une opération technique). || Pousser un rabot, le rabot (→ Glisser, cit. 7). || Pousser un trusquin (→ 1. Marbre, cit. 12). || Pousser son aiguille (cit. 3). — ☑ Loc. (1857). Pousser l'aiguille : coudre.
2 (Le compl. désigne un animé). Faire aller devant soi, dans une direction déterminée, par une action continue et insistante; inciter à aller dans une direction.
a (Concret). || Pousser ses troupes (en avant), les faire avancer. Avancer. || Pousser l'ennemi (en arrière), le faire reculer (→ Nôtre, cit. 7). Refouler, rejeter, repousser. || Ouvreuse (→ 2. Ouvreur, cit. 2) poussant devant elle un spectateur. || Ils avancent où ils sont poussés (→ 1. Pas, cit. 18). || Pousser qqn dans la mêlée (cit. 5). || Charretier qui pousse ses chevaux (→ Herse, cit. 2; et aussi cheval, cit. 10). || Meunier (cit. 2) poussant son âne. || Pousser ses vaches, ses moutons vers la ferme.
9 (…) poussant à leur tour les Gaulois qui étaient devant eux, comme le flot pousse le flot.
Fustel de Coulanges, Leçons à l'Impératrice…, p. 77.
Faire aller plus vite (un être animé). || Pousser son cheval. Porter (en avant).
b (Par métaphore). Entraîner (le sujet désigne une force). || Elle se laissait aller (cit. 90) où on la poussait. || « Mais je me sens poussé D'un souffle impétueux… » (→ Force, cit. 65, Hugo). || Le vieil instinct de voyage qui pousse infatigablement (cit. 1) Israël sur tous les chemins du monde. || Les excès poussent le corps dans sa voie propre (→ Ivrognerie, cit. 1).
10 (…) je ne sais quelle force encore m'a poussé vers vous !
Flaubert, Mme Bovary, II, IX.
11 C'est du propre, continuait-il, les yeux étoilés de haine, Gérard et toi vous entraînez cette petite, vous la poussez dans les bras de ce juif; vous voulez peut-être la vendre !
Cocteau, les Enfants terribles, p. 141.
Au p. p. || « Ainsi (cit. 11), toujours poussés vers de nouveaux rivages… » (Lamartine).
c (1538). Fig. || Pousser (qqn) à (qqch.). → Cabrer, cit. 2; hardiesse, cit. 12; impatient, cit. 10; pari, cit. 1. || Pousser (qqn) à (faire qqch.). → Fait, cit. 25; homme, cit. 85. Aiguillonner, animer, conduire, conseiller, disposer, encourager, engager, entraîner, exciter, inciter (cit. 2), induire, instiguer, inviter, porter, solliciter, stimuler; et aussi contraindre. || Pousser qqn à l'action, à la révolte, à la haine, au désespoir. || Pousser qqn à agir.(Sujet n. de chose). || La publicité pousse les gens à la consommation. || Force, instinct, besoin, sentiment, mobile… qui nous pousse à qqch. ( Impulsion [cit. 14]; → aussi Excès, cit. 14; fanatisme, cit. 9; gain, cit. 8; immodéré, cit. 2; intention, cit. 7; moralisation, cit.), à faire qqch. (→ Altruiste, cit. 1; développer, cit. 18; divertissement, cit. 1; instinct, cit. 1; jupon, cit. 4; mythomane, cit.; œuvre, cit. 24; paraître, cit. 47). Emporter.
(Sans finalité exprimée). || « Quelque diable (cit. 1) aussi me poussant… » (La Fontaine). Agir (faire), décider, déterminer, diriger.
12 Et l'intérêt du Ciel est tout ce qui le pousse.
Molière, Tartuffe, I, 1.
13 (…) lorsqu'on a commencé une tâche, il est quelque chose en nous qui nous pousse à ne pas la laisser imparfaite.
Balzac, le Médecin de campagne, Pl., t. VIII, p. 395.
14 (…) des grands chefs, que l'ambition pousse et que la gloire attire (…)
Alain, Propos, 2 avr. 1921, La guerre est la messe de l'homme.
Au p. p. || Se sentir poussé vers… Attirer, incliner (→ 3. Droit, cit. 71). || Poussés d'un zèle indiscret (→ Inconsidéré, cit. 1).
Aider (qqn) à atteindre une position meilleure; faciliter l'avancement, la réussite de (qqn). Favoriser. || Je l'aurais poussé si je lui avais trouvé quelque disposition (→ Bonasse, cit. 1). || Pousser un élève, un athlète, lui faire faire des progrès par un travail, un entraînement intensif.
15 N'est-ce pas votre intention, Monsieur, de le pousser à la cour, et d'y ménager pour lui une charge de médecin ?
Molière, le Malade imaginaire, II, 5.
16 (…) cette passion de protéger, de guider, de pousser, propre à tant de femmes du monde.
Louis Madelin, Talleyrand, I, II.
(Vx). || Pousser qqn, avoir envers lui une attitude provocante, offensante.
17 Mais c'est trop me pousser, ce respect est à bout (…)
Molière, le Dépit amoureux, V, 7 (cf. aussi le Misanthrope, III, 5).
Loc. Pousser qqn en avant : faire occuper à qqn une position en vue, mais périlleuse (afin de s'abriter derrière lui). → Mettre en avant. || Tous ces lâches qui nous poussaient en avant (→ 1. Dire, cit. 55). — ☑ (1656). Pousser à bout : acculer (→ Pantomimer, cit.), et, par ext., exaspérer (qqn), mettre sa patience à bout (→ Explosion, cit. 8). || En me poussant à la dernière extrémité (cit. 11).
18 (…) c'était tout simplement un poète irascible, franc jusqu'à la colère, un esprit que la contrariété poussait à bout, et qui ne pouvait pas plus cacher son opinion qu'il ne pouvait prendre celle d'autrui.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. II, p. 186.
19 J'aime une femme ! Tu le sais et tu la railles devant moi, tu me pousses à bout; tant pis pour toi.
Maupassant, Pierre et Jean, VII.
(1656). Presser (qqn), forcer à parler, à répondre, à réagir. || Pousser qqn sur un sujet, une affaire. Harceler.
20 Si on l'avait poussé un peu, on aurait fini par comprendre qu'il voyait là (dans la religion) une histoire ennuyeuse et sans portée, dont il serait convenable de reparler au moment de la mort (…)
F. Mauriac, les Anges noirs, XI.
3 (Fin XVIe). Personnes. Fournir l'effort nécessaire pour faire avancer (une chose mobile, un objet).
a (Concret). || Pousser une malle, une valise par terre. || Pousser un traîneau.(Le compl. désigne un objet sur roues). || Pousser une brouette, une voiture d'enfant, une charrue, un chariot… (→ Brancher, cit. 3; machiniste, cit. 3; marchand, cit. 10).(Le compl. désigne un objet quelconque). || Pousser un pion (→ Déplacer, cit. 4). — ☑ Loc. (vx). Pousser le bois : jouer aux dames, aux échecs. || Pousser un ballon, une balle ( Crosser).
21 Est-ce que vous perdez aussi votre temps à pousser le bois ? (C'est ainsi qu'on appelle par mépris jouer aux échecs ou aux dames).
Diderot, le Neveu de Rameau, Pl., p. 427.
(1606; sujet n. de chose, éléments naturels). || Vent poussant un navire (→ Galion, cit. 2; perdition, cit. 3). || Le vent, la tempête… pousse les nuages, des flocons, des étincelles… Chasser, souffler, voler (faire); → Aquilon, cit. 5; engouffrer, cit. 3; incendie, cit. 3.Par anal. || La lune (cit. 4) poussait des gerbes de lumière jusque dans l'épaisseur des ténèbres. Lancer, projeter.
22 (…) l'esprit de ces infidèles est comme le nuage qui change de forme et de route selon le vent qui le pousse.
Hugo, Littérature et Philosophie mêlées, Sur l'abbé de Lamennais (juil. 1823).
Par métonymie. || Pousser une botte, une charge, une attaque.Techn. || Relieur qui pousse des fers, des filets sur les plats d'une reliure, qui les applique, les trace.(1765). || Menuisier qui pousse des moulures, qui les forme sur le bois. || Soldats du génie poussant la sape.
23 (…) ce grand enfant d'Aouïmer, joyeux comme un cheval qui sent l'écurie (…) poussait des charges à fond de train contre de pauvres lièvres qui (…) prenaient le frais dans l'alfa.
E. Fromentin, Un été dans le Sahara, p. 279.
b Par métaphore, fig. (Pousser à, jusqu'à, vers, loin, etc.). Faire aller (qqch. : une activité, un travail, etc.) jusqu'à un certain point, une certaine limite, un certain degré. || Pousser jusqu'à l'achèvement (cit. 1), jusqu'au bout une action, une aventure, une œuvre (→ Dépendance, cit. 1; frivolité, cit. 2). Terminer.Vx (dans le même sens). || Pousser qqch. à bout (→ Pacifier, cit. 2).Pousser qqch. à la perfection, à l'extrême… (→ Couard, cit. 1; jeu, cit. 17; imaginaire, cit. 5). || Pousser bien loin, trop loin ( Exagérer) la logique, les figures (cit. 27), l'analogie (cit. 10), la plaisanterie… (→ Habile, cit. 5; monopole, cit. 5; parole, cit. 27). || Pousser qqch. trop avant (cit. 55), plus outre (→ 2. Outre, cit. 7)… Persévérer. || Pousser la luxure (cit. 2), la recherche des plaisirs (→ Épicurisme, cit. 3)… || Pousser l'impudence (cit. 4), le mépris (cit. 3)… || Pousser les tons du roman à un diapason (cit. 3) extrême.Pousser les choses au noir (cit. 47), pousser au noir (cit. 47.1). || Pousser l'enchère plus haut (cit. 119).Par ext. || Pousser un objet dans une vente, en offrir plus d'argent.
24 Platon s'est au projet simplement arrêté (…)
(…) Mais à l'effet entier je veux pousser l'idée
Que j'ai sur le papier en prose accommodée.
Molière, les Femmes savantes, III, 2.
25 Il n'y trouve plus rien de chatte,
Et, poussant l'erreur jusqu'au bout,
La croit femme en tout et partout.
La Fontaine, Fables, II, 18.
26 À la vente qui eut lieu par suite du décès du chevalier de Valois, Suzanne, désirant un souvenir de son premier et bon ami, fit pousser sa tabatière jusqu'au prix excessif de mille francs.
Balzac, la Vieille Fille, t. IV, p. 331.
27 Mais, c'est curieux, depuis que j'habite avec elle, au lieu de pousser plus loin l'étude de cette langue japonaise, je l'ai négligée (…)
Loti, Mme Chrysanthème, XX.
28 (…) cette fin de scène peut et doit être poussée jusqu'aux limites de la décence ou plutôt : de l'indécence, de l'impudeur.
Gide, Attendu que…, p. 200.
29 (…) car le propre de la divinité, c'est l'entêtement. Si l'homme savait pousser l'obstination à son point extrême, lui aussi serait déjà dieu. Voyez les savants, et les secrets divins qu'ils arrachent de l'air ou du métal, simplement parce qu'ils se butent.
Giraudoux, Amphitryon 38, III, 1.
Pousser jusqu'à (avec un inf. marquant le point extrême). || Pousser l'audace (cit. 20) jusqu'à approcher… || Pousser le dévouement, la délicatesse, la gentillesse (cit. 7)… jusqu'à faire telle ou telle chose (→ Déranger, cit. 14; furet, cit. 4; opportunisme, cit. 1).(Avec un subst. marquant qu'à ce point extrême la chose devient autre). || Amour maternel poussé jusqu'à la passion (→ Assombrir, cit. 2). || Pousser jusqu'à la coquetterie le soin de son ajustement (→ Fleurette, cit. 2). || Pousser l'esprit d'obéissance (cit. 8) jusqu'à la soumission aveugle.
30 J'ai poussé la vertu jusques à la rudesse.
Racine, Phèdre, IV, 2.
31 (…) il pousse l'amour de la poésie jusqu'au parfait abandon de soi-même et au sacrifice le plus absolu des nécessités de la vie.
Th. Gautier, Portraits contemporains, Glatigny.
c (Sans compl. ind.). Faire parvenir à un degré supérieur de développement, d'intensité. || Pousser son travail, les travaux. Avancer (faire). || Je pousse laborieusement (cit.) mon second volume.(1656). || Pousser une affaire, la mener activement.
32 Tout de suite, Jean avait eu l'idée de pousser ses affaires, auprès de Lise, en se déclarant.
Zola, la Terre, II, III.
Pousser le feu. Activer, attiser. — ☑ Mar. Pousser les feux.
33 Du bout du pied, il rouvrit la porte; et le chauffeur, ensommeillé, comprit, poussa le feu encore, afin d'augmenter la pression.
Zola, la Bête humaine, VII.
Pousser ses études, une discussion, une enquête. Durer (faire), poursuivre, prolonger.Vieilli. || Pousser un sujet. Approfondir, développer.Pousser son avantage. Accentuer. || Pousser sa chance. || Pousser un travail, un essai, une activité.
34 (…) j'aurais persévéré dans mes essais de jardinage qu'à travers maints déboires je n'ai pas poussés plus de trois ans.
Gide, Journal, 18 juil. 1932.
Pousser sa voix. Forcer.
35 (…) il poussait la voix sur la fin des phrases.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, VIII, XI.
Pousser un moteur, une voiture, chercher à lui faire rendre le maximum.Pousser une voiture (dans une occasion donnée), la mettre à plein régime, augmenter la vitesse.Au p. p. || Voiture poussée (→ ci-dessous).
4 (XVIe; même valeur que pousser intrans., III.). Faire naître, faire croître (spécialt, en parlant de productions végétales). Produire. || Troncs d'oliviers (cit. 6) poussant encore de grêles branches. Étendre. || Cet arbre pousse des bourgeons, des rejetons nouveaux, de profondes racines. || Vigne qui pousse des rameaux chétifs. Chênevotter.Par anal. || Enfant qui pousse ses premières dents.
36 (…) quand les enfants n'ont pas la force de les pousser (les dents) dans le temps, ils n'ont pas celle de soutenir le mouvement qui les veut faire percer toutes à la fois (…)
Mme de Sévigné, Lettres, 625, 16 juil. 1677.
37 Les platanes de la Halle aux vins poussaient leur jeune feuillage.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, II, V.
Par métaphore. || Expression hors d'usage qui tout à coup pousse un rejeton (→ Chandelle, cit. 5). || Toutes les sensations poussent des racines dans l'étendue (cit. 5). || Chez cet auteur… les métaphores poussent en tous sens leurs branchages noueux (→ Hyperbolique, cit. 4).
5 (Av. 1650). Produire avec force ou laisser échapper avec effort par la bouche (un son). || Pousser des cris (cit. 7, 13 et 27). Crier, émettre, faire, jeter, proférer (→ Épouvantable, cit. 2; fendre, cit. 5; frisson, cit. 12). || Pousser un hurlement (cit. 3), des vociférations (→ 1. Lie, cit. 7). || Pousser un gémissement (cit. 4), des plaintes, des lamentations (cit. 3 et 4), un terrible juron (→ Empoigner, cit. 2), des exclamations (→ Ha, cit. 7; heu, cit. 2)… || Pousser un soupir, des soupirs. Exhaler, lâcher (→ Évanouir, cit. 4; geignard, cit.; geindre, cit. 5; inarticulé, cit.; lassitude, cit. 8). || Pousser des hoquets (cit. 3), des sanglots. || Pousser de grands éclats de rire (→ Bravade, cit. 1; gloire, cit. 27), des rires (→ Feuilleton, cit. 1), un petit rire gloussant (cit.).
38 (…) il prie, mais il médite, il pousse des élans et des soupirs (…)
La Bruyère, les Caractères, XIII, 24.
Fam. || Pousser une chanson. Chanter. || En pousser une (chanson). || Pousser la chansonnette, la romance.
39 On lui demandait d'en « pousser une ». Il se croyait un talent de tragédien, et ne se faisait pas prier.
Eugène Dabit, Hôtel du Nord, XV.
40 Un bar avait été installé sur une caisse. Un lieutenant de gendarmerie, ténor amateur, poussa la chansonnette.
A. Billy, Un touriste solitaire, in le Figaro, 30 mars 1961.
(Animaux).
41 Il est la risée du village (…) Un lâche (…) On le mènerait à la boucherie et il ne pousserait pas le moindre bêlement.
F. Mauriac, les Anges noirs, XVI.
Vx. Faire entendre, exprimer avec une vivacité passionnée. || « Honteux (cit. 8) d'avoir poussé tant de vœux superflus » (Racine). || « Pousser le doux, le tendre et le passionné » (cit. 10, Molière).
42 Il nous ferait beau voir, attachés face à face
À pousser les beaux sentiments !
Molière, Amphitryon, I, 4.
———
II V. intr. (Personnes ou valeur active).
1 (1160). Faire effort en poussant qqch. ou qqn, en exerçant une poussée, une pesée, une pression. || Allez, poussez dur ! (cit. 29). || Voyons, ne poussez pas !Mar. Faire avancer en poussant. || Pousser de fond, « faire avancer une embarcation en faisant effort contre le fond avec des gaffes ou avirons » (Gruss).
43 Dans l'après-midi, au large de la Brière, un chaland s'éloignait par la curée de Nivince. C'était M. Ulric qui poussait.
A. de Châteaubriant, la Brière, III, VI.
44 — Je veux pousser aussi, dit Pablo. Sarah s'arc-bouta contre la voiture et poussa de toutes ses forces, les yeux clos, dans un cauchemar.
Sartre, la Mort dans l'âme, p. 16.
Loc. (Emploi absolu de I., 3.). Pousser à la roue. Roue.
(1690). Techn. (Sujet n. de chose). Exercer une poussée. || « Les terres ont poussé contre le mur de la terrasse » (Littré, Académie).
Loc. Techn. Pousser en dehors, en parlant d'un mur, Se déformer vers l'extérieur. Syn. : faire ventre.
2 (Fin XVIIe). Faire un effort pour expulser de son organisme.Spécialt. Se dit des efforts de la femme qui accouche, pour expulser le fœtus.
45 Elle poussait de toutes ses forces en silence, sans respirer, puis elle reprenait haleine en criant et elle retombait sur la mousse.
J. Giono, le Chant du monde, I, III.
(Pour expulser les excréments). → Selle, cit. 0.1, Beckett. || « Assis sur son pot, le petit poussait » (plaisanterie sur le Petit Poucet).
3 Fig. || Pousser à : inciter à, mener une action favorable à… Instigateur. || Pousser à la consommation.
46 Voilà le terrible ! cria-t-il. D'un côté, nous autres, les paysans, qui avons besoin de vendre nos grains à un prix rémunérateur. De l'autre, l'industrie, qui pousse à la baisse, pour diminuer les salaires.
Zola, la Terre, II, V.
47 (…) il n'y a point de déshonneur à être faible, malade ou vieux, mais il y a déshonneur si, étant faible, malade ou vieux, on se permet de pousser à la guerre.
Alain, Propos, 14 sept. 1921, Piquons l'honneur.
4 Sports. Jeter toutes ses forces dans l'effort. || Il a dû pousser pour gagner. || L'emporter sans pousser.
5 Vx (langue class.). Aller plus loin, avancer. Continuer.
Figuré :
48 Allons, ferme, poussez, mes bons amis de cour (…)
Molière, le Misanthrope, II, 4.
Mod. || Pousser plus loin, jusqu'à : aller plus loin, poursuivre son chemin. Avancer, porter (se). || Poussons jusqu'au prochain village.(Mar.). || Pousser au large, se dit d'une embarcation qui déborde d'un bâtiment, d'une côte pour s'en écarter.
49 (…) il a pu descendre à Mantes, à moins qu'il ne soit descendu à Rolleboise, ou qu'il n'ait poussé jusqu'à Pacy (…)
Hugo, les Misérables, III, III, VII.
Fig. || Pousser de l'avant, plus loin.
50 Il me tarde d'avoir achevé de recopier le chapitre VII de mes Mémoires; pour pouvoir pousser de l'avant.
Gide, Journal, 28 oct. 1917.
6 Fam. Aller trop loin (en acte ou en paroles); exagérer. Attiger, charrier, cherrer. Faut pas pousser ! || Dis donc, tu pousses ! || Il pousse un peu, le mec !
———
III V. intr. (Choses, végétaux, animaux; valeur passive).
1 (1660). Végétation. Croître, se développer, grandir. || Plantes, arbres (cit. 34) qui poussent, poussent dru (cit. 3), droit (→ Entamer, cit. 6; herbe, cit. 6 et 18; mur, cit. 6; palmier, cit.). || Les premiers bourgeons poussent. Pointer, sortir. || Un bon champ où tout pousse. Venir. || Un désert où il ne pousse rien (→ Manque, cit. 7). || Faire pousser une plante. Cultiver. || Espèces qui poussent dans nos régions. Habiter. || « Il faut que l'herbe pousse et que les enfants meurent » (cit. 17, Hugo). || Graine (cit. 1) qui doit germer et pousser.Par anal. || Barbe (cit. 10), cheveux qui poussent (→ Dresser, cit. 2; huile, cit. 7). || Ses premières dents ont toutes poussé.Par compar. (D'un animal, d'un être humain). || Cet enfant pousse comme un chêne (cit. 9).
51 Sur ces grasses et plantureuses campagnes, uniformément riches d'engrais, de canaux, d'exubérante et grossière végétation, herbes, hommes et animaux, poussent à l'envi, grossissent à plaisir. Le bœuf et le cheval y gonflent à jouer l'éléphant. La femme vaut un homme et souvent mieux.
Michelet, Hist. de France, III.
52 Boche disait que les enfants poussaient sur la misère comme des champignons sur le fumier.
Zola, l'Assommoir, V, t. I, p. 197.
53 À côté du pupitre où j'écrivais, végétait sur une planchette un glaïeul que je prétendais voir pousser (…) Un glaive verdoyant avait bientôt surgi de terre, et sa croissance de jour en jour m'émerveillait (…) J'avais calculé que la feuille gagnait trois cinquièmes de millimètre par heure (…)
Gide, Si le grain ne meurt…, I, V, Pl., p. 444.
(Animaux, humains). || Ton petit chien a poussé, a bien poussé. || Il laisse pousser ses enfants sans trop s'en occuper.
Par métaphore, fig. (le sujet désigne une construction, une ville). S'accroître, se développer, grandir… (→ 2. Neuf, cit. 3; parasite, cit. 12).Le sujet désigne une réalité psychique : idée (→ Crâne, cit. 5; dru, cit. 4), sentiment (→ Arbre, cit. 43).Le sujet désigne une réalité artistique, une œuvre (→ Étendre, cit. 4)… — ☑ Pousser comme des champignons, du chiendent. Pulluler.
54 De retour à Avignon, je cherchai le palais des papes, et l'on me montra la Glacière : la Révolution s'en est prise aux lieux célèbres; les souvenirs du passé sont obligés de pousser au travers et de reverdir sur des ossements.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. II, p. 227.
55 Et devant les cafés, des rangs de tables vertes
Ont par enchantement poussé sur les trottoirs.
Banville, Odes funambulesques, Gaietés, « Premier soleil ».
56 Mais la symphonie naissante poussait de toutes parts.
R. Rolland, Voyage musical au pays du passé, p. 243.
57 Que les hommes qui travaillent prétendent élever les salaires, et s'unir pour cela, je ne m'en effraie point, je ne m'en étonne point. C'est la Raison qui pousse, comme poussent les seigles et les blés.
Alain, Propos, 18 avr. 1909, La grève.
(Au p. p.). || Cassis (→ 1. Cassis, cit. 1) sauvage poussé entre les pierres (→ aussi Greffer, cit. 2). || Abbaye poussée comme un manoir fantastique (cit. 2).Amours mignons poussés en une nuit (→ Imbroglio, cit. 1).Enfant poussé trop vite.
58 Un clair de lune magnifique éclairait le steppe (sic) et, glissant entre les écailles de cactus énormes poussés à quelques mètres devant nous, leur donnait l'aspect surnaturel d'un troupeau de bêtes infernales éclatant tout à coup et jetant en l'air, en tous sens, les plaques rondes de leurs corps affreux.
Maupassant, la Vie errante, Vers Kairouan, 13 déc.
59 (…) elle restait raide, immobile, avec son cou maigre de fille poussée trop vite (…)
Zola, Nana, III.
2 (1802). Peint. || Pousser au noir, « se dit d'une couleur, d'une peinture qui se noircit sous l'action du temps ou par suite d'un abus des bitumes » (Réau).
Par anal. || Pousser au vert, au rouge, évoluer vers ces couleurs.
3 (Av. 1850). Techn. (œnologie). Fermenter par suite de la pousse. || Le vin pousse.
tableau Verbes exprimant une idée de mouvement.
——————
se pousser v. pron.
1 (Réfl.). Avancer avec effort (→ Dénoncer, cit. 6).(XVIe). Fig. (souvent péj.). Conquérir une situation, une position meilleure; se mettre en vue. || Le peuple appelle faire fortune (cit. 36) se pousser. || Se pousser dans les salons, auprès de qqn (→ Mouche, cit. 17). — ☑ Fam. Se pousser du col : se rengorger, prendre de grands airs.
60 On sait que ce pied plat, digne qu'on le confonde,
Par de sales emplois s'est poussé dans le monde.
Molière, le Misanthrope, I, 1.
61 Je fis réflexion que je pourrais me pousser à la cour, où un génie supérieur, à ce que j'avais ouï dire, n'était pas absolument nécessaire pour s'avancer.
A. R. Lesage, Gil Blas, VII, XI.
62 Le jeune Racine songe à son avancement, ainsi que tous les garçons de son âge. Il est fort désireux de se pousser dans le monde et ne néglige aucun de ceux qui le peuvent servir.
F. Mauriac, Vie de Jean Racine, II.
63 Elle m'aime (…) mais c'est un caractère difficile : elle s'en croit. Il y a sa mère aussi, qui se pousse du col.
Sartre, la Mort dans l'âme, p. 78.
(1660). S'ôter (d'un endroit où l'on gêne [qqn]), pour faire, pour laisser une place. || Pousse-toi, laisse-moi passer. || Poussez-vous un peu sur le banc, que je puisse m'asseoir.
2 (Récipr.). Entre-pousser (s'). || Il se pressent, s'entrechoquent, se poussent en silence (→ Direction, cit. 7). || Femmes qui se poussent le coude (cit. 4). || Les atomes qui se poussent et s'entrechoquent (→ Objectiver, cit. 1).Par métaphore (→ 1. Engendrer, cit. 11).
64 On devinait une histoire d'hôpital dans laquelle « ils », c'était à la fois les médecins, et ceux qui acceptent la loi; et ses méfiants compagnons de chambrée, bien que se poussant du coude comme les collégiens devant le loustic, préparaient des combines compliquées pour qu'il ne fût jamais garde-chambre.
Malraux, Antimémoires, Folio, p. 304.
3 (Rare). Passif. Être poussé (à un certain point), continuer. || La discussion « se poussa fort loin » (Mme de Sévigné).
——————
poussé, ée p. p. adj.
1 (Sens I, 1). || Voyageurs poussés, bousculés.Porte poussée (→ cit. 7 et supra)(Sens 2).infra cit. 11; infra cit. 14. — Poussé en avant.|| Poussé à bout.(Sens 3). || Traîneau, bateau poussé ( Poussage) ou tiré.
2 (Correspond à I., 3., c). Qui est porté très loin, à un haut degré ou qui est fait avec un grand soin du détail, de la précision. || Travail cérébral (cit. 2) trop poussé. || La plaisanterie est un peu poussée. 1. Fort. || Caricatures trop poussées, trop insistantes (cit. 2). || Il faudrait faire une analyse plus poussée de la situation.
65 (…) cet étudiant nord-africain hospitalisé, après un interrogatoire un peu trop poussé, comme on dit (…)
F. Mauriac, le Nouveau Bloc-notes 1959-1960, p. 152.
Dessin extrêmement poussé.N. m. || Le poussé, « se dit d'une exécution très soignée, d'un rendu très consciencieux » (Réau).
Moteur poussé, qui a plus de puissance qu'à l'origine. || Voiture poussée.
3 (Correspond à III., 1.). → ci-dessus cit. 58, 59 et supra.
CONTR. Haler, immobiliser, tirer. — Détourner, dissuader, empêcher.
DÉR. Poussage, pousse, poussée, poussette, pousseur, pousseux, poussoir.
COMP. Entre-pousser. V. Repousser. — V. aussi Pousse-.

Encyclopédie Universelle. 2012.